Fiona Apple
Tidal |
Label :
Clean Slate |
||||
A 18 ans, Fiona Apple enregistre son premier album sous la tutelle d'une signature immédiate dans la cour des grands, et se laisse driver pour le marketing.
Mais derrière le glamour et la pureté du noir et blanc des photos, et au-delà du bleu intense des yeux de la couverture de ce journal intime se déguise un chaos mental comme un loup dans la bergerie.
Les radios furent également peu hésitantes, bien qu'aucun des 10 chapitres de l'œuvre ne soit sous les 4 minutes, proposant de nombreux spoilers de cette histoire (5) qui ne pouvait être comprise que dans sa lecture intégrale. Les âmes de bonnes volontés s'appuyant uniquement sur ses diffusions n'en comprirent le charme qu'une fois ce bout de vie entre leurs mains.
"Sleep To Dream" est une lente ouverture plongeant dans le sombre songe qu'est Tidal. Un évanouissement soudain par ce vrombissement bestial accompagnant un groove léger mais enroulé de l'instrument chamberlain, parfaite superposition sonore de l'ivresse troublante du rêve, à l'image de tous les autres arrangements de Jon Brion (futur producteur de When The Pawn). Un songe dans lequel la jeune fille ne prône pourtant qu'un retour à la réalité, mais n'a pas la force de remonter vers l'éveil, et ne peut que descendre tel Alice dans le terrier pour 52 minutes de voyage irréel hors du temps.
"Sullen Girl" l'engage en complaisance dans son apitoiement et le ‘calme de l'océan' qui l'immerge (le vibraphone, également du domaine du sommeil), et l'amène de nouveau à faire comme l'héroïne du roman de Lewis Carrol : tourner en rond en faisant la danse saugrenue de Monsieur ‘Dodo', pour ne jamais arriver à sécher (ici ses larmes).
L'immaturité de "Shadowboxer", dont "The Child Is Gone" est la symétrique conséquence, met une gamine fronçant les sourcils à l'épreuve, effrayée de peser le pour et le contre d'un choix qui la rendra malheureuse de toute façon. De cette gracieuse marche funèbre de son esprit et de son cœur, Le morceau traîne logiquement les pieds vers ce choix : "Criminal".
L'anecdote amoureuse de "Criminal" est donc pleine de remord, une rédemption difficile où la manipulatrice a ‘besoin d'une bonne défense' pour avoir voulue cacher la vraie nature de ses sentiments, pour avoir peint les roses en rouge. Le long dénouement labyrinthique du morceau en est alors l'illustration pour y échapper, et "Slow Like Honey" le retour momentané au calme solitaire pour reprendre son souffle. Ceci pour malheureusement aussi constater que plus on avance (s'enfonce) dans ce rêve, plus le chemin s'efface, et plus ce rêve est un cauchemar. L'appel à l'aide de "The First Taste", prémice sensuel du nouveau r'n'b à la saveur orientale envoûtante, n'est ainsi que l'unique solution pour retrouver une direction. Un retour charmeur sur ses décisions, une concession sous forme de danse nuptiale (autant que le clip est une concession commerciale comparée aux précédents) qui ne fera finalement qu'aggraver les choses pour "Never Is A Promise" : les cordes sont les ailes de l'envol de la narratrice dans la vidéo de Stéphane Sednaoui, et le piano le bref moment de lucidité final au ton fataliste amenant la mutation évoquée dans "The Child Is Gone" et le "Pale September" qui suit.
La cassure brusque mais remplie d'extase des rythmes de "Carrion" (Matt Chamberlain y est pour beaucoup en Mad Hatter) traduit à merveille l'effort de l'élan à prendre avant la rupture totale : celle qui vient du cœur à laquelle la chanteuse fait allusion, mais également celle du retour à la lumière. L'Alice de ce récit musical s'évertue à vouloir rattraper son bonhomme qui n'en a rien à foutre (le lapin blanc), pour simplement lui dire qu'elle trouve la force de s'en aller. Désir aussi contradictoire que de parler de la réalité à travers un rêve, reflet de la triste vérité de l'autre coté du miroir : en surface, le viol qu'elle a subie étant enfant l'a autant révoltée qu'anéantie, et son sommeil devient le seul moyen de chercher un peu d'humanité, de trouver le repos. Ne dit-on pas ‘fermer les yeux' sur...
Epeler les maux en musique sera pour elle le dernier ressort pour réaliser son unique rêve : passer de chenille à papillon.
Mais derrière le glamour et la pureté du noir et blanc des photos, et au-delà du bleu intense des yeux de la couverture de ce journal intime se déguise un chaos mental comme un loup dans la bergerie.
Les radios furent également peu hésitantes, bien qu'aucun des 10 chapitres de l'œuvre ne soit sous les 4 minutes, proposant de nombreux spoilers de cette histoire (5) qui ne pouvait être comprise que dans sa lecture intégrale. Les âmes de bonnes volontés s'appuyant uniquement sur ses diffusions n'en comprirent le charme qu'une fois ce bout de vie entre leurs mains.
"Sleep To Dream" est une lente ouverture plongeant dans le sombre songe qu'est Tidal. Un évanouissement soudain par ce vrombissement bestial accompagnant un groove léger mais enroulé de l'instrument chamberlain, parfaite superposition sonore de l'ivresse troublante du rêve, à l'image de tous les autres arrangements de Jon Brion (futur producteur de When The Pawn). Un songe dans lequel la jeune fille ne prône pourtant qu'un retour à la réalité, mais n'a pas la force de remonter vers l'éveil, et ne peut que descendre tel Alice dans le terrier pour 52 minutes de voyage irréel hors du temps.
"Sullen Girl" l'engage en complaisance dans son apitoiement et le ‘calme de l'océan' qui l'immerge (le vibraphone, également du domaine du sommeil), et l'amène de nouveau à faire comme l'héroïne du roman de Lewis Carrol : tourner en rond en faisant la danse saugrenue de Monsieur ‘Dodo', pour ne jamais arriver à sécher (ici ses larmes).
L'immaturité de "Shadowboxer", dont "The Child Is Gone" est la symétrique conséquence, met une gamine fronçant les sourcils à l'épreuve, effrayée de peser le pour et le contre d'un choix qui la rendra malheureuse de toute façon. De cette gracieuse marche funèbre de son esprit et de son cœur, Le morceau traîne logiquement les pieds vers ce choix : "Criminal".
L'anecdote amoureuse de "Criminal" est donc pleine de remord, une rédemption difficile où la manipulatrice a ‘besoin d'une bonne défense' pour avoir voulue cacher la vraie nature de ses sentiments, pour avoir peint les roses en rouge. Le long dénouement labyrinthique du morceau en est alors l'illustration pour y échapper, et "Slow Like Honey" le retour momentané au calme solitaire pour reprendre son souffle. Ceci pour malheureusement aussi constater que plus on avance (s'enfonce) dans ce rêve, plus le chemin s'efface, et plus ce rêve est un cauchemar. L'appel à l'aide de "The First Taste", prémice sensuel du nouveau r'n'b à la saveur orientale envoûtante, n'est ainsi que l'unique solution pour retrouver une direction. Un retour charmeur sur ses décisions, une concession sous forme de danse nuptiale (autant que le clip est une concession commerciale comparée aux précédents) qui ne fera finalement qu'aggraver les choses pour "Never Is A Promise" : les cordes sont les ailes de l'envol de la narratrice dans la vidéo de Stéphane Sednaoui, et le piano le bref moment de lucidité final au ton fataliste amenant la mutation évoquée dans "The Child Is Gone" et le "Pale September" qui suit.
La cassure brusque mais remplie d'extase des rythmes de "Carrion" (Matt Chamberlain y est pour beaucoup en Mad Hatter) traduit à merveille l'effort de l'élan à prendre avant la rupture totale : celle qui vient du cœur à laquelle la chanteuse fait allusion, mais également celle du retour à la lumière. L'Alice de ce récit musical s'évertue à vouloir rattraper son bonhomme qui n'en a rien à foutre (le lapin blanc), pour simplement lui dire qu'elle trouve la force de s'en aller. Désir aussi contradictoire que de parler de la réalité à travers un rêve, reflet de la triste vérité de l'autre coté du miroir : en surface, le viol qu'elle a subie étant enfant l'a autant révoltée qu'anéantie, et son sommeil devient le seul moyen de chercher un peu d'humanité, de trouver le repos. Ne dit-on pas ‘fermer les yeux' sur...
Epeler les maux en musique sera pour elle le dernier ressort pour réaliser son unique rêve : passer de chenille à papillon.
Intemporel ! ! ! 20/20 | par X_YoB |
Posté le 22 décembre 2005 à 10 h 51 |
Bientôt la trentaine pour miss Fiona Apple, et pas une ride (parce qu'elle le vaut bien ?). A la place, un nouvel album très sympa, Extraordinary Machine... très sympa, oui, mais il manque un ptit quelque chose... quoi ? Certains vont faire 10 fois le tour du pot, mais autant y aller direct : 'C'est pas Tidal'.
Ben oui, Redde Caesari quae sunt Caesaris (cf. Astérix, Obelix & Cie) : c'est bien Tidal qui a 'tout déchiré' il y a maintenant 9 ans, et qui trotte dans ma tête quand on évoque le nom de Miss Pomme. Alors la musique de la Fiona, pour résumer (et seulement pour résumer), c'est un peu de jazz, un peu de pop, un peu de... heu je crois qu'on appelle ça la soul... Et qu'ouïs-je ? Que Fiona Apple, c'est je cite, 'presque aussi bien qu'Alicia Keys et Harry Connick Jr ?? Un ange passe...
Non, parce que je veux bien être ce modèle de tolérance tant loué par mes amis, mais il y a des limites: moi je trouve ça pas pareil, mais alors pas pareil du tout. Il me semble quand même que pour une fois, on a affaire à une fille qui s'est créé un véritable univers musical, avec des trucs à proposer, qu'on aime ou pas (et moi oui), y'a du neuf bordel !
Enfin, les plus irréductibles (j'aime vraiment beaucoup asterix ^^) d'entre vous me poseront la question : 'Mais que fout une fille qui a vendu 3 millions d'albums sur ce X_site ?' Pour les curieux, ne passez pas à côté... Libre à vous de vous faire votre avis, mais perso au lieu d'entendre des trucs comme 'ah oui c'est un nouvel accessoire de l'iPod !' je préfère carrément qu'on me dise 'j'ai écouté, j'aime pas'. Au moins vous aurez testé.
Ben oui, Redde Caesari quae sunt Caesaris (cf. Astérix, Obelix & Cie) : c'est bien Tidal qui a 'tout déchiré' il y a maintenant 9 ans, et qui trotte dans ma tête quand on évoque le nom de Miss Pomme. Alors la musique de la Fiona, pour résumer (et seulement pour résumer), c'est un peu de jazz, un peu de pop, un peu de... heu je crois qu'on appelle ça la soul... Et qu'ouïs-je ? Que Fiona Apple, c'est je cite, 'presque aussi bien qu'Alicia Keys et Harry Connick Jr ?? Un ange passe...
Non, parce que je veux bien être ce modèle de tolérance tant loué par mes amis, mais il y a des limites: moi je trouve ça pas pareil, mais alors pas pareil du tout. Il me semble quand même que pour une fois, on a affaire à une fille qui s'est créé un véritable univers musical, avec des trucs à proposer, qu'on aime ou pas (et moi oui), y'a du neuf bordel !
Enfin, les plus irréductibles (j'aime vraiment beaucoup asterix ^^) d'entre vous me poseront la question : 'Mais que fout une fille qui a vendu 3 millions d'albums sur ce X_site ?' Pour les curieux, ne passez pas à côté... Libre à vous de vous faire votre avis, mais perso au lieu d'entendre des trucs comme 'ah oui c'est un nouvel accessoire de l'iPod !' je préfère carrément qu'on me dise 'j'ai écouté, j'aime pas'. Au moins vous aurez testé.
Sympa 14/20
Posté le 17 janvier 2006 à 14 h 52 |
HUMMM... Tidal.
Il y a des disques comme ça où j'ai du mal à me jetter à l'eau, car ce que je ressens en écoutant ce disque est fort, et que j'ai du mal à nommer ces sentiments.
Inutile de décortiquer l'album titre par titre, je ne ferais pas mieux que X_YoB. J'ai toujours du mal à réaliser que la demoiselle auteur-compositeur-interprète a écrit cette collection de morceaux à 18 ans.
Que de maturité dans les textes, Que de risques pris dans les compositions.
Je me souviens d'un entretien réalisé par Les Inrocks à l'époque de la sortie du disque où le journaliste avait organisé une rencontre entre Fiona et Chan Marshall (Cat Power, qui venait de publier What Would The Community Think). La rencontre avait été passionnante.
Le début avait été tendu, les deux jeunes femmes ayant peur de devoir argumenter des choix difficiles à expliquer, puis ces deux morceaux de nerfs à fleur de peau s'étaient découverte plein de similarités :
l'urgence, le besoin viscéral d'écrire, l'importance des sujets traités, la peur panique d'interpréter ces morceaux de vie sur scène, la joie de voir que ce que l'on vient de mettre au monde parle à d'autres gens.....
Un disque... salutaire.
Il y a des disques comme ça où j'ai du mal à me jetter à l'eau, car ce que je ressens en écoutant ce disque est fort, et que j'ai du mal à nommer ces sentiments.
Inutile de décortiquer l'album titre par titre, je ne ferais pas mieux que X_YoB. J'ai toujours du mal à réaliser que la demoiselle auteur-compositeur-interprète a écrit cette collection de morceaux à 18 ans.
Que de maturité dans les textes, Que de risques pris dans les compositions.
Je me souviens d'un entretien réalisé par Les Inrocks à l'époque de la sortie du disque où le journaliste avait organisé une rencontre entre Fiona et Chan Marshall (Cat Power, qui venait de publier What Would The Community Think). La rencontre avait été passionnante.
Le début avait été tendu, les deux jeunes femmes ayant peur de devoir argumenter des choix difficiles à expliquer, puis ces deux morceaux de nerfs à fleur de peau s'étaient découverte plein de similarités :
l'urgence, le besoin viscéral d'écrire, l'importance des sujets traités, la peur panique d'interpréter ces morceaux de vie sur scène, la joie de voir que ce que l'on vient de mettre au monde parle à d'autres gens.....
Un disque... salutaire.
Excellent ! 18/20
Posté le 05 octobre 2006 à 18 h 51 |
Vous savez quoi? J'adore cette nana.
19 ans à peine et déjà un talent monstre, un corps de rêve et une voix à tomber... Bon comme ça à la base, c'était pas gagné tout de suite (étant fan du corpulent Buzz Osborne) mais il m'a suffit de peu pour tomber sous le charme de la donzelle: un disque (When The Pawn...) et quelques écoutes, tout juste assez pour être à genoux. Ni une ni deux, j'attaque son premier album...
Et dès les premières notes de "Sleep To Dream", la chose devient claire: Fiona est habitée, elle joue avec son coeur et c'est pas pour rire. Pas de calculs, pas de faux semblants. L'instrumentalisation est loin de sonner vraiment brute, beaucoup de cordes et d'effets, mais on ressent une essence particulière, viscérale et primitive...
Fait unique: Fiona Apple pourrait être la copine de ta petite soeur, avec ses arrangements sirupeux et ses beaux cheveux longs, mais elle ne s'en laisse pas compter, refusant de se laisser ranger à côté d'"Un Dos Tres" (ou autres espagnolades à la mode) dans sa discothèque.
C'est une artiste avec un grand A, touchante ("Carrion"), drôle ("Criminal") et suave ("Pale September").
Objectivement -et c'est très difficile- il y a des tubes imparables comme "Shadowboxer", mais aussi malheureusement du plus médiocre ("Never Is A Promise") dont on se serait passé parce que trop euh... Comment dire ?... Trop too much quoi !
Moins parfait donc que son succésseur, juste nécessaire.
19 ans à peine et déjà un talent monstre, un corps de rêve et une voix à tomber... Bon comme ça à la base, c'était pas gagné tout de suite (étant fan du corpulent Buzz Osborne) mais il m'a suffit de peu pour tomber sous le charme de la donzelle: un disque (When The Pawn...) et quelques écoutes, tout juste assez pour être à genoux. Ni une ni deux, j'attaque son premier album...
Et dès les premières notes de "Sleep To Dream", la chose devient claire: Fiona est habitée, elle joue avec son coeur et c'est pas pour rire. Pas de calculs, pas de faux semblants. L'instrumentalisation est loin de sonner vraiment brute, beaucoup de cordes et d'effets, mais on ressent une essence particulière, viscérale et primitive...
Fait unique: Fiona Apple pourrait être la copine de ta petite soeur, avec ses arrangements sirupeux et ses beaux cheveux longs, mais elle ne s'en laisse pas compter, refusant de se laisser ranger à côté d'"Un Dos Tres" (ou autres espagnolades à la mode) dans sa discothèque.
C'est une artiste avec un grand A, touchante ("Carrion"), drôle ("Criminal") et suave ("Pale September").
Objectivement -et c'est très difficile- il y a des tubes imparables comme "Shadowboxer", mais aussi malheureusement du plus médiocre ("Never Is A Promise") dont on se serait passé parce que trop euh... Comment dire ?... Trop too much quoi !
Moins parfait donc que son succésseur, juste nécessaire.
Très bon 16/20
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