Can
Rencontre avec Irmin Schmidt [dimanche 25 novembre 2012] |
Profitant de la venue Irmin Schmidt (clavier de Can, rappelons le) à l'édition 2013 du Bbmix pour une conférence centrée sur son groupe mythique, nous avions l'opportunité de le rencontrer une courte vingtaine de minutes avant le début de la conférence.
Interview réalisée par Lok & Chaos.
Interview réalisée par Lok & Chaos.
Après une entrée en matière quelque peu compliquée, nous décidons d'attaquer par une autre voie, moins risquée... :
-Pouvez vous nommer votre album favori parmi la discographie de Can ?
Je ne sais pas, Je ne sais vraiment pas répondre à cette question. Il y a certes une préférence pour les cinq premiers... mais vraiment je ne sais pas.
-Pour les bandes originales que vous avez faites avec Can, vous étiez le seul à voir les images, et ensuite vous racontiez les scènes aux autres membres du groupe. C'est une méthode qui vient de votre passif de chef d'orchestre ou était-ce une envie de travailler de cette manière ?
C'était parce que j'ai travaillé sur des films, au théâtre, j'ai eu l'habitude de travailler sur des scènes & la musique scénique. J'ai eu l'habitude de travailler avec des metteurs en scène, et j'ai amené à Can le fait de faire de la musique de film. C'était aussi trop difficile que 4 ou 5 personnes voyagent à Berlin ou à Munich, regardent le film, discutent avec le metteur en scène. Pour lui aussi c'était un peu compliqué aussi...
-...d'avoir plusieurs interlocuteurs...
-oui. J'avais déjà de l'expérience dans ce genre, c'était même complètement normal aussi pour les autres membres du groupe. J'arrivais dans le studio, je racontais l'histoire, et à partir de ça on a fait la musique comme pour les autres morceaux. C'était à moi de décider si telle scène demandait quelque chose de spécial, mais normalement c'était de cette manière que l'on procédait, et ça a bien marché. Les autres ont vu les films quand ils sortaient, et ils étaient contents.
-ils s'étaient fait une image des scènes, et ensuite les voir illustrer par votre musique et...
-...J'ai toujours travaillé avec les monteurs, notamment avec le monteur de Wim Wenders, c'était devenu un de mes 2-3 amis les plus proches avec le temps. J'ai beaucoup travaillé avec lui, j'étais toujours présent au moment du montage, à participer à mettre la musique sur le film, comme ça se faisait dans les années 70, avec la fameuse table Steenbeck. J'aimais beaucoup ça, cette manière de coller, de monter, c'était aussi un des principes du travail de Can. D'une façon générale cette pratique de montage, découpage, collage, c'était un des principes les plus importants de l'art du XXè siècle. Dans la littérature notamment, avec Burroughs ou Joyce, dans la peinture, la technique des papiers collés ou dans la photographie. C'était un principe de style très important, on a tellement travaillé de cette manière avec Can que c'était normal qu'on se retrouve à travailler sur des musiques de films.
-Pour votre album Soundtracks sorti en 70...
-Lequel ?
-Soundtracks
-Ah, Soundtracks (rires) j'ai pensé à Anthrax
-et...
-Vous connaissez le groupe Anthrax ?
-oui, du trash métal...
-Pas mal oui, pas mal (rires)..
-Donc pour cet album, c'était des bandes originales, des morceaux rejetés, ou des...
C'était des thèmes de film, des génériques. Sauf « Mother Sky, », qui était une longue séquence de 20 minutes dans un film.
-Ce n'était pas juste un nom d'album, c'était de vraies bandes originales
On a seulement mis les génériques, les thèmes, même plus tard dans Ege Bamyasi, Spoon et un autre titre étaient des title-songs de films de télévision. On jamais utilisé sur un disque toutes les musiques d'un film, c'est pourquoi on en trouve aussi dans les archives. Je savais qu'il y avait des bonnes choses, tout ça était dans les archives, jamais utilisées... et....
Dites moi, qu'est ce que c'était la première question que vous vouliez me poser ? Parce que... je voudrais pas vous frustrer...
Ma première question était de connaître vos réactions à la découverte des bandes.
C'était un travail d'enfer, plus de 50h à écouter, ma réaction était...très professionnelle : j'entends, j'écoute, & c'était comme la musique d'un autre. J'ai choisi, sélectionné des titres au moins aussi bon que tout le reste que Can a fait. Ce que je ne voulais pas, c'était sortir la 3ème version studio d'un morceau qui était déjà existant. Pour « Spoon » par exemple, la version live que j'ai trouvé est tellement étonnante, différente de la version déjà sortie. Le but n'était pas de sortir trois disques. Si dans les archives je n'avais trouvé que de quoi remplir un cd, un seul disque serait sorti. Même chose s'il y avait de quoi remplir 10 disques. Après The Lost Tapes, il n'y a rien. Rien qui mérite d'être écouté. Ce n'est pas exploitable, ce n'est pas assez bon, enfin peut être pour les musicologues dans 50 ans (rires), mais pas pour le public, c'est pas... Non, c'est le dernier. Il y a une grand collection en Angleterre, d'un grand fan qui a toutes les bandes qu'il pouvait trouver en Europe, de partout, au Japon -même si on a jamais joué là bas- il y a des enregistrements, des archives live, mais bon, la plupart sont des cassettes, des bootlegs, donc la qualité doit être... Je ne sais pas... Mais des archives dont nous parlons, on ne sortira plus rien.
Dans le Live à Pompei, Pink Floyd disaient que (première interruption du staff du festival, nous disant que la salle va s'ouvrir au public dans quelques minutes, nous priant donc de terminer rapidement) Gilmour disait que pour eux, le morceau doit être crée entièrement dans la tête avant de le poser sur les instruments...
-Nous c'était le contraire
-C'est ça
-On créait le morceau en jouant, après naturellement on retravaillait dessus, mais on a jamais...
-eu une idée directrice à la base...
-oui. On a jamais répété dans le sens classique, chaque fois qu'on rejouait un morceau, on le faisait d'une manière différente, comme par exemple une nouvelle fois « Spoon », on a crée un nouveau morceau à chaque fois... (Nouvelle interruption due à l'horaire)
-Une dernière question donc. La scène krautrock connaît un nouvel essor, avec des groupes comme Disappears, Wooden Shijps, Moon Duo, est ce que vous écoutez cette nouvelle scène ?
(visiblement déconcentré par le va & vient incessant dans le couloir, dans la loge où nous sommes) Euh, vous savez il y a tellement de groupe, je ne sais quoi vous dire...
-Aviez vous conscience de faire partie d'une même scène, avec des groupes comme Faust, Neu !, etc ?
Non, c'était pas une scène à proprement parlé tout simplement parce que ça se passait dans des villes comme Berlin, Munich, Dusseldorf, à Cologne & à Hambourg ; avec une distance de 400 ou 500 kilomètres, alors on ne pouvait pas vraiment parler d'une scène . Mais c'est vrai qu'à l'époque, il y avait surtout parmi les groupes allemands des imitations des groupes anglais, mais nous ne voulions plus faire ça. Ce qu'on appelle Krautrock, c'est la création d'une musique rock allemande, il y a eu le même phénomène avec la Brit Pop par exemple.
L'interview s'arrête malheureusement là, faute de temps. On aurait bien voulu lui parler notamment de Stephen Malkmus reprenant Ege Bamyasi le weekend suivant en Allemagne, de tellement de choses, de Damo, de Mooney... Questions qui seront d'ailleurs reprises dans la conférence qui suivit.
-Pouvez vous nommer votre album favori parmi la discographie de Can ?
Je ne sais pas, Je ne sais vraiment pas répondre à cette question. Il y a certes une préférence pour les cinq premiers... mais vraiment je ne sais pas.
-Pour les bandes originales que vous avez faites avec Can, vous étiez le seul à voir les images, et ensuite vous racontiez les scènes aux autres membres du groupe. C'est une méthode qui vient de votre passif de chef d'orchestre ou était-ce une envie de travailler de cette manière ?
C'était parce que j'ai travaillé sur des films, au théâtre, j'ai eu l'habitude de travailler sur des scènes & la musique scénique. J'ai eu l'habitude de travailler avec des metteurs en scène, et j'ai amené à Can le fait de faire de la musique de film. C'était aussi trop difficile que 4 ou 5 personnes voyagent à Berlin ou à Munich, regardent le film, discutent avec le metteur en scène. Pour lui aussi c'était un peu compliqué aussi...
-...d'avoir plusieurs interlocuteurs...
-oui. J'avais déjà de l'expérience dans ce genre, c'était même complètement normal aussi pour les autres membres du groupe. J'arrivais dans le studio, je racontais l'histoire, et à partir de ça on a fait la musique comme pour les autres morceaux. C'était à moi de décider si telle scène demandait quelque chose de spécial, mais normalement c'était de cette manière que l'on procédait, et ça a bien marché. Les autres ont vu les films quand ils sortaient, et ils étaient contents.
-ils s'étaient fait une image des scènes, et ensuite les voir illustrer par votre musique et...
-...J'ai toujours travaillé avec les monteurs, notamment avec le monteur de Wim Wenders, c'était devenu un de mes 2-3 amis les plus proches avec le temps. J'ai beaucoup travaillé avec lui, j'étais toujours présent au moment du montage, à participer à mettre la musique sur le film, comme ça se faisait dans les années 70, avec la fameuse table Steenbeck. J'aimais beaucoup ça, cette manière de coller, de monter, c'était aussi un des principes du travail de Can. D'une façon générale cette pratique de montage, découpage, collage, c'était un des principes les plus importants de l'art du XXè siècle. Dans la littérature notamment, avec Burroughs ou Joyce, dans la peinture, la technique des papiers collés ou dans la photographie. C'était un principe de style très important, on a tellement travaillé de cette manière avec Can que c'était normal qu'on se retrouve à travailler sur des musiques de films.
-Pour votre album Soundtracks sorti en 70...
-Lequel ?
-Soundtracks
-Ah, Soundtracks (rires) j'ai pensé à Anthrax
-et...
-Vous connaissez le groupe Anthrax ?
-oui, du trash métal...
-Pas mal oui, pas mal (rires)..
-Donc pour cet album, c'était des bandes originales, des morceaux rejetés, ou des...
C'était des thèmes de film, des génériques. Sauf « Mother Sky, », qui était une longue séquence de 20 minutes dans un film.
-Ce n'était pas juste un nom d'album, c'était de vraies bandes originales
On a seulement mis les génériques, les thèmes, même plus tard dans Ege Bamyasi, Spoon et un autre titre étaient des title-songs de films de télévision. On jamais utilisé sur un disque toutes les musiques d'un film, c'est pourquoi on en trouve aussi dans les archives. Je savais qu'il y avait des bonnes choses, tout ça était dans les archives, jamais utilisées... et....
Dites moi, qu'est ce que c'était la première question que vous vouliez me poser ? Parce que... je voudrais pas vous frustrer...
Ma première question était de connaître vos réactions à la découverte des bandes.
C'était un travail d'enfer, plus de 50h à écouter, ma réaction était...très professionnelle : j'entends, j'écoute, & c'était comme la musique d'un autre. J'ai choisi, sélectionné des titres au moins aussi bon que tout le reste que Can a fait. Ce que je ne voulais pas, c'était sortir la 3ème version studio d'un morceau qui était déjà existant. Pour « Spoon » par exemple, la version live que j'ai trouvé est tellement étonnante, différente de la version déjà sortie. Le but n'était pas de sortir trois disques. Si dans les archives je n'avais trouvé que de quoi remplir un cd, un seul disque serait sorti. Même chose s'il y avait de quoi remplir 10 disques. Après The Lost Tapes, il n'y a rien. Rien qui mérite d'être écouté. Ce n'est pas exploitable, ce n'est pas assez bon, enfin peut être pour les musicologues dans 50 ans (rires), mais pas pour le public, c'est pas... Non, c'est le dernier. Il y a une grand collection en Angleterre, d'un grand fan qui a toutes les bandes qu'il pouvait trouver en Europe, de partout, au Japon -même si on a jamais joué là bas- il y a des enregistrements, des archives live, mais bon, la plupart sont des cassettes, des bootlegs, donc la qualité doit être... Je ne sais pas... Mais des archives dont nous parlons, on ne sortira plus rien.
Dans le Live à Pompei, Pink Floyd disaient que (première interruption du staff du festival, nous disant que la salle va s'ouvrir au public dans quelques minutes, nous priant donc de terminer rapidement) Gilmour disait que pour eux, le morceau doit être crée entièrement dans la tête avant de le poser sur les instruments...
-Nous c'était le contraire
-C'est ça
-On créait le morceau en jouant, après naturellement on retravaillait dessus, mais on a jamais...
-eu une idée directrice à la base...
-oui. On a jamais répété dans le sens classique, chaque fois qu'on rejouait un morceau, on le faisait d'une manière différente, comme par exemple une nouvelle fois « Spoon », on a crée un nouveau morceau à chaque fois... (Nouvelle interruption due à l'horaire)
-Une dernière question donc. La scène krautrock connaît un nouvel essor, avec des groupes comme Disappears, Wooden Shijps, Moon Duo, est ce que vous écoutez cette nouvelle scène ?
(visiblement déconcentré par le va & vient incessant dans le couloir, dans la loge où nous sommes) Euh, vous savez il y a tellement de groupe, je ne sais quoi vous dire...
-Aviez vous conscience de faire partie d'une même scène, avec des groupes comme Faust, Neu !, etc ?
Non, c'était pas une scène à proprement parlé tout simplement parce que ça se passait dans des villes comme Berlin, Munich, Dusseldorf, à Cologne & à Hambourg ; avec une distance de 400 ou 500 kilomètres, alors on ne pouvait pas vraiment parler d'une scène . Mais c'est vrai qu'à l'époque, il y avait surtout parmi les groupes allemands des imitations des groupes anglais, mais nous ne voulions plus faire ça. Ce qu'on appelle Krautrock, c'est la création d'une musique rock allemande, il y a eu le même phénomène avec la Brit Pop par exemple.
L'interview s'arrête malheureusement là, faute de temps. On aurait bien voulu lui parler notamment de Stephen Malkmus reprenant Ege Bamyasi le weekend suivant en Allemagne, de tellement de choses, de Damo, de Mooney... Questions qui seront d'ailleurs reprises dans la conférence qui suivit.
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