Gojira

Possessed

Possessed

 Label :     Gabriel Editions 
 Sortie :    avril 1998 
 Format :  Mini Album / CD  K7 Audio   

Lorsque Gojira, qui s'appelait encore Gozilla, a sorti Possessed, une démo K7 depuis rééditée en CD, ce n'était déjà plus un groupe d'inconnus qui débute.
Le guitariste chanteur Joe Duplantier avait déjà acquis une sérieuse réputation de compositeur au sein de son précédent groupe P4, qui jouissait dans le sud-ouest d'une solide base de fans, et son frère Mario, bien que très jeune, sévissait derrière les fûts dans Putride, un groupe de thrash death vraiment furieux et mâture compte tenu de l'âge de ses membres, quelque chose comme 12 ou 13 ans de mémoire...
De la réunion des deux frangins allait naître ce qui est désormais un des groupes majeurs de la scène metal actuelle : Gojira.
Possessed, qui n'est somme toute qu'une ébauche, un premier jet, présente un groupe incroyablement puissant, doté d'un sens de la composition exceptionnel. Fan de death metal depuis déjà de longues années, cette démo est tout bonnement pour moi une des meilleures sorties du genre.
Les quatre titres offerts ici ("Possessed", "Bleeding", "Brutal Abortion", "End of Time") digèrent parfaitement les influences Death, Morbid Angel ou encore Monstrosity et balancent un groove insoutenable dont le groupe ne se départira plus jamais. La technique développée ici ne vire jamais à la démonstration et l'absence de solos confère une cohésion rare pour un groupe qui en est encore au stade de la démo : c'est déjà la très grosse claque et l'on sent poindre un potentiel énorme chez ces quatre types.
Privilégiant les tempos lourds, voire doom tant les ralentissements sont nombreux et pesants, et les cassures rythmiques incessantes, aux blasts beat roboratifs, Gozilla insuffle à ses compositions un souffle méphitique que viennent renforcer quelques arpèges obscurcissant davantage la pénombre dans laquelle il est recommandé d'écouter ces morceaux.
La production, massive, affirme la volonté du groupe de proposer un travail sérieux et soigné : nous sommes à mille lieux de l'amateurisme underground. L'impact est immédiat, frontal, laisse sans voix.
La voix justement. Exercice difficile dans le death, Joe sait déjà éviter tous les poncifs du genre : par de sur guttural, d'effets à outrance ou de beuglements de gros méchants envoyés à l'emporte pièce. Les mélodies vocales sont construites, reconnaissables et si l'on est bien dans les "growls" caractéristiques du genre, ils sont utilisés avec une grande maîtrise, à l'économie, sans surenchères inutiles, quelques passages plus criards ("Brutal Abortion" par exemple) prouvant l'étendue du registre du vocaliste tout en personnalisant davantage la musique.
Mario évolue dans un style caractéristique, double pédale en avant, mais l'on sent déjà dans les nombreux breaks qui parsèment les titres, et au milieu des riffs poli rythmiques, transparaître une finesse inhabituelle et un penchant marqué pour le tribal, orientation qui se confirmera par la suite. Le talent n'attendant pas le nombre des années, ce gamin qui disparaît totalement derrière sa batterie cogne comme un Dave Lombardo : le moindre coup est surpuissant, mais le délié l'emporte sur la trop simple brutalité de la vitesse d'exécution.
Cette démo s'achève sur "Mandragore", un instrumental acoustique qui démontre, s'il le fallait encore, qu'en plus d'être des tueurs techniquement, ces types ont aussi un feeling à tomber : Gozilla ne tire pas à blanc et ne respecte pas les sommations d'usage, ce premier effort est un incontournable pour les fans et une pièce indispensable à tout amateur de death qui se respecte.
Messieurs, chapeau bas....


Parfait   17/20
par Arno Vice


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