Soundgarden
Superunknown |
Label :
A&M |
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Jusqu'ici, Soundgarden était un hair band intégré malencontreusement à la vague grunge de Seattle, révolution oblige. Pourtant rien à voir avec le bruitisme bariolé des réels activistes du mouvement. Au delà du métal, du grunge ou de tout autre exercice de style auquel pourrait amener une étiquette, apparu cet album monumental.
Quoi qu'en disent les plus sceptiques, le rock se sera frayé un nouveau passage, avec pour débroussailleuse un Soundgarden possédé. Une heure et quart dans une jungle brûlante, on ne s'en remet forcément jamais. "Let Me Drown" est un anaconda résolu à vous serrer dans ses anneaux pour débuter la descente aux Enfers : on va vous digérer lentement. "My Wave" rugit un prémisse power-pop - parfois Motown - à la sauce disto. "Fell On Black Days" hurle à la lune un blues faussement sage. "Mailman" est un pachyderme inquiétant, dont on ne perçoit que le souffle lointain...
A mesure qu'elle progresse, cette arche de Noé à contre-emploi enfonce le clou du cercueil, enterre les feu-metal de Metallica, feu-hard de AC/DC et feu-groupes phares des 70's & 80's, que nous ne reverront probablement que dans de risibles revivals, ou par de médiocres fanatiques élitistes en mal d'un passé révolu (tout le monde à une centaine d'exemples à citer).
Définitivement heavy (ce qui définit le mieux le groupe), mais du point de vue "phoenix novateur sur-vitaminé", avec "Spoonman" pour plus féroce étendard : aviez-vous déjà entendu pareille danse tribale auparavant ? Et depuis ? Hum... Il est clair que ce territoire n'est pas en pente douce. Passant de la brume ambiante ("Limo Wreck" et "The Day I Tried To Live", tendus) au félin rock'n'roll ("Kickstand"), et au piège farceur (l'arabisant "Half", ambigu), rien n'est à jeter ici.
La guitare tranchante ou désaccordée a depuis fait des petits chez pas mal de monde souhaitant prendre du muscle (Deftones, au hasard...). Certainement l'un des seuls disques où le solo de guitare -aussi compliqué soit-il- ne se ressent pas comme excessif ou comme passage obligé du déroulement d'un morceau. Mais comment peut-on continuer à faire de la musique où la guitare ne fait que sweep-tapping-masturbation de manche à longueur de temps ?! Mort de chez mort. Et si la basse est plus discrète mais pas inoffensive (l'apocalyptique "4th Of July") ni abrutie ("Head Down", délire boisé), la batterie est une véritable flore grimpante sur tout ce qui s'écoute : judicieusement présente mais jamais envahissante, sur tous les plans, au plus pertinent. Majestueusement lourde. Mais le plus bel instrument étant la voix rageuse et soul de Cornell, habité des pieds à la tête (à mille lieux de ses performances singées dans Audioslave). Ici, le chant et d'une puissance phénoménale, à en décupler le potentiel de frisson de chacun de ces 16 titres déjà surhumains.
L'incontournable "Black Hole Sun" (sombre siamois du "Heart Shaped Box" de Nirvana ?) fut le guide éclaireur de cette bible épique sur une résurrection imaginaire du rock. Une encyclopédie de riffs cagneux, au service du futur hypothétique d'un grunge au sommet.
Superunknown marque au fer rouge la fin d'une époque hallucinante du rock.
Quoi qu'en disent les plus sceptiques, le rock se sera frayé un nouveau passage, avec pour débroussailleuse un Soundgarden possédé. Une heure et quart dans une jungle brûlante, on ne s'en remet forcément jamais. "Let Me Drown" est un anaconda résolu à vous serrer dans ses anneaux pour débuter la descente aux Enfers : on va vous digérer lentement. "My Wave" rugit un prémisse power-pop - parfois Motown - à la sauce disto. "Fell On Black Days" hurle à la lune un blues faussement sage. "Mailman" est un pachyderme inquiétant, dont on ne perçoit que le souffle lointain...
A mesure qu'elle progresse, cette arche de Noé à contre-emploi enfonce le clou du cercueil, enterre les feu-metal de Metallica, feu-hard de AC/DC et feu-groupes phares des 70's & 80's, que nous ne reverront probablement que dans de risibles revivals, ou par de médiocres fanatiques élitistes en mal d'un passé révolu (tout le monde à une centaine d'exemples à citer).
Définitivement heavy (ce qui définit le mieux le groupe), mais du point de vue "phoenix novateur sur-vitaminé", avec "Spoonman" pour plus féroce étendard : aviez-vous déjà entendu pareille danse tribale auparavant ? Et depuis ? Hum... Il est clair que ce territoire n'est pas en pente douce. Passant de la brume ambiante ("Limo Wreck" et "The Day I Tried To Live", tendus) au félin rock'n'roll ("Kickstand"), et au piège farceur (l'arabisant "Half", ambigu), rien n'est à jeter ici.
La guitare tranchante ou désaccordée a depuis fait des petits chez pas mal de monde souhaitant prendre du muscle (Deftones, au hasard...). Certainement l'un des seuls disques où le solo de guitare -aussi compliqué soit-il- ne se ressent pas comme excessif ou comme passage obligé du déroulement d'un morceau. Mais comment peut-on continuer à faire de la musique où la guitare ne fait que sweep-tapping-masturbation de manche à longueur de temps ?! Mort de chez mort. Et si la basse est plus discrète mais pas inoffensive (l'apocalyptique "4th Of July") ni abrutie ("Head Down", délire boisé), la batterie est une véritable flore grimpante sur tout ce qui s'écoute : judicieusement présente mais jamais envahissante, sur tous les plans, au plus pertinent. Majestueusement lourde. Mais le plus bel instrument étant la voix rageuse et soul de Cornell, habité des pieds à la tête (à mille lieux de ses performances singées dans Audioslave). Ici, le chant et d'une puissance phénoménale, à en décupler le potentiel de frisson de chacun de ces 16 titres déjà surhumains.
L'incontournable "Black Hole Sun" (sombre siamois du "Heart Shaped Box" de Nirvana ?) fut le guide éclaireur de cette bible épique sur une résurrection imaginaire du rock. Une encyclopédie de riffs cagneux, au service du futur hypothétique d'un grunge au sommet.
Superunknown marque au fer rouge la fin d'une époque hallucinante du rock.
Exceptionnel ! ! 19/20 | par X_YoB |
Posté le 16 mars 2007 à 18 h 03 |
En ces temps bien sombres pour le rock, il est bon de vanter les mérites des perles sorties dans la précédente décennie. En effet, quel groupe récent peut se vanter d'avoir sorti un brûlot rock'n'roll, avec impact public à la clé, de la taille du Superunknown de Soundgarden? Queens Of The Stone Age ? At The Drive-In ?? Ces groupes ne sont pas vraiment récents... Il faut se rendre à l'évidence : il y a une dizaine d'années, chaque mois ou presque nous avions droit à ce genre de disque essentiel. Dorénavant, l'industrie musicale n'a plus rien à foutre de ce style de musique et ce n'est pas la vague de groupes néo-garages en 'The...' qui a changé cet état de fait. Et après, on nous dit que le marché du disque s'effondre...
Trêve de nostalgie... Calons nous cet album entre les oreilles et oublions la dérive culturelle qui est en train frapper le rock depuis le nouveau millénaire. C'est l'occasion de se gaver de guitares saturées, de riffs de génies, de lignes de chant dantesques, de rythmes complexes et entraînants. Car, par ce disque, Soundgarden a su sublimer son style, que les musiciens avaient développé jusqu'à Badmotorfinger. Etant arrivé à la quasi perfection avec cet album, le groupe mixa tout ça avec ses influences premières. En résulte une galette 'auberge espagnole' où chaque morceau se distingue du précédent tout en restant à un niveau de qualité maximum. Les dinosaures des années 70 sont donc ici remerciés par des riffs lourds rythmés au rouleau compresseur ("4th Of July", "Mailman"). Les combos punks ayant bercé l'enfance de Kim Thayil et sa bande sont également de la fête ("Kicksand"). Les ambiances psychédéliques s'invitent elles aussi ("Fresh Tendrils", "Half").
Les morceaux mélodiques, déjà expérimentés sur Badmotorfinger, atteignent ici la perfection : du groovy "Fell On Black Days", au poignant "The Day I Try To Live" en passant par l'aérien "Black Hole Sun", tous sont autant d'hymnes irrésistibles et inégalés.
Les purs moments rock'n'roll sont aussi légion : "My Wave", "Spoonman", "Limo Wreck"...
Les musiciens sont plus que jamais au sommet de leur forme. Matt Cameron prouve qu'il est l'un des batteurs les plus doué de sa génération. Kim Thayil dresse des murs du son hallucinants. Ben Shepherd sait transcender les morceaux sans en faire trop. Et que dire de Chris Cornell ? Tout simplement un des meilleurs chanteurs rock, n'ayons pas peur des superlatifs !! Peu de chanteur savent distiller autant d'émotions différentes sans paraître à côté de la plaque ou grand-guignolesques... En somme, l'opposé de ce qu'il fera par la suite dans Audioslave !!
Bref pas la peine d'y revenir plus en détail ou de passer en revue les seize perles de cet album. Ce disque est indispensable pour tout fan de rock qui se respecte. Un point c'est tout. Soundgarden sera, grâce à ce brûlot, porté au panthéon du rock. Seul Down On The Upside pourra en côtoyer le génie. Que des albums de cette trempe manquent au paysage musical actuel !! S'en est presque désespérant...
Trêve de nostalgie... Calons nous cet album entre les oreilles et oublions la dérive culturelle qui est en train frapper le rock depuis le nouveau millénaire. C'est l'occasion de se gaver de guitares saturées, de riffs de génies, de lignes de chant dantesques, de rythmes complexes et entraînants. Car, par ce disque, Soundgarden a su sublimer son style, que les musiciens avaient développé jusqu'à Badmotorfinger. Etant arrivé à la quasi perfection avec cet album, le groupe mixa tout ça avec ses influences premières. En résulte une galette 'auberge espagnole' où chaque morceau se distingue du précédent tout en restant à un niveau de qualité maximum. Les dinosaures des années 70 sont donc ici remerciés par des riffs lourds rythmés au rouleau compresseur ("4th Of July", "Mailman"). Les combos punks ayant bercé l'enfance de Kim Thayil et sa bande sont également de la fête ("Kicksand"). Les ambiances psychédéliques s'invitent elles aussi ("Fresh Tendrils", "Half").
Les morceaux mélodiques, déjà expérimentés sur Badmotorfinger, atteignent ici la perfection : du groovy "Fell On Black Days", au poignant "The Day I Try To Live" en passant par l'aérien "Black Hole Sun", tous sont autant d'hymnes irrésistibles et inégalés.
Les purs moments rock'n'roll sont aussi légion : "My Wave", "Spoonman", "Limo Wreck"...
Les musiciens sont plus que jamais au sommet de leur forme. Matt Cameron prouve qu'il est l'un des batteurs les plus doué de sa génération. Kim Thayil dresse des murs du son hallucinants. Ben Shepherd sait transcender les morceaux sans en faire trop. Et que dire de Chris Cornell ? Tout simplement un des meilleurs chanteurs rock, n'ayons pas peur des superlatifs !! Peu de chanteur savent distiller autant d'émotions différentes sans paraître à côté de la plaque ou grand-guignolesques... En somme, l'opposé de ce qu'il fera par la suite dans Audioslave !!
Bref pas la peine d'y revenir plus en détail ou de passer en revue les seize perles de cet album. Ce disque est indispensable pour tout fan de rock qui se respecte. Un point c'est tout. Soundgarden sera, grâce à ce brûlot, porté au panthéon du rock. Seul Down On The Upside pourra en côtoyer le génie. Que des albums de cette trempe manquent au paysage musical actuel !! S'en est presque désespérant...
Exceptionnel ! ! 19/20
Posté le 02 novembre 2007 à 22 h 01 |
En premier lieu à l'écoute de ce disque, qui a contribué à une meilleure reconnaissance de Soundgarden autant médiatique qu'artistique, on pense directement à Led Zeppelin. La comparaison aurait pu rabaisser le groupe de Seattle qui excelle là dans un très bon hard rock parfois lent et pesant, mais il n'en est rien. Superunknown, après toutes ces années, continue d'être un album ébouriffant plombé d'une noirceur en guise de comburant qui attise les flammes déferlantes de son enfer. Le morceau le plus marquant restera ce très sombre "4th Of July". L'album qui succédera, Down On the Upside, qui est pourtant très bon, n'aura pas le même succès espéré au niveau des ventes, ce qui causera les doutes quant à l'évolution du groupe (d'après la major je suppose) et donnera lieu au split.
Dommage car l'avenir, du point de vue musical, aurait été prometteur si Soundgarden avait exploré des côtés tribal-world qui se pressentaient sur "Spoonman" et plus encore sur "Half". On se plairait encore à en rêver de ces nouvelles ouvertures. Mais c'est bel et bien fini aujourd'hui.
L'album d'un (du) sommet à mon sens.
Dommage car l'avenir, du point de vue musical, aurait été prometteur si Soundgarden avait exploré des côtés tribal-world qui se pressentaient sur "Spoonman" et plus encore sur "Half". On se plairait encore à en rêver de ces nouvelles ouvertures. Mais c'est bel et bien fini aujourd'hui.
L'album d'un (du) sommet à mon sens.
Exceptionnel ! ! 19/20
Posté le 07 juillet 2008 à 19 h 21 |
Déjà la pochette : une forêt renversée sous une image floue d'un homme en train de hurler sur fond noir. Toute la mythologie de Seattle.
Soundgarden n'a pas sorti d'album depuis 1991 et le très métal Badmotor Finger, la vague grunge s'épuise, l'ambiance est à la dépression après le suicide de Cobain.
Le groupe connaît ici son plus grand succès commercial malgré son sujet plutôt glauque, les paroles traitent d'aliénation, de suicide, de dépendance à la drogue.
Coté musique, Superunknown marque une nouvelle étape dans le songwritting du groupe : le chant de Cornell est plus posé et ne part dans les aiguës qu'avec parcimonie; d'un autre coté les compos sont plus mélodiques qu'auparavant, plus complexes et sombres.
L'album est assez lent ("Fell on Black Days", "Mailman", "Fresh Tendrils", "4th of July"), les ambiances malsaines, étouffantes et psychédéliques. Un cri de rage contre l'aliénation que ressent le groupe. En témoigne le vidéo-clip de "Black Hole Sun" digne d'un Tim Burton. Michael Beinhorn réussit à condenser les compositions des 4 musiciens pour nous livrer un album très cohérent au niveau du son, permettant aux membres du groupe de se lâcher dans leurs envies.
Seul bémol, comme tous les disques de Soundgarden, Superunknown est un poil trop long. Une plus grande concision aurait permis une plus grande efficacité.
Mais c'est faire la fine bouche, ce disque étant l'un des sommets des années 90. Un niveau que le groupe ne retrouvera pas par la suite (le très moyen Down On The Upside). La fin des illusions chroniquée en 16 plages indispensables.
Soundgarden n'a pas sorti d'album depuis 1991 et le très métal Badmotor Finger, la vague grunge s'épuise, l'ambiance est à la dépression après le suicide de Cobain.
Le groupe connaît ici son plus grand succès commercial malgré son sujet plutôt glauque, les paroles traitent d'aliénation, de suicide, de dépendance à la drogue.
Coté musique, Superunknown marque une nouvelle étape dans le songwritting du groupe : le chant de Cornell est plus posé et ne part dans les aiguës qu'avec parcimonie; d'un autre coté les compos sont plus mélodiques qu'auparavant, plus complexes et sombres.
L'album est assez lent ("Fell on Black Days", "Mailman", "Fresh Tendrils", "4th of July"), les ambiances malsaines, étouffantes et psychédéliques. Un cri de rage contre l'aliénation que ressent le groupe. En témoigne le vidéo-clip de "Black Hole Sun" digne d'un Tim Burton. Michael Beinhorn réussit à condenser les compositions des 4 musiciens pour nous livrer un album très cohérent au niveau du son, permettant aux membres du groupe de se lâcher dans leurs envies.
Seul bémol, comme tous les disques de Soundgarden, Superunknown est un poil trop long. Une plus grande concision aurait permis une plus grande efficacité.
Mais c'est faire la fine bouche, ce disque étant l'un des sommets des années 90. Un niveau que le groupe ne retrouvera pas par la suite (le très moyen Down On The Upside). La fin des illusions chroniquée en 16 plages indispensables.
Intemporel ! ! ! 20/20
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