The Auteurs
New Wave |
Label :
Hut |
||||
The Auteurs déboulent sur la scène anglaise en 93, soutenus en cela par Brett Anderson de Suede. Mais loin de verser dans le neo-glam des suscités, la bande à Haines entend se poser en mauvaise conscience de la Brit Pop naissante.
Cette pose relève d'un cas quasi-pathologique: Haines semble entretenir avec la pop la même relation qu'un amant avec une maîtresse qu'il se promet chaque jour de quitter et qu'il ne quitte pas. C'est - et même si sa fierté lui interdit de l'avouer - qu'il en est secrètement amoureux.
Ce premier album relate donc en filigrane cette aventure faite d'attraction, de répulsion, de ruptures et de retrouvailles. Dès le premier morceau "Showgirl", on a l'aveu de Haines: "I took a showgirl for my bride/Thought my life would be right". La "Show girl", on l'aura compris, c'est cette catin de pop, infidèle, séduisante et souillée jusqu'à la mœlle. S'il la gifle en rêve ( " This week we've got to shoot/all the dancing girls/and then replace them/with satellites instead") il s'humilie dès qu'elle approche.
Même si certains morceaux tombent à côté, on a dans cet album une belle quantité de chansons, dont une des plus réussies est "Junk Shop Clothes", qui tourne en dérision le débraillement vestimentaire du grunge, chantée d'une voix douce et venimeuse, en équilibre sur une douze cordes au son de clavecin à peine tempéré par quelques notes de piano jouées staccato.
Mais le sommet de l'album est atteint avec "How Could I Be Wrong", récit concis et fragmenté d'un instant de lucidité sur fond de guitares à la Television. Ce morceau constitue en outre le pivot de l'album: les thèmes ayant trait à la pop culture disparaissent au profit d'histoires de marginaux dans lesquelles sont livrés les dessous de l'Angleterre clinquante et glam. Les morceaux s'enchaînent parmi lesquels "Idiot Brother" et son riff imparable, le dylanien "Housebreaker", "Early Years" énigmatique et incisif à souhait.
Arrogant, crâneur, ce premier album des Auteurs a de quoi irriter. Le penchant de Haines pour le mauvais goût peut déplaire au premier abord. Mais c'est précisément cette tension entre la grâce et la vulgarité, ses affronts et sa pose hautaine qui font de lui un songwritter unique dans le paysage pop anglais.
Cette pose relève d'un cas quasi-pathologique: Haines semble entretenir avec la pop la même relation qu'un amant avec une maîtresse qu'il se promet chaque jour de quitter et qu'il ne quitte pas. C'est - et même si sa fierté lui interdit de l'avouer - qu'il en est secrètement amoureux.
Ce premier album relate donc en filigrane cette aventure faite d'attraction, de répulsion, de ruptures et de retrouvailles. Dès le premier morceau "Showgirl", on a l'aveu de Haines: "I took a showgirl for my bride/Thought my life would be right". La "Show girl", on l'aura compris, c'est cette catin de pop, infidèle, séduisante et souillée jusqu'à la mœlle. S'il la gifle en rêve ( " This week we've got to shoot/all the dancing girls/and then replace them/with satellites instead") il s'humilie dès qu'elle approche.
Même si certains morceaux tombent à côté, on a dans cet album une belle quantité de chansons, dont une des plus réussies est "Junk Shop Clothes", qui tourne en dérision le débraillement vestimentaire du grunge, chantée d'une voix douce et venimeuse, en équilibre sur une douze cordes au son de clavecin à peine tempéré par quelques notes de piano jouées staccato.
Mais le sommet de l'album est atteint avec "How Could I Be Wrong", récit concis et fragmenté d'un instant de lucidité sur fond de guitares à la Television. Ce morceau constitue en outre le pivot de l'album: les thèmes ayant trait à la pop culture disparaissent au profit d'histoires de marginaux dans lesquelles sont livrés les dessous de l'Angleterre clinquante et glam. Les morceaux s'enchaînent parmi lesquels "Idiot Brother" et son riff imparable, le dylanien "Housebreaker", "Early Years" énigmatique et incisif à souhait.
Arrogant, crâneur, ce premier album des Auteurs a de quoi irriter. Le penchant de Haines pour le mauvais goût peut déplaire au premier abord. Mais c'est précisément cette tension entre la grâce et la vulgarité, ses affronts et sa pose hautaine qui font de lui un songwritter unique dans le paysage pop anglais.
Très bon 16/20 | par Greg |
Posté le 19 août 2008 à 16 h 14 |
Il faut être réaliste : avec le recul, The Auteurs apparaît plus que jamais, de toute évidence, comme l'un des meilleurs groupes des années 90, laissant une discographie courte mais parfaite et inégalée dans le genre. Loin, très loin, devant les Oasis, Blur et consorts, et même devant Suede à qui la presse s'est plue à l'époque à les comparer voire opposer.
Avec un tel nom, The Auteurs, on ne pouvait s'attendre qu'à un groupe d'intellos esthètes, arty et arrogants. Ils le sont, du moins son leader, mais on ne va pas s'en plaindre. Avec un tel titre, New Wave, on pouvait présager d'un double hommage au mouvement musical du même nom et à la Nouvelle Vague française. Luke Haines (ex-The Servants), dandy pince-sans-rire, est un amateur éclairé de musique, de littérature et de cinéma. Des références et des clins d'oeil, il y en a, mais pas forcément celles qu'on attend. Beaucoup plus que du post-punk, The Auteurs s'inspirent du glam rock du début des 70's, T. Rex et Bowie en tête. Tout comme Suede apparu à la même époque. Les deux groupes sont même les fers de lance d'un mouvement remettant au goût du jour le glam, qui avait déjà beaucoup influencé les débuts du rock gothique de la fin des 70's-début des 80's : le batcave londonien et le death-rock californien. Ce néo glam constituait une alternative intéressante au shoegaze, à la brit pop et au grunge de l'époque, apportant une bouffée d'air frais bienvenue. Luke Haines pourrait être comparé à un nouveau Bowie par ses côtés classieux, intellectuel et érudit, et Bret Anderson de Suede à un nouveau Marc Bolan pour sa décadence, son goût pour l'ambiguité sexuelle, le glamour et la théâtralité. Tandis que Bret Anderson s'exhibe en public, Luke Haines préfère écrire des textes. Deux facettes d'un dandy fin de siècle.
La pochette, sobre, classe et glacée, laisse présager du meilleur. Une vieille photo d'un gentleman britannique à la fine moustache vêtu à l'arabe évoquant Lawrence d'Arabie, sur fond noir. Le résultat, c'est un chef-d'oeuvre. Un album de très grande classe, qu'on écoutera toujours dans 20 ans sans le trouver vieilli ou dépassé. Des textes de niveau littéraire, où il est question d'amour et de sexe ("Show Girl"), d'étoiles ("Don't Trust The Stars", "Strastruck") et où Luke Haines fait preuve d'un humour cynique ("Idiot Brother"), raillant parfois le grunge qui monopolisait les ondes à l'époque ("Junk Shop Clothes", "American Guitars"). Un chant lascif, distant et dédaigneux. Des guitares de toute beauté, riffs saturés évoquant Mick Ronson ou Marc Bolan, accords acoustiques en finesse rappelant Bowie, ou arpèges délicats et cristallins, sans compter ce sublime son de 12 cordes. De petites touches de carillon, de xylophone ou de piano. Parfois du violoncelle, et des percussions, T. Rex oblige. Le chanteur-guitariste, auteur et compositeur Luke Haines est épaulé par une section rythmique impeccable, une bassiste à la moue boudeuse et un batteur plus qu'efficace. Des mélodies de premier choix, qui à coup sûr resteront comme des classiques intemporels.
L'album commence fort par l'attaque agressive du bien connu single "Show Girl" qui les a révélés. Le groupe maîtrise à merveille aussi bien les morceaux rapides ("Don't Trust The Stars", "Early Years", le titre caché "New Wave") que les délicates ballades ("Junk Shop Clothes", "Startruck") ou les titres mid-tempo ("American Guitars", "How Could I Be Wrong"). Certains morceaux commencent de façon presque anodine, comme "Housebreaker" qui ensuite touche au sublime.
New Wave se bonifie au fil des écoutes grâce à sa richesse toute en subtilités. Il faut absolument écouter et posséder cet album précieux, d'une très grande classe, sans doute le meilleur de The Auteurs.
Avec un tel nom, The Auteurs, on ne pouvait s'attendre qu'à un groupe d'intellos esthètes, arty et arrogants. Ils le sont, du moins son leader, mais on ne va pas s'en plaindre. Avec un tel titre, New Wave, on pouvait présager d'un double hommage au mouvement musical du même nom et à la Nouvelle Vague française. Luke Haines (ex-The Servants), dandy pince-sans-rire, est un amateur éclairé de musique, de littérature et de cinéma. Des références et des clins d'oeil, il y en a, mais pas forcément celles qu'on attend. Beaucoup plus que du post-punk, The Auteurs s'inspirent du glam rock du début des 70's, T. Rex et Bowie en tête. Tout comme Suede apparu à la même époque. Les deux groupes sont même les fers de lance d'un mouvement remettant au goût du jour le glam, qui avait déjà beaucoup influencé les débuts du rock gothique de la fin des 70's-début des 80's : le batcave londonien et le death-rock californien. Ce néo glam constituait une alternative intéressante au shoegaze, à la brit pop et au grunge de l'époque, apportant une bouffée d'air frais bienvenue. Luke Haines pourrait être comparé à un nouveau Bowie par ses côtés classieux, intellectuel et érudit, et Bret Anderson de Suede à un nouveau Marc Bolan pour sa décadence, son goût pour l'ambiguité sexuelle, le glamour et la théâtralité. Tandis que Bret Anderson s'exhibe en public, Luke Haines préfère écrire des textes. Deux facettes d'un dandy fin de siècle.
La pochette, sobre, classe et glacée, laisse présager du meilleur. Une vieille photo d'un gentleman britannique à la fine moustache vêtu à l'arabe évoquant Lawrence d'Arabie, sur fond noir. Le résultat, c'est un chef-d'oeuvre. Un album de très grande classe, qu'on écoutera toujours dans 20 ans sans le trouver vieilli ou dépassé. Des textes de niveau littéraire, où il est question d'amour et de sexe ("Show Girl"), d'étoiles ("Don't Trust The Stars", "Strastruck") et où Luke Haines fait preuve d'un humour cynique ("Idiot Brother"), raillant parfois le grunge qui monopolisait les ondes à l'époque ("Junk Shop Clothes", "American Guitars"). Un chant lascif, distant et dédaigneux. Des guitares de toute beauté, riffs saturés évoquant Mick Ronson ou Marc Bolan, accords acoustiques en finesse rappelant Bowie, ou arpèges délicats et cristallins, sans compter ce sublime son de 12 cordes. De petites touches de carillon, de xylophone ou de piano. Parfois du violoncelle, et des percussions, T. Rex oblige. Le chanteur-guitariste, auteur et compositeur Luke Haines est épaulé par une section rythmique impeccable, une bassiste à la moue boudeuse et un batteur plus qu'efficace. Des mélodies de premier choix, qui à coup sûr resteront comme des classiques intemporels.
L'album commence fort par l'attaque agressive du bien connu single "Show Girl" qui les a révélés. Le groupe maîtrise à merveille aussi bien les morceaux rapides ("Don't Trust The Stars", "Early Years", le titre caché "New Wave") que les délicates ballades ("Junk Shop Clothes", "Startruck") ou les titres mid-tempo ("American Guitars", "How Could I Be Wrong"). Certains morceaux commencent de façon presque anodine, comme "Housebreaker" qui ensuite touche au sublime.
New Wave se bonifie au fil des écoutes grâce à sa richesse toute en subtilités. Il faut absolument écouter et posséder cet album précieux, d'une très grande classe, sans doute le meilleur de The Auteurs.
Exceptionnel ! ! 19/20
Posté le 16 août 2010 à 23 h 25 |
Il en va de certains albums comme pour certains vins. Les années, au lieu d'altérer, magnifient. 1993: les cheveux sales de Seattle et les défrichements grunge ont envahi depuis un moment déjà les ondes européennes. La perfide Albion, elle, cherche la parade. C'est qu'il y a de la tradition de l'autre-côté de la Manche. 30 ans. Voilà 30 ans que l'Angleterre est devenue le centre du monde. Les coupables: Who, Kinks, Beatles, Stones, Bowie, Joy Division, Smiths et consorts.
Seulement en ce début de décennie 90, l'Angleterre se cherche. Suede participe de cette - appelons-la comme ça - salve du renouveau. La critique s'emballe, le public aussi. Dans le sillage de Brett Anderson, un type improbable, Luke Haines. Avec sa nana de l'époque et deux ou trois potes, il fonde The Auteurs, nom évocateur. Evocateur oui, car tout chez Haines transpire l'érudition. Sa culture littéraire et cinématographique en bandoulière, Haines (et sa bande) réalise "New Wave".
L'album est une merveille qui n'a pas connu le succès qu'il méritait. Douze chansons ficelées au poil témoignant d'une richesse d'écriture que l'on croyait derrière nous. "Show Girl" ouvre le bal. Une gratte sèche, l'autre électrique se complétant admirablement sur une ligne rythmique affirmée. Premier chef-d'œuvre. La suite sera du même acabit: "Bailed Out", "Junk Shop Clothes", "Starstruck", 'How Could I Be Wrong" sont les titres les plus évidents au premier abord En un peu moins de trois quarts d'heure, "New Wave" a fini de convaincre les plus sceptiques.
D'un enthousiasme habituellement modéré, j'affirme ici sans hésiter qu'avec New Wave on est en présence de l'un des cinq albums majeurs de la décennie. Qu'on se le dise !
Seulement en ce début de décennie 90, l'Angleterre se cherche. Suede participe de cette - appelons-la comme ça - salve du renouveau. La critique s'emballe, le public aussi. Dans le sillage de Brett Anderson, un type improbable, Luke Haines. Avec sa nana de l'époque et deux ou trois potes, il fonde The Auteurs, nom évocateur. Evocateur oui, car tout chez Haines transpire l'érudition. Sa culture littéraire et cinématographique en bandoulière, Haines (et sa bande) réalise "New Wave".
L'album est une merveille qui n'a pas connu le succès qu'il méritait. Douze chansons ficelées au poil témoignant d'une richesse d'écriture que l'on croyait derrière nous. "Show Girl" ouvre le bal. Une gratte sèche, l'autre électrique se complétant admirablement sur une ligne rythmique affirmée. Premier chef-d'œuvre. La suite sera du même acabit: "Bailed Out", "Junk Shop Clothes", "Starstruck", 'How Could I Be Wrong" sont les titres les plus évidents au premier abord En un peu moins de trois quarts d'heure, "New Wave" a fini de convaincre les plus sceptiques.
D'un enthousiasme habituellement modéré, j'affirme ici sans hésiter qu'avec New Wave on est en présence de l'un des cinq albums majeurs de la décennie. Qu'on se le dise !
Exceptionnel ! ! 19/20
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