Monster Magnet
Paris [La Loco] - mardi 02 décembre 2008 |
Il y a des moments qui prennent une saveur particulière pour peu qu'on ait un esprit romantique. Des moments où, de la laideur d'un instant, et de ce qu'il révèle, jaillit une beauté nouvelle et tristement pathétique.
Le concert de Monster Magnet était de ces moment-là.
Après un set d'une heure de Nebula, devant un public accoudé aux tubes métalliques de la Loco, un public assez vieux, connaisseur, dodelinant de la tête, l'œil torve... Après donc, ce très bon set de Nebula, dans lequel Eddie Glass, qui s'est découvert un look à la Jack White, vaguement sudiste : moustache et cheveux longs, sur son corps fil-de-fer, nous a fait un numéro de guitare héros tout en retenue, avec une reprise de ZZ Top en point culminant... Après donc ce set – et les anecdotiques Pilgrim Fathers, mous comme des chiques – se pointent Monster Magnet. D'abord Ed Mundell, Bob Pantella, puis le nouveau guitariste et le bassiste dont le nom m'échappe. Tout le monde attend le "monstre sacré", le cerveau, Dave Wyndorf.
"Monstre...". On ne croit pas si bien dire pourtant...
C'est un Dave Wyndorf tout bouffi, rongé par la Cortisone, qui surgit de derrière la scène, dans un survêtement ample, et informe, le grossissant plus encore, exit les gilets de cuir... Un Dave Wyndorf de 120 kilos, tout déformé. Saisissant.
Une stupeur éphémère frappe l'assemblée, l'instant d'une demi-seconde. Mais Dave ne s'offre pas à nous dans toute sa déchéance, il ne nous laisse pas le temps de le contempler : il s'agite et la machine Monster Magnet se met en marche instantanément, pour un "Look To Your Orb For The Warming" sonique. "We are all here my friends all dumb and spaced but all so beautiful", voilà ce que Dave nous dit, comme un cri déchirant, derrière son infirmité. Peu importe, oui, on est là... Je regarde à droite, à gauche, et je me dis qu'après tout, on est tous un peu abîmés à notre façon.
Les titres s'enchaînent, de tous les albums (sauf Monolithic Baby ! et 4-Way Diablo, assez bizarrement), et la set list est extrêmement solide. Tout ce que MM a fait de mieux jusqu'à présent, ou presque.
Enchaînement dévastateur : "Third Alternative", "Zodiac Lung", "The Right Stuff", qui plonge littéralement l'assistance - pourtant clairsemée - en délire. J'écoute religieusement, presqu'avec gêne, ferme les yeux ; le visage bouffi et l'expression de détresse de Dave, camouflée par une hyper-activité que son corps ne peut supporter, me frappent la rétine, et m'arracheraient presque des larmes.
Oui, la laideur de ce moment a quelque chose de beau, festonné qu'il est de voix hallucinées, psychés, tournant en boucle, oui, ce moment a quelque chose de beau.
"Negasonic Teenage Warhead", "Space Lord" suivent et ils decampent tous.
9 titres, déjà.
On crie un peu, on aimerait qu'ils reviennent. Je veux revoir Dave, je veux revoir le visage froid d'Ed Mundell, et son jeu de scène limité, ses longs cheveux... Ils reparaissent (qui croit encore à ces départs soudains sans rappel ?).
"Melt", de God Says No, tombe à pic, entonnant un prophétique "I'll never trust myself again, cause I don't care".
Et puis, c'est l'incident : "Tractor"... et Dave faiblit, chante dans le vide à 5 mètres du micro et pourtant... Sa voix ne faiblit pas dans nos oreilles. Playback.
Ce mot qui sonne comme un couperet. Playback. Je n'en reviens pas. Britney Spears chante même "Toxic" en live, elle. Comment ça : Playback ?
Je suis coupé, refroidi. Et Dave qui continue à chanter (mais chante-t-il réellement ?) son "Tractor" rageur. Puis termine sur un pathétique – et pourtant beau – "Spine Of God"... "I love everyone"... Mais chante-t-il réellement ? A-t-il réellement chanté durant le concert ?
Je ne sais pas si j'aime tout le monde comme toi, Dave, je ne sais pas si je t'aime, si je dois encore t'aimer, je ne sais pas si tu t'es foutu de ma gueule, si tu l'as fait délibérément. J'ai ma petite idée, pourtant. Je ressors refroidi, et c'est ton visage, ton corps difforme qui se dessine sur ma rétine quand je ferme les yeux dans le métro, avec les acouphènes pour compagnons de nuit.
Allez, je te pardonne.
Le concert de Monster Magnet était de ces moment-là.
Après un set d'une heure de Nebula, devant un public accoudé aux tubes métalliques de la Loco, un public assez vieux, connaisseur, dodelinant de la tête, l'œil torve... Après donc, ce très bon set de Nebula, dans lequel Eddie Glass, qui s'est découvert un look à la Jack White, vaguement sudiste : moustache et cheveux longs, sur son corps fil-de-fer, nous a fait un numéro de guitare héros tout en retenue, avec une reprise de ZZ Top en point culminant... Après donc ce set – et les anecdotiques Pilgrim Fathers, mous comme des chiques – se pointent Monster Magnet. D'abord Ed Mundell, Bob Pantella, puis le nouveau guitariste et le bassiste dont le nom m'échappe. Tout le monde attend le "monstre sacré", le cerveau, Dave Wyndorf.
"Monstre...". On ne croit pas si bien dire pourtant...
C'est un Dave Wyndorf tout bouffi, rongé par la Cortisone, qui surgit de derrière la scène, dans un survêtement ample, et informe, le grossissant plus encore, exit les gilets de cuir... Un Dave Wyndorf de 120 kilos, tout déformé. Saisissant.
Une stupeur éphémère frappe l'assemblée, l'instant d'une demi-seconde. Mais Dave ne s'offre pas à nous dans toute sa déchéance, il ne nous laisse pas le temps de le contempler : il s'agite et la machine Monster Magnet se met en marche instantanément, pour un "Look To Your Orb For The Warming" sonique. "We are all here my friends all dumb and spaced but all so beautiful", voilà ce que Dave nous dit, comme un cri déchirant, derrière son infirmité. Peu importe, oui, on est là... Je regarde à droite, à gauche, et je me dis qu'après tout, on est tous un peu abîmés à notre façon.
Les titres s'enchaînent, de tous les albums (sauf Monolithic Baby ! et 4-Way Diablo, assez bizarrement), et la set list est extrêmement solide. Tout ce que MM a fait de mieux jusqu'à présent, ou presque.
Enchaînement dévastateur : "Third Alternative", "Zodiac Lung", "The Right Stuff", qui plonge littéralement l'assistance - pourtant clairsemée - en délire. J'écoute religieusement, presqu'avec gêne, ferme les yeux ; le visage bouffi et l'expression de détresse de Dave, camouflée par une hyper-activité que son corps ne peut supporter, me frappent la rétine, et m'arracheraient presque des larmes.
Oui, la laideur de ce moment a quelque chose de beau, festonné qu'il est de voix hallucinées, psychés, tournant en boucle, oui, ce moment a quelque chose de beau.
"Negasonic Teenage Warhead", "Space Lord" suivent et ils decampent tous.
9 titres, déjà.
On crie un peu, on aimerait qu'ils reviennent. Je veux revoir Dave, je veux revoir le visage froid d'Ed Mundell, et son jeu de scène limité, ses longs cheveux... Ils reparaissent (qui croit encore à ces départs soudains sans rappel ?).
"Melt", de God Says No, tombe à pic, entonnant un prophétique "I'll never trust myself again, cause I don't care".
Et puis, c'est l'incident : "Tractor"... et Dave faiblit, chante dans le vide à 5 mètres du micro et pourtant... Sa voix ne faiblit pas dans nos oreilles. Playback.
Ce mot qui sonne comme un couperet. Playback. Je n'en reviens pas. Britney Spears chante même "Toxic" en live, elle. Comment ça : Playback ?
Je suis coupé, refroidi. Et Dave qui continue à chanter (mais chante-t-il réellement ?) son "Tractor" rageur. Puis termine sur un pathétique – et pourtant beau – "Spine Of God"... "I love everyone"... Mais chante-t-il réellement ? A-t-il réellement chanté durant le concert ?
Je ne sais pas si j'aime tout le monde comme toi, Dave, je ne sais pas si je t'aime, si je dois encore t'aimer, je ne sais pas si tu t'es foutu de ma gueule, si tu l'as fait délibérément. J'ai ma petite idée, pourtant. Je ressors refroidi, et c'est ton visage, ton corps difforme qui se dessine sur ma rétine quand je ferme les yeux dans le métro, avec les acouphènes pour compagnons de nuit.
Allez, je te pardonne.
Bon 15/20 | par Chad |
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