Depeche Mode
Sounds Of The Universe |
Label :
Mute |
||||
Ca fait bizarre de se dire que les Depeche Mode sont désormais des papys du rock. Eux dont l'image de poupins des années 80 reste figée dans la plupart des esprits, comme sur le papier glacé: les formes ont (peu) changé, pas encore de cheveux gris, peu de rides... On pourrait presque dire que le temps et les excès les ont épargnés.
Et ce statut de papys est d'autant plus troublant que Gore et sa bande ont toujours fait belle figure de pionniers, d'influences revendiquées par moults artistes prestigieux, tous styles confondus.
Comble de ce paradoxe temporel: les trois anglais revenaient il y a presque quatre ans avec ce qui est aujourd'hui l'un de leurs plus grands succès publics et critiques, l'irréprochable Playing The Angel.
Mais voilà le premier de signe de vieillesse qui pointe enfin le bout de son nez en 2008: on apprend (avant même d'entendre parler d'un prochain album !), qu'en bons papys qui se respectent, les Depeche Mode vont s'attaquer à la tournée des stades (sic).
Ainsi, comme de vieilles légendes qui ont tout vécu, sont revenues de tout, n'ont plus rien à prouver à personne, ce qui est d'ailleurs probablement vrai, les trois compères recherchent encore la chose qui pourrait les faire vibrer. Et quoi de plus excitant et grisant que de jouer devant des foules conquises ?
A défaut de cautionner, on les comprend, donc, et on ne peut se plaindre, se rappelant avec bonheur les exubérances mégalomaniaques qui ont fait de leur tournée Devotional une expérience live totalement géniale...
Mais pour que cette tournée des stades soit à la hauteur de nos espérances, il fallait bien sûr que l'album " prétexte " n'en soit pas qu'un, de prétexte.
A vrai dire, la première surprise de ce Sounds Of The Universe réside dans sa tonalité d'ensemble, très sage, plutôt mid-tempo, quand son prédécesseur se montrait volontiers agressif et enlevé... Comme toujours chez Depeche Mode, un côté arty, qui tient presque du défi (ici celui de défendre en stade des morceaux plutôt intimistes), ressort ostensiblement d'une démarche à la base volontiers séductrice.
Mais pour être franc, au vu du résultat, on aurait préféré que l'enjeu se situe plus au niveau du son et des mélodies, comme cela avait toujours été le cas chez les 3 de Basildon, plutôt que dans un rapport à cette fameuse tournée.
En d'autres termes, dans quelle mesure Sounds Of The Universe n'a-t-il pas été composé dans l'unique but de soutenir un projet scènique plutôt que de réaliser un putain de bon disque ?
Car tout respire ici une forme de consensualité molle, qui, sans aucun doute, ne fâchera ni le fan, ni les nouvelles petites têtes blondes qui voudraient se plonger dans l'oeuvre de nos papys. Le premier regrettera sans aucun doute un manque d'innovation ("In Chains", "Come Back"), mais se rassurera à l'écoute d'une bombe comme "Wrong" (certainement leur meilleur tube depuis "Enjoy The Silence"), et se contentera du savoir-faire mélodique de Gore ("Fragile Tension", "In Sympathy") comme de sa faculté à écrire des ballades bancales et émouvantes ("Little Soul", "Jezebel"). Il s'enthousiasmera également de cette facilité avec laquelle Dave Gahan s'est fondu dans le moule de la composition Modesque tout en laissant transparaître une volonté rock appuyée ("Hole To Feed", "Miles Away").
Enfin, pour les nouveaux venus, Depeche Mode s'affirmera avec Sounds Of The Universe comme un groupe aussi bien efficace et planant que profond et mélancolique.
Attention, pas de panique non plus: sage (peut-être), peu ambitieux (certainement), ce dernier album, un peu bâtard, est tout de même une jolie synthèse de ce qu'à fait Depeche Mode depuis 30 ans: du machinique pur et dur associée à des sons novateurs ou vintage, de la pop électronique fragile mâtinée de guitares tantôt rock, tantôt bluesy. Mais c'est là son seul intérêt: car chaque amateur du groupe aura du mal à y trouver la magie qui anime les (nombreux) grands disques des maîtres de la pop (Violator, Ultra et Playing The Angel en tête).
Sounds Of The Universe se rangerait plutôt aux côtés d'un Exciter, très moderne mais plutôt faible mélodiquement, ou d'un Some Great Reward un peu lourdaud dans son approche sonique.
Pas de panique donc, l'honneur est bien sauf (ce qui n'était pas forcément le cas d'autres papys débutants, les Cure, l'année dernière), et la maison de retraite encore loin. Mais enfin il est assez déstabilisant de se dire qu'on attendrait presque avec plus d'enthousiasme le prochain Dave Gahan qu'un autre Depeche Mode...
Et ce statut de papys est d'autant plus troublant que Gore et sa bande ont toujours fait belle figure de pionniers, d'influences revendiquées par moults artistes prestigieux, tous styles confondus.
Comble de ce paradoxe temporel: les trois anglais revenaient il y a presque quatre ans avec ce qui est aujourd'hui l'un de leurs plus grands succès publics et critiques, l'irréprochable Playing The Angel.
Mais voilà le premier de signe de vieillesse qui pointe enfin le bout de son nez en 2008: on apprend (avant même d'entendre parler d'un prochain album !), qu'en bons papys qui se respectent, les Depeche Mode vont s'attaquer à la tournée des stades (sic).
Ainsi, comme de vieilles légendes qui ont tout vécu, sont revenues de tout, n'ont plus rien à prouver à personne, ce qui est d'ailleurs probablement vrai, les trois compères recherchent encore la chose qui pourrait les faire vibrer. Et quoi de plus excitant et grisant que de jouer devant des foules conquises ?
A défaut de cautionner, on les comprend, donc, et on ne peut se plaindre, se rappelant avec bonheur les exubérances mégalomaniaques qui ont fait de leur tournée Devotional une expérience live totalement géniale...
Mais pour que cette tournée des stades soit à la hauteur de nos espérances, il fallait bien sûr que l'album " prétexte " n'en soit pas qu'un, de prétexte.
A vrai dire, la première surprise de ce Sounds Of The Universe réside dans sa tonalité d'ensemble, très sage, plutôt mid-tempo, quand son prédécesseur se montrait volontiers agressif et enlevé... Comme toujours chez Depeche Mode, un côté arty, qui tient presque du défi (ici celui de défendre en stade des morceaux plutôt intimistes), ressort ostensiblement d'une démarche à la base volontiers séductrice.
Mais pour être franc, au vu du résultat, on aurait préféré que l'enjeu se situe plus au niveau du son et des mélodies, comme cela avait toujours été le cas chez les 3 de Basildon, plutôt que dans un rapport à cette fameuse tournée.
En d'autres termes, dans quelle mesure Sounds Of The Universe n'a-t-il pas été composé dans l'unique but de soutenir un projet scènique plutôt que de réaliser un putain de bon disque ?
Car tout respire ici une forme de consensualité molle, qui, sans aucun doute, ne fâchera ni le fan, ni les nouvelles petites têtes blondes qui voudraient se plonger dans l'oeuvre de nos papys. Le premier regrettera sans aucun doute un manque d'innovation ("In Chains", "Come Back"), mais se rassurera à l'écoute d'une bombe comme "Wrong" (certainement leur meilleur tube depuis "Enjoy The Silence"), et se contentera du savoir-faire mélodique de Gore ("Fragile Tension", "In Sympathy") comme de sa faculté à écrire des ballades bancales et émouvantes ("Little Soul", "Jezebel"). Il s'enthousiasmera également de cette facilité avec laquelle Dave Gahan s'est fondu dans le moule de la composition Modesque tout en laissant transparaître une volonté rock appuyée ("Hole To Feed", "Miles Away").
Enfin, pour les nouveaux venus, Depeche Mode s'affirmera avec Sounds Of The Universe comme un groupe aussi bien efficace et planant que profond et mélancolique.
Attention, pas de panique non plus: sage (peut-être), peu ambitieux (certainement), ce dernier album, un peu bâtard, est tout de même une jolie synthèse de ce qu'à fait Depeche Mode depuis 30 ans: du machinique pur et dur associée à des sons novateurs ou vintage, de la pop électronique fragile mâtinée de guitares tantôt rock, tantôt bluesy. Mais c'est là son seul intérêt: car chaque amateur du groupe aura du mal à y trouver la magie qui anime les (nombreux) grands disques des maîtres de la pop (Violator, Ultra et Playing The Angel en tête).
Sounds Of The Universe se rangerait plutôt aux côtés d'un Exciter, très moderne mais plutôt faible mélodiquement, ou d'un Some Great Reward un peu lourdaud dans son approche sonique.
Pas de panique donc, l'honneur est bien sauf (ce qui n'était pas forcément le cas d'autres papys débutants, les Cure, l'année dernière), et la maison de retraite encore loin. Mais enfin il est assez déstabilisant de se dire qu'on attendrait presque avec plus d'enthousiasme le prochain Dave Gahan qu'un autre Depeche Mode...
Sympa 14/20 | par Jekyll |
Posté le 19 juillet 2009 à 20 h 23 |
Ecrire que Sounds Of The Universe était attendu serait un doux euphémisme. Après tout, le douzième album de Depeche Mode succède à une série de sept albums irréprochables écrits sur une période de 18 ans, pendant lequel le groupe aura tout vécu : donner ses lettres de noblesse à l'electro-pop, des changements esthétiques radicaux, la décadence rock, changements de line-up et résurrections. Cette attente était d'autant plus importante qu'avec Playing The Angel, le trio de Basildon avait offert aux fans un chef d'œuvre sombre aux instrumentations magistralement inspirées.
Et comme beaucoup, j'ai cru que Sounds Of The Universe était un échec patent. Tout avait bien pourtant commencé. "Wrong" annonçait l'album de la plus belle des manières. Dans la lignée des singles déroutants du groupe, ce morceau sans couplet ni refrain offre au groupe un nouveau classique, avec son chant passionné et son instrumental démentiel. La bonne nouvelle qu'apporte ce single réside aussi dans le fait que l'association reconduite avec le producteur Ben Hillier semblait une nouvelle fois payante. Le son du groupe est toujours aussi foisonnant depuis 2005, mélange d'harmonies vocales sinistres et de sonorités analogiques grinçantes à souhait. Cette excellente impression est renforcée par le morceau d'ouverture "In Chains", qui distille pendant de longues minutes une soul synthétique à la subtile tension sur fond de nappes de synthétiseurs saisissantes. Et ensuite, le trou noir : une succession de morceaux manquant de percussion (dans le sens de "punch"), mais enrobés d'un son toujours aussi passionnant, truffé de bidouillages électroniques semblant mal masquer un manque d'inspiration. La nouvelle passion de Gore, l'achat effréné de synthés antiques sur e-Bay, aurait elle fait passer la recherche sonore avant l'application mélodique ? Il m'aura fallu plus de deux semaines pour envisager une écoute entière du disque, et plus encore avant de réussir à accrocher sur certains passages.
Lentement mais sûrement, Sounds Of The Universe a commencé à s'emparer de moi et à dévoiler ses charmes discrets. C'est un fait, ce douzième album tranche avec ses prédécesseurs. On ne retrouve pas la succession habituelle d'hymnes à la noirceur percutantes et de ballades douces-amères. Au contraire, on est très surpris par le calme de cet album, où les percussions habituellement dantesques de Depeche Mode s'effacent au profit de rythmes hésitants portés par des beats étouffés. A ce titre, "Fragile Tension" s'avère être un des meilleurs représentants de la direction emprunté par le groupe. Décevant au premier abord, ce morceau propose une sorte langueur et de morosité somme toute nouvelle pour le groupe (coutumier des émotions intenses), à l'image de ces riffs de guitare qui s'étirent pendant de longues secondes. Moins sombre, Sounds Of The Universe n'en reste pas moins intriguant. J'en veux pour preuve ce "Little Soul" complètement trippant, où l'instrumental industriel et détraqué fait naître un climat dérangeant. En fait, l'influence de Martin Gore est plus que jamais présente sur ce disque. On sait que Gahan est amateur des titres les plus rock du groupe, à la "Personal Jesus" ou "I Feel You". Rien de tout cela ici : la grande majorité de l'album est constituée de morceaux dans la veine de "Fragile Tension", touts en retenue. De la même façon "In Sympathy" ou "Peace" (aux chœurs hallucinants de Gore) proposent eux aussi des mélodies lancinantes et très lentes, habillées de sonorités malsaines, mais jamais aussi industrielles que sur Playing The Angel. Et la révélation arrive : une fois de plus et malgré la présence de Ben Hillier (qui semble partager le même besoin de renouvellement que le groupe), Depeche Mode a pris le contre-pied de son album précédent. Plutôt que de ravir les fans avec un nouveau brûlot industriel, Sounds Of The Universe propose une long voyage en apesanteur porté par des instrumentations analogiques ahurissantes d'inventivité mais finalement très discrètes, qui laissent apparaître des mélodies sobres mais insidieusement prenantes.
A côté de cet ensemble de morceaux inhabituels, on retrouve d'autres surprises. Les morceaux de Dave sont moins apaisés, comme "Holes to Feed" ou "Come Back", mais on sent qu'elles auraient pu être beaucoup plus efficaces, et que le groupe a volontairement atténué leur force de frappe pour ne pas troubler la fausse tranquillité du disque. Méfiez-vous de l'eau qui dort : sous ses aspects amicaux, Sounds of the Universe installe des climats plus vicieux qu'au premier abord. Et lorsque retentit le court instrumental "Spacewalker", la fin de l'album en met plein les yeux. "Perfect" surprend en offrant un caviar pop carrément apaisé et optimiste, contrastant parfaitement avec la glaçante "Jezebel" où Martin Gore chante avec toute la morgue dont il est capable. "Miles Away" offre des percussions extrêmement surprenantes, tandis qu'avec "Corrupt", Depeche Mode offre aux fans une de ses spécialités. Une fois de plus, les anciens garçons coiffeurs revisitent à leur façon le blues en le passant à la moulinette synthétique, et assènent un refrain bouillonnant, qui à n'en pas douter, fournira son lot d'émotions en concert.
Surprenant et trompeur album que ce Sounds Of The Universe donc. Ceux qui sauront passer l'inévitable déception des premières écoutes pourront alors profiter d'un énième recueil de chansons riches en émotions, mais qui cette fois seront bien plus retenues. Assurément, il ne s'agit pas du meilleur album de Depeche Mode. Assurément, il ne bénéficiera pas de l'aura de Violator ou Songs Of Faith And Devotion. Mais il n'y a aucune raison de crier sur tous les toits que Depeche Mode est désormais un dinosaure. Tout d'abord, un semi-échec (car il serait difficile de qualifier cet album de "mauvais") ne peut annoncer la fin d'un groupe. Mais surtout, cet album bénéficie d'un bien meilleur standing que ce que The Cure par exemple a pu offrir en 2008. S'il est tout à fait légitime de le trouver moins bon que ces sept prédécesseurs, Sounds Of The Universe n'a néanmoins rien d'un échec. Au contraire : le groupe déploie encore des trésors d'inventivité pour offrir quelque chose de nouveau. En s'essayant à la retenue, Depeche Mode prouve une fois de plus qu'il s'agit d'un grand groupe prêt à surprendre ses fans après 27 ans (!) de carrière. Et lorsqu'on entend la passion qui est restée intacte dans le chant de Gahan, on se dit que bien qu'ils soient moins efficaces, ces treize nouveaux morceaux recèlent eux aussi de la puissance inhérente aux compositions du groupe, même si pour une fois, elle se fait moins éclatante et plus fuyante.
Et comme beaucoup, j'ai cru que Sounds Of The Universe était un échec patent. Tout avait bien pourtant commencé. "Wrong" annonçait l'album de la plus belle des manières. Dans la lignée des singles déroutants du groupe, ce morceau sans couplet ni refrain offre au groupe un nouveau classique, avec son chant passionné et son instrumental démentiel. La bonne nouvelle qu'apporte ce single réside aussi dans le fait que l'association reconduite avec le producteur Ben Hillier semblait une nouvelle fois payante. Le son du groupe est toujours aussi foisonnant depuis 2005, mélange d'harmonies vocales sinistres et de sonorités analogiques grinçantes à souhait. Cette excellente impression est renforcée par le morceau d'ouverture "In Chains", qui distille pendant de longues minutes une soul synthétique à la subtile tension sur fond de nappes de synthétiseurs saisissantes. Et ensuite, le trou noir : une succession de morceaux manquant de percussion (dans le sens de "punch"), mais enrobés d'un son toujours aussi passionnant, truffé de bidouillages électroniques semblant mal masquer un manque d'inspiration. La nouvelle passion de Gore, l'achat effréné de synthés antiques sur e-Bay, aurait elle fait passer la recherche sonore avant l'application mélodique ? Il m'aura fallu plus de deux semaines pour envisager une écoute entière du disque, et plus encore avant de réussir à accrocher sur certains passages.
Lentement mais sûrement, Sounds Of The Universe a commencé à s'emparer de moi et à dévoiler ses charmes discrets. C'est un fait, ce douzième album tranche avec ses prédécesseurs. On ne retrouve pas la succession habituelle d'hymnes à la noirceur percutantes et de ballades douces-amères. Au contraire, on est très surpris par le calme de cet album, où les percussions habituellement dantesques de Depeche Mode s'effacent au profit de rythmes hésitants portés par des beats étouffés. A ce titre, "Fragile Tension" s'avère être un des meilleurs représentants de la direction emprunté par le groupe. Décevant au premier abord, ce morceau propose une sorte langueur et de morosité somme toute nouvelle pour le groupe (coutumier des émotions intenses), à l'image de ces riffs de guitare qui s'étirent pendant de longues secondes. Moins sombre, Sounds Of The Universe n'en reste pas moins intriguant. J'en veux pour preuve ce "Little Soul" complètement trippant, où l'instrumental industriel et détraqué fait naître un climat dérangeant. En fait, l'influence de Martin Gore est plus que jamais présente sur ce disque. On sait que Gahan est amateur des titres les plus rock du groupe, à la "Personal Jesus" ou "I Feel You". Rien de tout cela ici : la grande majorité de l'album est constituée de morceaux dans la veine de "Fragile Tension", touts en retenue. De la même façon "In Sympathy" ou "Peace" (aux chœurs hallucinants de Gore) proposent eux aussi des mélodies lancinantes et très lentes, habillées de sonorités malsaines, mais jamais aussi industrielles que sur Playing The Angel. Et la révélation arrive : une fois de plus et malgré la présence de Ben Hillier (qui semble partager le même besoin de renouvellement que le groupe), Depeche Mode a pris le contre-pied de son album précédent. Plutôt que de ravir les fans avec un nouveau brûlot industriel, Sounds Of The Universe propose une long voyage en apesanteur porté par des instrumentations analogiques ahurissantes d'inventivité mais finalement très discrètes, qui laissent apparaître des mélodies sobres mais insidieusement prenantes.
A côté de cet ensemble de morceaux inhabituels, on retrouve d'autres surprises. Les morceaux de Dave sont moins apaisés, comme "Holes to Feed" ou "Come Back", mais on sent qu'elles auraient pu être beaucoup plus efficaces, et que le groupe a volontairement atténué leur force de frappe pour ne pas troubler la fausse tranquillité du disque. Méfiez-vous de l'eau qui dort : sous ses aspects amicaux, Sounds of the Universe installe des climats plus vicieux qu'au premier abord. Et lorsque retentit le court instrumental "Spacewalker", la fin de l'album en met plein les yeux. "Perfect" surprend en offrant un caviar pop carrément apaisé et optimiste, contrastant parfaitement avec la glaçante "Jezebel" où Martin Gore chante avec toute la morgue dont il est capable. "Miles Away" offre des percussions extrêmement surprenantes, tandis qu'avec "Corrupt", Depeche Mode offre aux fans une de ses spécialités. Une fois de plus, les anciens garçons coiffeurs revisitent à leur façon le blues en le passant à la moulinette synthétique, et assènent un refrain bouillonnant, qui à n'en pas douter, fournira son lot d'émotions en concert.
Surprenant et trompeur album que ce Sounds Of The Universe donc. Ceux qui sauront passer l'inévitable déception des premières écoutes pourront alors profiter d'un énième recueil de chansons riches en émotions, mais qui cette fois seront bien plus retenues. Assurément, il ne s'agit pas du meilleur album de Depeche Mode. Assurément, il ne bénéficiera pas de l'aura de Violator ou Songs Of Faith And Devotion. Mais il n'y a aucune raison de crier sur tous les toits que Depeche Mode est désormais un dinosaure. Tout d'abord, un semi-échec (car il serait difficile de qualifier cet album de "mauvais") ne peut annoncer la fin d'un groupe. Mais surtout, cet album bénéficie d'un bien meilleur standing que ce que The Cure par exemple a pu offrir en 2008. S'il est tout à fait légitime de le trouver moins bon que ces sept prédécesseurs, Sounds Of The Universe n'a néanmoins rien d'un échec. Au contraire : le groupe déploie encore des trésors d'inventivité pour offrir quelque chose de nouveau. En s'essayant à la retenue, Depeche Mode prouve une fois de plus qu'il s'agit d'un grand groupe prêt à surprendre ses fans après 27 ans (!) de carrière. Et lorsqu'on entend la passion qui est restée intacte dans le chant de Gahan, on se dit que bien qu'ils soient moins efficaces, ces treize nouveaux morceaux recèlent eux aussi de la puissance inhérente aux compositions du groupe, même si pour une fois, elle se fait moins éclatante et plus fuyante.
Parfait 17/20
En ligne
324 invités et 0 membre
Au hasard Balthazar
Sondages