Thundercat
Drunk |
Label :
Brainfeeder |
||||
Je ne sais pas vraiment comment ce Drunk a pu échapper à mon attention durant près d'un an. Pour tout vous dire, je l'ai découvert en allant voir sur le net s'il y avait une quelconque information à propos d'un probable nouvel album de Flying Lotus et le nom de Thundercat m'est apparu, tout simplement parce que ce 3è album est co-produit par Flying Lotus ; merci au hasard ! Thundercat est un nom que j'ai plusieurs fois croisé en lisant les crédits sur les livrets de CD, mais je n'ai jamais pris le temps d'aller voir s'il avait une carrière en dehors du statut de session-man/producteur – erreur corrigée.
Flying Lotus à la co-production, une pochette qui m'a de suite rappelé Funkadelic, je me suis dit qu'il allait sûrement y avoir un mix entre le Jazz et le Funk et j'ai presque vu juste. Funk, Jazz, Soul, R'n'B, Hip-Hop, Pop (un petit peu), une véritable odyssée sonore maîtrisée de bout en bout par un génial Thundercat. Vous prenez You're Dead! de Flying Lotus, vous le mixez avec To Pimp A Butterfly de Kendrick Lamar, le tout enrobé de la créativité et du talent indéniable de Thundercat et vous obtenez le son de Drunk.
Comme la piste d'ouverture le suggère, on tombe directement dans le "Rabbot Ho" – référence évidente à l'œuvre de Lewis Carroll, sauf qu'ici le Pays des Merveilles est un paysage sonore harmonieux où seuls les détails permettent de différencier les différents lieux. Les personnages principaux sont Thundercat, Flying Lotus, Kamasi Washington, Michael McDonald, Kenny Loggins, Kendrick Lamar, Pharrell Williams et Wiz Khalifa.
Thundercat est connu pour sa virtuosité à la basse et sur Drunk, il m'est souvent arrivé de me dire "WAOUH !", une simple réaction qui en dit long. "Uh Uh" / "Them Changes" / "Where I'm Going" / "3AM", ce mec est une véritable bête avec sa basse 6 cordes – 6 cordes !
Drunk est un album homogène, à la cool, parfois sexy, parfois dansant, parfois planant, souvent marrant (je vais vous parler des paroles après) ; je parle de virtuosité à la basse, mais je devrais parler de virtuosité pour à peu près tout sur ce disque, que ce soit l'exécution de Thundercat ou des musiciens qui l'accompagnent (big-up Deantoni Parks), il semble que tout le monde ait eu envie de créer un grand disque.
Les ambiances se ressemblent et pourtant il n'y a aucune fois la sensation de répétition – je vous le dis, tout se joue dans les détails. Prenez "Captain Stupido", qui peut s'attendre à entendre un titre inspiré par The Mothers Of Invention ? La douce voix aiguë, les échanges/réponses avec les chœurs, le ronflement, le pet ; Frank Zappa revient sur "Uh Uh" avec le jeu de basse de Thundercat rappelant fortement la guitare épileptique de "Father O'Blivion" (Apostrophe ('), 1974). "Bus In These Streets" avec ses cloches pourrait faire office de générique joyeux pour une vieille sitcom ; les "miaou miaou" dans "A Fan's Mail (Tron Song Suite II)" il fallait oser et pourtant le gimmick fonctionne parfaitement. "Tokyo" obtient une intro digne de jeux vidéos old school et l'ambiance... je peux parler en connaissance de cause étant donné que j'y suis allé, j'écoute ce titre et je me revois en balade nocturne dans le quartier d'Akihabara, celui qu'on appelle le "quartier geek" – l'ambiance, les lumières de toutes les couleurs et dans tous les sens, il aurait rajouté des Japonaises aux voix stridentes nous invitant à rentrer dans les boutiques et ça aurait été l'image ultime ; voyage garanti.
Au niveau des collaborations elles sont toutes réussies, sauf celle avec Wiz Khalifa "Drink Dat", je n'y arrive toujours pas avec ce mec... et l'ambiance bien plus R'n'B s'oppose en quelque sorte au reste du disque. Par contre "Show You The Way" avec Michael McDonald et Kenny Loggins réunis est d'une beauté ! Et cette basse groovy, un petit délice. "The Turn Down" avec Pharell est loin d'être une chanson Happy, mais une certaine classe en ressort et l'échange opéré par les voix est tip-top. "Them Changes", bien funky et sexy comme un titre de Prince, obtient une partie de saxophone par le grand Kamasi Washington, mais ce n'est pas du tout assez, on a l'impression qu'à peine il entre en scène, le fade-out de la chanson arrive... dommage de gâcher ce moment. Et le duo avec Kendrick Lamar "Walk On By", rien d'étonnant étant donné qu'ils ont déjà collaboré ensemble, donc on sait à quoi s'attendre, il n'y a pas vraiment de surprise et la qualité est bel et bien au rendez-vous (cette production sied vraiment bien au flow du rappeur). Thundercat place même une référence à "Bitch Don't Kill My Vibe" (titre de Kendrick) dans "Friend Zone". Avec "DUI" on revient au début en reprenant la mélodie de "Rabbot Ho" – on ressort du trou.
Au niveau des paroles, elles sont souvent simples, mais surtout honnêtes et personnelles avec une pointe d'humour. Je prends l'exemple de "Tokyo" :
"Restless nights in Tokyo
Wanna hear all the sounds and see all the sights
From the Champs-Élysées to the Gundam Cafe
Gonna eat so much fish, I think I'm gonna be sick
Gonna blow all my cash on anime (Yes!)
Don't try to stop me 'cause I'm over 9000
Just point me to the pachinko machines
I think I'm Kenshiro, I think that I'm Goku
Can I just stay one more day?
[...]
This all started when I was a boy
I went to the dentist and he gave me a toy
It was Dragon Ball Z, a wrist-slap bracelet
Goku fucking ruined me"
quand on entend cette musique quand même sophistiquée, on n'imagine pas une seule seconde tomber sur ce genre de paroles et c'est aussi çà la magie de ce disque, mêlée la légèreté avec des propos qui peuvent être plus sérieux, comme la question de la mort dans "Lava Lamp" :
"Sometimes you have to let go
To free fall away
I won't judge you anymore
'Cause sometimes I needed to
Free fall far away
Out of sight, out of mind"
Sans que la musique soit lourde ou avec une ambiance plombante, bien au contraire le titre porte bien son nom, on se croirait coincé dedans. Thundercat peut être sérieux tout en sachant s'amuser, il reste toujours entre les deux sans vraiment plonger dans l'une ou l'autre direction.
Le point négatif de l'opus et peut-être même le seul, est le fait que certaines chansons soient beaucoup trop courtes et n'apportent au final que frustration ("Jethro" / "Day & Night" / "Jameel's Space Ride" / "I Am Crazy" / "3 AM"), on peut en considérer quelques-unes comme des interludes, mais les idées exposées sont tellement prometteuses qu'on en veut plus, on veut le vrai résultat final, celui qui aurait été exploité jusqu'au bout et non des petits trucs à droite à gauche. Tant pis, le feeling prime.
Drunk est une grande œuvre tout droit sorti de l'esprit d'un grand et même s'il n'est peut-être pas encore considéré comme tel, nul doute qu'il le sera très vite.
Flying Lotus à la co-production, une pochette qui m'a de suite rappelé Funkadelic, je me suis dit qu'il allait sûrement y avoir un mix entre le Jazz et le Funk et j'ai presque vu juste. Funk, Jazz, Soul, R'n'B, Hip-Hop, Pop (un petit peu), une véritable odyssée sonore maîtrisée de bout en bout par un génial Thundercat. Vous prenez You're Dead! de Flying Lotus, vous le mixez avec To Pimp A Butterfly de Kendrick Lamar, le tout enrobé de la créativité et du talent indéniable de Thundercat et vous obtenez le son de Drunk.
Comme la piste d'ouverture le suggère, on tombe directement dans le "Rabbot Ho" – référence évidente à l'œuvre de Lewis Carroll, sauf qu'ici le Pays des Merveilles est un paysage sonore harmonieux où seuls les détails permettent de différencier les différents lieux. Les personnages principaux sont Thundercat, Flying Lotus, Kamasi Washington, Michael McDonald, Kenny Loggins, Kendrick Lamar, Pharrell Williams et Wiz Khalifa.
Thundercat est connu pour sa virtuosité à la basse et sur Drunk, il m'est souvent arrivé de me dire "WAOUH !", une simple réaction qui en dit long. "Uh Uh" / "Them Changes" / "Where I'm Going" / "3AM", ce mec est une véritable bête avec sa basse 6 cordes – 6 cordes !
Drunk est un album homogène, à la cool, parfois sexy, parfois dansant, parfois planant, souvent marrant (je vais vous parler des paroles après) ; je parle de virtuosité à la basse, mais je devrais parler de virtuosité pour à peu près tout sur ce disque, que ce soit l'exécution de Thundercat ou des musiciens qui l'accompagnent (big-up Deantoni Parks), il semble que tout le monde ait eu envie de créer un grand disque.
Les ambiances se ressemblent et pourtant il n'y a aucune fois la sensation de répétition – je vous le dis, tout se joue dans les détails. Prenez "Captain Stupido", qui peut s'attendre à entendre un titre inspiré par The Mothers Of Invention ? La douce voix aiguë, les échanges/réponses avec les chœurs, le ronflement, le pet ; Frank Zappa revient sur "Uh Uh" avec le jeu de basse de Thundercat rappelant fortement la guitare épileptique de "Father O'Blivion" (Apostrophe ('), 1974). "Bus In These Streets" avec ses cloches pourrait faire office de générique joyeux pour une vieille sitcom ; les "miaou miaou" dans "A Fan's Mail (Tron Song Suite II)" il fallait oser et pourtant le gimmick fonctionne parfaitement. "Tokyo" obtient une intro digne de jeux vidéos old school et l'ambiance... je peux parler en connaissance de cause étant donné que j'y suis allé, j'écoute ce titre et je me revois en balade nocturne dans le quartier d'Akihabara, celui qu'on appelle le "quartier geek" – l'ambiance, les lumières de toutes les couleurs et dans tous les sens, il aurait rajouté des Japonaises aux voix stridentes nous invitant à rentrer dans les boutiques et ça aurait été l'image ultime ; voyage garanti.
Au niveau des collaborations elles sont toutes réussies, sauf celle avec Wiz Khalifa "Drink Dat", je n'y arrive toujours pas avec ce mec... et l'ambiance bien plus R'n'B s'oppose en quelque sorte au reste du disque. Par contre "Show You The Way" avec Michael McDonald et Kenny Loggins réunis est d'une beauté ! Et cette basse groovy, un petit délice. "The Turn Down" avec Pharell est loin d'être une chanson Happy, mais une certaine classe en ressort et l'échange opéré par les voix est tip-top. "Them Changes", bien funky et sexy comme un titre de Prince, obtient une partie de saxophone par le grand Kamasi Washington, mais ce n'est pas du tout assez, on a l'impression qu'à peine il entre en scène, le fade-out de la chanson arrive... dommage de gâcher ce moment. Et le duo avec Kendrick Lamar "Walk On By", rien d'étonnant étant donné qu'ils ont déjà collaboré ensemble, donc on sait à quoi s'attendre, il n'y a pas vraiment de surprise et la qualité est bel et bien au rendez-vous (cette production sied vraiment bien au flow du rappeur). Thundercat place même une référence à "Bitch Don't Kill My Vibe" (titre de Kendrick) dans "Friend Zone". Avec "DUI" on revient au début en reprenant la mélodie de "Rabbot Ho" – on ressort du trou.
Au niveau des paroles, elles sont souvent simples, mais surtout honnêtes et personnelles avec une pointe d'humour. Je prends l'exemple de "Tokyo" :
"Restless nights in Tokyo
Wanna hear all the sounds and see all the sights
From the Champs-Élysées to the Gundam Cafe
Gonna eat so much fish, I think I'm gonna be sick
Gonna blow all my cash on anime (Yes!)
Don't try to stop me 'cause I'm over 9000
Just point me to the pachinko machines
I think I'm Kenshiro, I think that I'm Goku
Can I just stay one more day?
[...]
This all started when I was a boy
I went to the dentist and he gave me a toy
It was Dragon Ball Z, a wrist-slap bracelet
Goku fucking ruined me"
quand on entend cette musique quand même sophistiquée, on n'imagine pas une seule seconde tomber sur ce genre de paroles et c'est aussi çà la magie de ce disque, mêlée la légèreté avec des propos qui peuvent être plus sérieux, comme la question de la mort dans "Lava Lamp" :
"Sometimes you have to let go
To free fall away
I won't judge you anymore
'Cause sometimes I needed to
Free fall far away
Out of sight, out of mind"
Sans que la musique soit lourde ou avec une ambiance plombante, bien au contraire le titre porte bien son nom, on se croirait coincé dedans. Thundercat peut être sérieux tout en sachant s'amuser, il reste toujours entre les deux sans vraiment plonger dans l'une ou l'autre direction.
Le point négatif de l'opus et peut-être même le seul, est le fait que certaines chansons soient beaucoup trop courtes et n'apportent au final que frustration ("Jethro" / "Day & Night" / "Jameel's Space Ride" / "I Am Crazy" / "3 AM"), on peut en considérer quelques-unes comme des interludes, mais les idées exposées sont tellement prometteuses qu'on en veut plus, on veut le vrai résultat final, celui qui aurait été exploité jusqu'au bout et non des petits trucs à droite à gauche. Tant pis, le feeling prime.
Drunk est une grande œuvre tout droit sorti de l'esprit d'un grand et même s'il n'est peut-être pas encore considéré comme tel, nul doute qu'il le sera très vite.
Excellent ! 18/20 | par Beckuto |
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