Ben Kweller

Je me souviens que quand j'avais quinze ans, j'aimais pas trop Ben Kweller, parce qu'il était plus une vedette que moi alors qu'il avait quand même trois semaines de moins, ce qui est anormal en plus d'être injuste. Et comme son groupe sentait un peu trop le coup marketing, je suis soigneusement passé à côté de Radish. Depuis, l'histoire semble vouloir à tout pris me prouver que j'ai eu tort.
C'est que Kweller a mine de rien du talent. Et pas un talent discret, non : un du genre qui te saute à la face pour y étaler son évidence. Une chanson de Ben Kweller, c'est assez simple : une mélodie panzer chantée avec conviction par-dessus des arrangements assez parfaits, le tout l'air de rien, comme si tout ça était très facile. Impression de chansons composées d'un revers de la manche, genre t'as vu, tu peines pendant que chez moi ça sort tout seul. Carrément dégueulasse.
La limite de ce talent, c'est que Kweller est un peu timoré. Il n'a ni l'emphase hard rock de Rivers Cuomo ni la folie douce de Jeffrey Lewis. Du coup ses chansons sont souvent belles mais rarement splendides - deux exceptions sur cet album : "I Don't Know Why", délicieusement sautillante, et "This Is War", qui clôt l'album et montre enfin un peu de rugosité garage. C'est un peu dommage, évacuer une première impression forte pour laisser place à une (très) légère frustration. On n'oblige évidemment personne à être malheureux, mais Kweller n'est pas vraiment crédible dans le domaine de la ballade sentimentale : manque de rage, d'extrémisme. Tout ceci n'est néanmoins pas très grave : restent onze chansons tout à fait classieuses.