Jenny Hval
The Long Sleep |
Label :
Sacred Bones |
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En cette année 2018, qui de par son simple agenda de sorties s'annonce majeure, Jenny Hval, elle, est dans l'entre-deux. La déesse norvégienne de la menstruation a déjà bien donné, enchaînant coup sur coup deux des plus beaux albums introspectifs de la pop des années 2010, Apocalypse, Girl en 2015 et Blood Bitch en 2016. Épuisée par le travail que demandent la promotion et les tournées de chaque album, Jenny fait un break. Mais voilà, on lui a bien fait comprendre chez Sacred Bones que si elle voulait rester "visible" elle ferait bien de sortir quelque chose d'ici son prochain album. Qu'à cela ne tienne, la touche-à-tout n'a jamais expérimenté sur le format EP ; elle en sortira deux. J'ai déjà parlé du premier sous le pseudonyme Lost Girls, et voici le second.
Un premier single est publié : "Spells". Wow ! Tous ces arrangements... piano, guitare, l'inévitable boîte à rythme, une armée de saxophones...? Jamais un morceau de Hval n'a été si léché, si luxuriant, avec les niveaux de pop montés à 11, une mélodie accrocheuse et frontale... Bon Dieu, non seulement j'adhère, mais j'adore ! 4 pistes, cet EP ? Donnez moi 4 "Spells" et je pourrai mourir heureux.
C'était bien entendu mal connaître celle qui joue aussi bien des concepts que de ses codes vocales. Lorsqu'elle s'est retrouvée avec "Spells" entre les mains, il lui est arrivée exactement la même chose qu'à moi : elle n'a pas pu se la sortir du crâne. En composant par la suite, elle s'est rendue compte qu'elle était en train d'écrire des variations de la même chose. Ce faisant, Jenny, qui n'est pas la dernière à prendre ses manifestations inconscientes à bras le corps, en a profité pour envelopper le tout d'un beau petit concept. Voici donc : The Long Sleep, qui commence par "Spells" et reste sur "Spells", en la faisant décanter d'une bien curieuse manière. "The Dreamer Is Everyone In Her Dream" est une version "singer-songwriter", ballade planante au piano qui récupère "Spells" et l'emmène doucement vers un twist psychédélique, tel un portail passant de la conscience au rêve, à une somnolence qui s'installe les 11 minutes du morceau titre, long drone cachant dans ses couches une jungle de détails, de bruitages, de vocaux éthérés, censé pouvoir s'écouter dans un état de semi-conscience.
Car une face du concept de cet EP était de prendre position sur l'ère du streaming et plus particulièrement les algorithmes qui choisissent par eux même des playlists adaptées à l'auditeur, l'ère des playlists "chill" destinées selon elle à endormir la conscience de l'auditeur pour mieux l'engourdir et lui faire oublier le poids du monde moderne. Jenny propose en réaction cette longue piste "chill" qu'est "The Long Sleep", avant de réveiller brusquement celui qui l'écoute. Comment ? Avec "I Want to Tell You Something", qui débarque sans prévenir alors que les drones finissent de s'effacer dans l'éther, et qui consiste en Jenny qui nous parle. Oui, à nous directement, brisant le quatrième mur, à se demander ce qu'elle fait là, ce qu'on fait là, qu'elle veut nous dire quelque chose, pour nous rejoindre au delà des mots, au delà des algorithmes, du produit, du message, des intermédiaires entre elle et nous ; elle ne veut nous dire qu'une chose : "Thank you. I love you."
Alors bon, bien sûr si j'avais eu 4 morceaux de la trempe de "Spells" j'aurais mis d'instinct la note maximale. Mais à la place j'ai eu Jenny Hval qui me susurre à l'oreille, je vais pas me plaindre.
Un premier single est publié : "Spells". Wow ! Tous ces arrangements... piano, guitare, l'inévitable boîte à rythme, une armée de saxophones...? Jamais un morceau de Hval n'a été si léché, si luxuriant, avec les niveaux de pop montés à 11, une mélodie accrocheuse et frontale... Bon Dieu, non seulement j'adhère, mais j'adore ! 4 pistes, cet EP ? Donnez moi 4 "Spells" et je pourrai mourir heureux.
C'était bien entendu mal connaître celle qui joue aussi bien des concepts que de ses codes vocales. Lorsqu'elle s'est retrouvée avec "Spells" entre les mains, il lui est arrivée exactement la même chose qu'à moi : elle n'a pas pu se la sortir du crâne. En composant par la suite, elle s'est rendue compte qu'elle était en train d'écrire des variations de la même chose. Ce faisant, Jenny, qui n'est pas la dernière à prendre ses manifestations inconscientes à bras le corps, en a profité pour envelopper le tout d'un beau petit concept. Voici donc : The Long Sleep, qui commence par "Spells" et reste sur "Spells", en la faisant décanter d'une bien curieuse manière. "The Dreamer Is Everyone In Her Dream" est une version "singer-songwriter", ballade planante au piano qui récupère "Spells" et l'emmène doucement vers un twist psychédélique, tel un portail passant de la conscience au rêve, à une somnolence qui s'installe les 11 minutes du morceau titre, long drone cachant dans ses couches une jungle de détails, de bruitages, de vocaux éthérés, censé pouvoir s'écouter dans un état de semi-conscience.
Car une face du concept de cet EP était de prendre position sur l'ère du streaming et plus particulièrement les algorithmes qui choisissent par eux même des playlists adaptées à l'auditeur, l'ère des playlists "chill" destinées selon elle à endormir la conscience de l'auditeur pour mieux l'engourdir et lui faire oublier le poids du monde moderne. Jenny propose en réaction cette longue piste "chill" qu'est "The Long Sleep", avant de réveiller brusquement celui qui l'écoute. Comment ? Avec "I Want to Tell You Something", qui débarque sans prévenir alors que les drones finissent de s'effacer dans l'éther, et qui consiste en Jenny qui nous parle. Oui, à nous directement, brisant le quatrième mur, à se demander ce qu'elle fait là, ce qu'on fait là, qu'elle veut nous dire quelque chose, pour nous rejoindre au delà des mots, au delà des algorithmes, du produit, du message, des intermédiaires entre elle et nous ; elle ne veut nous dire qu'une chose : "Thank you. I love you."
Alors bon, bien sûr si j'avais eu 4 morceaux de la trempe de "Spells" j'aurais mis d'instinct la note maximale. Mais à la place j'ai eu Jenny Hval qui me susurre à l'oreille, je vais pas me plaindre.
Parfait 17/20 | par X_Wazoo |
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