Fiona Apple

The Idler Wheel

The Idler Wheel

 Label :     Epic 
 Sortie :    juin 2012 
 Format :  Album / CD  Vinyle   

C'est en néophyte complet que je viens vous parler du nouvel album de Fiona Apple, The Idler Wheel. Je ne m'embêterai pas à vous restituer l'histoire de l'artiste, apprise sur le tard, ça reviendrait à réchauffer du wikipédia... Contentons nous de ceci : Fiona est de retour après 7 ans, et son caractère est aussi trempé que sa vie est bordélique.

Forte d'une production qu'elle a choisi de rendre inexistante, la pomme brune n'a plus nulle part où se cacher, pas de grands arrangements derrière lesquels s'abriter ni de production foireuse, comme lors du buzz médiatique autour de son dernier essai (cf l'ami Wiki). Et ça tombe bien, tant elle semble n'avoir d'autre envie que de se foutre à poil. Comme toujours, me direz-vous... Fiona Apple s'est toujours chantée elle-même, ses peines de cœur, ses histoires tristes, ses colères et ses conceptions du monde. Sauf que cette fois, la musique suit : un piano, un percussionniste (Charley Drayton, exceptionnel ici), et c'est tout. Tout ce qui accompagne la voix nue de Fiona sur les dix pistes qui composent The Idler Wheel.

Une voix dévastée pour accompagner des textes durs. Sans la musique, l'ensemble des paroles de l'album donnerait au péquenaud moyen l'idée d'investir dans l'achat d'une corde solide et d'une chaise branlante. On y parle d'amour à sens unique, ("Jonathan"), d'autodestruction compulsive ("Daredevil"), de colère froide ("Periphery"), de désespoir apitoyé ("Left Alone") et autre paranoïa amoureuse ("Werewolf"). Armée d'images fortes, de formules bien tournées et d'un bagage solide question expériences foireuses, Fiona enrobe ses malheurs dans des arrangements de piano burlesques et des percussions subtiles et entraînantes. Cet écrin léger, mêlé aux prouesses vocales de la demoiselle, tire le contenu littéraire par le haut et évite la déprime totale ! Car la voix de Fiona, plus mature que jamais au crépuscule de ses 34 ans, peut tout se permettre. Oscillant entre volupté soul et nonchalance jazz, maniant aussi bien la rage vengeresse que le désespoir éploré, la chanteuse porte avec son seul organe l'ensemble de l'album. Les instruments ne sont que de simples touches finales... des arrangements, rien de plus. Ainsi, sur "Hot Knife", tandis qu'elle récite à toute vitesse une comptine sur fond de percus tribales étouffées, un véritable canon se met en place, où une dizaine de Fiona Apple se tirent la bourre dans une explosion vocale parfaitement maîtrisée.
Hésitant entre la naïveté et le cynisme, Fiona fait se côtoyer, parfois au sein de la même chanson, piques narquoises et déclarations touchantes. Capable de sortir une punchline telle que : "I ran out of white dove feathers/ To soak out the hot piss that comes throught your mouth/ Everytime you adress me" (sur la bien-nommée "Regrets") et d'évoquer une image aussi magnifique que : "The lava of a volcano/ Shot up hot from under the sea/ One thing leads to another/ And you made an island of me" (sur "Werewolf", la perle du disque).

D'une grande richesse en dépit de (ou grâce à) sa production minimale, cet album de Fiona Apple, le seul que j'ai écouté à l'heure où je conclue cette chronique, est une réussite mérité. Le résultat d'une prise de risque assumée par une artiste animée par le sentiment grisant d'être le seul maître à bord. Le succès commercial ne sera peut-être pas au rendez-vous, aucun single franchement radio-friendly à l'horizon... M'est avis que dame Apple s'en fiche.
Et qu'importe si les chansons apportent de l'eau au moulin des grands pessimistes de ce monde, car comme l'a si bien dit mademoiselle Fiona Apple ; Nothing wrong when a song ends in a minor key.


Excellent !   18/20
par X_Wazoo


  Le titre complet de l'album est The Idler Wheel Is Wiser Than The Driver Of The Screw And Whipping Cords Will Serve You More Than Ropes Will Ever Do


 Moyenne 13.00/20 

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Posté le 30 septembre 2012 à 10 h 52

Y'a quelque chose qui cloche avec cet album. Déjà la pochette présente un visage lugubre, défiguré, inachevé aux couleurs d'arlequin. Une façon trop peu subtile pour Fiona Apple de mettre les auditeurs sans traîner sur la voie de ses nouveaux malheurs, de redorer son image de marque qui nous tire toujours une larmichette quand on y pense et a pâti d'une production pitoyable sur Extraordinary Machine (le bootleg de l'album produit avec Jon Brion qui tourne n'a pas grand-chose à se reprocher). Et puis comme si cela ne suffisait pas, comme si sa détresse reine devait accoucher avant même d'être entendue, l'américaine ressort le coup du titre interminable comme elle l'avait fait pour When The Pawn... ce qui est d'autant plus drôle puisqu'au départ ce devait être simplement et solennellement : Absolutely. Moins vendeur il est vrai. A méditer. A la place nous avons donc cette piteuse métaphore : The Idler Wheel Is Wiser Than The Driver Of The Screw, And Whipping Cords Will Serve You More Than Ropes Will Ever Do.

Avec autant de preuves de son inquiétude de ne pas être prise au sérieux, comment peut-on accueillir cet album si ce n'est par de la déception ? Car il ne suffit pas de recréer tout un environnement si c'est pour ne rien en faire. The Idler Wheel apparaît de suite moins polémique que ses prédécesseurs dans la syntaxe et les attaques au piano. Un certain relâchement se fait sentir alors qu'on était en droit d'attendre avec ce packaging des compositions plus frontales, à vif peut-être même saignantes. Si les airs pop grossiers de Extraordinary Machine sont oubliés, force est de reconnaître que Fiona Apple s'enfouit pour le coup dans des airs de piano bar lénifiant qui manquent d'aspérités auxquelles on puisse s'accrocher ou des schémas cabaret caricaturaux ("Left Alone" qui fait ses gammes, "Periphery" aux sons rondouillards de saloon et de pieds raclant le sol irritant) qui n'ont rien à voir avec tout ce qui a été promis. Mais ce qui gène le plus dans cette affaire, c'est indubitablement son chant si l'on peut appeler ça ainsi. Apple n'a jamais fait autant de mines et si mal retranscrit ses états d'âme. Certes on ne peut pas espérer qu'à maintenant trente cinq ans elle ait gardé son timbre et ses verbes bruts de décoffrage mais là s'en est trop. Elle livre ses textes avec un tel détachement, une telle formalité qu'il est impossible de ne pas prendre cela pour une trahison. Dès "Every Single Night" elle lance ses onomatopées grotesques, braille sur "Darevil" comme si elle faisait du boulevard, fait la pimbêche en minaudant un "Left Alone" qui laisse de marbre, beugle aussi fort qu'une vache conduite à l'abattoir ("Regret") et comble du comble sort de derrières les fagots une incantation tribale en canon à faire danser Simon et Pumbaa autour d'un feu de joie sous des roulements de tambours. Une horreur.

Fiona Apple disait sur "Sleep To Dream" (Tidal, 1996) 'this mind, this body, and this voice cannot be stifled by your deviant ways' et pourtant la voila qui, sans l'aide de personne, s'étouffe dans ce grand déballage où s'accumulent faiblesses lyriques et mélopées de bas étages. The Idler Wheel fait perdre ici toute légitimité et crédit à ses récits de coeur. Qui croyait-elle tromper avec ses choix esthétiques vermoulus ? Elle est bouffée jusqu'au trognon. Tout n'est que du cinéma ! Du grand n'importe quoi...
Sans intérêt   8/20







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