Kraftwerk
Tour De France Soundtracks |
Label :
Parlophone |
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Au milieu des années 1990, Kraftwerk, le célèbre groupe de musique électronique allemand, semble être à l'arrêt. Après la sortie de l'album-remix The Mix en 1991 et la tournée qui s'est poursuivie de manière sporadique jusqu'en 1993, Kraftwerk ne donne plus de signe de vie. En fait, Kraftwerk, toujours axé autour du duo Ralf Hütter / Florian Schneider passe toujours son temps à faire du vélo et à expérimenter en studio. Schneider d'ailleurs continue de travailler et d'améliorer ses instruments de synthèse vocale et contribue à développer des séquenceurs et divers instruments pour l'usine de synthé Doepfer.
Il faudra attendre l'année 1997 pour enfin retrouver le groupe. En effet, pour la première fois, Kraftwerk a accepté de faire une apparition dans le line-up d'un festival, chose que les deux leaders (qui officient également en tant que leurs managers propres) avaient toujours refusé. Qui plus est, il ne s'agit pas de n'importe quel festival : le célèbre Tribal Gathering situé à Luton, non loin au nord de Londres. Ce festival était surtout connu à l'époque pour être le principal événement musical orienté à 100% vers la scène électronique au Royaume-Uni. Le groupe, lorsqu'il réapparaît sur scène semble inchangé : la disposition des instruments est la-même que pour la tournée précédente, on retrouve Fritz Hilpert et Henning Schmitz en lieu et place de Wolfgang Flür et de Karl Bartos. Niveau setlist, la principale curiosité est l'apparition d'un nouveau titre, joué à la fin du set, juste avant "Music Non Stop". Instrumental et très orienté techno, ce titre n'a jamais vu officiellement le jour et est depuis référencé avec le nom de "Luton" par certains fans du groupe. Peu après, lors de concerts en Allemagne et en Autriche, deux nouveaux titres tout aussi instrumentaux et orientés techno font l'apparition : l'un est parsemé de syllabes synthétiques, l'autre semble être une improvisation autour du motif mélodique de "Airwaves" (sur Radio-Activity). Ces deux morceaux sont nommés (de manière non-officielle) "Lichthof" et "Tango".
Ces concerts de la fin des années 90 se poursuivent, et en 1998, Kraftwerk retourne triomphalement aux États-Unis (notamment à Detroit et à New-York), au Japon et se déplace pour la première fois jusqu'au Brésil. Les nouveaux morceaux y sont parfois joués.
L'année suivante voit Kraftwerk sortir son premier disque en quasiment dix ans : l'EP Expo 2000, composé suite à un contrat demandant au groupe de créer l'habillage musical de l'exposition universelle d'Hambourg. Le titre, peu novateur, associe les nouveaux sons techno avec la perfection rythmique et sonore de l'album Electric Café. On retrouve même certains sons utilisés dans cet album. Si certains ne voient en ce disque que l'opportunité pour Kraftwerk de faire de l'argent, il se trouve en rétrospective qu'il s'agit des prémisses d'une nouvelle ère pour le groupe teuton.
Après un moment de pause, le groupe refait surface pour jouer trois concerts complets à la Cité de la Musique de Paris. C'est l'endroit qu'ils ont choisi pour présenter leur toute nouvelle scénographie : exit les consoles remplies de séquenceurs, de racks d'effets et de sampleurs. Désormais tout le studio Kling Klang tient sur quatre consoles reliées à des laptops. Les quatre écrans qui étaient derrière le groupe sont également remplacés par un seul et unique écran géant. Kraftwerk, qui avait prophétisé l'arrivée du tout numérique vingt-ans auparavant dans leur album Computer World, entre donc pleinement dans le XXIème siècle. C'est également à cette période que Jean-François Bizot, journaliste, cofondateur du célèbre journal Actuel et proche ami du groupe déclare dans une interview que le groupe "est prêt à sortir environ deux heures de musique inédite"...
Il faudra attendre encore une année complète pour lui donner raison : le 4 août 2003 sort finalement, après 16 ans d'attente, Tour De France Soundtracks.
C'est le premier véritable album de Kraftwerk depuis la sortie d'Electric Café en 1986 et demeure à ce jour (2020) leur dernier véritable album. Enregistré au début des années 2000 mais ayant subi des problèmes de mixage, le disque est complètement remixé au dernier moment ce qui repousse la date de sortie de presque deux mois après la date prévue, et gâche l'effet de conjoncture avec le départ de la Grande Boucle, dont Ralf Hütter, cycliste amateur de renom, a toujours été très friand. Il faut dire que ce thème, cher à Kraftwerk, avait déjà été exploité dans la création du maxi Tour De France sorti en 1983, et avait failli dès cette période mener à la création d'un album entièrement axé sur la thématique des sports cyclistes. Cette idée inachevée aura donc pris un certain temps avant de finalement voir le jour.
Comme d'habitude avec Kraftwerk, il s'agit d'un album légèrement en avance sur son temps côté production sonore. Teinté de techno minimale et de sonorités IDM, Tour De France Soundtracks est un album de musique électronique pop assez recherché concernant la production. A ce jour, le son demeure très contemporain et aurait pu sortir l'an dernier. Il est important de noter que le changement de matériel et le passage au numérique marque profondément l'album. Il est difficile d'entendre des sons analogiques dans ce disque : tout y est parfaitement ciselé, les fréquences sont parfaitement mixées entre-elles et les textures synthétiques sonnent comme si elles avaient été produites sur Cubase ou Protools. Ce nouveau matériel a d'ailleurs donné au groupe l'occasion d'expérimenter davantage sur le travail de spatialisation sonore et de programmation.
L'album démarre avec la suite "Prologue - Etape 1 - Etape 2 - Etape 3 - Chrono". Longue d'un bon quart d'heure, cette suite de morceau évoque bien évidemment le déroulement du Tour de France. Le texte de "Etape 2", description de l'épreuve plus neutre encore que celle du morceau de 1983, décrit en détail les différentes épreuves de la course, et les moyens de captation qui permettent de la diffuser à travers le monde. Construits autour d'un beat techno très minimaliste, les morceaux s'articulent autour d'un leitmotiv mélodique lumineux qui permet l'enchaînement des "étapes" les unes dans les autres d'une manière très fluide. Cette suite renoue avec les morceaux fleuves que Kraftwerk composait dans les années 70, comme "Autobahn" ou "Trans-Europe Express" : la machine ne s'arrête plus, à la manière de Lance Armstrong, le maillot jaune de l'époque (et on se demande bien pourquoi)...
Suivent quatre morceaux de techno-pop finement produits : "Vitamin" tout d'abord, sa rythmique entêtante, ses basses très rondes et ses mélodies qui s'entrechoquent. Ensuite, la suite "Aerodynamik - Titanium", très technoïde (le titre sera d'ailleurs remixé par Alex Gopher et François K) et évoquant en effet par son effet répétitif quelque chose de très droit qui prendrait de la vitesse. L'album se poursuit sur "Elektro Kardiogramm", dans sa version non terminée (la version finale sortira quelques mois plus tard en single promo). Morceau construit sur un sample de battement de cœur et de respirations reste néanmoins conventionnel dans les choix mélodiques. Enfin, la suite "La Forme - Régénération", très douce, presque ambient, chante les bienfaits du fitness dans un mode de vie sportif.
On pourrait presque s'attendre à ce que le disque se conclue ici, mais il faudra encore passer par un nouveau mix digital (à la The Mix) du morceau "Tour De France" original. Il aurait en effet été dommage de ne jamais inclure ce morceau sur un album, qui plus est sur l'album dédié à la course éponyme. On préférera cependant la production plus tranchée de la version originale de 1983 que cette version, certainement un brin trop lisse.
Avec Tour De France Soundtracks; Kraftwerk signe donc un retour en grande pompes qui lui permettra pour la première fois d'atteindre avec un album le top des charts en Allemagne. Le minimalisme si cher au quatuor allemand n'aura peut-être jamais été autant expressif. Le disque, généralement bien reçu, fut vite emmené sur la route. Kraftwerk passe donc le reste de l'année 2003, et l'intégralité de l'année 2004 (la dernière date sera réservée aux Transmusicales de Rennes, en décembre) à tourner pour promouvoir le nouveau disque. Cette tournée sera d'ailleurs enregistrée et filmée afin de sortir l'année suivante en CD et DVD sous le titre Minimum-Maximum, extrait du texte de "Electro Kardiogramm".
L'album Tour De France Soundtracks ressort en 2009 en même temps que le reste de la discographie "classique" du groupe, et à l'instar de Electric Café qui est re-titré "Techno Pop", l'album de 2003 se nomme désormais et plus simplement "Tour De France". C'est aujourd'hui un album qui tient toujours aussi bien la route, et qui pourrait peut-être mieux convenir à des oreilles réfractaires au son de Kraftwerk des années 70/80. Malgré tout, Tour De France Soundtracks reste à ce jour le dernier effort discographique de Kraftwerk et il brille par son minimalisme et ses choix artistiques tranchés. C'est également (hors The Mix) le disque le plus long du groupe.
Comme le dit l'adage, "qui peut le plus peut le moins", et Kraftwerk nous le prouve avec brio pour la dernière fois, enfin, pour le moment...
Il faudra attendre l'année 1997 pour enfin retrouver le groupe. En effet, pour la première fois, Kraftwerk a accepté de faire une apparition dans le line-up d'un festival, chose que les deux leaders (qui officient également en tant que leurs managers propres) avaient toujours refusé. Qui plus est, il ne s'agit pas de n'importe quel festival : le célèbre Tribal Gathering situé à Luton, non loin au nord de Londres. Ce festival était surtout connu à l'époque pour être le principal événement musical orienté à 100% vers la scène électronique au Royaume-Uni. Le groupe, lorsqu'il réapparaît sur scène semble inchangé : la disposition des instruments est la-même que pour la tournée précédente, on retrouve Fritz Hilpert et Henning Schmitz en lieu et place de Wolfgang Flür et de Karl Bartos. Niveau setlist, la principale curiosité est l'apparition d'un nouveau titre, joué à la fin du set, juste avant "Music Non Stop". Instrumental et très orienté techno, ce titre n'a jamais vu officiellement le jour et est depuis référencé avec le nom de "Luton" par certains fans du groupe. Peu après, lors de concerts en Allemagne et en Autriche, deux nouveaux titres tout aussi instrumentaux et orientés techno font l'apparition : l'un est parsemé de syllabes synthétiques, l'autre semble être une improvisation autour du motif mélodique de "Airwaves" (sur Radio-Activity). Ces deux morceaux sont nommés (de manière non-officielle) "Lichthof" et "Tango".
Ces concerts de la fin des années 90 se poursuivent, et en 1998, Kraftwerk retourne triomphalement aux États-Unis (notamment à Detroit et à New-York), au Japon et se déplace pour la première fois jusqu'au Brésil. Les nouveaux morceaux y sont parfois joués.
L'année suivante voit Kraftwerk sortir son premier disque en quasiment dix ans : l'EP Expo 2000, composé suite à un contrat demandant au groupe de créer l'habillage musical de l'exposition universelle d'Hambourg. Le titre, peu novateur, associe les nouveaux sons techno avec la perfection rythmique et sonore de l'album Electric Café. On retrouve même certains sons utilisés dans cet album. Si certains ne voient en ce disque que l'opportunité pour Kraftwerk de faire de l'argent, il se trouve en rétrospective qu'il s'agit des prémisses d'une nouvelle ère pour le groupe teuton.
Après un moment de pause, le groupe refait surface pour jouer trois concerts complets à la Cité de la Musique de Paris. C'est l'endroit qu'ils ont choisi pour présenter leur toute nouvelle scénographie : exit les consoles remplies de séquenceurs, de racks d'effets et de sampleurs. Désormais tout le studio Kling Klang tient sur quatre consoles reliées à des laptops. Les quatre écrans qui étaient derrière le groupe sont également remplacés par un seul et unique écran géant. Kraftwerk, qui avait prophétisé l'arrivée du tout numérique vingt-ans auparavant dans leur album Computer World, entre donc pleinement dans le XXIème siècle. C'est également à cette période que Jean-François Bizot, journaliste, cofondateur du célèbre journal Actuel et proche ami du groupe déclare dans une interview que le groupe "est prêt à sortir environ deux heures de musique inédite"...
Il faudra attendre encore une année complète pour lui donner raison : le 4 août 2003 sort finalement, après 16 ans d'attente, Tour De France Soundtracks.
C'est le premier véritable album de Kraftwerk depuis la sortie d'Electric Café en 1986 et demeure à ce jour (2020) leur dernier véritable album. Enregistré au début des années 2000 mais ayant subi des problèmes de mixage, le disque est complètement remixé au dernier moment ce qui repousse la date de sortie de presque deux mois après la date prévue, et gâche l'effet de conjoncture avec le départ de la Grande Boucle, dont Ralf Hütter, cycliste amateur de renom, a toujours été très friand. Il faut dire que ce thème, cher à Kraftwerk, avait déjà été exploité dans la création du maxi Tour De France sorti en 1983, et avait failli dès cette période mener à la création d'un album entièrement axé sur la thématique des sports cyclistes. Cette idée inachevée aura donc pris un certain temps avant de finalement voir le jour.
Comme d'habitude avec Kraftwerk, il s'agit d'un album légèrement en avance sur son temps côté production sonore. Teinté de techno minimale et de sonorités IDM, Tour De France Soundtracks est un album de musique électronique pop assez recherché concernant la production. A ce jour, le son demeure très contemporain et aurait pu sortir l'an dernier. Il est important de noter que le changement de matériel et le passage au numérique marque profondément l'album. Il est difficile d'entendre des sons analogiques dans ce disque : tout y est parfaitement ciselé, les fréquences sont parfaitement mixées entre-elles et les textures synthétiques sonnent comme si elles avaient été produites sur Cubase ou Protools. Ce nouveau matériel a d'ailleurs donné au groupe l'occasion d'expérimenter davantage sur le travail de spatialisation sonore et de programmation.
L'album démarre avec la suite "Prologue - Etape 1 - Etape 2 - Etape 3 - Chrono". Longue d'un bon quart d'heure, cette suite de morceau évoque bien évidemment le déroulement du Tour de France. Le texte de "Etape 2", description de l'épreuve plus neutre encore que celle du morceau de 1983, décrit en détail les différentes épreuves de la course, et les moyens de captation qui permettent de la diffuser à travers le monde. Construits autour d'un beat techno très minimaliste, les morceaux s'articulent autour d'un leitmotiv mélodique lumineux qui permet l'enchaînement des "étapes" les unes dans les autres d'une manière très fluide. Cette suite renoue avec les morceaux fleuves que Kraftwerk composait dans les années 70, comme "Autobahn" ou "Trans-Europe Express" : la machine ne s'arrête plus, à la manière de Lance Armstrong, le maillot jaune de l'époque (et on se demande bien pourquoi)...
Suivent quatre morceaux de techno-pop finement produits : "Vitamin" tout d'abord, sa rythmique entêtante, ses basses très rondes et ses mélodies qui s'entrechoquent. Ensuite, la suite "Aerodynamik - Titanium", très technoïde (le titre sera d'ailleurs remixé par Alex Gopher et François K) et évoquant en effet par son effet répétitif quelque chose de très droit qui prendrait de la vitesse. L'album se poursuit sur "Elektro Kardiogramm", dans sa version non terminée (la version finale sortira quelques mois plus tard en single promo). Morceau construit sur un sample de battement de cœur et de respirations reste néanmoins conventionnel dans les choix mélodiques. Enfin, la suite "La Forme - Régénération", très douce, presque ambient, chante les bienfaits du fitness dans un mode de vie sportif.
On pourrait presque s'attendre à ce que le disque se conclue ici, mais il faudra encore passer par un nouveau mix digital (à la The Mix) du morceau "Tour De France" original. Il aurait en effet été dommage de ne jamais inclure ce morceau sur un album, qui plus est sur l'album dédié à la course éponyme. On préférera cependant la production plus tranchée de la version originale de 1983 que cette version, certainement un brin trop lisse.
Avec Tour De France Soundtracks; Kraftwerk signe donc un retour en grande pompes qui lui permettra pour la première fois d'atteindre avec un album le top des charts en Allemagne. Le minimalisme si cher au quatuor allemand n'aura peut-être jamais été autant expressif. Le disque, généralement bien reçu, fut vite emmené sur la route. Kraftwerk passe donc le reste de l'année 2003, et l'intégralité de l'année 2004 (la dernière date sera réservée aux Transmusicales de Rennes, en décembre) à tourner pour promouvoir le nouveau disque. Cette tournée sera d'ailleurs enregistrée et filmée afin de sortir l'année suivante en CD et DVD sous le titre Minimum-Maximum, extrait du texte de "Electro Kardiogramm".
L'album Tour De France Soundtracks ressort en 2009 en même temps que le reste de la discographie "classique" du groupe, et à l'instar de Electric Café qui est re-titré "Techno Pop", l'album de 2003 se nomme désormais et plus simplement "Tour De France". C'est aujourd'hui un album qui tient toujours aussi bien la route, et qui pourrait peut-être mieux convenir à des oreilles réfractaires au son de Kraftwerk des années 70/80. Malgré tout, Tour De France Soundtracks reste à ce jour le dernier effort discographique de Kraftwerk et il brille par son minimalisme et ses choix artistiques tranchés. C'est également (hors The Mix) le disque le plus long du groupe.
Comme le dit l'adage, "qui peut le plus peut le moins", et Kraftwerk nous le prouve avec brio pour la dernière fois, enfin, pour le moment...
Parfait 17/20 | par EmixaM |
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