Marilyn Manson
Holy Wood (In The Shadow Of The Valley Of Death) |
Label :
Nothing |
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Présenté comme le Grand Méchant Loup, Brian Warner est aujourd'hui reconnu au mieux comme un artiste original, au pire comme un de ces vieux guignols gâteux qui radotent et sont inoffensifs. Pourtant au top de sa carrière, il faisait vraiment peur. Rien que la tenue d'un tee-shirt à son effigie suffisait à déclencher des réactions horrifiées de la foule (surtout si vous faites ça en fête foraine dans une station balnéaire familiale...).
Car Brian Warner a utilisé au départ son personnage de Marilyn Manson pour faire passer des messages et critiquer. Critiquer quoi ? Critiquer tout. Et puis un peu pour espérer avoir du succès quand même. Et l'Amérique, au départ, l'a détesté. Levée de bouclier, indignation des associations de parents, dénonciation de la communauté religieuse etc. Cela amusait bien le personnage. Il en faisait toujours plus. Puis un jour, ça n'a plus du tout été drôle. Et c'était lors du drame du lycée de Columbine. Stupeur lorsqu'on fouille la chambre de l'ado : des jeux vidéos, des magasines porno et surtout des albums de Marilyn Manson. Voilà qu'on l'accuse de pervertir la jeunesse. Tout s'accumule, voilà le Congrès qui en parle, les journalistes qui font des amalgames et tout le monde découvre Marilyn Manson et le confond avec le Diable, un participant à une sorte d'Axe du Mal (déjà) de Alice Cooper en passant par Osborne. Brian Warner ne rigole plus du tout. Accusé de toute part et incompris, alors qu'il croyait son crédit augmenté après la sortie de son album précédent, Mechanical Animal, son travail avec David Lynch sur Lost Higway, ses collaborations avec Billy Corgan, le voilà honni de tous. Et surtout accusé responsable d'un drame qu'il rejette en bloc et l'a toujours fait.
Alors il s'enferme en studio, longtemps, et rumine sa colère. Sa vengeance sera terrible. Puisque l'Amérique insiste dans sa stupidité, il va la réveiller avec un bon coup de pied au cul. Et lui n'hésitera pas à dire ce qu'il faut, puisqu'après tout, on lui reproche de dire des horreurs, cela ne surprendra personne s'il parle vulgairement et critique tout, c'est son job.
Avec Holy Wood, Marilyn Manson va livrer un album sombre, haineux, doux et violent à la fois, tout en prenant soin de rester accessible pour capter l'attention des kids, car c'est à eux qu'il s'adresse avant tout. Quand on met en perspective avec le drame de Columbine, l'élection de Bush à venir, la guerre en Irak et les attentats de 2001, on remet cet album en perspective et on se dit que Marilyn Manson avait en réalité une bonne lecture pertinente de ce qui viciait son pays et l'Occident en général.
On l'oublie trop mais Marilyn Manson est un excellent parolier. Sur cet album, c'est plus limpide qu'avant, plus franc du collier, mais c'est d'une violence inouïe, il ne passe pas par quatre chemin et rentre dans le lard. Il constate avec dépit : "This is evolution : the monkey, the man then the gun" ou encore lance à une foule en délire : "Do you love your guns ? God ? Your government ?". C'est à peine croyable : imaginez cette chanson aujourd'hui et vous avez les slogans de campagne de Donald Trump. En fait, Holy Wood bien plus qu'un (très bon) album de métal gothique, est avant tout une analyse politique, certes vulgarisée. "I'm not a slave of a God that doesn't exist" - à l'heure de Daesh et du radicalisme, cette phrase pèse lourd.
Pour accompagner cela, de bonnes chansons, plus faciles d'accès, avec une écriture peut-être plus simple que sur Antichrist Superstar, du genre, je fais un couplet un peu glauque mais entêtant, puis je fais un refrain bien bourrin ("The Fight Song", "Disposable Teens") avec des guitares finalement assez heavy metal. L'accroche est là et il est toujours un spécialiste des mélodies. A croire qu'il est prolifique. Mais à d'autres moments, il s'offre des chansons plus reposées. "Target Audience" est en fait une fausse ballade où il dénonce mais se fait aussi plaintif, avant que la colère ne sorte. "A Place In A Dirt" alterne longue complainte et dépôt lent et lourd. Idem avec "Lamb Of God" où sa voix va se faire poignante, tout juste accompagnée d'une guitare acoustique et d'une boîte à rythmes. Un morceau surprenant et presque dépouillé.
Mais sur l'album, au fur et à mesure qu'il s'avance sur sa fin, laisse tomber les titres péchus et formatés single, pour plus d'expérimental et d'ambiance dark. La voix déformée sur "Valentine's Day" fait effet, le minimalisme de "Fall Of Adam" ne sert que d'intro à un passage des plus flippants : gros riff, discours enflammé et foule scandant comme au plus belles heures des dictatures des années 30, passage intro sur "King Kill" et carrément piano et sons de charge de revolver sur la fin de l'album.
La couleur est annoncée, ce sera noir. Un beau noir sur "Nobodies" ou "Cruci-Fixion In Space", le morceau le plus lourd. Un noir ténébreux en intro avec "God Eat God" et son chant macabre. Un noir plus mélancolique avec une guitare sèche, des voix qui tombent de la cloche d'une église, des pleurs de bébé sur "The Shadow Of The Valley Of Death".
Si Marilyn Manson signe ici un grand album, le dernier de sa trilogie, peut-être moins bon que Antichrist Superstar, vraiment son chef d'œuvre, mais sympathique à l'oreille et non moins intéressant pour les raisons que j'ai évoquées plus tôt, il reste que sera, à mon goût, son dernier vraiment trépidant. Après, hélas, on ne l'écoutera plus... Et il ne fera plus peur du tout.
Car Brian Warner a utilisé au départ son personnage de Marilyn Manson pour faire passer des messages et critiquer. Critiquer quoi ? Critiquer tout. Et puis un peu pour espérer avoir du succès quand même. Et l'Amérique, au départ, l'a détesté. Levée de bouclier, indignation des associations de parents, dénonciation de la communauté religieuse etc. Cela amusait bien le personnage. Il en faisait toujours plus. Puis un jour, ça n'a plus du tout été drôle. Et c'était lors du drame du lycée de Columbine. Stupeur lorsqu'on fouille la chambre de l'ado : des jeux vidéos, des magasines porno et surtout des albums de Marilyn Manson. Voilà qu'on l'accuse de pervertir la jeunesse. Tout s'accumule, voilà le Congrès qui en parle, les journalistes qui font des amalgames et tout le monde découvre Marilyn Manson et le confond avec le Diable, un participant à une sorte d'Axe du Mal (déjà) de Alice Cooper en passant par Osborne. Brian Warner ne rigole plus du tout. Accusé de toute part et incompris, alors qu'il croyait son crédit augmenté après la sortie de son album précédent, Mechanical Animal, son travail avec David Lynch sur Lost Higway, ses collaborations avec Billy Corgan, le voilà honni de tous. Et surtout accusé responsable d'un drame qu'il rejette en bloc et l'a toujours fait.
Alors il s'enferme en studio, longtemps, et rumine sa colère. Sa vengeance sera terrible. Puisque l'Amérique insiste dans sa stupidité, il va la réveiller avec un bon coup de pied au cul. Et lui n'hésitera pas à dire ce qu'il faut, puisqu'après tout, on lui reproche de dire des horreurs, cela ne surprendra personne s'il parle vulgairement et critique tout, c'est son job.
Avec Holy Wood, Marilyn Manson va livrer un album sombre, haineux, doux et violent à la fois, tout en prenant soin de rester accessible pour capter l'attention des kids, car c'est à eux qu'il s'adresse avant tout. Quand on met en perspective avec le drame de Columbine, l'élection de Bush à venir, la guerre en Irak et les attentats de 2001, on remet cet album en perspective et on se dit que Marilyn Manson avait en réalité une bonne lecture pertinente de ce qui viciait son pays et l'Occident en général.
On l'oublie trop mais Marilyn Manson est un excellent parolier. Sur cet album, c'est plus limpide qu'avant, plus franc du collier, mais c'est d'une violence inouïe, il ne passe pas par quatre chemin et rentre dans le lard. Il constate avec dépit : "This is evolution : the monkey, the man then the gun" ou encore lance à une foule en délire : "Do you love your guns ? God ? Your government ?". C'est à peine croyable : imaginez cette chanson aujourd'hui et vous avez les slogans de campagne de Donald Trump. En fait, Holy Wood bien plus qu'un (très bon) album de métal gothique, est avant tout une analyse politique, certes vulgarisée. "I'm not a slave of a God that doesn't exist" - à l'heure de Daesh et du radicalisme, cette phrase pèse lourd.
Pour accompagner cela, de bonnes chansons, plus faciles d'accès, avec une écriture peut-être plus simple que sur Antichrist Superstar, du genre, je fais un couplet un peu glauque mais entêtant, puis je fais un refrain bien bourrin ("The Fight Song", "Disposable Teens") avec des guitares finalement assez heavy metal. L'accroche est là et il est toujours un spécialiste des mélodies. A croire qu'il est prolifique. Mais à d'autres moments, il s'offre des chansons plus reposées. "Target Audience" est en fait une fausse ballade où il dénonce mais se fait aussi plaintif, avant que la colère ne sorte. "A Place In A Dirt" alterne longue complainte et dépôt lent et lourd. Idem avec "Lamb Of God" où sa voix va se faire poignante, tout juste accompagnée d'une guitare acoustique et d'une boîte à rythmes. Un morceau surprenant et presque dépouillé.
Mais sur l'album, au fur et à mesure qu'il s'avance sur sa fin, laisse tomber les titres péchus et formatés single, pour plus d'expérimental et d'ambiance dark. La voix déformée sur "Valentine's Day" fait effet, le minimalisme de "Fall Of Adam" ne sert que d'intro à un passage des plus flippants : gros riff, discours enflammé et foule scandant comme au plus belles heures des dictatures des années 30, passage intro sur "King Kill" et carrément piano et sons de charge de revolver sur la fin de l'album.
La couleur est annoncée, ce sera noir. Un beau noir sur "Nobodies" ou "Cruci-Fixion In Space", le morceau le plus lourd. Un noir ténébreux en intro avec "God Eat God" et son chant macabre. Un noir plus mélancolique avec une guitare sèche, des voix qui tombent de la cloche d'une église, des pleurs de bébé sur "The Shadow Of The Valley Of Death".
Si Marilyn Manson signe ici un grand album, le dernier de sa trilogie, peut-être moins bon que Antichrist Superstar, vraiment son chef d'œuvre, mais sympathique à l'oreille et non moins intéressant pour les raisons que j'ai évoquées plus tôt, il reste que sera, à mon goût, son dernier vraiment trépidant. Après, hélas, on ne l'écoutera plus... Et il ne fera plus peur du tout.
Très bon 16/20 | par Smashead |
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