Tindersticks
The Waiting Room |
Label :
City Slang |
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Toute l'ambivalence des Tindersticks est contenue dans la voix improbable de Stuart Staples. Cette voix qui charrie les échos d'un romantisme exacerbé, maniérée comme c'est pas permis, mais qui parait toujours à bout de souffle, à s'achever dans des trémolos asthmatiques, trop épuisée même pour se fatiguer à atteindre les bonnes notes. Les Tindersticks c'est un peu le tableau du Voyageur contemplant une mer de nuages revisité, où l'homme serait voûté face à un épais brouillard. Une musique de chambre intimiste qui se rêverait grandiose, symphonique.
Mais dans cette petite chambre il s'en passent des choses.
Dans cette chambre, Stuart Staples s'isole de tout, indifférent aux modes, insouciant du temps qui passe. Dans cette chambre c'est à se demander s'il daigner s'écouler d'ailleurs, le temps. Plus de 20 ans qu'il s'y prélasse, conforté dans son style à cœur ouvert et trémolos à cordes. Chaque album ressemble au précédent, pourtant ne se répète jamais. Dans cette chambre, Stuart n'est pas en stase, il se contente d'évoluer, de grandir, vieillir dans son petit coin. Dans sa chambre noire, on y rentre par le trou de la serrure : "Follow Me", une invitation sous la forme d'un modeste instrumental sorti du western que David Lynch n'a jamais tourné. Dans cette chambre de curieuses alchimies prennent forme entre deux plis de drap : comme une singularité temporelle, "Help Yourself!" surgit du néant, percée afrobeat retentissante, comme si Stuart avait invité le fantôme de Fela Kuti à boire une tasse de thé noir. Et les deux s'entendent comme cul et chemise. Dans cette chambre un pouvoir mystérieux est à l'œuvre, qui convoque des esprits disparus, celui de Lhasa De Sela. Hé Lucinda, hé Lucinda, es-tu là ? Si oui, tape trois fois et entame donc un duo à l'orchestration paradisiaque. On ne t'avait plus entendu chanter comme ça depuis ta mort en 2010. Dans cette chambre, pour tromper la solitude, Stuart se dandine sur des grooves imaginaires, au son de la basse chaloupée dont il habille "Were We Once Lovers?". Mais parfois dans cette chambre, il n'est plus possible de déjouer l'angoisse. Alors Stuart s'assombrit, son regard devient dur, sa guitare menaçante et son ton amer. Oui, peut-être qu'il ne peut pas faire grand chose, ainsi isolé dans ce cocon doux-amer qu'il s'est lui-même tissé, mais au moins il rêve. Et ce qu'on tient entre nos mains, cette Waiting Room, est un fragment de ce rêve.
Dans cette chambre au fond, Stuart a le temps. Tout le temps du monde. Cette solitude le protège autant qu'elle le piège. Alors Stuart se regarde dans la glace, examine ses fêlures, recompose les pièces de puzzle d'un cœur mille fois brisé. Dans sa chambre, comme un véritable orfèvre qui sculpte puis déguise délicatement ses petites poupées en bois, Stuart lui aussi passe son temps à habiller avec élégance (et avec des doigts qu'on s'imagine longs et fins) ses petits trésors de chansons douces. C'est un peu triste certes, mais difficile de résister à l'envie d'endosser le costume du voyou voyeur qui, par le petit trou de la serrure, observe l'homme isolé faire son office. Car cette scène a la beauté du secret, la beauté d'une confidence intime destinée à ne rester qu'entre lui et toi.
Il n'appartient qu'à nous désormais, de briser ou non le secret, de se faire du mal... "comme seuls en sont capables les amants".
Mais dans cette petite chambre il s'en passent des choses.
Dans cette chambre, Stuart Staples s'isole de tout, indifférent aux modes, insouciant du temps qui passe. Dans cette chambre c'est à se demander s'il daigner s'écouler d'ailleurs, le temps. Plus de 20 ans qu'il s'y prélasse, conforté dans son style à cœur ouvert et trémolos à cordes. Chaque album ressemble au précédent, pourtant ne se répète jamais. Dans cette chambre, Stuart n'est pas en stase, il se contente d'évoluer, de grandir, vieillir dans son petit coin. Dans sa chambre noire, on y rentre par le trou de la serrure : "Follow Me", une invitation sous la forme d'un modeste instrumental sorti du western que David Lynch n'a jamais tourné. Dans cette chambre de curieuses alchimies prennent forme entre deux plis de drap : comme une singularité temporelle, "Help Yourself!" surgit du néant, percée afrobeat retentissante, comme si Stuart avait invité le fantôme de Fela Kuti à boire une tasse de thé noir. Et les deux s'entendent comme cul et chemise. Dans cette chambre un pouvoir mystérieux est à l'œuvre, qui convoque des esprits disparus, celui de Lhasa De Sela. Hé Lucinda, hé Lucinda, es-tu là ? Si oui, tape trois fois et entame donc un duo à l'orchestration paradisiaque. On ne t'avait plus entendu chanter comme ça depuis ta mort en 2010. Dans cette chambre, pour tromper la solitude, Stuart se dandine sur des grooves imaginaires, au son de la basse chaloupée dont il habille "Were We Once Lovers?". Mais parfois dans cette chambre, il n'est plus possible de déjouer l'angoisse. Alors Stuart s'assombrit, son regard devient dur, sa guitare menaçante et son ton amer. Oui, peut-être qu'il ne peut pas faire grand chose, ainsi isolé dans ce cocon doux-amer qu'il s'est lui-même tissé, mais au moins il rêve. Et ce qu'on tient entre nos mains, cette Waiting Room, est un fragment de ce rêve.
Dans cette chambre au fond, Stuart a le temps. Tout le temps du monde. Cette solitude le protège autant qu'elle le piège. Alors Stuart se regarde dans la glace, examine ses fêlures, recompose les pièces de puzzle d'un cœur mille fois brisé. Dans sa chambre, comme un véritable orfèvre qui sculpte puis déguise délicatement ses petites poupées en bois, Stuart lui aussi passe son temps à habiller avec élégance (et avec des doigts qu'on s'imagine longs et fins) ses petits trésors de chansons douces. C'est un peu triste certes, mais difficile de résister à l'envie d'endosser le costume du voyou voyeur qui, par le petit trou de la serrure, observe l'homme isolé faire son office. Car cette scène a la beauté du secret, la beauté d'une confidence intime destinée à ne rester qu'entre lui et toi.
Il n'appartient qu'à nous désormais, de briser ou non le secret, de se faire du mal... "comme seuls en sont capables les amants".
Très bon 16/20 | par X_Wazoo |
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