John Fahey
Requia And Other Compositions For Guitar Solo |
Label :
Vanguard |
||||
Voici un disque qui ne devrait laisser personne indifférent.
Perdu dans les années 70, le regretté John Fahey a toujours été une de mes énigmes musicales préférées. Avec ses albums dépouillés, limite austère, composé de longue plage solo de guitare acoustique, il à tout fait pour sombrer dans l'oubli. Et pourtant !
Il a su redéfinir la musique populaire, Requia est l'une des meilleures introductions à l'univers plus expérimental qu'il ne pourrait y paraitre de Fahey. Le son est très caractéristique de son travail : blues / folk fusion entièrement à la guitare joué avec brio avec un toucher qui n'appartient qu'a lui. Chronique d'une Amérique fantasmée et faussement traditionaliste. Le délire est poussé jusqu'à reprendre le "California Dreaming" de The Mamas And The Papas.
La particularité de ce disque et le collage de son qui n'ont rien à voir avec l'univers de base du disque. Les quatre parties de "Requiem For Molly" sont le sommet de cette bizarrerie avec des bruits en tout genre allant d'une espèce de cri de phoque à des discours en allemand que j'imagine récupéré sur un discours d'Hitler. Rien n'est crédité mais ca y ressemble fort.
Les pionniers du post rock l'ont cité comme influence. Pas sur que le lien soit évident mais Requia est un disque mystérieux dédié à l'inexploré et au déboussolage intégral. Un OVNI à classer parmi les... parmi les, parmi les on ne sait trop quoi d'ailleurs. A ne pas classer finalement mais à écouter.
Perdu dans les années 70, le regretté John Fahey a toujours été une de mes énigmes musicales préférées. Avec ses albums dépouillés, limite austère, composé de longue plage solo de guitare acoustique, il à tout fait pour sombrer dans l'oubli. Et pourtant !
Il a su redéfinir la musique populaire, Requia est l'une des meilleures introductions à l'univers plus expérimental qu'il ne pourrait y paraitre de Fahey. Le son est très caractéristique de son travail : blues / folk fusion entièrement à la guitare joué avec brio avec un toucher qui n'appartient qu'a lui. Chronique d'une Amérique fantasmée et faussement traditionaliste. Le délire est poussé jusqu'à reprendre le "California Dreaming" de The Mamas And The Papas.
La particularité de ce disque et le collage de son qui n'ont rien à voir avec l'univers de base du disque. Les quatre parties de "Requiem For Molly" sont le sommet de cette bizarrerie avec des bruits en tout genre allant d'une espèce de cri de phoque à des discours en allemand que j'imagine récupéré sur un discours d'Hitler. Rien n'est crédité mais ca y ressemble fort.
Les pionniers du post rock l'ont cité comme influence. Pas sur que le lien soit évident mais Requia est un disque mystérieux dédié à l'inexploré et au déboussolage intégral. Un OVNI à classer parmi les... parmi les, parmi les on ne sait trop quoi d'ailleurs. A ne pas classer finalement mais à écouter.
Parfait 17/20 | par Chaurionde |
Posté le 05 février 2016 à 19 h 04 |
Après son escale spirituelle du volume 6, John Fahey revient la même année prouver au monde entier (à ceux qui veulent bien l'entendre) qu'il est autant un expérimentateur sonore qu'un guitariste. Qu'à-cela ne tienne, l'homme avait depuis deux albums déjà mis un pied bravache dans les eaux troubles de l'expérimental ; pour ce troisième disque sous des auspices de recherche sonique, Fahey saute à pieds joints dans la mare. Finies les incursions timides de bandes inversées et de Field Recording avec une guitare en fond, c'est au tour de la musique concrète, la vraie, celle du collage sonore pur et dur, de faire son entrée fracassante dans le répertoire du primitif américain. Et dans sa volonté de concilier la pureté de la guitare seule et ses velléités de savant fou, John creuse sa tracklist en une dichotomie radicale, où les deux mondes ne se mélangent presque plus : une face de guitare, une autre de collages.
Sur tous les fronts, Fahey n'oublie cependant pas de soigner son travail à la gratte. De fait, cette face A à six cordes est à compter facilement parmi les pages les plus inspirées du répertoire du gros John. "Requiem for Mississippi John Hurt" pose une de ces basses lourdes et menaçantes dont il a le secret et qu'il ne nous avait plus sorti depuis ses tout premiers albums, menace que vient contredire l'absolue liesse de la mélodie lead, tandis que "When the Catfish is in Bloom" pose un des sommets du guitariste, un crescendo dévastateur qui constituera l'ébauche d'un thème que Fahey développera quelques années plus tard sur les 23 minutes de l'épique "Fare Forward Voyager". Entre les deux, la méditation apaisée, solennelle, du "Requiem for Russell Blaine Cooper". Requiem qui est bien celui qui porte le mieux son nom, le recueillement est de rigueur au long de ces 9 minutes.
Mais le Requiem qui suit cet imparable trio est d'un ordre tout autre : le "Requiem for Molly" (en quatre parties) est la plongée promise ci-dessus de John Fahey dans la musique concrète. Certes, la guitare est toujours présente dans ces expérimentations, mais désormais c'est à peine si elle importe plus que n'importe lequel des échantillons sonores que Fahey manipule sur ses bandes. On assiste donc à quatre mouvements d'un collage sur lequel figurent en vrac (et à l'endroit comme à l'envers) : toux, sirènes, discours nazis, musiques orchestrales diverses triturées dans tous les sens, aboiements, divagations blues, music-hall distordu... Malgré tout l'intérêt que comporte cette composition, et le crédit que cela ajoute à l'artiste déjà bien complet à l'époque qu'est John Fahey (ici aidé par Barry Hansen avant qu'il ne devienne l'homme de radio Dr Demento) je ne peux m'empêcher de grimacer régulièrement. C'est très personnel, car la majorité des collages du style a tendance à m'agacer (j'ai déjà plus d'une fois eu envie de baffer un certain John Cage à l'écoute d'une partie de ses travaux...), je suis dur à convaincre et Fahey ne fait malheureusement pas tout à fait exception. Pas tout à fait je précise, car je sauve quelques passages plus apaisés, quelques parties de la Part.1 et l'ensemble de la brève Part.3 qui se pare d'une poignante mélancolie... Le reste est trop épuisant à mon goût.
Mais je garde espoir, peut-être un jour cet échantillonnage sonore prendra tout son sens à mes oreilles, et ce jour là je serai un auditeur heureux. D'ici là je fais comme John sur ce Requia ; je sépare et je pioche, je garde sous le coude cette merveilleuse face A et je laisse la B de côté, en gardant tout de même la brève conclusion acoustique au bottleneck. De toute façon, je me rassure en me disant que Fahey lui-même avec le recul ne considérait par que le Requiem pour Molly était une bonne pièce. Fort heureusement pour la pérennité de notre couple, sur son disque suivant John réduira ses velléités expérimentales à une petite portion congrue. Or ledit disque est même mon favori du bonhomme, et en ce sens un de mes préférés en ce vaste monde. Comme quoi on finit toujours par s'arranger !
Sur tous les fronts, Fahey n'oublie cependant pas de soigner son travail à la gratte. De fait, cette face A à six cordes est à compter facilement parmi les pages les plus inspirées du répertoire du gros John. "Requiem for Mississippi John Hurt" pose une de ces basses lourdes et menaçantes dont il a le secret et qu'il ne nous avait plus sorti depuis ses tout premiers albums, menace que vient contredire l'absolue liesse de la mélodie lead, tandis que "When the Catfish is in Bloom" pose un des sommets du guitariste, un crescendo dévastateur qui constituera l'ébauche d'un thème que Fahey développera quelques années plus tard sur les 23 minutes de l'épique "Fare Forward Voyager". Entre les deux, la méditation apaisée, solennelle, du "Requiem for Russell Blaine Cooper". Requiem qui est bien celui qui porte le mieux son nom, le recueillement est de rigueur au long de ces 9 minutes.
Mais le Requiem qui suit cet imparable trio est d'un ordre tout autre : le "Requiem for Molly" (en quatre parties) est la plongée promise ci-dessus de John Fahey dans la musique concrète. Certes, la guitare est toujours présente dans ces expérimentations, mais désormais c'est à peine si elle importe plus que n'importe lequel des échantillons sonores que Fahey manipule sur ses bandes. On assiste donc à quatre mouvements d'un collage sur lequel figurent en vrac (et à l'endroit comme à l'envers) : toux, sirènes, discours nazis, musiques orchestrales diverses triturées dans tous les sens, aboiements, divagations blues, music-hall distordu... Malgré tout l'intérêt que comporte cette composition, et le crédit que cela ajoute à l'artiste déjà bien complet à l'époque qu'est John Fahey (ici aidé par Barry Hansen avant qu'il ne devienne l'homme de radio Dr Demento) je ne peux m'empêcher de grimacer régulièrement. C'est très personnel, car la majorité des collages du style a tendance à m'agacer (j'ai déjà plus d'une fois eu envie de baffer un certain John Cage à l'écoute d'une partie de ses travaux...), je suis dur à convaincre et Fahey ne fait malheureusement pas tout à fait exception. Pas tout à fait je précise, car je sauve quelques passages plus apaisés, quelques parties de la Part.1 et l'ensemble de la brève Part.3 qui se pare d'une poignante mélancolie... Le reste est trop épuisant à mon goût.
Mais je garde espoir, peut-être un jour cet échantillonnage sonore prendra tout son sens à mes oreilles, et ce jour là je serai un auditeur heureux. D'ici là je fais comme John sur ce Requia ; je sépare et je pioche, je garde sous le coude cette merveilleuse face A et je laisse la B de côté, en gardant tout de même la brève conclusion acoustique au bottleneck. De toute façon, je me rassure en me disant que Fahey lui-même avec le recul ne considérait par que le Requiem pour Molly était une bonne pièce. Fort heureusement pour la pérennité de notre couple, sur son disque suivant John réduira ses velléités expérimentales à une petite portion congrue. Or ledit disque est même mon favori du bonhomme, et en ce sens un de mes préférés en ce vaste monde. Comme quoi on finit toujours par s'arranger !
Pas mal 13/20
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