Tristeza

A Colores

A Colores

 Label :     Better Looking 
 Sortie :    mardi 22 novembre 2005 
 Format :  Album / CD  Vinyle   

Swessey est parti. La Valle aussi. Le groupe est sérieusement amputé durant à peu près deux ans. Deux ans, le temps de faire le bilan mais surtout de combler la perte d'un guitariste et d'un pianiste respectivement par Alison Ables et Sean Ogilve. Bonne pioche. Le nouveau Tristeza est né.

Les cinq partenaires ont dépassé la simple vision spectrale de leur travail et recherchent dorénavant autant de variations que celles que l'on peut trouver dans les schémas cinématographiques. De cette précision notable, A Colores gagne la fluidité que ses prédécesseurs n'ont jamais acquis pourtant fréquemment à portée de main. Toujours loin des torrents bruyants, leurs textures sonores voient les différents instruments s'épouser et faire corps. Le discours qui en résulte est soudainement moins détaché, moins morcelé et donne un vrai sens à chaque titre. La nouvelle bande joue ensemble et on remarque qu'elle ne l'avait jamais aussi bien fait.

Force est de constater que ce revers est du en grande partie au sang neuf pulsé directement dans le cortex de Tristeza. Car dès "Bromas" puis "Balabaristas" d'une rare limpidité, Ogilve déroule ses lignes de piano prenant une place à part entière et rompt avec les anciennes manières de Swessey. Les nappes silencieuses sont reléguées en dernière position sur la liste des priorités après un jeu complémentaire averti avec les guitares, des décrochés synthétiques ("Abrazo Distante") ou encore des premiers rôles taillés sur mesure ("Aeroaviones"). Ensuite, pour ce qui est de Ables, on imagine qu'il a coupé court avec les redondances coutumières et a opté pour des pigmentations constantes, aléatoires (contagieuses sur "Palindrome Dome" avec sa batterie très en forme) ou même des approches de la frontière progressive qui borde celle de leur rock instrumental, comme s'ils avaient été invités quelques minutes à la cour des rois cramés ("La Tierra Subtil" resplendissante). La hauteur des guitares, adoptée maintenant, sera quant à elle la signature du quintet notamment sur "Cuchillos De Hiclo" qui n'est pas sans rappeler les Pink Floyd.

Ce troisième album est ainsi une réelle surprise surtout après ces départs, un hiatus de deux ans puis ces deux nouvelles recrues. On ne s'attendait pas à un tel revirement. Et pourtant Tristeza se tient là, droit devant nous, dans toute sa splendeur, plus bavarde que jamais en immersion dans son post rock spinal. Les américains ont décroché des fractales psychédéliques en guise de jaquette et affichent à présent un air presque gai, haut en couleurs. Presque car les couleurs sont tout de même sensiblement fluctuantes et comme j'ai oublié de le préciser ci-dessus le schéma suivi est celui d'un film à suspens. Avec ses bonnes et mauvaises passes. Ses doutes et ses instants de lucidité dont la clé sera certainement "Wand" aux dérives jazz et à l'embonpoint collectif.

A Colores, disque du salut et de la reconnaissance. Mieux vaut tard que jamais comme on énonce souvent. Il en aura fallu du temps et des changements mais le résultat est là et c'est le principal.


Excellent !   18/20
par TiComo La Fuera


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