The Portobello Bones

Refuse To Keep Silent

Refuse To Keep Silent

 Label :     Crash Disques 
 Sortie :    vendredi 12 février 1999 
 Format :  Album / CD   

Pas vraiment amateur de musique politiquement engagée, pas vraiment attiré non plus par le rock extrême (noise, hardcore etc...), je me surprends encore à considérer Refuse To Keep Silent comme étant l'un de mes disques de chevet.

Prolongement plus abouti du déjà brillant EP Horma, ce deuxième album des tourangeaux est un bloc d'émo-hardcore sans concessions et tranchant comme une lame. Le groupe poursuit et peaufine ici son concept : des textes extraits de rapports d'Amnesty International, de biographies, ou des écrits religieux mettant en lumière principalement et chacun à leur manière la terrible condition de femmes prostituées, battues, emprisonnées dans des conditions inhumaines...
Prenez des textes interprétés à la lettre près par deux voix parfois vibrantes et sensibles, parfois hurlées et vindicatives, emprisonnez les dans un lit de guitare froidement abrasives comme de l'azote et portez les avec une section rythmique inconfortable, raide et menaçante. Maîtres absolus de leur chaos clinique, les Portobello ne sont heureusement pas des donneurs de leçons, ils nous transmettent par bribes, avec l'appui de textes scrupuleusement piochés, la profonde révolte qui les anime face aux sociétés inégalitaires qui nous pendent tous au nez. Ici, une mère de famille se réfugie dans la boisson ("If She Had Not Had Me"), là on apprend qu'en Russie une personne, du moment qu'elle est séropositive est suivie dans ses moindres faits et gestes (l'apocalyptique "Epidemic Supervision Center"), et tout est dans le titre de la claque expéditive "Jailed for Having An Abortion", traduction : emprisonnée pour avoir pratiqué un avortement. Une précision : La scène se situe il n'y a pas si longtemps, en Espagne.

Le son énorme et écrasant, les mélodies pleines de désespoir et les rythmiques survoltées et étouffantes, additionnés de quelques programmations et samples de tablas ou de cithare produisent un cocktail qui dépasse en réalité les limites des genres musicaux, avant tout porté par son concept atypique. C'est un disque qui se veut le reflet d'une époque répressive et cinglée. Ne versant jamais dans la violence gratuite ou le larmoyant, Refuse To Keep Silent est un album difficile car dénué d'humour et implacable jusqu'au son (David Weber et le studio des Forces Motrices à Genève, responsable entre autres du son des Young Gods).

Il y a une lueur au bout du chaos, un mince espoir de remise en question. Je termine sur les paroles de l'ultra-violent "Hasta Cierto Punto", traduites de l'espagnol dans le livret. " Si je la voulais, je pourrais lui couper les ailes, et elle serait à moi. Mais comment aimer un oiseau qui ne vole pas? ".

Un album douloureux, car tiraillé entre la sensation d'impuissance et l'urgence de dénoncer, par d'un des groupes cultes de la scène rock française, splitté en 2001.


Excellent !   18/20
par Sam lowry


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