Patti Smith

Floreffe - Belgique [Esperanzah ! - Côté Jardin] - dimanche 07 août 2016

Patti Smith
Patti Smith vient à Esperanzah, t'as vu ?
– C'est vrai (surprise et excitation dans la voix) ?! Ah, je savais pas, non ! On y va ?

Quand, en déjeunant avec une amie, en avril dernier, celle-ci m'a annoncé que Patti Smith, une artiste que nous adorons tous les deux, venait d'être ajoutée à la liste du festival Esperanzah !, dans la région de Namur, on s'est dit qu'il fallait absolument y aller. Malgré son esprit bohème d'éternelle routarde qui l'a conduite fréquemment aux quatre coins du monde, et très souvent en France et en Belgique d'ailleurs, je n'avais encore jamais eu l'occasion de la voir en live. Une lacune que je me suis empressé de combler en achetant rapidement les tickets.

Esperanzah !, petit festival alternatif créé il y une dizaine d'années, se déroule dans et autour de l'abbaye de Floreffe : un décor médiéval et enchanteur où se dressent à côté des concerts de world music, de véritables petits villages foisonnant d'idées animés par des débats, des courts-métrages ou des stands qui transmettent une philosophie commune de tolérance, de démocratie, d'égalité et de solidarité. Le choix de Patti Smith, tête d'affiche du troisième et dernier jour du festival, prêtresse d'un punk poétique et personnalité engagée et bohème connue aussi pour ses messages d'émancipation, d'amour et de paix était donc tout à fait justifié.

Le concert floreffois de la tournée estivale An Evening Of Words And Music commence vers 19h. Patti Smith arrive avec son petit groupe (son fils, Jackson, est à la guitare) sur scène, avec, dans la main gauche, deux ou trois feuilles A4. Elle entame la lecture de "Footnote To Howl", du beatnik Allen Ginsberg : un poème qu'elle avait d'ailleurs superbement mis en musique vingt ans auparavant sous le titre "Spell", extrait de Peace And Noise. Après cette incantation chamanique, la guitare et la basse ronronnent les premières notes du superbe "Dancing Barefoot".

Le début du concert est plutôt downtempo : Patti Smith chante l'un de ses poètes favoris, William Blake ("My Blakean Year"), une utopie à reconstruire ("Peaceable Kingdom"), reprend feu Prince ("When Doves Cry"), et ponctue ses chansons de discours de paix. À part "Dancing Barefoot", plus dansant, c'est l'orientalisant "Ghost Dance" qui va faire bouger le public, invité à secouer les mains au ciel, telle une bande de mystiques en extase ("shake out the ghost dance"). Après l'enchaînement "Peaceable Kingdom"–"When Doves Cry", un gars dans le public réclame le morceau "Frederick". Patti lui répond qu'il n'est pas prévu au programme de ce soir et lui demande s'il s'agit de son prénom. Elle chante alors a capella le refrain de "Frederick".

Après ces quelques morceaux calmes, on est heureux d'entendre le très efficace et nerveux "Summer Cannibals" : le public se réveille et on scande les "Eat ! Eat !" les poings levés. Patti Smith est aussi pleinement dans son concert – elle qui m'avait, au tout début, semblé un peu fatiguée, trébuchant sur un mot de "Footnote to Howl" et sur un couplet de "Ghost Dance". Elle prend ensuite sa guitare acoustique et entame un autre morceau extrait de Gone Again (1996), "Beneath The Southern Cross". La chanson se termine par un long passage instrumental où Patti, son fils et Tony Shanahan sont à l'unison.

La dernière partie du concert est centrée sur certaines de ses chansons les plus connues : "Pissing In The River", mais surtout "Because The Night", dédiée au père de Jackson, à savoir Fred 'Sonic' Smith, et "People Have The Power", qu'elle dédie ce soir-là à 'tout le monde' et qui a une résonance toute particulière vu la philosophie du festival. Ses deux classiques captivent forcément le public, qui, à nouveau, lève les poings au ciel.

Patti Smith remercie son public et nous promet une toute dernière chanson : les premières notes de piano résonnent, suivies par le mythique premier vers : "Jesus died for somebody's sins but not mine" : ce sera "Gloria". Je crois que les cinq-six minutes qu'a duré la chanson resteront longtemps gravées dans mon esprit. "Gloria" (après "Land", absente du concert) est, pour beaucoup d'autres aussi sans doute, un de mes morceaux fétiches de son répertoire. Survolté, hurlant les paroles et tremblant de plaisir, j'ai vécu une sorte d'expérience extracorporelle. Le public autour était, lui aussi, bien chaud pour ce final intense, et même si Patti Smith, dans son élan, tenait parfois son micro trop loin, de sorte qu'on n'entendait pas toujours toutes les paroles, on était là pour la seconder. Comment ne pas être emporté par ce mythique titre au crescendo irrésistible ?

Patti s'éclipse, et son groupe aussi. Après un spectacle d'environ 1h15, Il n'y aura malheureusement pas de rappel, ce qui laisse une légère déception. Mais on est heureux quand même. Heureux d'avoir vu cette grande dame au charisme magnétique et au sourire réconfortant et sincère. La foule se disperse ; on retourne chercher une bière au bar et on partage déjà nos beaux souvenirs.

Holy ! Holy ! Holy Patti !


Très bon   16/20
par Rebecca Carlson


  Setlist :

Footnote to Howl
Dancing Barefoot
My Blakean Year
Ghost Dance
Peaceable Kingdom
When Doves Cry
Summer Cannibals
Beneath the Southern Cross
Pissing in the River
Because the Night
People Have the Power
Gloria

Photo par Rebecca Carlson


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