Bonnie Prince Billy
Ask Forgiveness |
Label :
Drag City |
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Dans une discographie déjà immense, on aurait tendance à prendre à la légère un petit écart consacré à des reprises. Une oeuvre anecdotique ou une voie de garage à thème pour les rebuts d'une production incessante. Avec un type du talent de Will Oldham, c'est plus compliqué que ça. C'était déjà plus compliqué que ça avec Tortoise... Ask Forgiveness n'est pas non plus un supplément quelconque pour palier à une béance artistique, forcément. C'est une démonstration alternative de la puissance d'écriture de notre prolifique moustachu. En outre, de la capacité d'Oldham à s'approprier un matériau. Bien entendu, il n'est pas trop périlleux de reprendre les aînés qui l'ont aidé à forger son art du songwriting country-folk (Mickey Newbury, Phil Ochs, Sonny Throckmoront), surtout lorsqu'ils ne sont pas connu des moins érudits. C'est surtout avec les univers éloignés qu'il fait ses preuves. Il revoit la recette à sa sauce, avec très peu d'ingrédients (arrangements discrets), pétrie à sa pogne, et donne une toute autre dimension à des chansons qu'on pensait avoir suffisamment entendues. L'écouter s'approprier le "Am I Demon" de Danzig est une leçon en soi. Le texte renaît à nos émotions, passant du rock vulgaire standard à la pièce folk mystique. Au fond du champ sonore, sa traduction de la figure imposée du solo hard rock nous persuade de son habileter à convertir avec révérence.
Il est clair que pour Oldham, reprendre une chanson n'est pas un gadget, quand bien même la sélection de certains titres puisse surprendre. Et R. Kelly en prendrait presque pour son grade ! Car si le gratteux traite "The World's Greatest" avec tout autant de respect et d'amour, son travail sublime tellement l'egotrip du vocaliste par son traitement roots que l'arrangement R'N'B moderne de l'original en devient ironiquement ringard. Le folk vieillit bien mieux, et la saveur folk d'y ajouter de la tragédie... Logique similaire pour le "I've Seen It All" que Bjork avait composé pour Lars Von Trier, néanmoins sans dégât. Lui retirer l'originalité et la beauté de son orchestration electro-symphonique pour gagner cette intimité obscure, dans laquelle le prince chante un texte écrit pour deux, devenu conflit intérieur. D'ailleurs, le choix n'est peut être pas anodin : les huit titres de Ask Forgiveness sont aux reprises ce que les sept de Selma Songs était à la bande originale... un court album, mais à part entière. Et comme Selma Songs est tout aussi indispensable à Dancers In The Dark qu'à la discographie de Bjork...
Ces chansons plus transformées attirant l'attention de façon irrémédiable, il faudra cependant prendre garde à ne pas passer à côté des perles plus discrètes. "Cycles", l'un des vieux succès de Sinatra, est même un des meilleurs moments du disque. Et si vous faites bien attention, vous constaterez que le père Oldham a pensé a tout : la bonne idée de glisser une composition inédite en milieu de programme pour dynamiser ce petit recueil de rythmes modérés est encore une preuve qu'il sait ce qu'il fait...
Il est clair que pour Oldham, reprendre une chanson n'est pas un gadget, quand bien même la sélection de certains titres puisse surprendre. Et R. Kelly en prendrait presque pour son grade ! Car si le gratteux traite "The World's Greatest" avec tout autant de respect et d'amour, son travail sublime tellement l'egotrip du vocaliste par son traitement roots que l'arrangement R'N'B moderne de l'original en devient ironiquement ringard. Le folk vieillit bien mieux, et la saveur folk d'y ajouter de la tragédie... Logique similaire pour le "I've Seen It All" que Bjork avait composé pour Lars Von Trier, néanmoins sans dégât. Lui retirer l'originalité et la beauté de son orchestration electro-symphonique pour gagner cette intimité obscure, dans laquelle le prince chante un texte écrit pour deux, devenu conflit intérieur. D'ailleurs, le choix n'est peut être pas anodin : les huit titres de Ask Forgiveness sont aux reprises ce que les sept de Selma Songs était à la bande originale... un court album, mais à part entière. Et comme Selma Songs est tout aussi indispensable à Dancers In The Dark qu'à la discographie de Bjork...
Ces chansons plus transformées attirant l'attention de façon irrémédiable, il faudra cependant prendre garde à ne pas passer à côté des perles plus discrètes. "Cycles", l'un des vieux succès de Sinatra, est même un des meilleurs moments du disque. Et si vous faites bien attention, vous constaterez que le père Oldham a pensé a tout : la bonne idée de glisser une composition inédite en milieu de programme pour dynamiser ce petit recueil de rythmes modérés est encore une preuve qu'il sait ce qu'il fait...
Parfait 17/20 | par X_YoB |
Note du rédacteur : Paru la veille au Royaume-Uni, comme d'habitude, sur Domino.
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