John Zorn
Femina |
Label :
Tzadik |
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"Womens of truth" : par ces mots, Laurie Anderson ouvre une narration presque muette de 35 minutes.
Une histoire que John Zorn conçoit avec un jeu de carte. Les sections composant les différentes parties de "Femina" sont jouées au côté d'un hasard majestueux ; un hasard synonyme d'improvisation, dont Zorn a toujours été un fervent défenseur. À la manière de ses rencontres, réelles ou artistiques, avec les différentes femmes l'ayant touché, marqué, ému, il pose différents jalons, différents repères, sans doute pour mieux montrer combien sans vie fut littéralement signée par ce hasard. "Femina" est bel et bien un disque hommage : à Simone de Beauvoir, à Yoko Ono, à la fantastique Hélène Cixous, à Meredith Monk ou à Louise Bourgeois, pour ne citer que les plus connues de la cinquantaine de noms composant l'objet de ce disque.
Mettre en musique son existence, se souvenir, mettre sur papier, faire jouer, partager, diffuser. Pour peu qu'on le traite d'égocentrique, Zorn rétorque sans cesse par sa générosité, son envie infinie de diriger les différents orchestres qu'il a eu sous sa plume ou sous sa main. Car, malgré tout, Zorn est et sera jusqu'à la fin de sa vie un éternel nostalgique, un déraciné, un apatride. Il ne retrouvera jamais son "temps perdu". Dans ce sens, les créations de Zorn sont faites pour être réinterprétées, réarrangées, ré-exécutées, réinventées. Cette quête sans fin n'est possible que si le compositeurs s'appuie sur des êtres, sur des faiseurs de musiques. Les rencontres, Zorn ne les oublie pas.
D'une beauté et d'une délicatesse qu'on ne lui connaissait pas, il partage, encore. Femina est exécuté sous des mains de femmes et sa musique prend alors des couleurs inédites : la douceur, la fragilité et l'harmonie se télescopent violemment avec l'excentricité, la force et la flamboyance.
Une fois ce hasard, fondant la composition, passé, l'interprétation, elle, peut suivre alors ce chemin que personne ne pouvait prévoir. Pas fou le Zorn : ses interprètes, il les connaît : entre autres Carol Emmanuel, Okkyung Lee, l'immense Sylvie Courvoisier ou Ikue Mori. D'une pureté et d'une beauté proprement hallucinante, "Femina" surprend à chaque écoute. Alternant folie et apaisement, les interprètes donnent leur vision de la musique de chambre d'aujourd'hui. La première partie rend bien compte de ce que l'on peut ressentir à l'égard de disque. Commençant tout doucement par une ambiance noire, où le violon côtoie la harpe qui lui même fleurte nonchalamment avec le piano de Courvoisier, un tissage noir et une atmosphère presque mortuaire se développent. Puis une pirouette, la partie virevolte pour se transformer en une incroyable et délicate séquence aux faibles accents de musiques extrême-orientales. Tout est dit, excepté que les esthètes nous feront replonger seulement quelques secondes plus tard dans un cauchemar délicieux.
Pendant les 35 minutes de cet objet paradoxal, John Zorn nous a posé là où il le désirait ; sans que l'on s'en aperçoive, il a eu le temps de nous enchanter, de nous pervertir, de nous angoisser puis de nous apaiser, là, dans son jazz dont il ne reste plus rien, avec ses interprètes, dans son disque vie, dans son disque monde.
Une histoire que John Zorn conçoit avec un jeu de carte. Les sections composant les différentes parties de "Femina" sont jouées au côté d'un hasard majestueux ; un hasard synonyme d'improvisation, dont Zorn a toujours été un fervent défenseur. À la manière de ses rencontres, réelles ou artistiques, avec les différentes femmes l'ayant touché, marqué, ému, il pose différents jalons, différents repères, sans doute pour mieux montrer combien sans vie fut littéralement signée par ce hasard. "Femina" est bel et bien un disque hommage : à Simone de Beauvoir, à Yoko Ono, à la fantastique Hélène Cixous, à Meredith Monk ou à Louise Bourgeois, pour ne citer que les plus connues de la cinquantaine de noms composant l'objet de ce disque.
Mettre en musique son existence, se souvenir, mettre sur papier, faire jouer, partager, diffuser. Pour peu qu'on le traite d'égocentrique, Zorn rétorque sans cesse par sa générosité, son envie infinie de diriger les différents orchestres qu'il a eu sous sa plume ou sous sa main. Car, malgré tout, Zorn est et sera jusqu'à la fin de sa vie un éternel nostalgique, un déraciné, un apatride. Il ne retrouvera jamais son "temps perdu". Dans ce sens, les créations de Zorn sont faites pour être réinterprétées, réarrangées, ré-exécutées, réinventées. Cette quête sans fin n'est possible que si le compositeurs s'appuie sur des êtres, sur des faiseurs de musiques. Les rencontres, Zorn ne les oublie pas.
D'une beauté et d'une délicatesse qu'on ne lui connaissait pas, il partage, encore. Femina est exécuté sous des mains de femmes et sa musique prend alors des couleurs inédites : la douceur, la fragilité et l'harmonie se télescopent violemment avec l'excentricité, la force et la flamboyance.
Une fois ce hasard, fondant la composition, passé, l'interprétation, elle, peut suivre alors ce chemin que personne ne pouvait prévoir. Pas fou le Zorn : ses interprètes, il les connaît : entre autres Carol Emmanuel, Okkyung Lee, l'immense Sylvie Courvoisier ou Ikue Mori. D'une pureté et d'une beauté proprement hallucinante, "Femina" surprend à chaque écoute. Alternant folie et apaisement, les interprètes donnent leur vision de la musique de chambre d'aujourd'hui. La première partie rend bien compte de ce que l'on peut ressentir à l'égard de disque. Commençant tout doucement par une ambiance noire, où le violon côtoie la harpe qui lui même fleurte nonchalamment avec le piano de Courvoisier, un tissage noir et une atmosphère presque mortuaire se développent. Puis une pirouette, la partie virevolte pour se transformer en une incroyable et délicate séquence aux faibles accents de musiques extrême-orientales. Tout est dit, excepté que les esthètes nous feront replonger seulement quelques secondes plus tard dans un cauchemar délicieux.
Pendant les 35 minutes de cet objet paradoxal, John Zorn nous a posé là où il le désirait ; sans que l'on s'en aperçoive, il a eu le temps de nous enchanter, de nous pervertir, de nous angoisser puis de nous apaiser, là, dans son jazz dont il ne reste plus rien, avec ses interprètes, dans son disque vie, dans son disque monde.
Exceptionnel ! ! 19/20 | par Reznor |
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