Sigur Rós
Harvf / Heim |
Label :
EMI |
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En 2006, le groupe décide de faire une tournée dans son pays natal, l'Islande. Pas d'annonce, quasiment en catimini, une série de prestations gratuites, des lieux incongrus mais magiques comme une grotte, une usine, et surtout la place centrale de Reykjavik devant 20000 personnes. Des concerts en hommage à une nation qui les a poussé mais dont les mystères et la beauté virginale rappellent le groupe à ses sources d'inspirations.
Car le contenu chatoyant et majestueux de la musique de Sigur Ros ne trouve pas son influence dans le désir de se répandre, de s'envoler ou de s'exporter, mais plutôt dans ce regard admiratif pour les éléments qui dépassent de loin la nature humaine.
A la suite de cet événement, un étrange documentaire en DVD sortira, suivi de près par un double EP Harvf / Heim, dont la pochette réversible, aux sublimes impressions à la fois froides et chaudes, sera une nouvelle fois d'une finesse inouïe.
Rassemblant quelques extraits de ces lives dépouillées, l'album coupé en deux permet de se lover dans une douce et accueillante berceuse évasive. Loin des tumultes habituels, sans guitares électriques ou archet usité en live, Sigur Ros se livre, se dévoile presque, dans une nudité sans égale. Sans doute est-ce pour cela que le groupe a choisi d'éliminer toute traces d'applaudissements ou de clameurs, dans le but de créer un cocon. Beaucoup plus léchées et raisonnables, les chansons magnifiques de lyrisme tranquille et évasif prennent une tournure sèche, sobre et fragile. Soutenus par des touches fluides de piano ou des nappes de violons, les titres s'enveloppent dans un lyrisme délicat qui fait rêver, à l'image de cette voix de fausset, issue plus de la tête, des vagabondages poétiques que de la poitrine et des émotions viscérales, chantant dans une langue inconnue ou en islandais, à la manière d'un doux illuminé. Apparaissant dans un jour plus vulnérable et apaisé, Sigur Ros se livre sans fard et sans épate. Les plages sont éblouissantes de grâce, sans virer vers la tempête, tout en conservant cette dimension intense, vaporeuse et nuageuse. Il est rare qu'un groupe façonne une musique qui colle au plus près de la géologie du pays qui les a vu naître.
Il était donc logique de retrouver dans le second EP, regroupant des inédits ou des versions différentes de titres déjà existant, ce même état d'esprit de modestie. Une beauté plus rentrée et en dedans, presque timide, sensation assez discordante avec l'idée d'une musique qui se meut vers des climax de plus en plus intenses. Mais les violons, les 'youhou' ou les 'itou' de rigueur, les arpèges à la guitare ne serviront qu'à emmener les mélodies célestes vers des sommets d'étendue, avec gerbe instrumentale et geyser monumental. Répétitions subtiles, bercées par des slides lointains ou des éclats cristallins, qui finissent par s'ouvrir comme des fleurs, glisser comme le Gulf Stream sur les collines recouvertes de toundra ou s'épancher comme des coulées basaltiques. Et les apogées sonores, presque naturelles, n'abrutissent pas, elles élèvent, elles subliment. Profondément absconses, ne serait-ce que par cette indéfinition sexuelle, ce marasme linguistique, ces psalmodies en onomatopées, les chansons de Sigur Ros restent pour autant d'une magie extrêmement fascinante.
Quand bien même elles ne trouvent pas de géniteurs, hormis les miracles de la nature ou des elfes, elles ont bien des enfants, tous ces auditeurs captivés prêts à se damner pour pareille beauté. Idéale bande son pour chercher à s'endormir et à s'évader oniriquement, ce double album, qui ne se répète pas, mais livre les deux facettes d'une même démarche, ne cherche en aucun cas à imposer une violence. A tel point que l'opus se fait plus volatil, presque intimiste, malgré ses envies de grandeurs et d'étendues. Le chanteur a beau s'égosiller, les violons tirer vers le sensible, les instruments s'additionner, la musique, en même temps de gagner en profondeur, gagne en tristesse et mélancolie. Une démonstration élégiaque qui touche en plein cœur, à condition de n'avoir pas l'esprit, et le cœur, fermés.
Un miracle qui n'a aucun équivalent sur Terre.
Car le contenu chatoyant et majestueux de la musique de Sigur Ros ne trouve pas son influence dans le désir de se répandre, de s'envoler ou de s'exporter, mais plutôt dans ce regard admiratif pour les éléments qui dépassent de loin la nature humaine.
A la suite de cet événement, un étrange documentaire en DVD sortira, suivi de près par un double EP Harvf / Heim, dont la pochette réversible, aux sublimes impressions à la fois froides et chaudes, sera une nouvelle fois d'une finesse inouïe.
Rassemblant quelques extraits de ces lives dépouillées, l'album coupé en deux permet de se lover dans une douce et accueillante berceuse évasive. Loin des tumultes habituels, sans guitares électriques ou archet usité en live, Sigur Ros se livre, se dévoile presque, dans une nudité sans égale. Sans doute est-ce pour cela que le groupe a choisi d'éliminer toute traces d'applaudissements ou de clameurs, dans le but de créer un cocon. Beaucoup plus léchées et raisonnables, les chansons magnifiques de lyrisme tranquille et évasif prennent une tournure sèche, sobre et fragile. Soutenus par des touches fluides de piano ou des nappes de violons, les titres s'enveloppent dans un lyrisme délicat qui fait rêver, à l'image de cette voix de fausset, issue plus de la tête, des vagabondages poétiques que de la poitrine et des émotions viscérales, chantant dans une langue inconnue ou en islandais, à la manière d'un doux illuminé. Apparaissant dans un jour plus vulnérable et apaisé, Sigur Ros se livre sans fard et sans épate. Les plages sont éblouissantes de grâce, sans virer vers la tempête, tout en conservant cette dimension intense, vaporeuse et nuageuse. Il est rare qu'un groupe façonne une musique qui colle au plus près de la géologie du pays qui les a vu naître.
Il était donc logique de retrouver dans le second EP, regroupant des inédits ou des versions différentes de titres déjà existant, ce même état d'esprit de modestie. Une beauté plus rentrée et en dedans, presque timide, sensation assez discordante avec l'idée d'une musique qui se meut vers des climax de plus en plus intenses. Mais les violons, les 'youhou' ou les 'itou' de rigueur, les arpèges à la guitare ne serviront qu'à emmener les mélodies célestes vers des sommets d'étendue, avec gerbe instrumentale et geyser monumental. Répétitions subtiles, bercées par des slides lointains ou des éclats cristallins, qui finissent par s'ouvrir comme des fleurs, glisser comme le Gulf Stream sur les collines recouvertes de toundra ou s'épancher comme des coulées basaltiques. Et les apogées sonores, presque naturelles, n'abrutissent pas, elles élèvent, elles subliment. Profondément absconses, ne serait-ce que par cette indéfinition sexuelle, ce marasme linguistique, ces psalmodies en onomatopées, les chansons de Sigur Ros restent pour autant d'une magie extrêmement fascinante.
Quand bien même elles ne trouvent pas de géniteurs, hormis les miracles de la nature ou des elfes, elles ont bien des enfants, tous ces auditeurs captivés prêts à se damner pour pareille beauté. Idéale bande son pour chercher à s'endormir et à s'évader oniriquement, ce double album, qui ne se répète pas, mais livre les deux facettes d'une même démarche, ne cherche en aucun cas à imposer une violence. A tel point que l'opus se fait plus volatil, presque intimiste, malgré ses envies de grandeurs et d'étendues. Le chanteur a beau s'égosiller, les violons tirer vers le sensible, les instruments s'additionner, la musique, en même temps de gagner en profondeur, gagne en tristesse et mélancolie. Une démonstration élégiaque qui touche en plein cœur, à condition de n'avoir pas l'esprit, et le cœur, fermés.
Un miracle qui n'a aucun équivalent sur Terre.
Excellent ! 18/20 | par Vic |
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