Siouxsie Sioux
Mantaray |
Label :
Universal |
||||
On assiste ces derniers temps à un gros regain d'intérêt pour Siouxsie Sioux. LCD Soundsystem a repris le morceau "Slowdive" avec panache, les Scissor Sisters ont crié sur tous les toits qu'elle était leur chanteuse préférée et DeVotchka a repris un titre des Banshees sur les conseils avisés d'Arcade Fire.
Parallèlement à ça, Basement Jaxx avait invité l'anglaise en 2003 à enregistrer un titre "Cish Cash", brillant il faut bien le dire.
Siouxsie s'est donc finalement jetée à l'eau en solo avec de l'autre côté du rivage, en point de mire, le monde merveilleux de la pop. "it's about to happen, it's about to show".
Son premier opus est donc ce plaisant Mantaray. Plaisant, c'est le cas de le dire car Mantaray procure un sentiment bien agréable à celui qui l'écoute. "A healing voice caressed your ear", comme le dit la chanson "If It Doesn't Kill You", dont l'ambiance peut rappeler l'univers de John Barry ou encore celui de Air sur le premier film de Sofia Coppola.
L'éclectisme est aussi de mise ici : on passe d'un "They Follow you" avec ses choeurs à la Arcade Fire assez réussis à "Loveless", un titre que D.M. ou Massive Attack n'auraient sans doute pas renié avec contrebasse et archet en prime. Ailleurs, sur "Drone Zone", on marche sur les plates-bandes de Portishead et d'Ennio Morricone avec un côté lascif en plus.
"About To Happen" est à l'inverse, le titre rock glitter par excellence du disque, une tuerie absolue de 3 minutes qui arrache tout sur son passage. Vous voilà prévenus, il y en a pour tous les goûts.
Côté textes, il y a du nouveau et on est même assez surpris au premier abord. Ses paroles n'ont en effet jamais été aussi directes. ''What am I gonna do ? How do I face the truth?''. Le thème de la rupture est d'ailleurs présent en filigrane dans la dernière partie "Sometimes you win when you lose."
Certaines chansons de ce disque sont même salvatrices et qui aurait imaginé ça chez elle, il y a désormais de la lumière au bout du tunnel. "If it doesn't break you, it will make you..."
Voilà donc une pop lumineuse sans prétention avec des phrases qui font mouche. ''I would catch a star if you asked me to but I can't seem to find one to hold onto...'' et cela donne à l'arrivée un bon grower, avec un souci du détail dans les arrangements. La chanteuse est ici à la plénitude de ses moyens, elle a suivi l'exemple de PJ Harvey : travailler sa voix avec un professeur de chant pour y puiser de nouvelles couleurs et rebondir vers autre chose. On attend déja la suite avec impatience.
Parallèlement à ça, Basement Jaxx avait invité l'anglaise en 2003 à enregistrer un titre "Cish Cash", brillant il faut bien le dire.
Siouxsie s'est donc finalement jetée à l'eau en solo avec de l'autre côté du rivage, en point de mire, le monde merveilleux de la pop. "it's about to happen, it's about to show".
Son premier opus est donc ce plaisant Mantaray. Plaisant, c'est le cas de le dire car Mantaray procure un sentiment bien agréable à celui qui l'écoute. "A healing voice caressed your ear", comme le dit la chanson "If It Doesn't Kill You", dont l'ambiance peut rappeler l'univers de John Barry ou encore celui de Air sur le premier film de Sofia Coppola.
L'éclectisme est aussi de mise ici : on passe d'un "They Follow you" avec ses choeurs à la Arcade Fire assez réussis à "Loveless", un titre que D.M. ou Massive Attack n'auraient sans doute pas renié avec contrebasse et archet en prime. Ailleurs, sur "Drone Zone", on marche sur les plates-bandes de Portishead et d'Ennio Morricone avec un côté lascif en plus.
"About To Happen" est à l'inverse, le titre rock glitter par excellence du disque, une tuerie absolue de 3 minutes qui arrache tout sur son passage. Vous voilà prévenus, il y en a pour tous les goûts.
Côté textes, il y a du nouveau et on est même assez surpris au premier abord. Ses paroles n'ont en effet jamais été aussi directes. ''What am I gonna do ? How do I face the truth?''. Le thème de la rupture est d'ailleurs présent en filigrane dans la dernière partie "Sometimes you win when you lose."
Certaines chansons de ce disque sont même salvatrices et qui aurait imaginé ça chez elle, il y a désormais de la lumière au bout du tunnel. "If it doesn't break you, it will make you..."
Voilà donc une pop lumineuse sans prétention avec des phrases qui font mouche. ''I would catch a star if you asked me to but I can't seem to find one to hold onto...'' et cela donne à l'arrivée un bon grower, avec un souci du détail dans les arrangements. La chanteuse est ici à la plénitude de ses moyens, elle a suivi l'exemple de PJ Harvey : travailler sa voix avec un professeur de chant pour y puiser de nouvelles couleurs et rebondir vers autre chose. On attend déja la suite avec impatience.
Très bon 16/20 | par Rabbidcat |
Posté le 02 novembre 2007 à 18 h 40 |
Après une brillante et prolifique carrière au sein de Siouxsie And The Banshees, mais aussi, parallèlement, The Creatures (avec son batteur de mari Budgie), la diva Siouxsie sort enfin son album solo.
L'égérie punk puis gothique a su s'entourer de musiciens dont le choix n'est pas évident. Les deux principaux, le guitariste Steve Evans (qui s'occupe également de la programmation) et le bassiste Charlie Jones (qui joue également de la contrebasse et des claviers) sont d'illustres inconnus. Producteurs de l'album, ils sont également co-compositeurs de la plupart des titres avec Siouxsie. Le batteur Clive Deamer, quant à lui, joua avec Portishead mais aussi Robert Plant. Divers musiciens complètent ce noyau dur : un percussionniste, un joueur de xylophone, un arrangeur de cordes, etc. un Notons également la participation au saxophone et autres instruments à vent de Terry Edwards, qui joua avec des artistes aussi variés et prestigieux que PJ Harvey, Lydia Lunch, Lush, Tindersticks, Nick Cave, The Jesus And Mary Chain ou Tom Waits.
Sur cet album, Siouxsie a su prendre des risques, s'éloignant radicalement du son des Banshees mais aussi des Creatures pour aboutir à quelque chose de très actuel mais aussi très personnel. On a parlé pour Mantaray de pop sophistiquée, et le terme est assez adéquat. Je dirais pour ma part qu'il s'agit de pop rock avec des tendances industrielles (même si on est loin d'un Nine Inch Nails !). Le tout est assez varié tout en restant homogène.
Il faut bien avouer que les musiciens ne sont pas des pointures, leur jeu manque de finesse, surtout le guitariste et le batteur, le bassiste étant en peu au dessus. Ce point de vue s'est confirmé lors du récent concert à Paris. N'est pas John Mc Geoch ou Budgie qui veut ! On se rend d'autant mieux compte à quel point ces musiciens étaient des génies, et Siouxsie And The Banshees un groupe majeur...
Parmi les meilleurs morceaux figurent le single "Into A Swan", mais aussi "About To Happen", "Here Comes That Day", "Loveless" (avec un solo de xylophone digne des Creatures), le jazzy "If It Doesn't Kill You",... bref, la première moitié de l'album. La seconde partie est un peu moins réussie.
Un assez bon album qui me déçoit tout de même un peu, je m'attendais à mieux d'une telle artiste, surtout après un tel temps d'attente. L'urgence, c'est justement peut être ce qui manque à cet album, où l'on ne retrouve pas toujours cette tension caractéristique du son des Banshees et des Creatures...
L'égérie punk puis gothique a su s'entourer de musiciens dont le choix n'est pas évident. Les deux principaux, le guitariste Steve Evans (qui s'occupe également de la programmation) et le bassiste Charlie Jones (qui joue également de la contrebasse et des claviers) sont d'illustres inconnus. Producteurs de l'album, ils sont également co-compositeurs de la plupart des titres avec Siouxsie. Le batteur Clive Deamer, quant à lui, joua avec Portishead mais aussi Robert Plant. Divers musiciens complètent ce noyau dur : un percussionniste, un joueur de xylophone, un arrangeur de cordes, etc. un Notons également la participation au saxophone et autres instruments à vent de Terry Edwards, qui joua avec des artistes aussi variés et prestigieux que PJ Harvey, Lydia Lunch, Lush, Tindersticks, Nick Cave, The Jesus And Mary Chain ou Tom Waits.
Sur cet album, Siouxsie a su prendre des risques, s'éloignant radicalement du son des Banshees mais aussi des Creatures pour aboutir à quelque chose de très actuel mais aussi très personnel. On a parlé pour Mantaray de pop sophistiquée, et le terme est assez adéquat. Je dirais pour ma part qu'il s'agit de pop rock avec des tendances industrielles (même si on est loin d'un Nine Inch Nails !). Le tout est assez varié tout en restant homogène.
Il faut bien avouer que les musiciens ne sont pas des pointures, leur jeu manque de finesse, surtout le guitariste et le batteur, le bassiste étant en peu au dessus. Ce point de vue s'est confirmé lors du récent concert à Paris. N'est pas John Mc Geoch ou Budgie qui veut ! On se rend d'autant mieux compte à quel point ces musiciens étaient des génies, et Siouxsie And The Banshees un groupe majeur...
Parmi les meilleurs morceaux figurent le single "Into A Swan", mais aussi "About To Happen", "Here Comes That Day", "Loveless" (avec un solo de xylophone digne des Creatures), le jazzy "If It Doesn't Kill You",... bref, la première moitié de l'album. La seconde partie est un peu moins réussie.
Un assez bon album qui me déçoit tout de même un peu, je m'attendais à mieux d'une telle artiste, surtout après un tel temps d'attente. L'urgence, c'est justement peut être ce qui manque à cet album, où l'on ne retrouve pas toujours cette tension caractéristique du son des Banshees et des Creatures...
Sympa 14/20
Posté le 24 novembre 2011 à 11 h 36 |
Après trois décennies de carrière en meneuse de groupes (Siouxsie and the Banshees, the Creatures), Siouxsie Sioux se libère de toute attache. Elle nous vend pour la première fois son nom, seul, en tête d'affiche de ce Mantaray. Et c'est une créature nouvelle qui se présente, via le récit de sa métamorphose. Elle nous provoque avec un son moderne, aux nombreuses sonorités futuristes. La vieille icône semble dire qu'elle est encore bien plus en avance que nous sur son temps. Elle amasse des composantes actuelles, et les mélange selon sa recette ancestrale pour offrir une cure de jeunesse à notre génération.
Elle y mêle aussi une variété d'autres influences, afin de créer un paysage luxuriant à l'image de sa longue carrière. Elle les réunit toutes ici pour les confronter les unes aux autres, pour poser un résumé de son passé comme base de son devenir. On entend alors un air de jazz, des percussions industrielles ou des plages atmosphériques, au milieu de mélodies électriques et électroniques. Leur identité, très marquée, est toujours taillée sur mesure sur le rythme d'une colère ou d'une passion. La musique, si expressive, crée ainsi un contraste entre chacun de ses éléments. Il est facile de se repérer le long de la route où nous mène la diva.
La première piste est soudaine et dangereuse. Le son, puissant et plein de fougue, célèbre sa renaissance. Elle se libère enfin de ses vieux démons, et devient une créature plus belle et vorace. On croirait la revoir dans sa première jeunesse, pleine de force et prête à dévorer la vie. Ses atouts se dévoilent, son pouvoir se libère, et nous traîne dans sa course sans se soucier de notre avis.
Forte de sa nouvelle forme, elle se jette sur la deuxième piste au pas de course. Elle garde son agressivité, mais la teinte de roublardise. Elle évolue maintenant dans le monde, qu'elle manipule en maître. Les gens sont à ses pieds et ses souhaits à portée. Le rythme, à son image, est écrasant et effréné.
Comme elle devient experte à ce jeu là, elle gagne en maturité. Elle prend donc un sentier plus raffiné, plus élégant. Son ascension est soudaine, fulgurante. On s'étonne d'une évolution si rapide, entraînée par l'enchaînement des morceaux qui se succèdent sans silence, et montent chaque fois d'un cran en intensité. Elle est à l'apogée de son pouvoir, maniant sa nouvelle forme avec une maîtrise parfaite. Et alors, inattendus, des nuages se montrent à l'horizon. Elle s'élance à leur devant avec hargne, prête à lutter.
Elle se rend compte, trop tard, que la route qui suit s'annonce trop périlleuse. On l'entend tenter de ralentir sa course, comme un coureur encore poussé par l'élan. Elle ne peut s'arrêter avant de se heurter aux nuages menaçants. Sans défense, elle découvre que sa nouvelle forme lui a fait ignorer bien des choses, dont ses conséquences. Elle cherche des armes, prête à combattre, mais se retourne et n'en voit aucune. Dans sa course, elle ne s'en est pas construit, persuadée d'être capable de tout et de n'en a avoir jamais besoin. Elle fait lentement quelques pas en arrière, et le souvenir intervient, là où tout était imminence. La bataille lui est déjà perdue.
Des raclements de guitare, désagréables, l'accueillent à l'entrée d'un désert. Les notes sont lointaines et longues, l'atmosphère change radicalement, devient contemplative et peu engageante. La puissance du début a disparu, et il n'y a plus que la défaite à observer. Elle se glisse, errante, dans l'immensité qu'elle découvre, qui s'étend et s'est toujours étendu autour d'elle. Un monde si vaste qu'elle n'en avait rien vu, ni jamais rien su.
Alors, ne voyant rien à bâtir sur cette route, elle tente de rebrousser chemin. Autant redevenir qui elle était, puis ce qu'elle n'est plus rien d'autre. Mais elle ne suffit plus à s'apaiser, et ne peut s'empêcher de voir le monde sinistre autour d'elle. Elle le craint, puis par peur d'y retourner se terre dans ses anciennes passions, où l'ombre des nuages la rejoint toujours.
Ne sachant où fuir, elle reste immobile pour contempler le désert. Elle y voit d'abord ses chimères, et leur adresse un sourire ironique. Derrière ensuite se remuent celles de ses semblables. Elles lui paraissent bientôt, comme les siennes, aussi variées que dérisoires. Elle les confond toutes ensemble, et les regarde interagir comme de minuscules pièces d'une même mécanique.
Porteuse de cette idée, elle se laisse aller à la contemplation lascive. Sa défaite ne lui a rien laissé, ni même le privilège de se replonger dans ses anciens vices. Alors autant vivre en retrait, sans plus de participation. Mais ses souvenirs reviennent la lécher comme la mer les plages, perdue dans l'immensité de l'horizon. Elle se prend alors à rêver à un nouvel avenir, plus loin encore que le désert. Il lui suffit d'emprunter le sentier qui y mène.
Elle le trouve finalement, et fait une introduction fracassante dans son nouveau monde, sur un air de triomphe. Sa voix se fait incisive et sure d'elle. Elle se jette à la gorge de tout ce qui se dresse devant elle. Pourtant, peu à peu, ses anciennes cicatrices la font souffrir, et essoufflent sa force retrouvée. Elle ne peut faire l'impasse sur son passé, pas plus qu'elle ne peut y revenir. Le désert est encore proche, et dans son effroi il est au moins un lieu connu.
Elle s'en détourne, continue de marcher coûte que coûte. Elle se croit enfin à l'abri. Une voix intérieure murmure encore que c'est un mensonge, mais elle parvient à la faire taire peu à peu. Alors elle se détend, et se laisse jouir de ces nouveaux délices qui l'entourent. Bientôt, son ancienne forme pleine de cicatrices et de doute disparaît, et la voilà qui renaît.
Avec un regard neuf, Siouxsie retrace son propre parcours. Elle le suit avec passion, et l'anime d'autant de couleurs qui le dévoilent. C'est un moyen pour elle de faire un détour par chacune de ses influences, de les poser dans un panorama global de ses intentions. Leur multitude est remarquable, de même que la variété et la précision des sons pour l'exprimer.
Néanmoins, à l'image du parcours chaotique qu'elles illustrent, elles n'ont pas toutes la même saveur. Certaines étapes sont fatalement moins passionnantes, certaines passions moins captivantes. La seconde partie de l'album, forcément moins attractive que la première, souffre un peu de l'ombre de celle-ci. L'élan amorcé par le début du disque fait se succéder les morceaux avec une virtuosité éblouissante. On voudrait être emmené ainsi jusqu'au bout, mais le rythme se en milieu de parcours, et l'on se perd à chercher les sommets annoncés. Les cinq derniers morceaux demanderont plusieurs écoutes individuelles pour révéler leurs qualités. Ainsi, ils seront plus difficiles à suivre sur une écoute complète de l'album, où notre attention se perdra après les pics de ses débuts.
Il reste pourtant que Siouxsie s'affiche avec une jeunesse retrouvée. L'ambiance futuriste ne laisse pas supposer d'horizon sans avenir. Au contraire, elle semble nous y attendre, ayant déjà deviné les embuches qui se mettront au travers de sa route. La nouvelle Siouxsie n'est plus la courtisane d'antan, qui touchait un peu de tout, mais une reine aux nombreux sujets et aux pleins pouvoirs.
Elle y mêle aussi une variété d'autres influences, afin de créer un paysage luxuriant à l'image de sa longue carrière. Elle les réunit toutes ici pour les confronter les unes aux autres, pour poser un résumé de son passé comme base de son devenir. On entend alors un air de jazz, des percussions industrielles ou des plages atmosphériques, au milieu de mélodies électriques et électroniques. Leur identité, très marquée, est toujours taillée sur mesure sur le rythme d'une colère ou d'une passion. La musique, si expressive, crée ainsi un contraste entre chacun de ses éléments. Il est facile de se repérer le long de la route où nous mène la diva.
La première piste est soudaine et dangereuse. Le son, puissant et plein de fougue, célèbre sa renaissance. Elle se libère enfin de ses vieux démons, et devient une créature plus belle et vorace. On croirait la revoir dans sa première jeunesse, pleine de force et prête à dévorer la vie. Ses atouts se dévoilent, son pouvoir se libère, et nous traîne dans sa course sans se soucier de notre avis.
Forte de sa nouvelle forme, elle se jette sur la deuxième piste au pas de course. Elle garde son agressivité, mais la teinte de roublardise. Elle évolue maintenant dans le monde, qu'elle manipule en maître. Les gens sont à ses pieds et ses souhaits à portée. Le rythme, à son image, est écrasant et effréné.
Comme elle devient experte à ce jeu là, elle gagne en maturité. Elle prend donc un sentier plus raffiné, plus élégant. Son ascension est soudaine, fulgurante. On s'étonne d'une évolution si rapide, entraînée par l'enchaînement des morceaux qui se succèdent sans silence, et montent chaque fois d'un cran en intensité. Elle est à l'apogée de son pouvoir, maniant sa nouvelle forme avec une maîtrise parfaite. Et alors, inattendus, des nuages se montrent à l'horizon. Elle s'élance à leur devant avec hargne, prête à lutter.
Elle se rend compte, trop tard, que la route qui suit s'annonce trop périlleuse. On l'entend tenter de ralentir sa course, comme un coureur encore poussé par l'élan. Elle ne peut s'arrêter avant de se heurter aux nuages menaçants. Sans défense, elle découvre que sa nouvelle forme lui a fait ignorer bien des choses, dont ses conséquences. Elle cherche des armes, prête à combattre, mais se retourne et n'en voit aucune. Dans sa course, elle ne s'en est pas construit, persuadée d'être capable de tout et de n'en a avoir jamais besoin. Elle fait lentement quelques pas en arrière, et le souvenir intervient, là où tout était imminence. La bataille lui est déjà perdue.
Des raclements de guitare, désagréables, l'accueillent à l'entrée d'un désert. Les notes sont lointaines et longues, l'atmosphère change radicalement, devient contemplative et peu engageante. La puissance du début a disparu, et il n'y a plus que la défaite à observer. Elle se glisse, errante, dans l'immensité qu'elle découvre, qui s'étend et s'est toujours étendu autour d'elle. Un monde si vaste qu'elle n'en avait rien vu, ni jamais rien su.
Alors, ne voyant rien à bâtir sur cette route, elle tente de rebrousser chemin. Autant redevenir qui elle était, puis ce qu'elle n'est plus rien d'autre. Mais elle ne suffit plus à s'apaiser, et ne peut s'empêcher de voir le monde sinistre autour d'elle. Elle le craint, puis par peur d'y retourner se terre dans ses anciennes passions, où l'ombre des nuages la rejoint toujours.
Ne sachant où fuir, elle reste immobile pour contempler le désert. Elle y voit d'abord ses chimères, et leur adresse un sourire ironique. Derrière ensuite se remuent celles de ses semblables. Elles lui paraissent bientôt, comme les siennes, aussi variées que dérisoires. Elle les confond toutes ensemble, et les regarde interagir comme de minuscules pièces d'une même mécanique.
Porteuse de cette idée, elle se laisse aller à la contemplation lascive. Sa défaite ne lui a rien laissé, ni même le privilège de se replonger dans ses anciens vices. Alors autant vivre en retrait, sans plus de participation. Mais ses souvenirs reviennent la lécher comme la mer les plages, perdue dans l'immensité de l'horizon. Elle se prend alors à rêver à un nouvel avenir, plus loin encore que le désert. Il lui suffit d'emprunter le sentier qui y mène.
Elle le trouve finalement, et fait une introduction fracassante dans son nouveau monde, sur un air de triomphe. Sa voix se fait incisive et sure d'elle. Elle se jette à la gorge de tout ce qui se dresse devant elle. Pourtant, peu à peu, ses anciennes cicatrices la font souffrir, et essoufflent sa force retrouvée. Elle ne peut faire l'impasse sur son passé, pas plus qu'elle ne peut y revenir. Le désert est encore proche, et dans son effroi il est au moins un lieu connu.
Elle s'en détourne, continue de marcher coûte que coûte. Elle se croit enfin à l'abri. Une voix intérieure murmure encore que c'est un mensonge, mais elle parvient à la faire taire peu à peu. Alors elle se détend, et se laisse jouir de ces nouveaux délices qui l'entourent. Bientôt, son ancienne forme pleine de cicatrices et de doute disparaît, et la voilà qui renaît.
Avec un regard neuf, Siouxsie retrace son propre parcours. Elle le suit avec passion, et l'anime d'autant de couleurs qui le dévoilent. C'est un moyen pour elle de faire un détour par chacune de ses influences, de les poser dans un panorama global de ses intentions. Leur multitude est remarquable, de même que la variété et la précision des sons pour l'exprimer.
Néanmoins, à l'image du parcours chaotique qu'elles illustrent, elles n'ont pas toutes la même saveur. Certaines étapes sont fatalement moins passionnantes, certaines passions moins captivantes. La seconde partie de l'album, forcément moins attractive que la première, souffre un peu de l'ombre de celle-ci. L'élan amorcé par le début du disque fait se succéder les morceaux avec une virtuosité éblouissante. On voudrait être emmené ainsi jusqu'au bout, mais le rythme se en milieu de parcours, et l'on se perd à chercher les sommets annoncés. Les cinq derniers morceaux demanderont plusieurs écoutes individuelles pour révéler leurs qualités. Ainsi, ils seront plus difficiles à suivre sur une écoute complète de l'album, où notre attention se perdra après les pics de ses débuts.
Il reste pourtant que Siouxsie s'affiche avec une jeunesse retrouvée. L'ambiance futuriste ne laisse pas supposer d'horizon sans avenir. Au contraire, elle semble nous y attendre, ayant déjà deviné les embuches qui se mettront au travers de sa route. La nouvelle Siouxsie n'est plus la courtisane d'antan, qui touchait un peu de tout, mais une reine aux nombreux sujets et aux pleins pouvoirs.
Excellent ! 18/20
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