Iron & Wine

Archive Series Volume No. 5: Tallahassee

Archive Series Volume No. 5: Tallahassee

 Label :     Black Cricket Recording Company, Sub Pop 
 Sortie :    vendredi 07 mai 2021 
 Format :  Compilation d'inédits / CD  Vinyle  K7 Audio  Numérique   

Un petit miracle. C'est ainsi que Sam Beam qualifie l'existence des chansons présentes sur ce cinquième volume de ses Archives. À l'époque de leur enregistrement, en 1998 et 1999, il était dans sa vingtaine, étudiait le cinéma à la Florida State University à Tallahassee en Floride (d'où le titre de l'album) et n'avait, selon les quelques souvenirs qu'il relate dans le livret du disque, pas beaucoup de temps à accorder à la musique, particulièrement accaparé qu'il était par ses études. Il faut donc remercier EJ Holowicki, ami, camarade d'université et colocataire de Beam à ce moment-là (et futur membre d'Iron & Wine) d'avoir conservé et préservé pendant plus de vingt ans ces bandes que le déjà barbu chanteur avait fini par oublier avec le temps. Il s'agit pourtant de ses tout premiers pas de songwriter, en tout cas du témoignage le plus ancien que l'on possède désormais de lui. Iron & Wine n'existait alors même pas en rêve et la musique était pour lui un pur loisir, un charmant et plaisant à-côté qui devait lui permettre de se relaxer et de penser à autre chose entre deux projets cinés. Il composait durant son temps libre, fatalement réduit donc, ne faisait évidemment pas de concert et ne se répandait pas plus que cela sur cette petite occupation.

Il a fallu toute la force de conviction de Holowicki pour le convaincre d'enregistrer ses chansons, Beam n'étant pas forcément enthousiaste à cette idée. Mais comme son compère possédait tout le matériel nécessaire pour le faire, il se laissa tenter, se disant peut-être que pareille occasion ne se représenterait pas de sitôt, surtout si le cinéma devenait son unique occupation comme il le pensait alors. C'est ainsi qu'il concrétisa ses premières aspirations musicales, sans doute un peu par surprise le concernant, et que lui et son ami enregistrèrent dans leur maison commune une vingtaine de titres, en plus de diverses idées et autres sketches, le tout en prise directe, sans le moindre artifice de studio. Et si le son obtenu sonne évidemment assez lo-fi, proche de ses premières sorties officielles (The Creek Drank the Cradle, The Sea & The Rhythm, les volumes 1 et 2 de ses Archives parus en 2015), il semble meilleur que sur celles-ci, moins étouffé, plus clair.

Mais ce qui marque vraiment ici, c'est surtout l'étonnante fraîcheur de Beam, sa maîtrise technique aboutie et sa capacité à composer des morceaux qui tiennent déjà incontestablement la route. Pour quelqu'un avec si peu d'expérience et qui prenait la musique pour un passe-temps sans enjeu concret, c'est assez exceptionnel. Il fait également preuve d'une réelle capacité à aimanter l'auditeur sans effort apparent sur certaines chansons, avec sa voix et sa guitare pour seules armes. On sent un vrai relâchement, un plaisir tangible de jouer, sans pression, une joie sincère d'enregistrer ses premiers morceaux, matérialisation de quelque chose de peut-être inattendu pour lui encore une fois. Des titres comme "This Solemn Day", "Calm On The Valley", magnifique et gorgé d'émotions, "Ex-Lover Lucy Jones", sensible et touchant, "Cold Town" ou "Valentine", témoignent tous de cela et dévoilent un talent déjà éclot.

Ce cinquième volume des Archives d'Iron & Wine fait œuvre de mémoire en nous replongeant au cœur des premières heures d'un Sam Beam apparemment pas encore totalement convaincu que son avenir passerait par la musique. Mais à bien écouter ce qu'il nous propose ici, il n'est pas compliqué de déceler les éléments qui ont dû le convaincre de finalement persévérer dans cette voie et le détacher du cinéma. Mais reste avant tout ce bonheur simple et immédiat de faire de la musique, composer des chansons, écrire des paroles, trouver les bons arrangements, les bonnes tonalités. Et au point où il en était en 98-99, c'est bien tout ce qu'il pouvait faire et ne devait sûrement pas voir plus loin. Le temps viendrait bien assez vite pour lui de s'y plonger corps et âme.

Nb : bien que ces enregistrements soient restés indisponibles pendant vingt ans, un morceau issu de ces mêmes premières sessions, non présent sur ce cinquième volume, est en fait connu depuis au moins l'année 2001. Intitulé "In Your Own Time", Beam le partagea avec son ami d'enfance Ben Bridwell, le chanteur de Band of Horses, sans pour autant lui donner un nom à ce moment-là. La chanson circula rapidement dans leur cercle d'amis et au-delà sous le nom de "Fuck Like A Dog" (tiré des paroles) et atterrit dans les oreilles du journaliste Mike McGonigal, qui contribua à la faire connaître, et celles de Jonathan Poneman de Sub Pop, où Beam allait bientôt signer. Tout serait donc parti de ces enregistrements estudiantins de Tallahassee... Et pour boucler définitivement la boucle, "In Your Own Time" apparaît sur Years to Burn, la deuxième collaboration entre Iron & Wine et Calexico parue en 2019.


Très bon   16/20
par Poukram


  En écoute :
https://ironandwine.bandcamp.com/album/archive-ser ... recordings


Proposez votre chronique !







Recherche avancée
En ligne
278 invités et 0 membre
Au hasard Balthazar
Sondages
Finalement, au vu des projets nés après leur désunion, vous êtes très content qu'ils aient splité:


At The Drive-In
Atari Teenage Riot
Big Black
Black Flag
Diabologum
Faith No More
Fu Manchu
The God Machine
The Murder City Devils
Refused