Quelque part est un disque majeur. et le disque essentiel de Mendelson. Etrangement, on a beaucoup moins parlé de cet album que de L'avenir est devant ou Seuls au sommet. Moins de promo sans doute, mais aussi, admettons-le, parce qu'il reste d'un abord plus difficile. La musique, ambitieuse, lorgne du côté du free jazz, notamment avec les interventions de la contrebassiste Joelle Léandre, l'ensemble s'avère totalement étouffant, les boiseries instrumentales se lézardant régulièrement de tensions presque noisy, électriques. Mais ce qui fait le génie du disque ce sont les textes de Pascal Bouaziz. Si ce disque est majeur, c'est parce qu'on y découvre une écriture radicale, sorte de néo-réalisme globalement désespéré, poésie d'un quotidien glauque que seuls ceux qui vécurent leur enfance dans des banlieues sordides au large des cités des années 80 peuvent vraiment sentir. Réminiscences d'enfance, d'adolescence dans les parkings, de journées à l'usine (Monsieur Pinto, déchirant), de destins sans avenir (l'incroyable Monsieur) , de couples écartelés (Katherine Hepburn, la plus belle collection d'amies jamais narrée). Il y a de la nostagie et un humour tendre, mais aussi ce réalisme crasse, cette dérision implacable, notamment quand ces pauvres destins se heurtent du fond de leurs appartements crasseux au élans métaphysiques les plus noirs. Des morceaux de vie à pleurer donc, ou à rire , mais on peut rire quand on sait ce que c'est que d'habiter là et d'y vivre, sinon je ne permets pas non je ne pemets pas.
" Elle dit doit y avoir quelque chose de mieux quand même
Que cette vie là avec le garage
Avec les rues et les maisons toujours pareilles
Y a sûrement quelque chose de mieux c'est vrai
Mais je ne sais pas ce que c'est
Et je ne sais pas comment on fait"
Les textes les plus intelligents depuis.. l'unique album de Houellebecq !