Placebo

Every You Every Me

Every You Every Me

 Label :     Virgin 
 Sortie :    jeudi 21 janvier 1999 
 Format :  Single / CD  Vinyle   

Il faut le reconnaître, avant de céder aux facilités commerciales, Placebo était le dernier groupe intéressant des années 90. Après : grosse période de creux. Se superposant d'ailleurs à une absence criante de renouvellement dans le paysage musical par la suite.
La bande à Brian Molko, qui à l'époque connaissait le sens du mot provocation, était les meilleurs, en tout cas sans doute les seuls, à oser mélanger mélancolie mélodique et urgence sous speed sur ces albums. Pour beaucoup donc, Placebo et ses frasques sincères, souvent liées aux drogues ou à une sexualité ambiguë, fut le groupe qui su le mieux cristalliser les frustrations et les attentes de tout un chacun. Tout en conservant un esthétisme très racé et identitaire. Il est rare de s'immerger dans cette zone trouble entre l'adolescence et l'état adulte. Le trio multi-identitaire jouait des ambivalences, des messages tendancieux et d'un romantisme légèrement insidieux, sur fond de guitares rapides et vives.
Le succès de l'excellent Without You I'm Nothing (dernière ode adolescente de la décenie) fut au rendez-vous, et alors que le groupe aurait pu enchaîner les singles, il ne cèdait pas (pas encore du moins) aux sirènes commerciales, préférant livrer avec ses titres les plus célèbres quelques surprises : des reprises (excellentes), mais aussi des textes salaces en français ou des remix bizarroïdes.
Le single "Every You Every Me", malgré le fait qu'il n'est constitué que de trois versions de la même chanson, contient une surprise bien cachée. Pour rentrer dans le vif du sujet, rien de mieux que la version originale, sublime morceau pop, joué à cent à l'heure et avec une morgue et une suffisance défiant toute imagination.
Passons sur la version dub/electro, inintéressante.
Lorsqu'on lit les crédits du deuxième remix, on a l'agréable surprise de découvrir la mention "Sneaker Pimps Version". Au-delà d'être un simple exercice de style, le remix est une véritable réappropriation d'un style par un autre (chose suffisamment rare pour être souligné).
On retrouve parfaitement l'atmosphère sombre et brouillée du groupe de Chris Corner, avec ses guitares sèches et sa boite à rythme. Le tempo est beaucoup plus lent, insidieux et étrange, conservant le chant tendrement nasal de Brian Molko mais l'ayant ralenti par sample. Et au lieu d'avoir un morceau énergique et plein comme un oeuf, on se retrouve immergé dans une ambiance inquiétante avec des fantômes en arrière-fond, des chœurs doublés qu'on entend à peine et qui se contentent de faire des 'dadada' de manière lancinante, des bourdonnements, voire même par moment des éclairs de guitares. Le morceau n'hésite pas à se laisser dériver vers un dub traversé de saturations noisy et de voix étranges, avant de revenir à la voix de Brian Molko et aux guitares sèches. Du même coup, les paroles prennent une toute valeur : alors qu'elles symbolisaient un esprit bouillonnant à vouloir tout faire, tout essayer, elles dépeignent ici plus un décalage et un troublant sentiment de solitude et de mélancolie.
Sneaker Pimps propose donc ici une version alternative à un tube en puissance, dans un registre suffisamment différent et captivant pour mériter d'être entendu par curiosité.


Bon   15/20
par Vic


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