Mild High Club

King Gizzard & The Lizard Wizard & Mild High Club - Sketches Of Brunswick East

King Gizzard & The Lizard Wizard & Mild High Club - Sketches Of Brunswick East

 Label :     Flightless / Heavenly / ATO 
 Sortie :    vendredi 18 août 2017 
 Format :  Album / CD  Vinyle  K7 Audio  Numérique   

Il faut que je vous raconte ma petite virée à Los Angeles de ce Dimanche matin. Je me baladais tranquilou dans la rue, de bonne heure, quand un barbu en vélo s'arrête à mes côtés et me "dring-dring", je tourne la tête et qui je vois ? Allez, je vous le donne en mille, Alexander Brettin le leader et en réalité seul membre permanent de Mild High Club ; ça me change un peu, d'habitude je me fais stalker par un autre artiste. Bon, il me salue, je le salue, me demande si tout va bien pour moi, je suis OK, me demande où je vais, je lui dis que je flâne dans les rues parce que le dimanche matin c'est très paisible, je lui demande ce qu'il fait là à vélo avec une énorme radiocassette au bras, il me propose un joint, je refuse et là il m'annonce cash qu'il vient de terminer un nouvel album qui n'est pas vraiment son 3è et m'invite à passer du temps à Venice Beach pour me le faire écouter avec justement son énorme radiocassette ; sans trop réfléchir j'accepte de le suivre avec enthousiasme. Posé sur le sable, casquette vissée sur la tête, il sort une cassette jaune flashy, l'insère et me souhaite bonne écoute en me précisant que c'était une collaboration avec King Gizzard & The Lizard Wizard et que le titre du disque était Sketches Of Brunswick East (la banlieue nord de Melbourne où se trouve le label Flightless des King Gizzard) – référence évidente au Sketches Of Spain de Miles Davis ; je sens bien arriver la fusion de deux styles de jazz bien particuliers !

Ça démarre avec la courte "Sketches Of Brunswick East I", son de l'extérieur audible, du piano en intro, une basse bien mise en avant, batterie brushée, percussions très discrètes, flûte enchanteresse et la batterie accélère un peu pour enchainer avec "Countdown", plus funky. Le mellotron fait son apparition, j'entends Stu qui chante avec sa voix aiguë à la limite du murmure, on retrouve l'ambiance de Quarters! Et sans s'en rendre vraiment compte, on fil vers la troisième piste "D-Day"... je crois bien que le groupe Australien devient expert en l'art d'unifier ses albums – plus de temps morts entre les chansons. Une instrumentale d'une minute et demie (si l'on omet le décompte de 11 à 01) et quelle instrumentale ! Microtonale mesdames et messieurs ! Les instruments utilisés sur Flying Microtonal Banana sont de sortie et nous balancent un son funk-rock-jazz dans l'urgence soutenu par un son de basse tapant dans les baffles – il devient rapidement clair que 2 instruments se partagent la vedette sur ce disque : la basse et le mellotron ; "Certains membres de leur groupe sont comme toi, ils refusaient mes joints, alors au final la seule chose qu'on a fait tourné c'est la basse, quasiment tout le monde en a joué" m'a confié Alex... Et moi qui pensais pouvoir utiliser ce disque comme preuve irréfutable que le bassiste Lucas Skinner était l'un des meilleurs du moment... Bah c'est loupé, je vais juste pouvoir affirmer une nouvelle fois que ces putains de multi-instrumentistes Australiens ont du talent plein les doigts. Le gratteux n°2 Joey Walker apporte sa pierre à l'édifice avec "Tezeta" – titre sûrement emprunté à l'artiste jazz Éthiopien Mulatu Astatke qui a d'ailleurs sorti un disque qui porte le nom de Sketches Of Ethiopi, hum hum, pas si anodin tout çà. Avec "Tezeta", en plus d'incorporer de douces notes de glass marimba dans nos oreilles, Joey ramène Han-Tyumi avec lui – cette drôle de voix que l'on entend c'est le cyborg que l'on retrouve sur la 3è partie de Murder Of The Universe, celui qui passe son temps à vomir encore et encore jusqu'à tout anéantir ; bah il est revenu ce con ! Et son "Come Here Girl" en guise d'introduction amène des doutes sur ses intentions malgré le côté "à la cool" de la piste. Autre courte instrumentale "Cranes, Planes, Migraines" avec toujours une basse groovy à souhait délicieusement mise en avant ; les sons de la rue sont toujours audibles en fond sonore, "on a vraiment enregistré les sons du quartier" précise Alex. Jusque-là, ce disque est parfait et me donne qu'une envie, c'est de continuer à chiller sur cette plage en écoutant l'ambiance apaisante qui règne aux alentours en ce dimanche matin ensoleillé ; c'est calme, reposant, pas d'agressivité à l'horizon, mais en même temps on n'est pas prêt de s'endormir, c'est comme si cette association permettait à Mild High Club de calmer les ardeurs des 3 derniers opus des King Gizzard en apportant ses sonorités développées avec son Skiptracing et aux 7 hurluberlus d'empêcher à Alex Brettin de s'endormir à cause d'un trop-plein de fumette – gagnant/gagnant. Quand "Sketches Of Brunswick East II" démarre, j'ai d'abord l'impression d'écouter un vinyle avec un gramophone puis le son plus moderne revient, la flûte m'enchante toujours autant, la basse résonne autant que l'optigan qui fait son apparition sans crier gare – belle surprise.

La cassette s'arrête, Alex la retourne et lance la Face B qui démarre par "Dusk To Dawn On Lygon Street", une piste chantait par le 3è gratteux de la bande Cook Graig. Une basse fretless est utilisée, les gars veulent m'achever... La piste suivante le fera. "The Book", voilà la petite pépite que j'attendais que King Gizzard fasse depuis longtemps, il aura fallu attendre cette collaboration avec Mild High Club pour entendre la digne héritière de la bombe qu'était "Hot Wax" sur Oddments (2014) ; une chanson assez simple au fort potentiel addictif avec une mélodie entêtante, un rythme entrainant qui fait bouger le derrière, une voix bien grave qui plairait à tous fans de Zappa, une folie contrôlée, des cassures dans le rythme, un son particulier (l'orgue microtonal) ; 5 minutes jouissives qui se poursuivent dans la folie de "A Journey To (S)Hell", instrumentale totalement hallucinée qui malheureusement ne peut être écoutée à part, elle prend véritablement forme au sein du disque et juste après "The Book", mise de côté elle devient totalement inaudible, on ne se dira pas "tiens je me ferais bien une petite 'A journey...' avant d'y aller", non, ça ne peut pas marcher et c'est dommage. Arrive "Rolling Stoned", la seule piste entièrement composée par Brettin qui est en réalité une réécriture de la coda de "The Chat" servant de final à Timeline. Ce coup-ci c'est l'omnichord qui est utilisé – ils ont dû ressortir tous leurs jouets d'enfance pour l'occasion –, mais c'est encore la basse et la flûte qui domine cette nouvelle instrumentale. Des voix et l'harmonica d'Ambrose Kenny-Smith se font entendre au fond de la salle, je pensais pas qu'on allait l'entendre, je commençais à m'impatienter. Avec "You Can Be Your Silhouette" Alex et les King Gizzard nous emmènent vers les terres latines de la bossa-nova infusée de jazz bien évidemment – instant décontraction totale. "Sketches Of Brunswick East III" rejoue la carte du jam avec fenêtre ouverte sur la rue passante, générique de fin.

Je marchais tranquillement dans la rue il y a 40 minutes de ça et me voilà désormais à Venice Beach avec Alex qui vient de me faire écouter son nouveau disque, mix quasi parfait entre l'innocence et le côté épuré de Paper Mâché Dream Balloon, les sonorités jazz et aventureuse de Quarters!, l'aspect apaisant et la maîtrise de Skiptracing. "Tu restes encore un peu ? Je n'ai pas trop la force de bouger là...", Alex était bien sympa, il planait, mais il était bien sympa ; ce nouvel album m'a donné envie de rester assis sur cette plage pour profiter, entendre ce que la nature a à me dire et regarder les gens vivre tout simplement. En y repensant, je ne crois pas avoir entendu ne serait-ce qu'une seule fois la voix d'Alex Brettin... Bah merde alors... Bon, il a apporté sa maîtrise des instruments, sa capacité à créer de belles mélodies, sa touche jazzy assez personnelle, il a participé à la composition de la moitié des titres... Vraiment on peut dire que cette collaboration est plus que réussie et je ne serais pas contre une seconde tentative dans quelques années. J'ai hâte de voir où Alex va m'emmener avec son 3è album "solo", en attendant j'ai bien envie de réappuyer sur play... Mais comment il a fait pour transporter cette énorme radiocassette ? C'est lourd ce truc... Et où a-t-il posé son vélo ?


Excellent !   18/20
par Beckuto


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