Tom Waits
Paris [Le Grand Rex] - vendredi 25 juillet 2008 |
Ma chère Scarlett,
Connais-tu Paris, la ville des amoureux (enfin, après la moitié des villes italiennes)? J'imagine que oui, vu toutes les promos aux quatre coins du monde que tu as dû faire. Mais Paris n'est pas que la ville des clubs ridicules, des râleurs, du Théatre de la Michodière où triomphe "Tout Bascule" d'Olivier Lejeune. Paris, c'est aussi donc la ville des amoureux. Ou moins des gens qui ont des goûts en commun.
Or il se trouve que toi et moi, nous partageons la même admiration pour un certain Tom Waits. Comme toi, vu la qualité des chansons, j'ai crû qu'il était facile de le reprendre, et que sa voix si particulière, ces arrangements faussement bancals, finalement, ça faisait son petit effet en studio, mais que le tout était difficilement exportable sur scène. Scarlett, tu aurais dû venir à Paris ! Car chez Tom Waits, il y a les chansons certes, mais il y a aussi la manière de les jouer, de les mettre en scène.
L'entrée en scène est la même que la veille, mais bon, elle fait toujours le même effet. Dès le départ, tu te serais rendu compte que non seulement, il sait adapter lui-même ses chansons, ce qui n'est pas vraiment une surprise, mais qu'en plus il peut les mélanger sans problème, comme sur ce "Lucinda / Ain't Goin' Down To The Well". Tu l'aurais vu s'époumoner sur "Rain Dogs", "Falling Down", "On The Other Side Of The World" ou encore "God's Away On Business", plus saccadé que jamais. Tu aurais sûrement été émue sur "Lucky Day", qu'il a sûrement voulu rattraper suite à son plantage de la veille, et surtout sur "Hold On". Je t'avouerais que jusque là, cette chanson n'était pour moi qu'une bonne chanson de Waits parmi tant d'autres. Si j'ai le bonheur de le revoir, j'espère vraiment qu'il la rejouera, ce qu'il en a fait ce soir là vaut bien des classiques.
Tu aurais sûrement apprécié aussi ses talents de comédien "Eyeball Kid", cette manière de jouer le mime avec son œil, et ce chapeau à paillettes qui éclaire le Grand Rex, ainsi que la version jazzy de "Jesus Gonna Be Here".
Je ne sais pas si tu es du genre à réclamer tes morceaux préférés pendant les concerts, mais si c'est le cas, tu te serais faite gentiment rembarrée au moment du passage au piano, comme tous ceux qui ont tenté leur chance. C'est qu'il n'aime pas être interrompu lorsqu'il décrit l'état d'excitation de la femelle araignée quand le mâle agite ses pates arrière, "même si cette dernière regarde un soap opera". Mais il faut reconnaître que ce jeu du "je tente ma chance" côté public / "c'est sympa d'avoir essayé, mais c'est moi qui décide" côté Waits amuse tout le monde. Finalement, après l'enchainement "You Can Never Hold Back Spring" - "Johnsburg, Illinois" (dédié à sa femme, comme quoi, tu vois, c'est vraiment la ville des amoureux !) - "Tom Traubert's Blues" - "Innocent When You Dream", tu te serais dit qu'il aurait été bien inutile de demander quoi que ce soit.
Sur "Lie To Me", tu aurais sûrement, toi aussi, joué le jeu, poussant des "ouuuh" lors des breaks, tapé dans les mains sur "Hoist That Rag", gagnée par l'émotion "Bottom Of The World" et surtout "Hang Down Your Head", qui n'ont pas changé par rapport à la veille. Côté nouveautés du jour, "Heigh Ho", mais surtout "Black Market Baby" et "Poor Edward" avaient des faux airs de BO de "l'Etrange Noel de Mr Jack". Avant de finir la première partie, le groupe nous offrira un dernier contraste entre un "Dirt In The Ground" tout calme, ces cuivres tout en retenue, et un "Make It Rain" festif, pluie de confetti à la clé.
A ce stade là, pas de doute, tu aurais été comblée, mais qu'aurais-tu dit du rappel ? "Way Down In The Hole" pour commencer... j'avoue que ce n'est vraiment pas ma préférée en studio mais là... bon et puis après l'artillerie lourde pour finir par 2 morceaux de Rain Dogs (pour moi son meilleur album) : le cafardeux mais génial "Jockey Full Of Bourbon", avant de conclure par ce fabuleux "Anywhere I Lay My Head". Comme toi, je la voulais tellement ! Plus que "Time" ou "Ol 55" (qui semblait prévue pour le passage au piano). Il n'y avait pas plus belle manière de terminer les 2 concerts parisiens que ce morceau. Cette mini-fanfare au ralenti, cette voix complètement déchirée. Si j'avais fait un disque, je pense que comme toi, je lui aurais probablement donné ce titre.
9 morceaux ont changé entre les 2 soirs, et sur le papier, on ne sait que choisir. Sur le terrain, s'il faut vraiment trancher, je dirais que la première soirée m'a peut-être (je dis bien peut-être) un peu plus marqué, parce que je découvrais les chansons les unes après les autres. Cette remarque mise à part, les 2 concerts sont le genre d'événement à remettre en cause toute la grille de notation élaborée implicitement au fil des ans. Pour l'anecdote, 73 morceaux différents seront joués sur les 30 dates ; combien de groupes ayant encore tout à prouver ne sont pas capables de jouer 30 chansons en 73 dates ?? Sans compter les réarrangements, les improvisations, la mise en scène. Certains artistes deviennent cultes par leurs déboires ; les seules excentricités de Tom Waits sont artistiques, ce type n'est pas au-dessus de tout le monde, il est à côté, dans sa cuisine à taper sur tout ce qui bouge, à parler à l'araignée dans le coin ou au cafard par terre, bouteille de bourbon à la main, à prendre quelques vrais instruments et à construire des scénettes sociales, tristes ou joyeuses.
Oui je sais, si tu avais été là, tu aurais mesuré l'écart si grand entre lui et toi sur "Anywhere I Lay My Head", sur toutes les autres. Enfin pas tout de suite, le temps de redescendre sur terre d'abord. Dans le hall du Grand Rex, la tête encore dans les nuages, tu m'aurais dit "Oh my god !", je t'aurais répondu "God's away on business, baby. In facts, he's on tour".
Connais-tu Paris, la ville des amoureux (enfin, après la moitié des villes italiennes)? J'imagine que oui, vu toutes les promos aux quatre coins du monde que tu as dû faire. Mais Paris n'est pas que la ville des clubs ridicules, des râleurs, du Théatre de la Michodière où triomphe "Tout Bascule" d'Olivier Lejeune. Paris, c'est aussi donc la ville des amoureux. Ou moins des gens qui ont des goûts en commun.
Or il se trouve que toi et moi, nous partageons la même admiration pour un certain Tom Waits. Comme toi, vu la qualité des chansons, j'ai crû qu'il était facile de le reprendre, et que sa voix si particulière, ces arrangements faussement bancals, finalement, ça faisait son petit effet en studio, mais que le tout était difficilement exportable sur scène. Scarlett, tu aurais dû venir à Paris ! Car chez Tom Waits, il y a les chansons certes, mais il y a aussi la manière de les jouer, de les mettre en scène.
L'entrée en scène est la même que la veille, mais bon, elle fait toujours le même effet. Dès le départ, tu te serais rendu compte que non seulement, il sait adapter lui-même ses chansons, ce qui n'est pas vraiment une surprise, mais qu'en plus il peut les mélanger sans problème, comme sur ce "Lucinda / Ain't Goin' Down To The Well". Tu l'aurais vu s'époumoner sur "Rain Dogs", "Falling Down", "On The Other Side Of The World" ou encore "God's Away On Business", plus saccadé que jamais. Tu aurais sûrement été émue sur "Lucky Day", qu'il a sûrement voulu rattraper suite à son plantage de la veille, et surtout sur "Hold On". Je t'avouerais que jusque là, cette chanson n'était pour moi qu'une bonne chanson de Waits parmi tant d'autres. Si j'ai le bonheur de le revoir, j'espère vraiment qu'il la rejouera, ce qu'il en a fait ce soir là vaut bien des classiques.
Tu aurais sûrement apprécié aussi ses talents de comédien "Eyeball Kid", cette manière de jouer le mime avec son œil, et ce chapeau à paillettes qui éclaire le Grand Rex, ainsi que la version jazzy de "Jesus Gonna Be Here".
Je ne sais pas si tu es du genre à réclamer tes morceaux préférés pendant les concerts, mais si c'est le cas, tu te serais faite gentiment rembarrée au moment du passage au piano, comme tous ceux qui ont tenté leur chance. C'est qu'il n'aime pas être interrompu lorsqu'il décrit l'état d'excitation de la femelle araignée quand le mâle agite ses pates arrière, "même si cette dernière regarde un soap opera". Mais il faut reconnaître que ce jeu du "je tente ma chance" côté public / "c'est sympa d'avoir essayé, mais c'est moi qui décide" côté Waits amuse tout le monde. Finalement, après l'enchainement "You Can Never Hold Back Spring" - "Johnsburg, Illinois" (dédié à sa femme, comme quoi, tu vois, c'est vraiment la ville des amoureux !) - "Tom Traubert's Blues" - "Innocent When You Dream", tu te serais dit qu'il aurait été bien inutile de demander quoi que ce soit.
Sur "Lie To Me", tu aurais sûrement, toi aussi, joué le jeu, poussant des "ouuuh" lors des breaks, tapé dans les mains sur "Hoist That Rag", gagnée par l'émotion "Bottom Of The World" et surtout "Hang Down Your Head", qui n'ont pas changé par rapport à la veille. Côté nouveautés du jour, "Heigh Ho", mais surtout "Black Market Baby" et "Poor Edward" avaient des faux airs de BO de "l'Etrange Noel de Mr Jack". Avant de finir la première partie, le groupe nous offrira un dernier contraste entre un "Dirt In The Ground" tout calme, ces cuivres tout en retenue, et un "Make It Rain" festif, pluie de confetti à la clé.
A ce stade là, pas de doute, tu aurais été comblée, mais qu'aurais-tu dit du rappel ? "Way Down In The Hole" pour commencer... j'avoue que ce n'est vraiment pas ma préférée en studio mais là... bon et puis après l'artillerie lourde pour finir par 2 morceaux de Rain Dogs (pour moi son meilleur album) : le cafardeux mais génial "Jockey Full Of Bourbon", avant de conclure par ce fabuleux "Anywhere I Lay My Head". Comme toi, je la voulais tellement ! Plus que "Time" ou "Ol 55" (qui semblait prévue pour le passage au piano). Il n'y avait pas plus belle manière de terminer les 2 concerts parisiens que ce morceau. Cette mini-fanfare au ralenti, cette voix complètement déchirée. Si j'avais fait un disque, je pense que comme toi, je lui aurais probablement donné ce titre.
9 morceaux ont changé entre les 2 soirs, et sur le papier, on ne sait que choisir. Sur le terrain, s'il faut vraiment trancher, je dirais que la première soirée m'a peut-être (je dis bien peut-être) un peu plus marqué, parce que je découvrais les chansons les unes après les autres. Cette remarque mise à part, les 2 concerts sont le genre d'événement à remettre en cause toute la grille de notation élaborée implicitement au fil des ans. Pour l'anecdote, 73 morceaux différents seront joués sur les 30 dates ; combien de groupes ayant encore tout à prouver ne sont pas capables de jouer 30 chansons en 73 dates ?? Sans compter les réarrangements, les improvisations, la mise en scène. Certains artistes deviennent cultes par leurs déboires ; les seules excentricités de Tom Waits sont artistiques, ce type n'est pas au-dessus de tout le monde, il est à côté, dans sa cuisine à taper sur tout ce qui bouge, à parler à l'araignée dans le coin ou au cafard par terre, bouteille de bourbon à la main, à prendre quelques vrais instruments et à construire des scénettes sociales, tristes ou joyeuses.
Oui je sais, si tu avais été là, tu aurais mesuré l'écart si grand entre lui et toi sur "Anywhere I Lay My Head", sur toutes les autres. Enfin pas tout de suite, le temps de redescendre sur terre d'abord. Dans le hall du Grand Rex, la tête encore dans les nuages, tu m'aurais dit "Oh my god !", je t'aurais répondu "God's away on business, baby. In facts, he's on tour".
Intemporel ! ! ! 20/20 | par Francislalanne |
Setlist
Lucinda / Ain't Goin' Down To The Well
Raindogs
Falling Down
On The Other Side Of The World
Lucky Day
God's Away On Business
Hold On
Eyeball Kid
Jesus Gonna Be Here
You Can Never Hold Back Spring
Johnsburg, Illinois
Tom Trauberts Blues
Innocent When You Dream
Lie To Me
Hoist That Rag
Heigh Ho
Bottom Of The World
Hang Down Your Head
Poor Edward
Black Market Baby
Dirt In The Ground
Make It Rain
---
Way Down In he THole
Jockey Full Of Bourbon
Anywhere I Lay My Head
Lucinda / Ain't Goin' Down To The Well
Raindogs
Falling Down
On The Other Side Of The World
Lucky Day
God's Away On Business
Hold On
Eyeball Kid
Jesus Gonna Be Here
You Can Never Hold Back Spring
Johnsburg, Illinois
Tom Trauberts Blues
Innocent When You Dream
Lie To Me
Hoist That Rag
Heigh Ho
Bottom Of The World
Hang Down Your Head
Poor Edward
Black Market Baby
Dirt In The Ground
Make It Rain
---
Way Down In he THole
Jockey Full Of Bourbon
Anywhere I Lay My Head
En ligne
356 invités et 0 membre
Au hasard Balthazar
Sondages