Johnny Cash

The Fabulous Johnny Cash

The Fabulous Johnny Cash

 Label :     Columbia 
 Sortie :    lundi 03 novembre 1958 
 Format :  Album / CD  Vinyle   

Vous n'allez sûrement pas me croire mais il m'est arrivé un truc incroyable. Un soir, alors que je nettoyais ma collection de disques, le fantôme de Johnny Cash m'a rendu visite. L'Homme en Noir, en personne. Il avait la même gueule de vieux brigand increvable que sur la pochette du premier American Recordings. D'abord, j'ai eu très peur. Ensuite, je me suis senti un peu con. Déjà parce que j'étais en pyjama devant l'une des plus grandes icônes de la musique américaine. Ensuite parce que, pour être honnête, ça faisait des lustres que je n'avais pas écouté l'un de ses morceaux. Quand j'étais plus jeune et me découvrais une passion pour le rock'n'roll, c'est pourtant l'un des premiers artistes vers lequel je me suis tourné. C'était à l'époque où la sortie du biopic Walk The Line et les compilations posthumes l'avaient mis au centre de mon attention. Bien avant de développer mon obsession pour Dylan, Young et Cohen, c'est Johnny Cash qui m'a montré la voix et m'a permis de relier les chaînons manquants entre Hank Williams et Kevin Morby. Je lui dois une fière chandelle et pourtant, tel un fils ingrat qui abandonne ses vieux en maison de retraite, je l'ai laissé tomber. Le voilà donc qui revenait me hanter.

Dylanesque : Je vous sers un thé, monsieur Cash ?

Johnny Cash : Tu peux m'appeler Johnny. Et je prendrais plutôt un whisky.

Dylanesque : Entendu, Johnny. Le truc bizarre quand t'es français, c'est que le prénom Johnny, ça te fait aussitôt penser à...

JC : Je suis pas venu pour parler de vos chanteurs de variétés. Si je suis là, c'est que j'ai l'impression qu'on m'a un peu oublié.

Dylanesque : Ah oui désolé, c'est juste que...

JC : Pas la peine de te justifier. Ce n'est pas de ta faute après tout : plus personne ne se soucie de l'Homme en Noir. En 2016, je ne suis plus qu'un lointain souvenir. Quand mon vieux pote Merle Haggard m'a rejoint en avril dernier, il m'a prévenu : en 2016, tu ne vaux plus rien, Johnny. Tout le monde ne parle que de Bowie, Cohen et du dernier Radiohead. Même toi gamin, quand tu t'évertues à chroniquer toute la discographie de mes héritiers, je ne suis pas mentionné.

Dylanesque : C'est à dire que Kevin Morby et Simon Joyner, c'est surtout de Dylan qu'ils se sont insp...

JC : Oh putain ce que je me suis fendu la gueule quand j'ai appris pour le jeune Bobby. Prix Nobel, la blague ! Bref, j'en ai marre des injustices. Et j'aimerais te confier une mission : redorer mon blason.

Dylanesque : À vos ordres, maître.

JC : En 2017, tu vas me faire le plaisir d'écrire une chronique sur chacun de mes albums.

Dylanesque : Mais il y en a une soixantaine !

JC : Une année, c'est 365 jours. Avec ton chômage, tu devrais y arriver. Je vois que X-Silence n'a fait qu'effleurer ma discographie alors tu vas me compléter tout ça. Si tu le veux bien, on va commencer dès maintenant.

J'ai à peine eu le temps de nous servir du bourbon que Johnny a posé sur la platine une copie de son troisième album, le premier sorti chez Columbia.

Dylanesque : Pourquoi avoir quitté Sun ?

JC : Ecoute, tout comme Elvis et Jerry Lee, je dois tout à Sam Phillips. C'est pour le rencontrer que j'ai déménagé à Memphis en 54. Mais quand Columbia te propose un gros contrat et que t'as un groupe et une famille à nourrir, tu peux pas refuser. Elvis venait de signer chez RCA alors j'ai suivi son exemple. C'est triste que le label de Sam n'ait jamais pu s'en remettre mais ça ne l'a pas empêché de rentrer dans la légende.

Dylanesque : Et c'est aussi pour suivre l'exemple d'Elvis que tu as choisi les Jordanaires comme choristes ?

JC : Ces gars là étaient formidables, un contrepoint parfait au timbre de ma voix. Des bêtes de studio, très pros. À côté d'eux, j'avais l'impression d'être un bouseux du Midwest.

Dylanesque : Sans vous manquer de respect, c'était un peu le cas.

JC : Et jamais je ne renierais mes origines ! C'est pour ça que j'ai écrit des chansons de redneck : "Don't Take Your Guns to Town", "Pickin' Time", c'est de l'authentique !

Dylanesque : Il y a aussi de jolies reprises de standards country que je n'avais jamais entendues avant.

JC : J'avais un rôle de passeur. C'est en entendant tout ça à la radio étant gamin que j'ai voulu devenir musicien. "The Troubadour" de Cindy Walker, qu'on croirait écrit sur mesure pour moi. "I'd Rather Die Young", une lamentation superbe. "Shepherd of My Heart" de Jenny Lou Carson, elle savait comment écrire de belles ballades, paix à son âme !

Dylanesque : Et à la vôtre. En tout cas, alors que les albums Sun ressemblaient plus à des compilations de singles, vous avez là un vrai album, cohérent aussi bien dans le choix des chansons que dans leur enregistrement, très soigné.

JC : Oui, et là je dois remercier les Jordanaires ainsi que mes fidèles Luther Perkins et Marshall Grant. Ils m'ont permis de peaufiner mon son sans renier ce rythme si unique qui a fait ma réputation et qui a fait de "Still Miss Someone" un véritable tube.

Dylanesque : Et de cet album un immense succès commercial.

JC : Le début d'une longue histoire avec Columbia et l'Amérique que tu vas m'aider à revisiter.

Dylanesque : Un autre whisky Johnny ?


Parfait   17/20
par Dylanesque


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