808 State
Ninety |
Label :
ZTT |
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Fort du succès de "Pacific State" et de leur mini album Quadrastate, 808 State (Graham Massey, Martin Price, Darren Partington et Andrew Baker) devient la cible de quasiment tous les labels importants du Royaume-Uni, et le groupe choisit finalement ZTT, plus par goût musicaux communs (c'est le label qui abrite les enregistrements signés Trevor Horn, à savoir les groupes Frankie Goes To Hollywood, Art Of Noise et Propaganda pour ne citer qu'eux) que par nécessité financière. "Pacific" est remixé, quitte à exclure les interventions de Simpson du titre, et peaufiner davantage les arrangements, quitte à y remplacer certains sons de synthés et y rajouter différents samples. Les trois versions de "Pacific" ("707" pour la version courte, "202" pour la version longue et "909" pour la version dub) sortent début novembre 89 et tapent très forts dans les charts pop : 808 State atteint pour la première fois de sa carrière la 10ème place du Top 50, quitte à se faire inviter au passage à interpréter la chanson en "live" sur la célèbre émission Top Of The Pops. Cette fois c'est sûr, le quatuor mancunien a su percer et s'imposer comme les principaux meneurs de cette nouvelle scène électro à l'anglaise, aux côtés des KLF et de Orbital qui à l'automne 89 connaissent également tous deux leurs premiers succès publics.
Concernant ce premier véritable album de 808 State, il est enregistré tout au long de l'année pendant différentes sessions jusque fin septembre 1989 aux studios Spirit de Manchester. Le disque est finalement mixé pendant le mois d'octobre. Nommé Ninety, il sort le 4 décembre 1989 chez ZTT et, de par son succès quasi immédiat, assure la pérennité du groupe. Comme le faisait alors remarquer Martin Price, c'est la première fois que le groupe peut vivre de sa musique. Dans la continuité du virage effectué par Quadrastate, Ninety propose sept titres (plus un outro) qui ne ressemblent quasiment plus à ce que le groupe avait pu composer pour le premier album, Newbuild.
Le disque démarre sur la chanson (oui, avec une chanteuse, dénommée "Vanessa" mais inconnue au bataillon) "Magical Dream", titre situé quelque part entre de l'acid-house pur et dur, de la new wave à la New Order et un côté ambient-jazz qui va coller à la peau de tous les titres du disque. Conduit à la fois par une rythmique syncopée et une ligne de basse saturée, le titre s'envole dans des contrées psychédéliques grâce aux nappes de synthés, aux arpèges du Roland D50 et à la voix toute douce de cette Vanessa. La légende raconte que Bernard Sumner (chanteur de New Order) aurait dû donner de la voix sur ce titre, mais, complètement torché après une nuit de folie passée à l'Haçienda, il débarqua en plein milieu de la session pour chanter (mal) son texte, ce qui força 808 State à se passer de ses services (pour le moment...).
Le titre suivant, "Ancodia", est une sorte de mash-up d'influences diverses. Sur une rythmique hip-hop construite par le duo Barker/Partington, le titre explore aussi bien des nuances funky que techno, et on y retrouve autant de samples plus obscurs les uns que les autres (mention spéciale aux samples de Pete Shelley). Créant un ensemble assez décousu en apparence, le titre parvient malgré tout à tenir la route grâce au génie mélodique de Graham Massey, qui permet de lier les différents passages du titres en toute fluidité.
Vient ensuite l'un des moments les plus intenses du disque. Après une assez longue intro "rythmique", le titre "Cobra Bora" prends son envol sur le son très rave de cordes samplées (un gimmick qui fera les choux gras de la B.O du jeu vidéo Mortal Kombat quelques années plus tard). Ce qui s'annonce comme un pur morceau techno est en fait une sorte d'excursion jazz-fusion en territoire house. Les différentes strates de synthés jazzy (du Moog, à tous les coups) se superposent à la rythmique endiablée du groove très rentre dedans construit sur des boites à rythmes et une ligne de basse "acide" de TB 303. On est là à mille lieux de ce que la presse nomme "acid house", et pourtant on y retrouve tous les composants de base du style, dans un genre quasiment "new age".
La fin de la face A du disque nous propose la nouvelle version longue de "Pacific" (le mix "202"), ses cordes synthétiques paradisiaques, ses samples d'oiseaux tropicaux, sa rythmique tribale et ses saxophones majestueux. Il est clair que tout le génie musical de 808 State prends ses lettres de noblesse avec la grâce toute synthétique de ce titre désormais mythique. Véritable "anthem" rave durant l'été 89 et toute l'année qui suit, "Pacific" saura être le porte-étendard d'une génération, celle qu'on nomme dans la presse à l'époque comme "chimique" (à cause de l'ecstasy); époque ou la joie de vivre et la bonne humeur se transmettait aussi bien en musique qu'en communauté dans les clubs ou les raves. Le titre, bien qu'ayant considérablement vieilli avec les années, reste une preuve nostalgique de toute l'innocence et du bonheur qu'elle pouvait susciter dans les cœurs et les esprits, et continue d'inspirer tout musicien électronique qui se respecte. Retrouver ce titre dans la B.O d'un jeu comme GTA : San Andreas est certainement l'un des plus beaux hommages qu'on pouvait faire au groupe.
La seconde partie de Ninety démarre à toute berzingue sur le groove tout électro de "Donkey Doctor". Construit sur une alliance de breakbeats dingues et une ligne de basse qui heurte l'auditeur en pleine face, le titre est un véritable hommage du groupe à Kraftwerk, clicks, zapps et arpèges à la "Home Computer" de rigueur. A noter également l'usage du sample de "Techno City" de Cybotron, le projet électro de Juan Atkins, l'un des pères fondateurs de la musique techno à Détroit. Le titre nous propose là encore de belles envolées lyriques toutes en intensité et en chaleur. Le groupe se paye même le luxe de l'autocitation en samplant les cordes de "Pacific State", ce pour mieux les écorcher et développer son groove pendant le break central.
"808080808", titre suivant, nous replonge un instant dans les affres acides hypnotiques de Newbuild. Extrêmement répétitif, le titre se sauve de l'ennui par l'usage de petites phrases mélodiques parcimonieusement placées ça et là. Pour le reste, c'est "danse ou crève".
L'album se termine sur l'ambient techno de "Sunrise", lent trip mental tout en progression rythmique que Moby n'aurait pas renié. Le titre, assez différent du reste du disque, reste cependant l'un des plus importants de l'album. Nous laissant imaginer, grâce aux flutes japonaises tapissées derrière la rythmique entêtante, un magnifique lever de soleil sur des paysages de jungles ou de montagnes. "Sunrise" fait un peu office de descente, de "chill-out" après l'enchainement de titres aussi intenses que "Cobra Bora", "Pacific" ou "Donkey Doctor", et permet de conclure l'album en beauté, quoique le dernier titre, "The Fat Shadow", plus une "outro" qu'autre chose (50 secondes) est en fait la véritable conclusion de Ninety, sur fond de bruits stridents et voix robotiques qui répètent les chiffres "808" à l'envie.
Après écoute, on comprend tout à fait pourquoi et comment 808 State a su se hisser au sommet des charts. Proposant une vision alternative de la scène acid house qui bat son plein à ce moment là au Royaume-Uni, Ninety surprend également par la vitesse à laquelle le groupe à su se réinventer et évoluer. Après le quasi-expérimental Newbuild et le mini Quadrastate faisant office de transition, le quatuor Barker-Massey-Partington-Price livre là son premier album homogène et ambitieux, proposant de réinventer un genre qui vient à peine de naître pour l'envoyer dans d'autres dimensions. A noter que Ninety n'est sorti à la base que sur le marché européen, asiatique et océanique. Le marché américain à dû attendre quasiment une année supplémentaire pour voir le label Tommy Boy (célèbre labe new-yorkais de musique électro et hip-hop) sortir cet album sous le nom de UTD.State 90, composé des sept titres principaux de la version basique de Ninety ainsi qu'une poignée de nouveaux morceaux (des remixes de titres présents sur Quadrastate, deux inédits : "Boneyween" et "Cübik" ainsi que deux nouveaux remixes de "Pacific").
Dans tous les cas, et toutes les versions, la performance technique et l'alliance étonnante de machines (dont certaines déjà anciennes) et d'instruments plus conventionnels permettent également à 808 State avec Ninety de se créer une certaine place dans l'histoire du rock : celle du groupe qui a su transcender les genres pour fusionner toute la musique que ses membres écoutaient. Si ce postulat est déjà véridique à l'époque de Ninety, il sera encore plus nettement marqué dans l'album suivant.
Concernant ce premier véritable album de 808 State, il est enregistré tout au long de l'année pendant différentes sessions jusque fin septembre 1989 aux studios Spirit de Manchester. Le disque est finalement mixé pendant le mois d'octobre. Nommé Ninety, il sort le 4 décembre 1989 chez ZTT et, de par son succès quasi immédiat, assure la pérennité du groupe. Comme le faisait alors remarquer Martin Price, c'est la première fois que le groupe peut vivre de sa musique. Dans la continuité du virage effectué par Quadrastate, Ninety propose sept titres (plus un outro) qui ne ressemblent quasiment plus à ce que le groupe avait pu composer pour le premier album, Newbuild.
Le disque démarre sur la chanson (oui, avec une chanteuse, dénommée "Vanessa" mais inconnue au bataillon) "Magical Dream", titre situé quelque part entre de l'acid-house pur et dur, de la new wave à la New Order et un côté ambient-jazz qui va coller à la peau de tous les titres du disque. Conduit à la fois par une rythmique syncopée et une ligne de basse saturée, le titre s'envole dans des contrées psychédéliques grâce aux nappes de synthés, aux arpèges du Roland D50 et à la voix toute douce de cette Vanessa. La légende raconte que Bernard Sumner (chanteur de New Order) aurait dû donner de la voix sur ce titre, mais, complètement torché après une nuit de folie passée à l'Haçienda, il débarqua en plein milieu de la session pour chanter (mal) son texte, ce qui força 808 State à se passer de ses services (pour le moment...).
Le titre suivant, "Ancodia", est une sorte de mash-up d'influences diverses. Sur une rythmique hip-hop construite par le duo Barker/Partington, le titre explore aussi bien des nuances funky que techno, et on y retrouve autant de samples plus obscurs les uns que les autres (mention spéciale aux samples de Pete Shelley). Créant un ensemble assez décousu en apparence, le titre parvient malgré tout à tenir la route grâce au génie mélodique de Graham Massey, qui permet de lier les différents passages du titres en toute fluidité.
Vient ensuite l'un des moments les plus intenses du disque. Après une assez longue intro "rythmique", le titre "Cobra Bora" prends son envol sur le son très rave de cordes samplées (un gimmick qui fera les choux gras de la B.O du jeu vidéo Mortal Kombat quelques années plus tard). Ce qui s'annonce comme un pur morceau techno est en fait une sorte d'excursion jazz-fusion en territoire house. Les différentes strates de synthés jazzy (du Moog, à tous les coups) se superposent à la rythmique endiablée du groove très rentre dedans construit sur des boites à rythmes et une ligne de basse "acide" de TB 303. On est là à mille lieux de ce que la presse nomme "acid house", et pourtant on y retrouve tous les composants de base du style, dans un genre quasiment "new age".
La fin de la face A du disque nous propose la nouvelle version longue de "Pacific" (le mix "202"), ses cordes synthétiques paradisiaques, ses samples d'oiseaux tropicaux, sa rythmique tribale et ses saxophones majestueux. Il est clair que tout le génie musical de 808 State prends ses lettres de noblesse avec la grâce toute synthétique de ce titre désormais mythique. Véritable "anthem" rave durant l'été 89 et toute l'année qui suit, "Pacific" saura être le porte-étendard d'une génération, celle qu'on nomme dans la presse à l'époque comme "chimique" (à cause de l'ecstasy); époque ou la joie de vivre et la bonne humeur se transmettait aussi bien en musique qu'en communauté dans les clubs ou les raves. Le titre, bien qu'ayant considérablement vieilli avec les années, reste une preuve nostalgique de toute l'innocence et du bonheur qu'elle pouvait susciter dans les cœurs et les esprits, et continue d'inspirer tout musicien électronique qui se respecte. Retrouver ce titre dans la B.O d'un jeu comme GTA : San Andreas est certainement l'un des plus beaux hommages qu'on pouvait faire au groupe.
La seconde partie de Ninety démarre à toute berzingue sur le groove tout électro de "Donkey Doctor". Construit sur une alliance de breakbeats dingues et une ligne de basse qui heurte l'auditeur en pleine face, le titre est un véritable hommage du groupe à Kraftwerk, clicks, zapps et arpèges à la "Home Computer" de rigueur. A noter également l'usage du sample de "Techno City" de Cybotron, le projet électro de Juan Atkins, l'un des pères fondateurs de la musique techno à Détroit. Le titre nous propose là encore de belles envolées lyriques toutes en intensité et en chaleur. Le groupe se paye même le luxe de l'autocitation en samplant les cordes de "Pacific State", ce pour mieux les écorcher et développer son groove pendant le break central.
"808080808", titre suivant, nous replonge un instant dans les affres acides hypnotiques de Newbuild. Extrêmement répétitif, le titre se sauve de l'ennui par l'usage de petites phrases mélodiques parcimonieusement placées ça et là. Pour le reste, c'est "danse ou crève".
L'album se termine sur l'ambient techno de "Sunrise", lent trip mental tout en progression rythmique que Moby n'aurait pas renié. Le titre, assez différent du reste du disque, reste cependant l'un des plus importants de l'album. Nous laissant imaginer, grâce aux flutes japonaises tapissées derrière la rythmique entêtante, un magnifique lever de soleil sur des paysages de jungles ou de montagnes. "Sunrise" fait un peu office de descente, de "chill-out" après l'enchainement de titres aussi intenses que "Cobra Bora", "Pacific" ou "Donkey Doctor", et permet de conclure l'album en beauté, quoique le dernier titre, "The Fat Shadow", plus une "outro" qu'autre chose (50 secondes) est en fait la véritable conclusion de Ninety, sur fond de bruits stridents et voix robotiques qui répètent les chiffres "808" à l'envie.
Après écoute, on comprend tout à fait pourquoi et comment 808 State a su se hisser au sommet des charts. Proposant une vision alternative de la scène acid house qui bat son plein à ce moment là au Royaume-Uni, Ninety surprend également par la vitesse à laquelle le groupe à su se réinventer et évoluer. Après le quasi-expérimental Newbuild et le mini Quadrastate faisant office de transition, le quatuor Barker-Massey-Partington-Price livre là son premier album homogène et ambitieux, proposant de réinventer un genre qui vient à peine de naître pour l'envoyer dans d'autres dimensions. A noter que Ninety n'est sorti à la base que sur le marché européen, asiatique et océanique. Le marché américain à dû attendre quasiment une année supplémentaire pour voir le label Tommy Boy (célèbre labe new-yorkais de musique électro et hip-hop) sortir cet album sous le nom de UTD.State 90, composé des sept titres principaux de la version basique de Ninety ainsi qu'une poignée de nouveaux morceaux (des remixes de titres présents sur Quadrastate, deux inédits : "Boneyween" et "Cübik" ainsi que deux nouveaux remixes de "Pacific").
Dans tous les cas, et toutes les versions, la performance technique et l'alliance étonnante de machines (dont certaines déjà anciennes) et d'instruments plus conventionnels permettent également à 808 State avec Ninety de se créer une certaine place dans l'histoire du rock : celle du groupe qui a su transcender les genres pour fusionner toute la musique que ses membres écoutaient. Si ce postulat est déjà véridique à l'époque de Ninety, il sera encore plus nettement marqué dans l'album suivant.
Parfait 17/20 | par EmixaM |
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