The Smiths
Meat Is Murder |
Label :
Virgin |
||||
1985: un jour d'orage, me voici qui vient au monde après avoir patienté tranquillement pendant un hiver de merde [mode "Je cite ma mère" on]... Un peu comme 'Meat Is Murder' des Smiths qui a été façonné pendant tout l'hiver 1984 à Liverpool... "Tout était morne et glacial, la neige était pesante, les jours sombres, l'album s'en ressent" [mode "Je cite Morrissey" on]
Et effectivement, oui, c'est un album sombre, y'a qu'à écouter le chant tyrolien de Morrissey sur "Headmaster Ritual" pour être tout retourné... Ce disque n'est qu'émotion, Johnny Marr n'a jamais joué une musique aussi triste, la basse lourde et plaintive nous repousse dans les limites du supportable: en gros, le plus bel écrin pour la voix de Morrissey... Sur "Rusholme Ruffians", on n'en peut plus... Le refrain de "I Want The One I Can't Have" est magnifique de tristesse, cette façon empressée de chanter montre que Morrissey est animé d'un sentiment d'urgence irrationnelle poussé par les éclairs de Marr dessine avec sa guitare...
Sur le très rock "What She Said", on appréciera encore une fois la prestation de Morrissey avant la ballade "That Joke Isn't Funny Anymore"... C'est exactement ce que j'ai envie de dire à ce moment du disque... 'I've seen it happen in other people's lives And now it's happening in mine' chanté à l'infini par Morrissey avant un douloureux feedback instrumental qui précède le mystique 'How Soon Is Now', sept minutes de ouf où la guitare de Johnny se fait dure, va chercher des effets de malade soutenu par une rythmique impitoyable sur de longues plages instrumentales entrecoupées par les vers de Morrissey dépeignant une certaine misère affective "I am Human and I need to be loved"... Derrière ces deux morceaux emplis de tristesse, "Nowhere Fast" remet presque de bonne humeur et nous permet de retrouver un Morrissey plus speed, une basse plus groovy... J'entends des chevaux galoper sur ce morceau avant que le soufflet ne retombe avec la rythmique lourde de "Well I Wonder" (ah, cette ligne de basse entre le chant de Morissey...) où la solitude mise en musique. J'apprécie particulièrement ce petit sample de l'eau qui coule... Avant les deux chefs-d'oeuvre absolus des Smiths: "Barbarism Begins At Home" où les aboiements de Morissey témoignent d'une enfance douloureuse et d'une barbarie domestique quotidienne... Un final presque disco nous montre la voie de l'espoir en redessinant le sourire sur mon visage... Et encore une fois,le soufflet retombe sur la chanson-titre "Meat Is Murder"... Ca commence par une vache qui fait 'meuh...', ça continue par une mélodie plaintive sur laquelle se pose la voix de Morissey, le végétarien qui défend sa cause et ça finit par une vache qui fait 'meuh...'...
Bref, un album primordial pour qui sait qu'il faut quotidiennement 20 minutes de fou rire...
La critique est facile, je sais, l'art est difficile, en tout cas, cet album marque un pas de plus pour les Smiths qui s'appretent à sortir l'année d'après leur album le plus fabuleux: The Queen Is Dead...
Le mot de la fin pour les Inrocks: "Difficile de saisir tout à fait l'importance des Smiths si on n'a pas vécu en direct ce moment", "Ceux qui ricanent aujourd'hui le font peut-être par jalousie d'être né trop tôt ou trop tard pour avoir assisté à une telle éclosion".
Et effectivement, oui, c'est un album sombre, y'a qu'à écouter le chant tyrolien de Morrissey sur "Headmaster Ritual" pour être tout retourné... Ce disque n'est qu'émotion, Johnny Marr n'a jamais joué une musique aussi triste, la basse lourde et plaintive nous repousse dans les limites du supportable: en gros, le plus bel écrin pour la voix de Morrissey... Sur "Rusholme Ruffians", on n'en peut plus... Le refrain de "I Want The One I Can't Have" est magnifique de tristesse, cette façon empressée de chanter montre que Morrissey est animé d'un sentiment d'urgence irrationnelle poussé par les éclairs de Marr dessine avec sa guitare...
Sur le très rock "What She Said", on appréciera encore une fois la prestation de Morrissey avant la ballade "That Joke Isn't Funny Anymore"... C'est exactement ce que j'ai envie de dire à ce moment du disque... 'I've seen it happen in other people's lives And now it's happening in mine' chanté à l'infini par Morrissey avant un douloureux feedback instrumental qui précède le mystique 'How Soon Is Now', sept minutes de ouf où la guitare de Johnny se fait dure, va chercher des effets de malade soutenu par une rythmique impitoyable sur de longues plages instrumentales entrecoupées par les vers de Morrissey dépeignant une certaine misère affective "I am Human and I need to be loved"... Derrière ces deux morceaux emplis de tristesse, "Nowhere Fast" remet presque de bonne humeur et nous permet de retrouver un Morrissey plus speed, une basse plus groovy... J'entends des chevaux galoper sur ce morceau avant que le soufflet ne retombe avec la rythmique lourde de "Well I Wonder" (ah, cette ligne de basse entre le chant de Morissey...) où la solitude mise en musique. J'apprécie particulièrement ce petit sample de l'eau qui coule... Avant les deux chefs-d'oeuvre absolus des Smiths: "Barbarism Begins At Home" où les aboiements de Morissey témoignent d'une enfance douloureuse et d'une barbarie domestique quotidienne... Un final presque disco nous montre la voie de l'espoir en redessinant le sourire sur mon visage... Et encore une fois,le soufflet retombe sur la chanson-titre "Meat Is Murder"... Ca commence par une vache qui fait 'meuh...', ça continue par une mélodie plaintive sur laquelle se pose la voix de Morissey, le végétarien qui défend sa cause et ça finit par une vache qui fait 'meuh...'...
Bref, un album primordial pour qui sait qu'il faut quotidiennement 20 minutes de fou rire...
La critique est facile, je sais, l'art est difficile, en tout cas, cet album marque un pas de plus pour les Smiths qui s'appretent à sortir l'année d'après leur album le plus fabuleux: The Queen Is Dead...
Le mot de la fin pour les Inrocks: "Difficile de saisir tout à fait l'importance des Smiths si on n'a pas vécu en direct ce moment", "Ceux qui ricanent aujourd'hui le font peut-être par jalousie d'être né trop tôt ou trop tard pour avoir assisté à une telle éclosion".
Sympa 14/20 | par Takichan |
Posté le 14 novembre 2006 à 20 h 38 |
S'attaquer à une critique d'un des groupes incontournables de la pop anglaise, c'est un peu comme parler d'un match de l'équipe de l'Angleterre avant une phase de coupe du monde, c'est ardu, délicat et passionnant à la fois. On ne sait pas trop comment juger...
Meat Is Murder est un album engagé, il suffit de voir la pochette de l'album ou encore le titre, c'est déjà une piste sur le contenu de cet album intense, parfois lyrique, parfois onirique et surtout percutant.
Même si on atteint pas le sublime comme sur The Queen Is Dead, Meat Is Murder surprend et séduit par la qualité du jeu de guitare, les lignes de basse, et bien sûr la voix du Moz.
On peut considérer Meat Is Murder comme un essai littéraire q'on aurait traduit en musique.
Pourquoi ? Parce que cet album se laisse prendre peu à peu, on rentre pas à pas dans cet univers mancunien qui ne ressemble qu'aux personnalités envoûtantes de ces quatre musiciens.
Meat Is Murder est l'album le plus personnel du groupe, pas le plus abouti, mais le plus surprenant, le plus éclectique par son atmosphère si particulière.
Des titres comme "That Joke Isn't Funny Anymore", "Well I Wonder" ou "How Soon Is Now" montrent l'ampleur de la créativité de ce groupe, prêt à partir dans toutes les directions et tous les plaisirs. Là ou le romantisme dominait dans The Queen Is Dead, ici on est davantage dans l'introspection, l'hédonisme.
Un grand disque d'une formation majeur.
Meat Is Murder est un album engagé, il suffit de voir la pochette de l'album ou encore le titre, c'est déjà une piste sur le contenu de cet album intense, parfois lyrique, parfois onirique et surtout percutant.
Même si on atteint pas le sublime comme sur The Queen Is Dead, Meat Is Murder surprend et séduit par la qualité du jeu de guitare, les lignes de basse, et bien sûr la voix du Moz.
On peut considérer Meat Is Murder comme un essai littéraire q'on aurait traduit en musique.
Pourquoi ? Parce que cet album se laisse prendre peu à peu, on rentre pas à pas dans cet univers mancunien qui ne ressemble qu'aux personnalités envoûtantes de ces quatre musiciens.
Meat Is Murder est l'album le plus personnel du groupe, pas le plus abouti, mais le plus surprenant, le plus éclectique par son atmosphère si particulière.
Des titres comme "That Joke Isn't Funny Anymore", "Well I Wonder" ou "How Soon Is Now" montrent l'ampleur de la créativité de ce groupe, prêt à partir dans toutes les directions et tous les plaisirs. Là ou le romantisme dominait dans The Queen Is Dead, ici on est davantage dans l'introspection, l'hédonisme.
Un grand disque d'une formation majeur.
Très bon 16/20
Posté le 09 février 2008 à 06 h 56 |
Meat Is Murder est sans conteste le meilleur album – devant The Queen Is Dead – de The Smiths. Il est à la fois plus homogène, plus abouti, plus riche, et tout assez varié. Il ne présente aucun moment de faiblesse – aucun morceau et même aucune seconde – mais atteint toujours, en permanence, des sommets inégalés de génie.
La production de Stephen Street (il écrira le premier album solo de Morrissey, sur lequel il jouera des guitares et la basse) est parfaitement équilibrée, même si le son a un peu vieilli.
"The Headmaster Ritual" est une évocation, très certainement autobiographique (il y est d'ailleurs question de Manchester), du système scolaire britannique, qui n'est pas franchement réputé pour favoriser l'épanouissement de ses élèves. La composition et les guitares de Johnny Marr sont brillantes, parfaites.
"Rusholme Ruffians" montre un autre visage du groupe, un rythme country-folk, une basse chaloupée, une guitare acoustique omniprésente qui s'acharne. Les paroles sont le reflet de la fascination de Morrissey pour les mauvais garçons fréquentant les fêtes foraines dans les années 60.
"I Want The One I Can't Have" accélère le rythme. Cette folle cavalcade sous fond d'incessantes notes de guitares qui tombent sous forme de pluies acides ou de flocons de neige cristallins – on ne dira jamais assez combien Johnny Marr est de très loin le meilleur guitariste de tous les temps, au moins dans ce registre – est bien entendu (le titre est suffisamment explicite) une ode à la frustration, thème cher à notre chanteur.
"What She Said" est tout aussi rapide, mais dans un rythme différent, la mélodie est tout aussi sublime, le chant de Morrissey est encore plus superbe. Les paroles sont une preuve supplémentaire de l'humour corrosif, décalé, so british, noir voire macabre de Morrissey :
"What she said :
"How come someone hasn't noticed
That I'm dead
And decided to bury me?
God knows, I'm ready!"
La-la-la..."
"That Joke Isn't Funny Anymore" est une magnifique ballade où Morrissey dénonce, de manière là encore très certainement autobiographique (il dit d'ailleurs "I've seen this happen in other people's lives/And now it's happening in mine "), les moqueries que pourraient subir les gens malheureux.
"Nowhere Fast", peut-être le meilleur morceau de l'album, hausse à nouveau la cadence, le rythme est presque rockabilly. Une fois de plus – mais c'est valable pour tous les morceaux – les guitares de Johnny Marr sont impressionnantes par leur complexité infinie mais parfaitement maîtrisée et surtout par les émotions qu'elles dégagent. Les paroles contiennent un clin d'œil à The Queen Is Dead montrant l'humour si particulier de Morrissey ("I'd like to drop my trousers to the Queen/Every sensible child will know what this means").
"Well I Wonder", un morceau mid-tempo, est un chef-d'œuvre de plus de mélancolie et de sensibilité. Les paroles, comme souvent chez Morrissey, sont plaintives et narcissiques, ce qui peut en agacer plus d'un (moi y compris), tout comme sa voix si particulière mais si insupportable pour certains.
"Barbarism Begins At Home" brouille les pistes car, contrairement à ce que son titre peut laisser présager, il ne s'agit aucunement d'une diatribe contre les violences conjugales. C'est un des morceaux les plus connus de l'album, et pourtant celui que j'aime le moins, même s'il demeure de très haut niveau. Chose inhabituelle, la basse est presque funk, presque slappée, et l'une des guitares aussi.
Le morceau-titre, "Meat Is Murder", est assurément un manifeste végétarien ("This beautiful creature must die/A death for no reason/And death for no reason is murder") et commence par des cris d'animaux et des bruits industriels. Fait peu coutumier, les guitares sont accompagnées par un piano. C'est un titre que l'on pourra trouver poignant ou pathétique, c'est selon. Pour ma part, bien que n'étant pas acquis à la cause végétarienne – et même carnassier invétéré –, je trouve qu'on ne peut qu'être ému par autant de sensibilité et de sincérité, et se mettre à réfléchir au sort des animaux.
Meat Is Murder est l'un des plus grands chefs-d'œuvres des années 80 mais aussi de la pop britannique toutes époques confondues.
La production de Stephen Street (il écrira le premier album solo de Morrissey, sur lequel il jouera des guitares et la basse) est parfaitement équilibrée, même si le son a un peu vieilli.
"The Headmaster Ritual" est une évocation, très certainement autobiographique (il y est d'ailleurs question de Manchester), du système scolaire britannique, qui n'est pas franchement réputé pour favoriser l'épanouissement de ses élèves. La composition et les guitares de Johnny Marr sont brillantes, parfaites.
"Rusholme Ruffians" montre un autre visage du groupe, un rythme country-folk, une basse chaloupée, une guitare acoustique omniprésente qui s'acharne. Les paroles sont le reflet de la fascination de Morrissey pour les mauvais garçons fréquentant les fêtes foraines dans les années 60.
"I Want The One I Can't Have" accélère le rythme. Cette folle cavalcade sous fond d'incessantes notes de guitares qui tombent sous forme de pluies acides ou de flocons de neige cristallins – on ne dira jamais assez combien Johnny Marr est de très loin le meilleur guitariste de tous les temps, au moins dans ce registre – est bien entendu (le titre est suffisamment explicite) une ode à la frustration, thème cher à notre chanteur.
"What She Said" est tout aussi rapide, mais dans un rythme différent, la mélodie est tout aussi sublime, le chant de Morrissey est encore plus superbe. Les paroles sont une preuve supplémentaire de l'humour corrosif, décalé, so british, noir voire macabre de Morrissey :
"What she said :
"How come someone hasn't noticed
That I'm dead
And decided to bury me?
God knows, I'm ready!"
La-la-la..."
"That Joke Isn't Funny Anymore" est une magnifique ballade où Morrissey dénonce, de manière là encore très certainement autobiographique (il dit d'ailleurs "I've seen this happen in other people's lives/And now it's happening in mine "), les moqueries que pourraient subir les gens malheureux.
"Nowhere Fast", peut-être le meilleur morceau de l'album, hausse à nouveau la cadence, le rythme est presque rockabilly. Une fois de plus – mais c'est valable pour tous les morceaux – les guitares de Johnny Marr sont impressionnantes par leur complexité infinie mais parfaitement maîtrisée et surtout par les émotions qu'elles dégagent. Les paroles contiennent un clin d'œil à The Queen Is Dead montrant l'humour si particulier de Morrissey ("I'd like to drop my trousers to the Queen/Every sensible child will know what this means").
"Well I Wonder", un morceau mid-tempo, est un chef-d'œuvre de plus de mélancolie et de sensibilité. Les paroles, comme souvent chez Morrissey, sont plaintives et narcissiques, ce qui peut en agacer plus d'un (moi y compris), tout comme sa voix si particulière mais si insupportable pour certains.
"Barbarism Begins At Home" brouille les pistes car, contrairement à ce que son titre peut laisser présager, il ne s'agit aucunement d'une diatribe contre les violences conjugales. C'est un des morceaux les plus connus de l'album, et pourtant celui que j'aime le moins, même s'il demeure de très haut niveau. Chose inhabituelle, la basse est presque funk, presque slappée, et l'une des guitares aussi.
Le morceau-titre, "Meat Is Murder", est assurément un manifeste végétarien ("This beautiful creature must die/A death for no reason/And death for no reason is murder") et commence par des cris d'animaux et des bruits industriels. Fait peu coutumier, les guitares sont accompagnées par un piano. C'est un titre que l'on pourra trouver poignant ou pathétique, c'est selon. Pour ma part, bien que n'étant pas acquis à la cause végétarienne – et même carnassier invétéré –, je trouve qu'on ne peut qu'être ému par autant de sensibilité et de sincérité, et se mettre à réfléchir au sort des animaux.
Meat Is Murder est l'un des plus grands chefs-d'œuvres des années 80 mais aussi de la pop britannique toutes époques confondues.
Intemporel ! ! ! 20/20
Posté le 16 juillet 2013 à 16 h 39 |
Attention cette chronique va parler d'amour, d'éducation, de musique... et de viande.
Car le bœuf, comme on nous le répète souvent, c'est le goût d'être ensemble, tout comme l'amour de la musique qui nous lie tous, peu importe notre éducation.
C'est dans cet état d'esprit que nous allons chroniquer maintenant un album sorti en 1985 (oui Marty ! En 1985 !). Meat Is Murder, un manifeste pour la différence autant que l'individualité, et une certaine idée du végétarisme (ou du végétalisme, il y a tellement de nuances et je ne connais pas le régime exact du Morrissey). Je n'aime pas trop utiliser le "je" dans les chroniques, mais pour celle-ci (comme peut être pour d'autres), cela me paraît inévitable. En effet, j'ai toujours ressenti une certaine culpabilité quand se termine "Meat Is Murder" (le titre final) : que ce soit manger un steak tartare chez les prout-prout de la Brasserie Lipp ou dans une bonne adresse bordelaise, ou contraint d'avaler un steak eco+ quand les fins (ou débuts) de mois sont difficiles (justement si j'ai mangé un steak tartare chez Lipp), j'aime la viande. Et j'aime The Smiths. Il m'est autant difficile d'en laisser un pour l'autre. Ne suis-je donc pas un vrai fan des Smiths ?
Que de questions ! Mais passons à la musique. Nous avons là un classique, évidemment. Rien que l'intro de "The Headmaster Ritual" montre que les anglais (en général, mais en particulier les Smiths) sont les maîtres de la mélodie pop, claire, évidente. Un français ou un américain pourra toujours essayer, ce ne sera la même chose (attention, il y a des talents partout). Bref, c'est un morceau qui démarre très fort et qui est par la suite emporté par les arpèges magnifiques du Dieu Johnny Marr, habillant légèrement malgré ses multiples couches, les textes durs de Morrissey. Et puis les deux autres, parlons-en des deux autres : Andy Rourke (basse) et Mike Joyce (batterie ; et non pas Mickey Rourke et Andy Joyce). Leur travail est exemplaire sur ce disque. Les lignes de basse sont précises autant que nerveuses, et les parties de batterie sont toujours justes. Dommage que le temps et les deux autres les aient effacés ces gars-là (je n'ai pas leur poster dans ma chambre non plus, mais l'efficacité des Smiths leur doit beaucoup). Ce premier morceau est une belle entrée avant le plat de résistance, où les parties et les morceaux les plus nobles sont découpés avec amour (imaginez votre boucher favori découper un bien beau morceau de charolais). Les Smiths accrochent sur leurs esses 10 morceaux tous indispensables et goûteux (sauf peut-être "How Soon Is Now ?", un peu trop copieux, trop long quoi...). Les quatre morceaux du début rentrent dans le lard comme un bovin énervé (la crise du début des années 80, le Thatchérisme, la musique de merde... pourquoi n'avons-nous pas eu un disque français digne de ça pendant les années Sarko ?), Morrissey s'en prend à l'éducation, à la politique, se révolte contre son propre désespoir en envoyant tout le monde paître ailleurs. Les textes ("What She Said", par exemple) montrent des tranches de vie dégoulinantes d'amertume et de pessimisme. Si Morrissey auparavant tentait de sublimer le réel, il est plus direct ici et est bien décidé à chasser le gras. "That Joke Isn't Funny Anymore" clôt de manière plus douce cette première face (dans le tempo seulement) mais on reste bel et bien là dans l'enclos d'une génération désenchantée (ça y est ma référence pourrie est placée).
La deuxième face débute par "How Soon Is Now ?", découvert par des hordes d'adolescentes grâce à la série Charmed et qui ne seront jamais allées plus loin ( ah, si, il y a bien eu une reprise du duo electro pop ado lesbien russe TATU, poduit par Trevor Horn !). Le texte peut être autant interprété comme une revendication homosexuelle de Morrissey qu'un hymne à tous les laissés pour compte de l'amour. Ce n'est que personnel mais c'est le seul morceau un peu too much du disque. "Nowhere Fast" remet les pendules à l'heure et fonce à l'allure d'un train qui défile trop vite pour les moutons et les bœufs qui broutent paisiblement dans la lande. Toujours mélodieux, désespéré et adolescent, un excellent morceau suivi par deux autres tout aussi majestueux et qui correspondent pour moi au temps fort du disque. Sur "Well I Wonder", on imagine une cité portuaire anglaise battue par la pluie et minée par la grisaille. Les notes qui finissent ce titre sont magiques, une des plus belles expressions de la mélancolie. "Barbarism Begins At Home" est une tuerie, mon morceau préféré des Smiths et au-delà, avec son rythme disco, ses guitares hâchées, ses motifs ultra mélodiques et cette voix de Morrissey qui part complètement en roue libre, avec un texte sur l'éducation (à la maison cette fois-ci, tandis que Morrissey s'attaquait à l'école dans le morceau d'ouverture) qui ferait réfléchir toute une génération de parents et de professeurs.
Arrive enfin le morceau polémique pour moi, "Meat Is Murder". Quand on est "Meat Is Butcher" ou "Meat Is Burger", ça devient compliqué. Pourtant, une partie de moi souhaiterait être végétarienne (je ne vais pas raconter ma vie car tout le monde s'en bat les steaks)... "This beautiful creature must die" se plaint la reine de Manchester. On imagine facilement un bœuf avec des yeux mignons implorant pitié. La culpabilité vous ronge (en tous cas le texte y aide). Les bruits d'abattoir renforcent cette impression que la vache qui rit ne va plus le faire très longtemps... Les chœurs trafiqués augmentent cette sensation de malaise. OK, mais quand je me retrouve face à un steak de soja, ou un truc supposé être bon pour le corps mais qui ne l'est pas quand vous le mangez, mon désespoir est le même que décrit dans ce morceau. (Ne vous inquiétez pas, je mange des fruits et des légumes aussi, et la viande ne constitue pas ma seule nourriture).
Au final, Morrissey tourne le dos (tournedos, ah, ah, ah...) à l'étiquette bien pensante anglaise, fait la nique aux préjugés, et les Smiths nous délivrent un album essentiel, tant de son époque que dans le rock indie en général. Nerveux, fort et sublime, un indispensable.
Car le bœuf, comme on nous le répète souvent, c'est le goût d'être ensemble, tout comme l'amour de la musique qui nous lie tous, peu importe notre éducation.
C'est dans cet état d'esprit que nous allons chroniquer maintenant un album sorti en 1985 (oui Marty ! En 1985 !). Meat Is Murder, un manifeste pour la différence autant que l'individualité, et une certaine idée du végétarisme (ou du végétalisme, il y a tellement de nuances et je ne connais pas le régime exact du Morrissey). Je n'aime pas trop utiliser le "je" dans les chroniques, mais pour celle-ci (comme peut être pour d'autres), cela me paraît inévitable. En effet, j'ai toujours ressenti une certaine culpabilité quand se termine "Meat Is Murder" (le titre final) : que ce soit manger un steak tartare chez les prout-prout de la Brasserie Lipp ou dans une bonne adresse bordelaise, ou contraint d'avaler un steak eco+ quand les fins (ou débuts) de mois sont difficiles (justement si j'ai mangé un steak tartare chez Lipp), j'aime la viande. Et j'aime The Smiths. Il m'est autant difficile d'en laisser un pour l'autre. Ne suis-je donc pas un vrai fan des Smiths ?
Que de questions ! Mais passons à la musique. Nous avons là un classique, évidemment. Rien que l'intro de "The Headmaster Ritual" montre que les anglais (en général, mais en particulier les Smiths) sont les maîtres de la mélodie pop, claire, évidente. Un français ou un américain pourra toujours essayer, ce ne sera la même chose (attention, il y a des talents partout). Bref, c'est un morceau qui démarre très fort et qui est par la suite emporté par les arpèges magnifiques du Dieu Johnny Marr, habillant légèrement malgré ses multiples couches, les textes durs de Morrissey. Et puis les deux autres, parlons-en des deux autres : Andy Rourke (basse) et Mike Joyce (batterie ; et non pas Mickey Rourke et Andy Joyce). Leur travail est exemplaire sur ce disque. Les lignes de basse sont précises autant que nerveuses, et les parties de batterie sont toujours justes. Dommage que le temps et les deux autres les aient effacés ces gars-là (je n'ai pas leur poster dans ma chambre non plus, mais l'efficacité des Smiths leur doit beaucoup). Ce premier morceau est une belle entrée avant le plat de résistance, où les parties et les morceaux les plus nobles sont découpés avec amour (imaginez votre boucher favori découper un bien beau morceau de charolais). Les Smiths accrochent sur leurs esses 10 morceaux tous indispensables et goûteux (sauf peut-être "How Soon Is Now ?", un peu trop copieux, trop long quoi...). Les quatre morceaux du début rentrent dans le lard comme un bovin énervé (la crise du début des années 80, le Thatchérisme, la musique de merde... pourquoi n'avons-nous pas eu un disque français digne de ça pendant les années Sarko ?), Morrissey s'en prend à l'éducation, à la politique, se révolte contre son propre désespoir en envoyant tout le monde paître ailleurs. Les textes ("What She Said", par exemple) montrent des tranches de vie dégoulinantes d'amertume et de pessimisme. Si Morrissey auparavant tentait de sublimer le réel, il est plus direct ici et est bien décidé à chasser le gras. "That Joke Isn't Funny Anymore" clôt de manière plus douce cette première face (dans le tempo seulement) mais on reste bel et bien là dans l'enclos d'une génération désenchantée (ça y est ma référence pourrie est placée).
La deuxième face débute par "How Soon Is Now ?", découvert par des hordes d'adolescentes grâce à la série Charmed et qui ne seront jamais allées plus loin ( ah, si, il y a bien eu une reprise du duo electro pop ado lesbien russe TATU, poduit par Trevor Horn !). Le texte peut être autant interprété comme une revendication homosexuelle de Morrissey qu'un hymne à tous les laissés pour compte de l'amour. Ce n'est que personnel mais c'est le seul morceau un peu too much du disque. "Nowhere Fast" remet les pendules à l'heure et fonce à l'allure d'un train qui défile trop vite pour les moutons et les bœufs qui broutent paisiblement dans la lande. Toujours mélodieux, désespéré et adolescent, un excellent morceau suivi par deux autres tout aussi majestueux et qui correspondent pour moi au temps fort du disque. Sur "Well I Wonder", on imagine une cité portuaire anglaise battue par la pluie et minée par la grisaille. Les notes qui finissent ce titre sont magiques, une des plus belles expressions de la mélancolie. "Barbarism Begins At Home" est une tuerie, mon morceau préféré des Smiths et au-delà, avec son rythme disco, ses guitares hâchées, ses motifs ultra mélodiques et cette voix de Morrissey qui part complètement en roue libre, avec un texte sur l'éducation (à la maison cette fois-ci, tandis que Morrissey s'attaquait à l'école dans le morceau d'ouverture) qui ferait réfléchir toute une génération de parents et de professeurs.
Arrive enfin le morceau polémique pour moi, "Meat Is Murder". Quand on est "Meat Is Butcher" ou "Meat Is Burger", ça devient compliqué. Pourtant, une partie de moi souhaiterait être végétarienne (je ne vais pas raconter ma vie car tout le monde s'en bat les steaks)... "This beautiful creature must die" se plaint la reine de Manchester. On imagine facilement un bœuf avec des yeux mignons implorant pitié. La culpabilité vous ronge (en tous cas le texte y aide). Les bruits d'abattoir renforcent cette impression que la vache qui rit ne va plus le faire très longtemps... Les chœurs trafiqués augmentent cette sensation de malaise. OK, mais quand je me retrouve face à un steak de soja, ou un truc supposé être bon pour le corps mais qui ne l'est pas quand vous le mangez, mon désespoir est le même que décrit dans ce morceau. (Ne vous inquiétez pas, je mange des fruits et des légumes aussi, et la viande ne constitue pas ma seule nourriture).
Au final, Morrissey tourne le dos (tournedos, ah, ah, ah...) à l'étiquette bien pensante anglaise, fait la nique aux préjugés, et les Smiths nous délivrent un album essentiel, tant de son époque que dans le rock indie en général. Nerveux, fort et sublime, un indispensable.
Parfait 17/20
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