Frank Zappa

The Grand Wazoo

The Grand Wazoo

 Label :     Rykodisc 
 Sortie :    vendredi 01 décembre 1972 
 Format :  Album / CD  Vinyle   

Quelqu'un écrivait sur Francis Vincent Zappa Junior dit Frank ceci :
"De par sa situation d'Américain, le jazz swing l'énerve vite. Parce que Frank Zappa est à la recherche de formes originales. L'importance dans le terme "jazz", pour lui, c'est cette liberté d'improvisation et ce côté spontané de la musique. Il y a l'aspect révolutionnaire de l'écriture, et l'attitude du jazzman qui est une attitude d'improvisateur, de communication humaine, de respect du public : une générosité de coeur. Dans ce sens-là, Zappa est un très grand jazzman."

A l'instar du In A Silent Way de Miles Davis, le Grand Wazoo de Frank Zappa est une des pièces essentielles de la musique électrique moderne, comme lui d'ailleurs ce n'est ni du jazz, ni du rock...
Et ce n'est pas du jazz-rock, comme l'affirme certains forcenés de l'étiquette, c'est VRAIMENT autre chose. C'est du Zappa ! La pulsation qui donne au GW cet apparent swing est binaire (6/8 et autres jolies petites métriques). Les jazzeux en restent bouche bée en tapant du pied, les rockeux fondent en larmes en claquant des doigts...
Situons : 1972 ; après un accident de concert idiot Zappa est immobilisé pendant une petite année : plâtre, fauteuil roulant, prothèse. Le chef s'est engueulé avec tout le monde et tout le monde s'est fait jeter : Les Mothers n'existent plus. Pendant cette période il va nous concocter une musique pour big band dont on entendra les premiers efforts dans Waka/Jawaka qui est, plus qu'une suite du Hot Rats, une ébauche du Wazoo et à ce titre les morceaux "Big Swifty" & "Waka/Jawaka" nous auraient fait un beau double album, puisque c'est le même personnel qui officie.
L'olibrius va tenter de faire jouer cette musique par l'orchestre appelé Grand Wazoo Orchestra (formation d'une vingtaine de bonhommes trop coûteuse à faire tourner aux States), puis en octuor avec le Petit Wazoo* mais entre répétitions difficiles, travail de studio et concerts guère productifs, il s'emmêle un peu les pinceaux et stoppe au bout d'un mois.
Les bandes enregistrées durant l'été 72 avec moult compagnons de bacchanale sonore vont lui permettre de monter grâce à cette science de l'overdub qu'il maîtrise parfaitement et du collage sonore inégalable une bande son scénarisée, comme pour le "Billy The Mountain" des Mothers. L'aventure est celle d'un véritable péplum, totalement incompréhensible d'ailleurs, mais pour Zappa la parabole est claire : il règle ses comptes avec le show-business.
Disque instrumental (à part quelques borborygmes), où l'extraordinaire partition du batteur Aynsley Dunbar vaut à elle seule le détour, il présente une facette étonnante du bonhomme qu'il intégrera dorénavant aux diverses prestations scéniques, lorsqu'il trouvera les musiciens qui pourront jouer ce genre de partition ambitieuse (il faudra attendre la tournée de 88 surtout). Après avoir dynamité avec humour le blues et le rock, avec audace le contemporain & le doo-wop, mélangeant le free-jazz au funk dans des happenings musicaux outranciers, le moustachu se paie le luxe de baliser la route avec une palette sonore qui, à l'époque et comme pour Miles, va en heurter plus d'un. Sa portée artistique mettra du temps à s'imposer et de nos jours il y a consensus là-dessus, The Grand Wazoo ne se contente pas d'être grand, il est monumental.
Les musiciens interrogés plus tard affirmeront : "Une musique très complexe... Ce n'était pas du jazz... Il écrit tout et est capable de le jouer à la guitare".
La sensualité musicale débordante de ces sillons où d'infernales mélodies copulent sans vergogne nous incite à une révision à posteriori de l'immense travail de Zappa : on retrouvera ces thèmes récurrents tout au long de la discographie du monsieur corroborant ses théories "farfelues" sur cette continuité conceptuelle et sur la Grande Note qui en ont amusé plus d'un.
Les 13 mn de l'éponyme "Grand Wazoo" qui démarre l'album sont un hors d'œuvre copieux qui vont vous faire rentrer dans un monde de velours où la guitare aqueuse du maître (pas de solos gonflos ici, n'ayez crainte) le dispute au trombone ou au cornet virtuoses, et au bout des petites 40 mn réglementaires du vinyle original, qui passent bien trop vite, quand les dernières mesures du "Blessed Relief" s'estompent, morceau de loukoum fondant pour oreilles gourmandes, n'hésitez pas à troquer vos mp3 ridicules avec le cd mastérisé, le jeu en vaut la chandelle, croyez-moi !
Zappa est au top et va nous livrer en quelques mois la trilogie haut de gamme Over-nite Sensation, Apostrophe & One Size Fits All (+ le Roxy en public) avec une formation de rêve.


* on peut se rendre compte de ce travail avec la sortie en 2007, du double cd Zappa Wazoo, enregistré live le 24 septembre 1972, à Boston


Intemporel ! ! !   20/20
par Raoul vigil


 Moyenne 19.50/20 

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Posté le 22 septembre 2008 à 18 h 33

La pochette du CD laisse prévoir le meilleur : dans son laboratoire secret à peine cliché, un inventeur fou fait revivre un Rome antique loufoque et plus proche de 'La vie de Brian' que des livres d'histoires.
Zappa explore ici un genre qu'il invente au fur et à mesure : des mélodies très accrocheuses ("Cletus Awreetus"), des breaks incroyables, une rythmique implacable et des solistes au sommet (George Duke sur l'intro de "Eat That Question").
L'ouverture très pompeuse de ce Grand Wazoo(Grand Zoziau en français) nous emmène rapidement dans le monde fantaisiste où les guerriers sont les musiciens, les armes des instruments et les idées des mélodies. On navigue ainsi entre les thèmes très différents, comme Zappa passe d'une idée à l'autre. Les musiciens sont tous excellents, et plus particulièrement les percussionnistes, qui ne laissent jamais retomber la tension et assurent un mouvement continuel.
Moins connu que Hot Rats mais tout aussi exceptionnel, un immense (presque) instrumental, alchimie magique entre jazz, rock et quelque chose de complètement différent : la musique selon Frank Zappa.
Exceptionnel ! !   19/20







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