Godspeed You Black Emperor !

Paris [Le Cabaret Sauvage] - lundi 12 mai 2003

 Godspeed You Black Emperor !
Après une excellente première partie du duo Hanged'Up, les neufs membres de Godspeed You! Black Emperor investissent la scène du Cabaret Sauvage pour offrir à un public incrédule un set de deux heures d'une violence émotionnelle et sonore inimaginable. Le groupe va en effet jouer un set compact et terrifiant, ouvrant par une version glauque et ralentit de "Tazez Floyd". Après cet étrange départ, le groupe va enchainer morceaux de bravoures sur morceaux de bravoures, comme un incroyable et magnifique "Monheim", des morceaux suffoquants comme " World Police" ou une éprouvante et épique interprétation de leur nouveau titre " Albanian". Le concert fait ce soir la part belle aux titres anciens et aux guitares dissonantes. Le groupe achèvera son auditoire par une surprise de taille, avec une interprétation sidérante de l'integralité de "Slow Riot For New Zero Kanada", alors que le mot "Hope" envahit l'écran.... Espoir, on ne sait pas trop, tant ce soir le groupe a donné un concert d'une noirceur et d'un désespoir absolu... Difficile de s'en remettre...


Intemporel ! ! !   20/20
par X_Elmo


  Set List :
Tazer Floyd
Monheim
Albanian
(Impro)
World Police And Friendly Fire
Dead Metheny
>>
Moya
BBF3


 Moyenne 17.67/20 

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Posté le 30 décembre 2005 à 09 h 14

On aurait dit Black Sabbath ! lourdingue, sans finesse, le jeu du groupe était convenu. Certes, la puissance sonore surprend toujours ceux qui n'ont jamais vu GY!BE, mais elle ne saurait cacher la relative misère des performances au Cabaret ces jours là.

Nous disons bien : 'relative' misère : la surprise du Slow Riot... EP en fin de concert, la diversité des morceaux et quelques passages en sourdine ont été plus que surprenants.
Il est donc dommage que l'interprétation générale ait été aussi basique, voire comme du rock FM américain, avec des finales de morceaux très téléphonés, une (double) batterie sans subtilités, martelant plutôt que syncopant, la distorsion systématiquement fuzzée et poussée à fond, etc.

Pour les fans du piratage live (je ne le suis pas donc je ne pourrai pas orienter efficacement), cherchez et faites la comparaison entre cette tournée et les précédentes, et vous vous ferez une opinion plus juste.

Alors quoi ? Je ne suis qu'un chaffoin snobinard ? Non, non, mais je pense que les rares lecteurs de ma chronique seront alertés : GY!BE est actuellement dans une mauvaise passe créative et d'interprétation. Pas étonnant à l'écoute de Silver Mt Zion qui vole progressivement toute la créativité, chaque album et concert s'affinant là où Godspeed s'épaissit.

Objectivement, ça valait 13, et le concert du lendemain aussi.

PS : ha ! j'oubliais l'horreur du cabart sauvage : scène jolie mais salle médiocre pour les spectateurs des côtés et partout : une très mauvaise acoustique pour les concerts soniques. Heureusement qu'un grand bar permet de s'accouder tout en suivant de face et en grand large tout ce qui se passe sur la scène...
Pas mal   13/20



Posté le 13 mai 2007 à 15 h 59

Hello A.,

ça fait bizarre de t'écrire maintenant que tu nous as quittés pour d'autres cieux mais hier, j'ai pensé à toi que je n'ai plus revu depuis presque quatre étés. On s'était d'ailleurs mis une de ces mines ce soir-là...

Mais ce n'est pas de cela dont je veux parler, surtout que cela réactive des souvenirs plus noirs que noirs... Et je ne veux plus me lamenter sur le vide intersidéral que tu as laissé derrière toi après que tu aies pris cette funeste décision...

Non, ce dont je veux me souvenir, c'est ce soir de mai 2003...

Rappelle-toi, j'étais en pleins concours, toi, tu étais en pleine bourre sur de nombreux fronts et nous avions totalement arrêté d'écrire des textes et de composer, persuadés que persister dans le hiphop alors que ce mouvement partait en couille en oubliant ses fondamentaux ("tout n'est pas si facile... tout ne tient qu'à un fil...", comme il est dit dans la chanson) était inutile. On avait même revendu nos instruments... Avec le recul, c'est la plus grosse connerie qu'on ait faite tous les deux ensemble (et pourtant, ensemble, il est possible de faire beaucoup de conneries, si l'on veut détourner le slogan de propagande de notre nouveau président...). Ce soir de mai 2003 donc, tu m'avais (or-)donné rendez-vous chez toi avant qu'on se rende au Cabaret Sauvage. Le motif de ton ton si pressant et impératif: tu venais de te faire offrir un vinyle intitulé Slow Riot For New Zero Kanada par ta grande soeur et le groupe en question jouait au Cabaret Sauvage. Avant de prendre les transports pour s'y rendre, tu m'as fait écouter le vinyle: je me rappelle avoir été impressionné par la puissance de ce qui se dégageait, une forme de désespoir proche de celle qu'Almodovar dit ressentir en permanence: cet état de désespoir qui pousse à tout tenter pour en sortir et ne pas se laisser écraser par lui.

Mais l'écoute du vinyle n'était rien à côté de ce qu'on allait se ramasser dans les dents au Cabaret Sauvage. Tout l'impact émotionnel éprouvé sur le disque a été décuplé par la troupe Godspeed You ! Black Emperor sur scène. A un nombre de décibels ahurissant sur des morceaux que nous ne connaissions guère en rentrant dans la salle, nous avons été secoués par ce qui émanait de la scène, de ces neuf musiciens, de ces projections, de notre attitude de silence religieux avec laquelle nous nous sommes immergés dans le set du groupe.

Et puis, magie, au moment du rappel, Slow Riot For New Zero Kanada a été joué dans son intégralité... J'ai chialé à la fin de "Moya" et j'ai eu du mal à sortir indemne de l'interprétation de "BFF III", ayant succédé à "Moya". Je me souviens, on se regardait, incrédules, devant tant de puissance. Après la fin du morceau, nous avons rapidement quitté les lieux et sommes restés en silence dans le métro jusqu'à ce qu'on se sépare à Vincennes où je créchais pendant mes concours. Aujourd'hui, je savoure encore ce silence car nous n'avions pas cherché à mettre des mots sur ce que nous venions d'éprouver: nous n'avions pas le recul nécessaire...

Et hier, j'étais en train d'écouter "Motherfucker = Reedemer" et je crois avoir trouvé quelques bribes de mots pour décrire ce silence que nous avions observé en cette occasion: nous venions de ressentir au plus profond de nos êtres l'existence d'une foi indéfectible en un "truc" indicible et indestructible, "truc" que personne ni rien ne pouvait réduire à néant. Et plus encore, ce "truc" venait d'être exprimé en musique alors que nous ne croyions plus qu'il était possible de mettre en musique tant de luttes intérieures, tant de révoltes silencieuses, tant de tout ce qu'on s'était mangé en pleine gueule ce soir de mai 2003 au Cabaret Sauvage. Le résultat immédiat de cela avait été de se replonger, chacun de notre côté, dans la recherche et l'écoute active de disques, qui allaient au-delà des genres et des apparences... Sans toi, je ne serais pas en train de vivre au quotidien cette "chasse perpétuelle aux bons disques"...

Hier donc, j'écoutais "Motherfucker=Reedemer" et j'étais traversé par une colère sourde, en effet, nous avons élu à l'Elysée dimanche dernier Nicolas III, tsar autoproclamé de toutes les Frances (j'exagère grave mais comme je suis en colère...) et j'ai été tenté tout au long de la semaine suivant son élection de me laisser écraser par un désespoir profond... Mais "Motherfucker=Reedemer" m'a rappelé à ce "truc" auquel on revient toujours dans toute "traversée du désert" ou autre intempérie de la vie... Ca m'a rappelé que ce "truc", rien ni personne, pas même la mort, mort des idéaux ou des personnes, ne pouvait le détruire et que ce concert et le souvenir que j'en garde sont un des nombreux fils invisibles qui me relient à ce "truc".

Merci de m'avoir aidé à le tisser et , qui sait ?, à bientôt pour de nouvelles aventures,


T.

PS: Dans le même genre, et dans une vision moins symphonique, il y a Born Into Trouble As Sparks Fly Upward de Silver Mt. Zion (groupe composé en partie de membres de Godspeed You ! Black Emperor) qui m'a beaucoup aidé durant la "traversée du désert" qui a suivi ton départ. Ecoute-le religieusement, si tu en as l'occasion, où que tu te trouves, ai-je envie de t'ordonner, d'un ton pressant et impératif.
Intemporel ! ! !   20/20





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