Captain Beefheart

Trout Mask Replica

Trout Mask Replica

 Label :     Reprise 
 Sortie :    octobre 1969 
 Format :  Album / CD  Vinyle  K7 Audio   

Voilà un album qui confirme à quel point Captain Beefheart & His Magic Band sont une clique de dégénérés en puissance. Rien que la pochette du LP vous rend interrogatif sur le contenu. Réplique d'un masque de truite ? Humm, oui. Jetons donc un oeil sur les titres : "Dachau Blues", "Pachuco Cadaver", "Hair Pie Bake", "China Pig", "Neon Meat Dream Of An Octafish"... Pas de doute, on a atteint le sommet en matière d'excentricité et d'extravagance musicale.

Beaucoup de critiques considèrent que ce LP de 1969 est le sommet du 'Magic Band', la pièce maîtresse. Je ne suis pas d'accord : Safe As Milk est indétronable - ce n'est que mon avis. Cet album est sombre, même beaucoup trop, je ne ressens plus l'énergie produite sur le premier LP de 1967. Ce dernier était structuré autour d'un blues brutal intéressant, inventif et certes, un peu déroutant.

Mais Trout Mask Replica déçoit dans le capharnaüm intégral de certaines pistes. Rien que "Frownland" qui ouvre le bal déstabilise, on a l'impression que les musiciens sont bien alcoolisés et jouent chacun de leur côté sans même essayer de s'adapter. C'est une foire d'instruments impressionnante !

Je sais pertinemment que c'est l'effet recherché, je sais bien évidement que c'est du Beefheart tout craché, et cet univers de fou dangereux devrait justement faire tout le charme de ce LP. Mais je n'aime pas... Il faut écouter ce disque en ayant un sacré coup dans le nez. Au moins, on en rit.


Pas terrible   9/20
par Th0mas


 Moyenne 15.11/20 

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Posté le 22 décembre 2005 à 15 h 05

Les amis de Frank Zappa sont nos amis. Même si ce sont des loups-garous ayant forcé la dose de valium et régurgitant des comptines étranges passées à la sauce free-jazz, même (surtout) quand ils se promènent nus mais avec allégresse dans les contrées agréables de la folie et résistent à toute tentative d'explication 'rationnelle' (ha ha ha...) de leur comportement et de leurs frasques musicales, ce sont nos amis sans le moindre doute car ils savent par un miracle sans nom retranscrire dans des albums apocalyptiques, dont Trout Mask Replica est loin d'être le moindre, la fureur qui les habitent et les visions tragiques qui les hantent. Ce disque n'est pas du n'importe quoi, loin de là, même si a priori il s'en rapproche souvent, et malgré sa difficulté est parfaitement audible et qui plus est très intéressant pour les plus modérés, fascinant et hypnotique pour les autres. Il est certes tout d'abord très difficile de tirer de cela une quelconque logique, mais très vite peu importe. En effet, l'on ne peut que se laisser entraîner par l'énergie totalement déjantée de ce capitaine à l'équipage des plus éclectiques, qu'il dirige d'une main tremblante mais énergique, et qui réussit à nous communiquer son enthousiasme et sa démence. Comment rester de marbre face au vivifiant "Ella Guru", d'une ivresse quasi magique dans son excès, comment ne pas rire (ou trembler) en entendant cette voix d'outre-tombe venant régurgiter son "Dachau Blues" sans forme ni colonne vertébrale, ver de terre illuminé. L'on entend des soli sans cohérence de guitare ou de trompette, mais ils nous touchent profondément et subtilement, sans qu'il soit possible de savoir comment. Et, quoi qu'il arrive, chaque chanson recèle en son sein une singulière et très troublante harmonie, que ce soit dans ce riff paraissant soudain et sonnant si bizarrement juste au milieu de ce chaos musical, de cette phrase frappante de poésie au milieu d'un discours hermétique, ou tout simplement du talent sans égal qui permit à ces gens de nous surprendre en ficelant miraculeusement ces chansons qui n'en sont pas, et qui pourtant cachent un secret incroyablement neuf et lumineux à force d'efforts désarticulés. Si vous cherchiez de la musique proprement surréaliste, au sens noble du mot, jetez-vous sur Trout Mask Replica sans plus tarder.
Et puis, comment ne pas aimer un groupe qui glorifie les poulpes ?
Exceptionnel ! !   19/20



Posté le 24 septembre 2006 à 12 h 12

C'est en 1969 qu'une bande d'irresponsables commet l'irréparable. A peine signé sur Straight (label de l'ami Zappa), Beefheart met en chantier cette bizarrerie s'étalant sur pas loin de 80 minutes !
Trafiquant d'abord au piano des mélodies grandiloquentes, Von Vliet, en véritable despote, guide ses ouailles dans sa propre conception de la musique: déstructurée, libre, décomplexée et puisant sont inspiration dans l'expérience chimique...

Le résultat est plus qu'étonnant, le Magic Band nous proposant une sorte d'historique de la musique Américaine en pas moins de 28 leçons.
Du jazz (façon big band ou free), du blues, du rock, du negro spirituals ("The Dust Blows Forward'n The Dust Blows Back"), Beefheart se réapproprie totalement touts les genres, les additionnent et les conjuguent à merveille.
Très long, ce disque défendu par Lester Bangs (excusez du peu) ne parvient réellement à dévoiler touts ses charmes qu'au fil d'une écoute continue.
Pour autant, les compositions sont relativement audibles: les riffs sont cinglants, la batterie suit comme elle peut et la voix du capitaine Vliet, père Ubu fait roi, est tout simplement exceptionnelle.

Odieux pour les uns et messianique pour les autres, Trout Mask Replica ne laisse pas indifférent. Franck Black, Tom Waits (voir "Rain Dogs") et Franz Ferdinand (!) s'avouent être de grands fans du groupe. Aux Etats Unis, les ventes n'atteindraient pas les 100 000 exemplaires. Mais qui cela pourrait-il étonner?
Au prix d'un MacDo, payez vous le luxe d'un peu de folie.
Grand.
Excellent !   18/20



Posté le 14 novembre 2006 à 19 h 50

Acheté sous les conseils d'un ami, après avoir écouté et aimé Safe As Milk (le 1er album du groupe), et avoir lu à droite et à gauche que cet album était essentiel (cf. La Discographie Idéale de Phillipe Manoeuvre, Lester Bangs, John Peel, Piero Scaruffi, et plein d'autres pointures), je m'attendais à une claque.
Malgré les avertissements sur le fait que Trout Mask Replica était un album difficile.

Cette chronique n'a pas pour but de descendre ce disque, qui plaît et plaira sûrement à d'autres, car je pense qu'il est au dessus des jugements habituels sur la musique. On est face à une entreprise de déconstruction des repères rock tels qu'on les connaît. Captain Beefheart (Don Van Vliet) et son groupe magique prennent le contre-pied de toute la musique de l'époque. Peut-être par rejet, sûrement par humour.

Ce disque est plutôt drôle, ça sent le gros délire acide, et les paroles et chants sont souvent absurdes. Mais la folie de l'album ne semble pas gratuite pour autant : il y a malgré l'humour parfois potache ("Old Fart At Play") un certain pessimisme, quelque chose de sérieux dans des chansons comme "Dachau Blues" -l'exemple le plus flagrant de l'album- ou "My Human Gets Me Blues".
Trout Mask Replica semble être une représentation artistique du monde vu par Don Van Vliet. Artistique au sens abstrait. Une sorte de vision du monde et de sa folie.
Car musicalement on se retrouve avec une musique libre, souvent déstructurée (volontairement, et apparemment minutieusement coordonnée par Captain Beefheart), qui peut rendre le disque difficile d'accès. Certains titres gardent un pied dans le rock de l'époque (le rock à voix de loup-garou "Moonlight on Vermont", ou le blues avec "China Pig"), mais le reste sonne surtout expérimental. Et ravira sûrement les amateurs.

Un disque à part donc, déstabilisant. Qui va trop loin dans l'expérimental pour que je le considère comme un album de musique à écouter plutôt que comme une oeuvre d'art abstraite.
Trout Mask Replica mérite cependant une écoute (plutôt plusieurs) afin de s'en faire vraiment une idée.
Moyen   10/20



Posté le 11 juin 2007 à 23 h 35

Qui fut le plus important ? Les Beatles ou le Captain Beefheart ? Pour Lester Bangs, célèbre rock-critic, la question ne se posait même pas, Don Van Vliet l'emporte haut la main, grâce à cet album, cet album qui a été si important dans l'histoire de la musique. Cet album qui a été si influent chez les artistes ayant fait l'effort de l'écouter (cf les groupe new-wave : Talking Heads, Père Ubu et cie), cet album dont Matt Groening (créateur des Simpsons pour les incultes) aime à dire que c'est 'la pire chose qu'il ait jamais entendu'.

Alors non, cet album n'est pas facile à écouter, on peut même dire qu'il est quasiment impossible de l'écouter aujourd'hui pour une oreille expérimentée, ceci pour la simple et bonne raison que ce disque est un concentré de dissonances, d'aberrations harmoniques, ajoutez à cela une voix de fou furieux qui semble hurle à la lune... Seulement tout le monde est parti à force d'entendre ces cris, ça lui apprendra à vouloir bouleverser la pop music. Et oui déjà à l'époque on avait les standards à ne pas bouleverser, si ça ne sonnait pas de telle ou telle manière, si le guitariste ne jouait pas avec tel ou tel principe harmonique, le disque ne pouvait pas marcher, ce qui est la moindre des choses, on n'est pas là pour nous faire saigner les oreilles...

Ce disque tient de l'art brut, comme un bon gros diamant sale, qui ne révèle son éclat qu'après des efforts acharnés. Moi même quand j'ai écouté cet album il m'a semblé juste être une vulgaire tentative pour un psychopathe de mettre en ‘musique' ses émotions brutes... Et à force de faire des efforts d'écoute et d'interprétation, j'ai pris conscience qu'on avait là l'un des disques les plus importants de l'Histoire ! Aussi important que les deux premiers disques du Velvet Underground et bien plus écoutable que toutes les conneries que nous sortent les maisons de disque depuis 40 ans. Et puis si vous l'achetez, vous ferez parti des quelques 100 000 personnes l'ayant acheté depuis sa sortie il y'a de cela 38 ans...

Et pour ceux qui prétendent que cet album est inécoutable à jeun encore aujourd'hui, qu'est-ce que vous voulez que je vous dise... buvez, vous ne le regretterez pas, nom d'un poulpe !
Intemporel ! ! !   20/20



Posté le 13 juillet 2008 à 00 h 29

Vous ne pouvez pas vous imaginer la trogne de ma chère grand mère lorsque Trout Mask Replica s'est mit à geindre en plein apéro. C'était dans le salon, juste avant de manger, je crois que c'était un anniversaire, et il y avait toute la famille, et, que vous voulez, un ovni s'était posé sur la table basse. Ca a pris l'attention de tout le monde. C'était immédiat. Je me souviendrai toujours de la surprise générale qui flottait silencieusement, et la bonne grosse voix de Beefheart qui résonnait, effarante, sauvage. Tout semblait déchiqueté, pas clair, mal joué, sérieusement cinglé et je dois dire que je n'ai jamais retrouvé une telle impression par la suite, aussi forte et entière. Pour un peu ça avait ratissé sacrément large: tout le monde est passé à table illico.
Avec plusieurs écoutes on pige que Trout Mask Replica n'est pas une simple curiosité ou un moment de folie particulièrement productif. C'est une nouvelle voie qu'a consolidé Beefheart. Il faut considérer ce disque colossal comme un manifeste dans la pure gymnastique des avant-garde. C'est un langage tout à fait inédit et mature.
Déjà Trout Mask Replica, et bien... comment dire... ça swingue terriblement. C'est juste que la musique doit être perçue de travers, c'est à nous de changer de bord pour comprendre et danser peut être (c'est un peu le rôle l'art de nous sortir de notre condition non?). Et quand on pigé ce travers, c'est tout un mode que l'on découvre. La polyrythmie qui semble être au départ une simple connerie genre les soeurs Shaggs est en fait une vraie géométrie cohérente, trop radicale et sauvage peut être pour nos fortes têtes de popeux dont la mèche est parfois frileuse.
La réplique du masque de truite est une cure de jouvence, étirant nos réflexes auditifs bornés au 4/4, rafraichissant notre curiosité. nous retournant toujours aussi fort la gueule histoire de ne pas fondre dans le moule environnant, a dada sur son bidet.
Intemporel ! ! !   20/20



Posté le 25 janvier 2010 à 12 h 39

C'est l'album que vous devez absolument offrir, ou donner, à votre ami snob. Incontestablement, il s'agit d'un must. A la fois adoré des critiques, des musicologues, de Frank Zappa et même de ces populistes de Radiohead : qui dit mieux ?! Avec cet album, votre ami snob est sûr de faire fuir tous les jeanfoutres et esprits incultes qui pourraient encore rôder autour de chez lui. C'est le répressif idéal pour les moustiques et autres vermines grouillantes. Car seul environ (je n'ai pas fait le compte exact) 1 humain sur un million est assez audacieux pour écouter cette galette du début à la fin, ou même deux morceaux de suite. Faire partie d'une côterie aussi sélect est un véritable rêve pour votre ami snob. Il pourra en causer tout à loisir avec ses autres amis snobs et quelques musicologues particulièrement aventureux, le genre qui va vivre un an dans le fin fond de la papouasie pour mieux s'imprégner de son sujet d'étude. Malheureusement le cher Don Van Vliet alias Captain Beefheart n'a jamais fait mieux. Par la suite, il fera des albums assez audibles et même quelques morceaux franchement écoutables par le pékin moyen, très vulgaires donc, et ça, votre ami snob ne le supportera pas.
Un sommet. Mais un sommet à réserver absolument pour nos amis snobs et (/ou) musicologues.
Inaudible ! ! !   0/20



Posté le 08 avril 2010 à 12 h 06

Acheter un disque parce que soit-disant il faut l'avoir dans sa discothèque, peu importe si on ne l'écoute jamais, franchement où est le sens ? Les glands sans personnalité ne réagissent pas autrement, faut l'avoir donc c'est ok pour moi, chuis un gars cool. Pas grave si j'arrive pas à y jeter une oreille de temps à autre, si je m'en branle royal à un point pas permis, ou alors de me souvenir vaguement de sa présence quelque part chez moi... L'artiste qui a eu les corones de se mettre à nu, de pas trop se censurer, peut déjà se dire qu'il va peut-être pouvoir vendre, à défaut d'être un tant soit peu compris. Je prie que des mecs comme Obispo ou Phil Collins ne deviennent jamais des soit-disant classiques. N'importe quel chanteur aspirant à le devenir se goure d'objectif, être classique c'est être mort. Plus de surprise, de raté, de risque, on est tous d'accord, en bande, avec notre classique du rock sous le bras, en signe de reconnaissance du cher troupeau. Pfou, désigner ce qui est classique, c'est passer à autre chose, ranger pour ne plus le ressortir. Trout Mask Replica ne sera jamais un classique, où alors de la liberté absolue à la rigueur. Beefheart a manifestement fait ce qu'il a voulu, ce qui s'entend diront les cloisonnés de la tête, mais c'est peut-être un cas historique, l'artiste seul avec lui-même. Ce qui se passe ici est incompréhensible, chaque écoute révèle un truc pas noté précédemment. Les mecs semblent ne jamais jouer ensemble. Pourtant des trucs s'en échappent, vous absorbent et vous arrachent malgré vous des moments béats de plaisirs déments, ça parait empoisonné cette affaire tellement c'est insidieux. Son plus que rugueux et grande finesse pourtant, totalemment rock, rauque.Peut-être effectivement que tout un chacun ne peut accéder à cet étrange territoire par manque d'éducation du conduit auditif, un comble à une époque où tout est disponible. Peut-être est-il trop difficile d'accès, parce que là ça va trop loin, vraiment. Ouaip mais tant mieux, au moins on peut se retrouver un peu seul quelque part, en autiste, la rêverie c'est fondamental. Et puis se dire qu'on est un des rares à aimer ce genre de truc extrême c'est carrément jouissif, même si c'est pas le premier disque que tu mettras chez toi un soir de rendez-vous; en même temps si la fille reste, c'est qu'elle l'aime ton côté cintré. Hop là pile en plein, Trout Mask Replica ou comment repérer la fille de sa vie parmi tous ces plans d'une seule nuit.
Intemporel ! ! !   20/20



Posté le 18 janvier 2015 à 16 h 48

Je concède que c'est un album assez difficile, d'autant que les trois premières pistes ne sont pas des plus engageantes. Malgré ça, cette jungle surréelle et déstructurée (et écrite, c'est pas du random) recèle de véritable trésors mélodiques, des déflagration blues jubilatoires et des structures uniques. L'album est sorti en 1969, au moins deux décennies avant que le terme math-rock n'émerge, pourtant, on ne peut s'empêcher de penser à plein de groupe du genre à l'écoute de Trout Mask Replica.
Il est difficile de rester marbre face à la puissance de morceaux comme "Moonlight On Vermont", "Hair Pie : Bake 2" (qui rappelle vraiment le math-rock des 90's pour le coup) ou "Veteran's Day Poppy" qui termine l'album de façon brillante !

Cet album est incroyablement en avance sur son temps et son influence est considérable ! On ressens l'aura de ce disque sur une grosse partie du rock underground et sans lui, les choses auraient été différentes.
Intemporel ! ! !   20/20







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