Patti Smith

Anvers - Belgique [Openluchttheater Rivierenhof] - mardi 01 août 2017

Patti Smith
Près d'un an après ma première rencontre live avec Patti Smith, je me retrouve au milieu de l'amphithéâtre bucolique du Rivierenhof d'Anvers prêt pour un nouveau rendez-vous. L'année dernière, c'est dans une abbaye que je la voyais ; cette fois-ci, le décor est tout aussi enchanteur : un grand parc classé, sous un ciel clair et clément. Une petite bière et des croquettes de crevettes – la spécialité flamande par excellence – avant le début du concert : on se met bien pour une bonne soirée.

Patti Smith arrive avec ses musiciens (Tony Shanahan, Seb Rochford, et son fils Jackson) un peu après neuf heures, une tasse à la main. La voir déambuler, son breuvage à la main, me fait penser à son dernier bouquin, M Train, dans lequel elle parle toutes les cinq pages de café, elle qui en consomme énormément. Elle nous avouera plus tard avant de chanter "Pissing In A River" qu'elle a en fait un problème de toux – ce que d'ailleurs je n'avais pas remarqué avant qu'elle le dise : c'est donc probablement un grog ou une préparation de ce genre qui se cache dans la mystérieuse tasse blanche. Elle racontera aussi qu'elle a vu le jour même un médecin anversois prénommé Hans : oui, avec Patti Smith, on a les détails, et elle parle beaucoup, toujours entre chaque chanson, et toujours avec ce sourire bienveillant.

Le concert débute en douceur avec "Wing", extrait de Gone Again, qu'elle dédie aux oiseaux qu'elle a vus dans le parc. Le son est très beau ce soir ; par contre, comme intro, je trouve cette chanson un peu fade : jolie, mais peu mémorable. Les choses sérieuses commencent vraiment avec le second titre : le très beau "Dancing Barefoot", qu'on a souvent tendance à oublier dans sa discographie et qui pourtant est tellement bon, surtout en live. Après "Ghost Dance" et "My Blakean Year", qu'elle interprète fréquemment en concert, Patti Smith et ses musiciens jouent deux titres beaucoup plus rares : tout d'abord "Mothers Of The Disappeared" de U2, qu'elle a chanté pour la première fois quelques jours auparavant avec les Irlandais au Stade de France, et ensuite "Tarkovsky (The Second Stop Is Jupiter)" un de ses poèmes mis en musique, présent sur Banga (2012). Concernant le premier, je dois reconnaître que U2, ce n'est pas ma tasse de thé, mais la version de Smith ce soir-là m'a bien plu. Avant de commencer "Tarkovsky", Patti Smith nous dit qu'elle a oublié son livre – je me demande un peu de quoi elle parle, je me dis qu'elle va sans doute nous lire un poème, ce qui est plutôt fréquent avec elle. En attendant quelques secondes que quelqu'un le lui apporte, Jackson improvise quelque chose à la guitare. Le livre en main, elle nous parle du cinéaste soviétique, du film L'Enfance d'Ivan et ses inspirations pour écrire le poème. Les premières notes de "Tarkovsky" résonnent. Au bout d'une minute, Patti referme le bouquin et continue de réciter son poème musical : on se demande pourquoi elle avait besoin du livre, qui est resté fermé pendant les deux-tiers de la chanson. La prestation sur ce morceau est l'un des meilleurs moments du concert : on est complètement happé par les talents de poétesse de Patti, sa voix hypnotisante, sa théâtralité ; quant à ses musiciens, il délivre un très bon jeu entre rock progressif atmosphérique et free-jazz.

Après quelques morceaux, notamment le très beau "Beneath The Southern Cross", qu'elle dédie à Sam Shepard, ami et ancien amant, décédé quelques jours plus tôt, Patti présente ses musiciens, dont son fils Jackson. Un gars dans le public réclame la chanson "The Jackson Song" ; Patti répond qu'elle ne sera pas jouée car son fils la déteste : ça tombe bien, on est au moins deux ce soir. Un peu plus tard, je serai victime d'un faux espoir, et ça, c'est moins cool : elle annonce qu'elle va chanter une chanson écrite pour le père de Jackson (Fred 'Sonic' Smith), je pense tout de suite à "Frederick", mais les très caractéristiques notes d'introduction de "Because The Night" seront vite jouées au clavier par Tony Shanahan. Le concert s'achève avec l'indémodable "Gloria" qui vaut toujours autant le détour : évidemment l'un des meilleurs moments du concert. On en redemande ! Patti reviendra pour interpréter l'attendu "People Have The Power" en rappel.

Au bout d'un peu plus d'une heure et demie se termine mon deuxième concert de Patti Smith. Comme il y a un an, j'ai passé un très bon moment en la regardant, en partageant avec elle ses chansons, en l'écoutant parler du monde et délivrer ses messages de paix et de liberté. Il y a une telle justesse et une telle sincérité dans ses paroles et dans son attitude que ses discours ne sont jamais bateaux, mais toujours profonds et incitant à la réflexion. Le regret que j'ai, néanmoins, concernant ce concert, c'est en réalité la setlist. Celle-ci est, en effet, quasi identique à celles de l'année dernière aux festivals Esperanzah ! (Floreffe) et Jazz Middelheim (Anvers) : ses deux dates belges en 2016. J'aurais aimé que Patti Smith ouvre son grand grimoire et qu'elle veille à apporter un peu plus de variété pour ceux, sans doute nombreux, qui l'avaient vues il y a un an.


Très bon   16/20
par Rebecca Carlson


  Setlist :

Wing
Dancing Barefoot
Ghost Dance
My Blakean Year
Mothers of the Disappeared
Tarkovsky (The Second Stop Is Jupiter)
Beneath the Southern Cross
Peaceable Kingdom
Summer Cannibals
Pissing in a River
Because the Night
Gloria
>>>
People Have the Power


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