The Television Personalities

My Dark Places

My Dark Places

 Label :     Domino 
 Sortie :    lundi 27 février 2006 
 Format :  Album / CD  Vinyle   

En 1980, Dan Treacy et ses Television Personalities chantaient "I Know Where Syd Barrett Lives". 20 ans plus tard, les américains de Mr T Experience enregistrent "I Don't Know Where Dan Treacy Lives". Tout est dit.
Après 1996, c'est Perdu de Vue sans Pradel pour le songwriter lunaire. Folles rumeurs parcourant les discussions de ses fans (3, 4 ?). On en vient à se demander si Dan Treacy est toujours de ce monde. Le doux taré accro à l'héro, complètement fauché, s'est en fait retrouvé comme tous les gens de sa situation en occident : à la case que les joueurs de Monopoly redoute le plus. Sur un bateau, un bateau-prison. De cette 'croisière qui n'irait nulle part' (dixit lui-même), Treacy lança un appel sans vraiment de détresse, mais plutôt avec une sacrée envie de replonger dans le grand bain à bulle pop.
Chose faite en 2006. Aidé par quelques fidèles amitiés dont, surprise, Ed Ball, le bassiste des premiers jours, Dan Treacy repousse de la chansonnette étrange. Et sur Domino en plus. Le label indie qui ne cesse de décrocher du jackpot en ce début de siècle, a eu le bon goût ou peut-être même la sagesse, d'offrir à l'Anglais la possibilité d'inscrire un nouvel album dans la discographie bordélique de ses TVP's. My Dark Places. Opus lo-fi.
De la pop qui jouit de traficote et de dissonance. Comme au bon vieux temps. Retrouvailles presque idéales avec cette sacrée permissivité enfantine qui font naître des rapprochements au-delà de l'incongru. Quand tout devient possible. L'horrible eurodance (Ace Of Base, tout ça...) qui s'embarque sur de l'electro kraut, et ben oui, c'est possible ("You Kept Waiting Too Long"). PIL qui croise le fer avec "Frère Jacques" ? Là aussi, ce n'est plus de la fabulation de fumeur de joint ("My Dark Places")...
Fourre-tout chancelant, entre passionnant et amusant (sans doute les deux à la fois), My Dark Places est aussi création d'un type qui se lamente à la magnifique. Ça, ça n'a pas changé, et ça ne changera certainement jamais. Et on ne voudrait certainement pas qu'il en soit autrement. Car dans ce cas-là, quand Dan Treacy choisit le piano pour simple accompagnement à sa voix de petit garçon apeuré, il est au moins aussi bouleversant qu'un Daniel Johnston ("I'm Not Your Typical Boy"). Ce qui rappelons-le, n'est pas rien. C'est même beaucoup.


Très bon   16/20
par Sirius


 Moyenne 17.00/20 

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Posté le 15 mai 2009 à 00 h 24

Il y a peu de disques qui procurent cette sensation d'immédiateté que l'on recherche (ou non), qui nous mettent seuls face à notre souffrance - sans passer par des chemins empruntés après maintes reconversions : la tristesse profonde transformée en nostalgie, où peut venir se mêler de la complaisance, ce qui fait naître certes de très belles œuvres mais qui, dans un état de dépression totale, demeurent souvent inaudibles, parce que trop éprouvantes, trop peu sincères finalement parce que trop belles, et parce que la dépression ne contient en elle aucune beauté et aucun ressors pour pouvoir véritablement en extraire une œuvre d'art ou pour apprécier pleinement cette beauté dans la tristesse. C'est l'après qui compte, l'après drame, le bonheur d'être triste comme dirait Hugo à propos de la mélancolie, sauf que là, pour un disque comme celui-ci, il n'y a aucun bonheur, il n'y a que de la tristesse, donc il n'y a pas de mélancolie ou alors très peu. Dan Treacy a composé la bande son parfaite d'un désenchantement, d'un vide inexprimable qui lui a paradoxalement dicté seize morceaux, négatifs dans ce qu'il y a de plus brut, de plus évident. Il revient après plusieurs années de disparition mais en ayant continué de donner signe de vie par l'intermédiaire d'un journal intime virtuel. On reste déstabilisés à l'écoute de My Dark Places tant on ne lui donne pas d'âge, ni d'époque. On m'aurait dit qu'il date d'il y a 10 ou 15 ans, je n'aurais pas forcément remis la parole en doute. En le réécoutant dans 10 ou 15 ans, il n'aura pas bougé non plus. Je n'étais même pas né à l'époque où le groupe était à son heure de gloire en terme de compositions, pas en terme de succès ; contrairement à son nom (malédiction?) il n'a jamais été une star du petit écran- en tout cas en France, il ne touchera pas large, et à l'échelle internationale n'obtiendra pas la célébrité des Beatles comme ils le souhaitaient ironiquement à travers le titre d'un de leurs morceaux. Non, plutôt underground aux yeux (à l'oreille) de cette génération, comme le Velvet, en continuant dans le name-dropping, puisqu'un morceau de My Dark Places porte le nom du groupe. Television Personalities revient et c'est une sorte de contre événement puisqu'on y entend tout au long de l'album une palette de lamentations- touchantes si l'on en saisi la teneur dramatique par rapport à l'ensemble brouillon qui vient se bousculer, et créer un ensemble de morceaux plus ou moins décousus avec des bouts de cordes qui traînent on ne sait où, au sol, en l'air, dans une piaule, en taule, ou ailleurs, la voix de Dan Treacy qui œuvre selon son envie, qui chantonne, parle, ne parle plus, puis des appellations qui en disent long sur le programme ("Sick Again", "There's No Beautiful Way To Say Goodbye"...). On ressent l'intensité de la souffrance intérieure du bonhomme, et là où certains verront beaucoup d'auto-apitoiement, d'autres y trouveront au contraire un exercice non pas de partage, mais de miroir direct sur leurs propres tourments, comme un reflet blessant de ce que la tristesse peut avoir de plus minable, de plus difficilement surmontable, d'insupportable. Alors par moment My Dark Places l'est (insupportable), mais ce n'est pas le numéro de quelqu'un qui fait un disque-thérapie, c'est un album qui fait mal aux tripes en les soulevant parce qu'il est difficilement digérable, qu'on ne peut pas écouter à n'importe quel moment, qui demande un temps d'adaptation et de décrochage, et c'est ce qui fait la puissance des grands disques. Quand Dan Treacy chante : "You look so ill, sad and ill", il s'adresse directement à nous, pas seulement à son nombril, quand il traîne sur ses morceaux, il nous permet de souffler un peu, parce que sa voix est contagieuse, et les compositions foutrement oppressantes (en plein milieu de "Knock It All Down", on a l'impression d'entendre les pleurs d'un nourrisson)... Même quand il dit "Look at me now", il ouvre le dialogue. Très dépressif donc, une grande vague qui envoie directement au fond du trou alors qu'on (le ou se) voyait remonter à la surface, une claque qui ne réveille pas mais qui noie. My Dark Places noue la gorge, c'est le moment où l'on vomit mais sans soulagement, le constat de lucidité réitéré jusqu'à épuisement (I'm not your typical boy). Dan Treacy se souvient, par bribes, de moments ou de personnes (ex "Girl Friends", en exemple) mais avec la gueule de bois, qu'il échoue presque dés qu'il s'essaye à la légèreté, les morceaux les plus entraînants se révélant peu naturels, plus forcés. Après le dernier morceau, il sera difficile de placer un autre disque tout de suite – le dernier titre résumant parfaitement le disque en lui-même – s'il s'agit malheureusement d'un adieu. Habituellement, on estimerait que c'est parce que le groupe a atteint des sommets et qu'il lui faudra s'arrêter ; là c'est parce qu'il a atteint le fond - et qu'on y reste atterrés.
Excellent !   18/20







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