The Minutemen
Double Nickels On The Dime |
Label :
SST |
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Quand en 1983, les Minutemen apprennent que leur partenaire de label, Hüsker Dü, prépare un double-album, en l'occurrence Zen Arcade, ils changent leurs plans et choississent eux aussi d'enregistrer un double-album. Double Nickels On The Dime leur permet ainsi de faire exploser leur folie créatrice sur plus de 40 (!) chansons très courtes, tournant pour la plupart en-dessous des 2 minutes. Il en ressort un album aussi réussi et ambitieux que le London Calling des Clash. Et n'allez pas croire que c'est une comparaison facile témoignant d'un manque flagrant d'imagination de la part du chroniqueur. Non, je suis un fan absolu des Clash. Et quand je compare un album quel qu'il soit à London Calling, soyez-en sûr, c'est que j'y ai réfléchi longuement...
Là où London Calling proposait un savant mix de rock, pop, reggae et dub, Double Nickels On The Dime s'invite lui sur des terrains free jazz et funk tout en conservant, à l'image des Clash, une dynamique punk. Dès le premier titre "Anxious Mo-Fo", nous sommes en compagnie d'un groupe qui, grâce à une section rythmique hors du commun (Mike Watt à la basse et le méconnu George Hurlez à la batterie) possède un groove implacable. Le punk-funk du Gang Of Four ou le funk blanc des Talking Heads n'est certes jamais très loin mais "Viet Nam", "Love Dance" ou encore "West Germany" témoignent d'une originalité certaine, notamment grâce au jeu de guitare très particulier de D. Boon, parfois proche du jazz. Les Red Hot Chili Peppers, à n'en pas douter, ont certainement puisé une grande partie de leur inspiration à l'écoute de toutes ces pépites furieuses et dansantes qui parsèment l'album.
Les Minutemen sont bien loin du punk hardcore de leurs débuts qu'ils retrouvent néanmoins avec joie sur l'hilarante mais engagée "Political Song For Michael Jackson To Sing". Car les Minutemen, faut-il le rappeler, sont des agitateurs politiques marxisants dans ces terribles années reaganiennes, un peu à l'image de R.E.M.. Si vous êtes un aficionado des exploits des demeurés de Jackass, vous devriez reconnaître "Corona" qui bien qu'utilisée comme générique pour cette émission consumériste n'en est pas moins une chanson dénonçant l'impérialisme américain.
Mais ce qui frappe avant tout dans cet album, c'est l'extraordinaire diversité musicale que nous propose les Minutemen. D'où la comparaison avec London Calling. L'avant-gardiste et primitif "You Need The Glory" succède à la pop de "History Lesson - Part II". L'instrumental folk "Cohesion" côtoie le blues-rock haché de "It's Expected I'm Gone" (dont l'intro de batterie titillera l'oreille des fans de Nirvana, je n'en dis pas plus...). Les trois californiens n'ont aucune mauvaise conscience punk à reprende du Steely Dan, "Doctor Wu", ou même du Van Halen, "Ain't Talkin' Bout Love". A noter que cette dernière chanson disparaît pour des raisons techniques obscures de la dernière édition CD (1990) réduisant l'album à un simple. Tout comme "Little Man With A Gun In His Hand" et "Mr. Robot's Holy Orders". "Three Car Jam" qui ne figurait pas sur la version originale, clôt désormais ce chef-d'oeuvre.
Oui le mot est lâché, un chef-d'oeuvre. Malgré cela, peu de gens ont directement à l'esprit ce double album lorsque l'on parle de rock indé. Et pourtant, Double Nickels On The Dime fait bien partie de ces incourtounables du rock des années 80, au même titre qu'un Daydream Nation ou d'un Psychocandy. De toute façon, quand un groupe punk talentueux décide un beau jour de rendre le plus bel hommage qui soit au rock'n'roll au sens large, le résultat est forcément intemporel...
Là où London Calling proposait un savant mix de rock, pop, reggae et dub, Double Nickels On The Dime s'invite lui sur des terrains free jazz et funk tout en conservant, à l'image des Clash, une dynamique punk. Dès le premier titre "Anxious Mo-Fo", nous sommes en compagnie d'un groupe qui, grâce à une section rythmique hors du commun (Mike Watt à la basse et le méconnu George Hurlez à la batterie) possède un groove implacable. Le punk-funk du Gang Of Four ou le funk blanc des Talking Heads n'est certes jamais très loin mais "Viet Nam", "Love Dance" ou encore "West Germany" témoignent d'une originalité certaine, notamment grâce au jeu de guitare très particulier de D. Boon, parfois proche du jazz. Les Red Hot Chili Peppers, à n'en pas douter, ont certainement puisé une grande partie de leur inspiration à l'écoute de toutes ces pépites furieuses et dansantes qui parsèment l'album.
Les Minutemen sont bien loin du punk hardcore de leurs débuts qu'ils retrouvent néanmoins avec joie sur l'hilarante mais engagée "Political Song For Michael Jackson To Sing". Car les Minutemen, faut-il le rappeler, sont des agitateurs politiques marxisants dans ces terribles années reaganiennes, un peu à l'image de R.E.M.. Si vous êtes un aficionado des exploits des demeurés de Jackass, vous devriez reconnaître "Corona" qui bien qu'utilisée comme générique pour cette émission consumériste n'en est pas moins une chanson dénonçant l'impérialisme américain.
Mais ce qui frappe avant tout dans cet album, c'est l'extraordinaire diversité musicale que nous propose les Minutemen. D'où la comparaison avec London Calling. L'avant-gardiste et primitif "You Need The Glory" succède à la pop de "History Lesson - Part II". L'instrumental folk "Cohesion" côtoie le blues-rock haché de "It's Expected I'm Gone" (dont l'intro de batterie titillera l'oreille des fans de Nirvana, je n'en dis pas plus...). Les trois californiens n'ont aucune mauvaise conscience punk à reprende du Steely Dan, "Doctor Wu", ou même du Van Halen, "Ain't Talkin' Bout Love". A noter que cette dernière chanson disparaît pour des raisons techniques obscures de la dernière édition CD (1990) réduisant l'album à un simple. Tout comme "Little Man With A Gun In His Hand" et "Mr. Robot's Holy Orders". "Three Car Jam" qui ne figurait pas sur la version originale, clôt désormais ce chef-d'oeuvre.
Oui le mot est lâché, un chef-d'oeuvre. Malgré cela, peu de gens ont directement à l'esprit ce double album lorsque l'on parle de rock indé. Et pourtant, Double Nickels On The Dime fait bien partie de ces incourtounables du rock des années 80, au même titre qu'un Daydream Nation ou d'un Psychocandy. De toute façon, quand un groupe punk talentueux décide un beau jour de rendre le plus bel hommage qui soit au rock'n'roll au sens large, le résultat est forcément intemporel...
Intemporel ! ! ! 20/20 | par Sirius |
Posté le 01 juillet 2013 à 18 h 06 |
Pourquoi eux plus que les autres ? Tout d'abord, l'intelligence des textes. Simples et incisifs, percutant, hargneux, qui n'oublient jamais la question sociale et le constat sociologique, sans tomber dans le gauchisme bête et gentillet de l'anti racisme et du "prenons-nous tous par la main".
Ensuite, éclectisme : colère punk dans le phrasé, mais les sonorités vont puiser autant dans le couplet-refrain hardcore élémentaire, que dans le free jazz à la Coleman, le funk à la The Meters, ou encore la guitare andalouse (mais si !).
Déjà avec The Punch Line (1981) et What Makes A Man Start Fires ? (1983), les Minutmen montrent l'étendue de leurs talents musicaux, et d'écriture. Puis vient Double Nickels On The Dime en 1984. Construit sur le même principe que les précédents, "We Jam Econo", les larrons abordent le Vietnam, le travail en usine, Jésus, l'état du monde (qui n'a pas vraiment changé), la Corona.
Parfois sur le fil du rasoir, et à d'autres moments, plus apaisés, l'album des Minutemen est l'exemple de l'intelligence dans la musique : faire sa musique, crée une économie parallèle, et faire participer le public (l'album posthume Ballot Result de 1986 en est l'exemple). Tout simplement bon et cathartique, Double Nickels On The Dime est indispensable pour comprendre la scène indé nord américaine des années 80. Quarante chansons, deux minutes en moyenne. Plus qu'une crotte de nez, c'est un concentré de sueur prolo qui suinte ici, et se déposent sur les débuts des années Reagan. L'hymne (et le clip) qu'est "This Ain't No Picnic" résume à merveille l'idée.
Intégrité, intelligence, talent musicaux, l'histoire était trop belle. En décembre 1985, D. Boon aura la mauvaise idée de mourir dans un accident de voiture. Les potes rangent les instrus, le show se termine définitivement.
"A défaut de devenir les plus grands, on devient des légendes" comme dirait l'autre (à l'époque). Aujourd'hui, vous avez le choix entre... ni l'un, ni l'autre.
Ensuite, éclectisme : colère punk dans le phrasé, mais les sonorités vont puiser autant dans le couplet-refrain hardcore élémentaire, que dans le free jazz à la Coleman, le funk à la The Meters, ou encore la guitare andalouse (mais si !).
Déjà avec The Punch Line (1981) et What Makes A Man Start Fires ? (1983), les Minutmen montrent l'étendue de leurs talents musicaux, et d'écriture. Puis vient Double Nickels On The Dime en 1984. Construit sur le même principe que les précédents, "We Jam Econo", les larrons abordent le Vietnam, le travail en usine, Jésus, l'état du monde (qui n'a pas vraiment changé), la Corona.
Parfois sur le fil du rasoir, et à d'autres moments, plus apaisés, l'album des Minutemen est l'exemple de l'intelligence dans la musique : faire sa musique, crée une économie parallèle, et faire participer le public (l'album posthume Ballot Result de 1986 en est l'exemple). Tout simplement bon et cathartique, Double Nickels On The Dime est indispensable pour comprendre la scène indé nord américaine des années 80. Quarante chansons, deux minutes en moyenne. Plus qu'une crotte de nez, c'est un concentré de sueur prolo qui suinte ici, et se déposent sur les débuts des années Reagan. L'hymne (et le clip) qu'est "This Ain't No Picnic" résume à merveille l'idée.
Intégrité, intelligence, talent musicaux, l'histoire était trop belle. En décembre 1985, D. Boon aura la mauvaise idée de mourir dans un accident de voiture. Les potes rangent les instrus, le show se termine définitivement.
"A défaut de devenir les plus grands, on devient des légendes" comme dirait l'autre (à l'époque). Aujourd'hui, vous avez le choix entre... ni l'un, ni l'autre.
Intemporel ! ! ! 20/20
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