Sun Kil Moon
Universal Themes |
Label :
Caldo Verde |
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Me voilà bien emmerdé. Un an de cela, Sun Kil Moon a.k.a. Mark Kozelek a.k.a. Trolling-For-A-Living sortait Benji, disque folk d'un nouveau genre, personnel, bavard, l'impression de se retrouver invité de force dans un confessionnel ou dans le bureau d'un psy. La chronique qui en découlait s'était accordée au diapason ; un blabla verbeux appuyant la métaphore du journal intime, du gars qui parle sans censure et de tout et n'importe quoi mais émeut malgré (ou peut-être grâce à) tous ces épanchements. Tout cela reste très vrai, il n'y a qu'à se repasser ledit Benji pour s'en persuader, mais je n'avais pas prévu qu'en 2015 Mark allait pousser le bouchon encore plus loin Maurice, avec un tout nouvel album au titre déjà révélateur : Universal Themes.
Et voilà comment on rend une chronique caduque. Car Universal Themes est tout ce que Benji était déjà, mais poussé à l'extrême. Les éclats de sagesse du quotidien sont devenus de copieuses anecdotes éparses, les morceaux riches en ponts et en interludes se sont transformés en patchworks à tiroir sans avoir peur du coq-à-l'âne. Avant, Mark nous parlait de la mort accidentelle de sa cousine Carissa pour tâcher d'en extraire un sens profond, désormais il nous cause d'un opossum qui crève dans son jardin pour ensuite nous raconter un concert de Godflesh qui était vraiment top moumoute. Ça va même plus loin que cela ; en écoutant Universal Themes, on réalise comme la pensée de Mark était élaborée sur Benji, et comme comparativement elle paraît ici filer en association libre, sans retenue ni fil rouge. Kozelek nous balance juste tout ce qui lui passe par la tête, point barre. Ce qui ne lui est pas préjudiciable en soi ; même lorsqu'il aborde du trivial complètement éclaté, le mec sait rester passionnant, pour peu qu'on fasse pas gaffe on peut croire qu'il est en train de nous enseigner une leçon de vie. Ce qui est plus embêtant, c'est lorsque cet éclatement touche à la construction même des morceaux. Comme des proggeux qui s'ignoreraient, la troupe de Sun Kil Moon enchaine en un même morceau plusieurs parties différentes pour des pistes s'étalant de 7 à 10 minutes. Par moment ça marche parfaitement, les transitions semblent confondantes de fluidité ; à d'autres elles semblent avoir été collées là sans autre forme de procès, juste parce que Mark s'est levé du pied gauche ou que son chat l'a regardé et qu'il a décidé de nous en parler. À nous de nous adapter, parfois péniblement.
J'accuse, "Ali/Spinks2" de friser le ni-queue-ni-tête musical et de s'en gargariser et "With A Sort Of Grace I Walked To The Bathroom To Cry" (quel titre pourtant...!) de conjuguer pauvrement électricité éructée à bout de voix et spoken-word minimaliste – en oubliant de rajouter un "co" au mot "errance". J'acquitte, sans le moindre remord, la légèreté élégiaque des arpèges de "Birds of Flims" (qui n'est pas un flim sur le cyclimse), la grâce d'un "Gardner of Lavender" (renouant avec les plus belles heures des Red House Painters) et la chaleureuse "This Is My First Day And I'm An Indian And I Work At A Gas Station". Mark Kozelek est un grand moulin à parole dont l'hélice nous souffle aussi bien les plus subtiles mélodies sous forme d'une brise d'automne, que des bourrasques intempestives qui nous les brisent tout court. Ici donc plus que jamais, avec un résultat certes surprenant – pour un disque qui, peu importe ce qu'on en pense en bien ou en mal, fera date ne serait-ce que pour son concept jusqu'au-boutiste – mais qui reste riche en climax. D'ailleurs, les plus beaux sommets, les plus brillantes réussites de ces Universal Themes demeurent celles qui économisent leurs effets et parviennent à garder une cohésion d'un bout à l'autre. Et si on peut regretter que le disque se présente à ce point en dents-de-scie, et craindre que son auteur ne s'enfonce de plus en plus dans cette voie, on ne peut en revanche qu'admirer la persistance de Mark Kozelek à faire ce qu'il veut sans se soucier du qu'en-dira-t-on. Et gare à toi si tu as quelque chose à y redire, le mec serait bien capable de te prendre au mot et te dédier une chanson*. Et si tu me crois pas, va-t-en donc demander aux War On Drugs ce qu'ils en pensent...
Et voilà comment on rend une chronique caduque. Car Universal Themes est tout ce que Benji était déjà, mais poussé à l'extrême. Les éclats de sagesse du quotidien sont devenus de copieuses anecdotes éparses, les morceaux riches en ponts et en interludes se sont transformés en patchworks à tiroir sans avoir peur du coq-à-l'âne. Avant, Mark nous parlait de la mort accidentelle de sa cousine Carissa pour tâcher d'en extraire un sens profond, désormais il nous cause d'un opossum qui crève dans son jardin pour ensuite nous raconter un concert de Godflesh qui était vraiment top moumoute. Ça va même plus loin que cela ; en écoutant Universal Themes, on réalise comme la pensée de Mark était élaborée sur Benji, et comme comparativement elle paraît ici filer en association libre, sans retenue ni fil rouge. Kozelek nous balance juste tout ce qui lui passe par la tête, point barre. Ce qui ne lui est pas préjudiciable en soi ; même lorsqu'il aborde du trivial complètement éclaté, le mec sait rester passionnant, pour peu qu'on fasse pas gaffe on peut croire qu'il est en train de nous enseigner une leçon de vie. Ce qui est plus embêtant, c'est lorsque cet éclatement touche à la construction même des morceaux. Comme des proggeux qui s'ignoreraient, la troupe de Sun Kil Moon enchaine en un même morceau plusieurs parties différentes pour des pistes s'étalant de 7 à 10 minutes. Par moment ça marche parfaitement, les transitions semblent confondantes de fluidité ; à d'autres elles semblent avoir été collées là sans autre forme de procès, juste parce que Mark s'est levé du pied gauche ou que son chat l'a regardé et qu'il a décidé de nous en parler. À nous de nous adapter, parfois péniblement.
J'accuse, "Ali/Spinks2" de friser le ni-queue-ni-tête musical et de s'en gargariser et "With A Sort Of Grace I Walked To The Bathroom To Cry" (quel titre pourtant...!) de conjuguer pauvrement électricité éructée à bout de voix et spoken-word minimaliste – en oubliant de rajouter un "co" au mot "errance". J'acquitte, sans le moindre remord, la légèreté élégiaque des arpèges de "Birds of Flims" (qui n'est pas un flim sur le cyclimse), la grâce d'un "Gardner of Lavender" (renouant avec les plus belles heures des Red House Painters) et la chaleureuse "This Is My First Day And I'm An Indian And I Work At A Gas Station". Mark Kozelek est un grand moulin à parole dont l'hélice nous souffle aussi bien les plus subtiles mélodies sous forme d'une brise d'automne, que des bourrasques intempestives qui nous les brisent tout court. Ici donc plus que jamais, avec un résultat certes surprenant – pour un disque qui, peu importe ce qu'on en pense en bien ou en mal, fera date ne serait-ce que pour son concept jusqu'au-boutiste – mais qui reste riche en climax. D'ailleurs, les plus beaux sommets, les plus brillantes réussites de ces Universal Themes demeurent celles qui économisent leurs effets et parviennent à garder une cohésion d'un bout à l'autre. Et si on peut regretter que le disque se présente à ce point en dents-de-scie, et craindre que son auteur ne s'enfonce de plus en plus dans cette voie, on ne peut en revanche qu'admirer la persistance de Mark Kozelek à faire ce qu'il veut sans se soucier du qu'en-dira-t-on. Et gare à toi si tu as quelque chose à y redire, le mec serait bien capable de te prendre au mot et te dédier une chanson*. Et si tu me crois pas, va-t-en donc demander aux War On Drugs ce qu'ils en pensent...
Bon 15/20 | par X_Wazoo |
*Le single " War On Drugs Suck My Cock " est là pour en témoigner : https://www.youtube.com/watch?v=VjDwit8ryEA
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