Einstürzende Neubauten

Die Hamletmaschine

Die Hamletmaschine

 Label :     Potomak 
 Sortie :    lundi 21 février 1994 
 Format :  Bande Originale / CD   

Einstürzende Neubauten a toujours été bien plus qu'un simple groupe. Créateur, pionnier, chercheur, la volonté de déconstruire le son et de penser la musique différemment a toujours été un des leitmotivs du groupe.
En marge des activités musicales dites "classiques", Neubauten prête également son talent aux arts de la scène. Ainsi, en 1991, les cinq musiciens s'associent au dramaturge est-allemand Heiner Müller, qui les charge de composer la musique de sa première pièce : Die Hamletmaschine.
Le résultat sonore tient en une trentaine de minutes.
On a beau être familier de leurs expérimentations, ce long morceau a de quoi surprendre, dérouter, déboussoler. Déjà parce que si vous êtes, comme moi, dans l'incapacité totale de comprendre un mot d'allemand, le texte a toutes les chances de vous passer au-dessus de la tête. Reste une certaine musicalité du phrasé et de la langue, que l'on dit rude mais qui n'est néanmoins pas totalement dénuée de poésie. Après tout, le romantisme fut allemand avant d'être français.
Le texte est donc déclamé tout au long de ces trente minutes, principalement sous la forme d'un monologue. N'imaginez pas mettre cet album pour égayer vos soirées Monopoly, vous risqueriez de vous retrouver au stalag sans avoir le temps de passer par la case départ.
Non, l'idéal est encore la station allongée, dans la pénombre, seul face à l'œuvre. Là, il y a peut-être une chance de trouver du charme à cet album. Car la voix hypnotise, joue avec les langueurs et les sursauts d'énergie. Elle vous parle, et ce en dépit du fait que vous n'y entendiez rien, elle vous englobe. C'est là sa force : la conviction.
C'est sur ces déclamations que Neubauten vient poser ses bruitages et crissements divers. Inutile de rechercher ici une once de mélodie car rien n'est fait pour assurer le confort d'écoute. L'auditeur est bringuebalé entre des cassures de rythme bruitistes, des sons incongrus, inusités comme seuls ces Allemands savent en produire. Cela ne ressemble à rien de connu et l'on en vient même parfois à se demander si cela est fait pour être écouté. À l'origine, la réponse est sans doute "pas uniquement" : Le spectacle est censé être vivant, autant visuel que sonore, et ce seul enregistrement ne saurait être suffisant pour se faire un avis objectif et définitif quant à la véritable valeur du projet. A fortiori lorsque l'on n'est pas bilingue.
Reste que ce concept est ici, entre nos oreilles, et qu'il faut mettre sa frilosité de côté pour apprécier, ou supporter c'est selon, son écoute. Une demi-heure, ça peut sembler peu, mais uniquement dans la langue de Goethe et avec pour seuls repères des bruits de tôles ondulées, de râpe à fromages et de tuyaux métalliques divers et variés recyclés en improbables instruments, c'est bien suffisant !
Je ne tiendrais donc pas compte de mon ignorance totale de la langue allemande pour arrêter mon avis sur ce Die Hamletmaschine, préférant me laisser malmener par l'apparente incohérence de la musique, puisqu'il faut bien se résoudre à nommer ainsi cet assemblage disparate de sons, et considérer cet enregistrement comme un effort artistique indéniable, obscur mais plaisant à celui qui fera l'effort de l'écouter.
Sûrement pas l'album à recommander pour découvrir les Neubauten, mais à posséder absolument pour ceux qui suivent de près leur très prolifique carrière.


Sympa   14/20
par Arno Vice


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