Jeffrey Lewis

Paris [Point Ephemere] - jeudi 20 octobre 2005

De retour à Paris après plusieurs passages remarqués ces deux dernières années (Nouveau Casino, Pop In, Mains d'Oeuvres et Point Ephémère - pour un mémorable concert folk-punk acoustique avec Herman Düne-), le Jeffrey Lewis Band nous a joué un concert plein d'émotions, qui a dû raviver de vieux souvenirs d'une jeunesse punk dorée à certains.

Pour les présenter brièvement, Jack et Jeff Lewis appartiennent à la scène antifolk, dont les membres écument actuellement les (petites) salles de concerts de France et de Navarre, en grande partie grâce aux Herman Düne, qui s'en sont fait les apôtres au plan européen.

Au sein de cette étrange famille, qui regroupe des groupes ou artistes new yorkais qui ont ou avaient l'habitude de se retrouver pour jouer au SideWalk Café N.Y.C., on trouve notamment des têtes aujourd'hui connues telles qu'Adam Green, et d'autres moins connues comme Kimya Dawson (ex-comparse d'Adam au sein des mythiques Moldy Peaches), Prewar Yardsale, Brian Piltin, Turner Cody, Ish Marquez et ... Jeffrey Lewis, que l'on ne dissociera pas de son frère, Jack, à la production solo elle aussi intéressante. Tout ce beau monde étant rassemblé sur un disque manifeste Antifolk Volume 1, qui est à chaudement recommandé pour meubler toute discothèque underground digne de ce nom.
Mais si Adam Green, comme Ben Kweller, a choisi de s'éloigner de la scène lo-fi pour céder aux sirènes d'une production plus léchée et naviguer ainsi vers le succès interplanétaire et les quatre f Télérama, d'autres, tels Jeffrey Lewis, ont choisi la fidélité absolue aux valeurs punk et underground initiales, ainsi que l'absence revendiquée de compromis ("Don't Let The Record Label Take You Out To Lunch" est un de ses titres-phare). Quand on sait que le bougre est un fan invétéré de Mark E.Smith (aka The Fall), rien d'étonnant à tout cela...
Voilà qui explique sans doute que sa notoriété soit encore relativement confidentielle, en dépit d'un talent hors normes. Soit dit en passant, Jeffrey est au moins aussi connu pour ses talents de dessinateur de BD underground, qui sont d'ailleurs en vente à chacun de ses concerts.

Jeff aime bien Paris, qui le lui rend bien. La salle du Point Ephémère est en conséquence très bien remplie, et le set commence avec une première partie assurée par le duo Schwervon, qui mériterait à elle seule une chronique, en dépit d'un set un peu court ... mais avec une reprise notable d'un titre d'Herman Düne ("Winners Lose") et de Jeff Lewis, qui leur rendra la pareille lors de son set.

Et puis arrivent les frères Lewis, Jeffrey (guitare, chant, instruments bizarres) et Jack (basse et chant), accompagnés par David Beauchamp à la batterie.
Le concert sera un mélange de morceaux dans la plus pure veine folk, assurés avec un débit verbal impressionnant (où le songwriting est très marqué par le sceau de l'imaginaire Dylan/Cohen/Velvet), et d'autres nettement plus punk ("The Man With The Golden Arm", "No Lsd Tonight"), issus des deux premiers albums du groupe, et du dernier album à sortir dans les jours à venir ("City And Eastern Song").
Jack Lewis, s'il chante toujours très faux et s'il est désormais moustachu façon Ringo Starr grande période, jouera quant à lui deux ou trois morceaux issus de sa composition, dont le potentiel tubesque est imparable et qui nous rappellent de vieux souvenirs issus de ses prestations remarquées au Festival Mofo 2004 et en tournée avec les Herman Düne (aux Eurockéennes 2004 notamment, avec Kimya Dawson).
Et puis il n'y a pas de concerts de Jeff Lewis sans une "Low Budget Video". Ce dernier concept peut se résumer ainsi : Jeff se met face au public, prend une BD de sa composition (ici l'histoire du communisme et de la commune de Paris) qu'il oriente vers le public en tournant les pages au fur et à mesure qu'il les commente, sur un tempo basse-batterie lancinant et envoûtant.
Si l'on peut regretter un peu le côté naïf du contenu (version "les communistes étaient tous des gentils et les yankees tous des méchants"... ce qui est vrai, mais, chuttt), la prestation est brillante et amuse l'ensemble d'une salle conquise par le bonhomme.
Pour finir, Jeffrey nous livrera trois titres diaboliques en final qui auraient donné envie de slammer à un cul-de-jatte ("Arrow" et son final crescendo, "If You Shoot The Head You Kill The Ghoul" et "Texas") et qui auront eu le mérite de mettre le point FMR à feu et à sang (et le chroniqueur en nage). Rock'n'roll, quoi ...

A l'issue du deuxième rappel, Jeff Lewis revient seul sur scène et déclame a capella un dernier "Low Budget Video" sur "I Met A Hippie Girl On The 5th Avenue". Déjà joué lors de son passage à Mains d'Oeuvres l'an dernier, c'est brillant et amusant, avec qui plus est, une petite note d'humour sur la petite (-grosse-) tendance sociologique des fans d'Herman Düne à abuser de la fumette.


Parfait   17/20
par Wildthing


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