Of Montreal
Skeletal Lamping |
Label :
Polyvinyl |
||||
Depuis le début de sa carrière, le groupe Of Montreal nous a habitués à des disques aux allures de kaléidoscope, où il s'amuse à télescoper un nombre déraisonnable de style musicaux. Le changement de sonorités entrepris avec le chef d'œuvre Hissing Fauna Are You The Destroyer? n'a pas entamé cette caractéristique.
Sur Skeletal Lamping, Of Montreal dynamite son écriture en poussant cette variété au maximum. L'heure de musique proposée est, sur CD, divisé en 15 pistes. Mais le terme piste n'a aucun sens lorsqu'il s'agit d'évoquer cet album. Les paroles sont le seul élément permettant d'assurer un minimum de cohérence sur chaque piste. Musicalement, impossible de diviser l'album de la sorte. Kevin Barnes s'est inspiré d'une technique de chasse consistant à bruler une forêt, afin de faire sortir tous les animaux de celle-ci et de les abattre sans prendre le temps de choisir sa cible. L'écriture suit cette méthode. Le leader du groupe semble avoir ouvert ses entrailles, déversé toute la musique qu'il a en lui, sans prendre le temps d'effectuer une sélection, de choisir et travailler ses morceaux. 15 pistes donc, mais au moins une quarantaine de thèmes musicaux, dont la durée varie de 20 secondes à 3 minutes. Cette écriture gargantuesque a de quoi laisser pantois, et rendre l'écoute complexe. Mais ce n'est pas tout ! Le groupe ne s'encombre pas de transitions travaillées, pour donner un semblant de cohérence à son œuvre. Le passage d'une mélodie à une autre semble se faire à la hache, de façon très maladroite. En découle une écoute passionnante, où les surprises s'enchaînent à un rythme effréné.
Cette avalanche de thèmes musicaux a de quoi désarçonner. Dans le pire des cas, on la considèrera comme une logorrhée musicale, d'un groupe ayant perdu toue notion d'accessibilité. Mais pour ceux qui seront réceptifs, l'écoute de Skeletal Lamping a tout d'un couloir aux merveilles.
Les sonorités utilisées sont les mêmes que sur Hissing Fauna Are You The Destroyer?. En clair, attendez vous à une avalanche de guitares funky ou stridentes, de beats acides, de rythmes syncopés et sourds, et surtout de voix aiguës, efféminées, nasillardes et précieuse à l'extrême. Quant aux genres utilises, on a le droit à vraiment de tout: du disco-funk, de l'electro, de la folk, de la pop, du shoegazing et la plupart du temps, des bizarreries electro-psychées acides. Le groupe a un son unique. L'association de ces sonorités avec des registres variés fait naître des émotions rares. En un instant, on peut passer de l'écoute d'un morceau de pop légère à une expérimentation malsaine. Malsain, le mot est lâché. Cette association entre mélodies enjouées, étrangeté, musique dansante ou ambiante, le tout sur un rythme haletant avait pour but de faire entrevoir la complexité du cerveau humain. L'échec est patent pour Kevin Barnes. Car c'est bien sa psyché qui est exprimée sur ce disque. Son esprit hystérique est exposé, mélange de joie, mélancolie, fureur et surtout folie. On a vraiment l'impression d'entendre une personne touchée de démence, d'une joie irrépressible mais capable de devenir dangereuse pour les autres. Bref, on a en main un disque qui correspond vraiment à l'esthétique dionysiaque chère à Nietzche. Le disque procure une transe certaine, où s'entremêlent joie, euphorie, danger, fulgurance, efflorescence, destruction, irrégularité et démence. Par moments, l'écoute peut mettre vraiment mal à l'aise. Si les changements de mélodies ne facilitent pas l'écoute, cette démence, cet aspect malsain peut vraiment effrayer.
Difficile donc de retenir des morceaux en particulier, l'album s'écoute d'une traite. Mais après plusieurs écoutes, on se rend compte que quelques pistes sont plus travaillées que d'autres.
"Nonpareil Of Favor", par exemple, qui fait office d'introduction agressive. Après 2 minutes d'une ritournelle electro, le rythme s'emballe, devient haletant, soutenu à l'extrême. Mais mêlé à du bruit blanc en fond sonore, le miracle se produit et une mélodie naît.
Pas le temps de se reposer avant que "Wicked Wisdom" ne déboule. Ce morceau est une véritable montagne russe. En 5 minutes, autant de mélodies sont utilisées, et dans des registres complètement opposés. Il s'agit sûrement du morceau le plus représentatif de l'album.
"Gallery Piece" est elle aussi passionnante. Elle commence comme un tube funky, où Kevin Barnes semble crier son amour (‘I Wanna Write You A Book, I Wanna Dry Your Tears Whenever You Are Sad, I Wanna Be Your Only Friend'), mais en basculant dans un passage ambient, on se rend compte que ce morceau est plus complexe. Et en le réécoutant, on découvre d'autres paroles bien plus malsaines (‘I Wanna Scratch Your Chick, I Wanna Crash Your Car') chantés d'une voix bien trop enjouée pour être bêtement heureuse. Kevin Barnes semble littéralement ivre de bonheur, et ses derniers restes de raisons semblent prêts à disparaitre.
L'odyssée de 7 minutes "Plastic Wafers", ou les changements de rythme et les synthés nous font atteindre une sorte d'état second est elle aussi remarquable.
Voilà les morceaux qui m'ont le plus marqué. Mais chacun retiendra ce qui le touche le plus. Cet album est gargantuesque, la créativité est ahurissante et à de quoi donner le tournis. Difficile d'y revenir sans l'écouter en entier.
Enfin, comment ne pas évoquer les textes ? Kevin Barnes continue de nous exposer ses obsessions, et sur ses paroles drôlatres et décalés, il évoque le sexe, le couple, la fidélité, la rupture, la solitude mais aussi le dégoût face à la politique. Mais tous cela sous des aspects absurdes et hallucinés, bien sûr.
Skeletal Lamping est donc l'œuvre ahurissante d'un groupe vraiment unique, qui persiste et signe dans l'excellence et a quasiment oublié toute forme de conformisme. En utilisant des sonorités modernes et hype, le groupe a crée une œuvre labyrinthique, dionysiaque où s'exprime toute la folie de son créateur. Assurément, peu de disques atteindront cette excellence cette année. Of Montreal continue son odyssée musicale, parsemée de fulgurances et d'une créativité débordante. Nul doute que l'esprit torturé et extravagant de Kevin Barnes nous réserve d'autres chefs d'œuvre.
Sur Skeletal Lamping, Of Montreal dynamite son écriture en poussant cette variété au maximum. L'heure de musique proposée est, sur CD, divisé en 15 pistes. Mais le terme piste n'a aucun sens lorsqu'il s'agit d'évoquer cet album. Les paroles sont le seul élément permettant d'assurer un minimum de cohérence sur chaque piste. Musicalement, impossible de diviser l'album de la sorte. Kevin Barnes s'est inspiré d'une technique de chasse consistant à bruler une forêt, afin de faire sortir tous les animaux de celle-ci et de les abattre sans prendre le temps de choisir sa cible. L'écriture suit cette méthode. Le leader du groupe semble avoir ouvert ses entrailles, déversé toute la musique qu'il a en lui, sans prendre le temps d'effectuer une sélection, de choisir et travailler ses morceaux. 15 pistes donc, mais au moins une quarantaine de thèmes musicaux, dont la durée varie de 20 secondes à 3 minutes. Cette écriture gargantuesque a de quoi laisser pantois, et rendre l'écoute complexe. Mais ce n'est pas tout ! Le groupe ne s'encombre pas de transitions travaillées, pour donner un semblant de cohérence à son œuvre. Le passage d'une mélodie à une autre semble se faire à la hache, de façon très maladroite. En découle une écoute passionnante, où les surprises s'enchaînent à un rythme effréné.
Cette avalanche de thèmes musicaux a de quoi désarçonner. Dans le pire des cas, on la considèrera comme une logorrhée musicale, d'un groupe ayant perdu toue notion d'accessibilité. Mais pour ceux qui seront réceptifs, l'écoute de Skeletal Lamping a tout d'un couloir aux merveilles.
Les sonorités utilisées sont les mêmes que sur Hissing Fauna Are You The Destroyer?. En clair, attendez vous à une avalanche de guitares funky ou stridentes, de beats acides, de rythmes syncopés et sourds, et surtout de voix aiguës, efféminées, nasillardes et précieuse à l'extrême. Quant aux genres utilises, on a le droit à vraiment de tout: du disco-funk, de l'electro, de la folk, de la pop, du shoegazing et la plupart du temps, des bizarreries electro-psychées acides. Le groupe a un son unique. L'association de ces sonorités avec des registres variés fait naître des émotions rares. En un instant, on peut passer de l'écoute d'un morceau de pop légère à une expérimentation malsaine. Malsain, le mot est lâché. Cette association entre mélodies enjouées, étrangeté, musique dansante ou ambiante, le tout sur un rythme haletant avait pour but de faire entrevoir la complexité du cerveau humain. L'échec est patent pour Kevin Barnes. Car c'est bien sa psyché qui est exprimée sur ce disque. Son esprit hystérique est exposé, mélange de joie, mélancolie, fureur et surtout folie. On a vraiment l'impression d'entendre une personne touchée de démence, d'une joie irrépressible mais capable de devenir dangereuse pour les autres. Bref, on a en main un disque qui correspond vraiment à l'esthétique dionysiaque chère à Nietzche. Le disque procure une transe certaine, où s'entremêlent joie, euphorie, danger, fulgurance, efflorescence, destruction, irrégularité et démence. Par moments, l'écoute peut mettre vraiment mal à l'aise. Si les changements de mélodies ne facilitent pas l'écoute, cette démence, cet aspect malsain peut vraiment effrayer.
Difficile donc de retenir des morceaux en particulier, l'album s'écoute d'une traite. Mais après plusieurs écoutes, on se rend compte que quelques pistes sont plus travaillées que d'autres.
"Nonpareil Of Favor", par exemple, qui fait office d'introduction agressive. Après 2 minutes d'une ritournelle electro, le rythme s'emballe, devient haletant, soutenu à l'extrême. Mais mêlé à du bruit blanc en fond sonore, le miracle se produit et une mélodie naît.
Pas le temps de se reposer avant que "Wicked Wisdom" ne déboule. Ce morceau est une véritable montagne russe. En 5 minutes, autant de mélodies sont utilisées, et dans des registres complètement opposés. Il s'agit sûrement du morceau le plus représentatif de l'album.
"Gallery Piece" est elle aussi passionnante. Elle commence comme un tube funky, où Kevin Barnes semble crier son amour (‘I Wanna Write You A Book, I Wanna Dry Your Tears Whenever You Are Sad, I Wanna Be Your Only Friend'), mais en basculant dans un passage ambient, on se rend compte que ce morceau est plus complexe. Et en le réécoutant, on découvre d'autres paroles bien plus malsaines (‘I Wanna Scratch Your Chick, I Wanna Crash Your Car') chantés d'une voix bien trop enjouée pour être bêtement heureuse. Kevin Barnes semble littéralement ivre de bonheur, et ses derniers restes de raisons semblent prêts à disparaitre.
L'odyssée de 7 minutes "Plastic Wafers", ou les changements de rythme et les synthés nous font atteindre une sorte d'état second est elle aussi remarquable.
Voilà les morceaux qui m'ont le plus marqué. Mais chacun retiendra ce qui le touche le plus. Cet album est gargantuesque, la créativité est ahurissante et à de quoi donner le tournis. Difficile d'y revenir sans l'écouter en entier.
Enfin, comment ne pas évoquer les textes ? Kevin Barnes continue de nous exposer ses obsessions, et sur ses paroles drôlatres et décalés, il évoque le sexe, le couple, la fidélité, la rupture, la solitude mais aussi le dégoût face à la politique. Mais tous cela sous des aspects absurdes et hallucinés, bien sûr.
Skeletal Lamping est donc l'œuvre ahurissante d'un groupe vraiment unique, qui persiste et signe dans l'excellence et a quasiment oublié toute forme de conformisme. En utilisant des sonorités modernes et hype, le groupe a crée une œuvre labyrinthique, dionysiaque où s'exprime toute la folie de son créateur. Assurément, peu de disques atteindront cette excellence cette année. Of Montreal continue son odyssée musicale, parsemée de fulgurances et d'une créativité débordante. Nul doute que l'esprit torturé et extravagant de Kevin Barnes nous réserve d'autres chefs d'œuvre.
Exceptionnel ! ! 19/20 | par Vamos |
L'album est édité en 7 versions: au-delà des traditionnels vinyle (celui-là pèsera 180 grammes et inclura un poster géant) et cd, vous pourrez également vous offrir le disque avec, au choix, un tee-shirt, un sac en tissu, des boutons, une lanterne en papier, ou des décalcomanies.
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