Dominique A
La Mémoire Neuve |
Label :
Lithium |
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'Au twenty-two bar on dansait, on dansait... C'était plutôt inhabituel, alors bien sûr j'en profitais'. Si un jour par malheur Dominique A avait composé un gros tube, et bien ce serait sans hésiter que l'on se tournerait vers "Le Twenty-Two Bar" et sa ritournelle accrocheuse... Elle fit le tour des radios et fut responsable de la reconnaissance médiatique du chanteur nantais d'adoption. A une moindre échelle, c'est le pendant francophone d'un certain "Creep" de Radiohead, qui est l'exemple type de la chanson échappant à son auteur et devenant un boulet qu'une foule avide ne va cesser de réclamer. Son vidéo-clip est en ce sens prophétique, car l'on y voit un Dominique fuyant, mal à l'aise face à une caméra, peu enclin à se prêter au jeu du play-back. La vidéo de "Il Ne Faut Pas Souhaiter La Mort Des Gens" va exactement dans le même sens : l'artiste est exaspéré par un caméscope amateur qui lui colle aux basques. Au delà de cette mise en scène de l'indocilité de Dominique A, de son désir de garder la tête froide malgré le succès populaire qui monte, on peut voir dans ces deux bijoux visuels une critique virulente du rôle du vidéo-clip type : commande de la maison de disque, outil de promotion qui ne rend le plus souvent pas justice à l'artiste, l'enfermant dans la posture promotionnelle plutôt que petit oeuvre d'art jouant le rôle de compléter visuellement l'univers musical. Exemple d'intégrité de plus, Dominique, nominé révélation masculine, interprète sur la scène des Victoires de la Musique un "Twenty-Two Bar" remanié où il s'en prend ouvertement à la télévision... Manière efficace de dénoncer et surtout de se protéger. Ce moment fort sera une des attitudes les plus politiques de la carrière de l'artiste, lui qui parle si bien de l'intime plutôt que de se dévouer aux grandes causes...
Inutile de le rappeler aujourd'hui, mais derrière un ou deux singles multi diffusés jusqu'à l'écoeurement de l'artiste lui-même, il y a un album, et quel album! "La Mémoire Neuve" est l'une des plus grandes réussites de Dominique A. Il marque tout autant une rupture avec le minimalisme des débuts qu'une nette amélioration d'écriture. Alors que du minimalisme de "La Fossette" résultait un disque intimiste marqué par une identité forte et inédite, "Si Je Connais Harry" donnait l'impression de tourner en rond. C'est donc avec plaisir que l'on trouve ici un Dominique A enfin désireux d'aiguiser sa plume, de soigner les arrangements, un Dominique enfin perfectionniste. La contribution de la compagne de l'artiste, Françoiz Breut, est plus nettement mise en valeur que sur "Si Je Connais Harry" (c'est d'ailleurs elle que l'on voit sur la pochette, floutée mais en premier plan). Sa présence ne se résume plus à des interventions vocales mais bien à des duos, comme "Le Travail" ou "Les Hauts Quartiers De Peine", chanson à tirer des larmes, monument de grâce qui évoque de manière très imagée les hauts et les bas de la relation amoureuse. Sans doute, avec pudeur, la leur.
La production est donc moins abrupte, plus fournie et très aérienne. Les obsessions de Dominique A se dessinent ici plus nettement : la mémoire, les apparences ou le temps qui passe, un certain cynisme également, mais un cynisme généreux et plein d'ellipses. "Le Métier De Faussaire" et la chanson titre décrivent au scalpel une tendance mythomane dans laquelle chacun peut se retrouver, une tendance où l'on finit, en plus d'avoir trompé les autres, par s'est soi-même trompé. La mémoire est si subjective... Treize ans après, la chanson titre reste l'une des plus belles de son auteur. L'artiste, depuis, la reprend souvent en live, sublime instant en apesanteur sur un champ de ruines. Le retour à la réalité est brutal : après s'être trompé soi même en s'étant fabriqué des souvenirs, la 'vraie mémoire' réapparaît pour nous placer devant la carcasse que l'on traîne. Ce n'est pas gai. Bien qu'il soit le plus accessible, et donc parfait pour découvrir l'artiste, le propos de cet album peut rebuter par son aspect sans illusions et empli de doutes, assez cérébral aussi. Cassant son image de petit artisan lo-fi, l'artiste ne s'abandonne pour autant pas dans la surproduction indigeste et ne cherche pas non plus à rendre sa musique plus 'mainstream', tout au plus désire t-il rendre ses chansons plus présentables, et par là même plus amples.
Cette fois, le grand public qui vient de le découvrir va courir après cette image de chanteur androgyne et un peu précieux (au premier abord) qui sera pulvérisée dans le fond et la forme par "Remué". Comme quoi, Dominique n'est jamais là on l'attend, c'est ce qui fait de lui un artiste essentiel.
En attendant "Remué", ce disque est le témoignage d'un artiste qui mûrit et trouve sa voie sans jamais sombrer dans la facilité.
Sublime, vraiment.
Inutile de le rappeler aujourd'hui, mais derrière un ou deux singles multi diffusés jusqu'à l'écoeurement de l'artiste lui-même, il y a un album, et quel album! "La Mémoire Neuve" est l'une des plus grandes réussites de Dominique A. Il marque tout autant une rupture avec le minimalisme des débuts qu'une nette amélioration d'écriture. Alors que du minimalisme de "La Fossette" résultait un disque intimiste marqué par une identité forte et inédite, "Si Je Connais Harry" donnait l'impression de tourner en rond. C'est donc avec plaisir que l'on trouve ici un Dominique A enfin désireux d'aiguiser sa plume, de soigner les arrangements, un Dominique enfin perfectionniste. La contribution de la compagne de l'artiste, Françoiz Breut, est plus nettement mise en valeur que sur "Si Je Connais Harry" (c'est d'ailleurs elle que l'on voit sur la pochette, floutée mais en premier plan). Sa présence ne se résume plus à des interventions vocales mais bien à des duos, comme "Le Travail" ou "Les Hauts Quartiers De Peine", chanson à tirer des larmes, monument de grâce qui évoque de manière très imagée les hauts et les bas de la relation amoureuse. Sans doute, avec pudeur, la leur.
La production est donc moins abrupte, plus fournie et très aérienne. Les obsessions de Dominique A se dessinent ici plus nettement : la mémoire, les apparences ou le temps qui passe, un certain cynisme également, mais un cynisme généreux et plein d'ellipses. "Le Métier De Faussaire" et la chanson titre décrivent au scalpel une tendance mythomane dans laquelle chacun peut se retrouver, une tendance où l'on finit, en plus d'avoir trompé les autres, par s'est soi-même trompé. La mémoire est si subjective... Treize ans après, la chanson titre reste l'une des plus belles de son auteur. L'artiste, depuis, la reprend souvent en live, sublime instant en apesanteur sur un champ de ruines. Le retour à la réalité est brutal : après s'être trompé soi même en s'étant fabriqué des souvenirs, la 'vraie mémoire' réapparaît pour nous placer devant la carcasse que l'on traîne. Ce n'est pas gai. Bien qu'il soit le plus accessible, et donc parfait pour découvrir l'artiste, le propos de cet album peut rebuter par son aspect sans illusions et empli de doutes, assez cérébral aussi. Cassant son image de petit artisan lo-fi, l'artiste ne s'abandonne pour autant pas dans la surproduction indigeste et ne cherche pas non plus à rendre sa musique plus 'mainstream', tout au plus désire t-il rendre ses chansons plus présentables, et par là même plus amples.
Cette fois, le grand public qui vient de le découvrir va courir après cette image de chanteur androgyne et un peu précieux (au premier abord) qui sera pulvérisée dans le fond et la forme par "Remué". Comme quoi, Dominique n'est jamais là on l'attend, c'est ce qui fait de lui un artiste essentiel.
En attendant "Remué", ce disque est le témoignage d'un artiste qui mûrit et trouve sa voie sans jamais sombrer dans la facilité.
Sublime, vraiment.
Excellent ! 18/20 | par Sam lowry |
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