Slint

Paris [Le Bataclan] - jeudi 24 mai 2007

 Slint
Ce n'est pas parce qu'on a une posture statique que la puissance d'une musique sur scène ne peut pas éclater au grand jour.
Il est clair que les membres de Slint ne sont pas des habitués aux solos furieux, aux déhanchés virevoltants ou aux cambrures extrêmes. De toute façon, leur musique ne s'y prête pas. Au contraire, bien campés sur leurs positions et ne les dépassant guère de quelques centimètres, ils se font les serviteurs d'une musique tendue, complexe et sans cesse sur le fil, une musique qui finit par les dépasser eux-mêmes. Sans bouger ou presque, David Pajo et les siens, accomplissent le miracle de créer de la vie à partir de quasi-rien, rendant vibrante la salle à grand renfort de lignes mélodiques brisées, aux angles pointus et aux virages secs à 90°.
Défilant le monstrueux album Spiderland de bout en bout, les musiciens se démarquaient par leur quasi-neurasthénie sur scène. Seul le batteur se laisse emporter par son rythme. Pour les autres : air hagard, yeux fixes, et pose statufiée. Jusqu'au point qu'il est alors stupéfiant de mesurer le fossé qui existe entre la puissance du son et les mouvements absents qui auraient dû apparaître avec une telle violence, une telle recherche intellectuelle de la complexité.
C'est cette complexité justement qui est mise à l'honneur, et non les musiciens, que ce soit sur les mélodies dissonantes, les accalmies stressantes, les montées dans l'intensité ou les lacher-prises, effrayantes parfois de noirceur. Les musiciens, eux, deviennent des fantômes, comme Brian McMahon, murmurant des textes inaudibles, les bras ballants le long du corps, et le visage éclairée par en dessous, dessinant des zones d'ombres, comme lorsqu'on joue à faire peur en braquant une lampe torche sur le menton. Par moment, le groupe joua même dans le noir, et il ne resta que le son de Slint, vicieux, tendu et angoissant.
Propre à saisir à la gorge, alors qu'on n'a l'impression qu'il ne se passe rien sur scène, on devine pourtant, pour peu qu'on fasse un effort, la présence parasitaire de l'atmosphère séminal de Slint, lorsque par exemple, les musiciens réaccordent leur guitare, dans un silence de mort, ne s'occupant guère du public, prête à ressurgir dès la prochaine chanson.
En fait, les musiciens ne sont pas vraiment là, du moins pour eux-mêmes, mais uniquement comme vecteur d'une musique bien plus imposante qu'eux, quitte à jouer les yeux fermés ou s'éclipser dans l'ombre et surgir le temps d'un chœur ou d'une phrase chantée.
La même image pendant plusieurs minutes d'affilée de musiciens mornes sur scène, et pourtant une multitude de sons entendus, de climats explorés, angoissant ou violent, comme lors des quelques chansons en bonus à la suite de l'album, qui fut joué en intégralité et avec une fidélité sans faille. Le dernier, un inédit instrumental, fut joué comme si le groupe récitait une leçon bien apprise, alors que l'intensité était fluctuante, tempétueuse, et même extrêmement puissant, comme lors des débordements saturés.
Et à la limite, la durée bien trop courte du show ne fait que renforcer cette déstabilisante sensation d'avoir vu un mirage, un flou, une apparition, juste l'ombre d'une violence sans nom, un petit bout du Horla, surpris dans le coin d'un miroir, et dont l'évocation suffit à emballer l'imagination...


Parfait   17/20
par Vic


  Setlist :
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Nosferatu Man
Don, Aman
Washer
For Dinner...
Good Morning, Captain
Glenn
Rhoda
(inédit)


 Moyenne 17.00/20 

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Posté le 25 mai 2007 à 23 h 14

Ca y est, le grand jour est arrivé, Slint passe enfin dans la capitale pour présenter son capital Spiderland.
J'arrive à 20h30, trop tard pour la première partie, Warehouse, qui apparemment n'a pas vraiment convaincu le public.

Le Bataclan ce soir n'est pas plein, tant mieux, ca fait plus de place pour nous, privilégiés, qui allons voir l'un des meilleurs groupes de post-rock.

Dès les premières notes du groupe, qui a malheureusement joué qu'une heure et quelques minutes, une fille s'évanouit, les fans commencent à crier, et le son de Slint est vraiment incisif... Tous les titres de Spiderland sont joués et le public reconnaît facilement les morceaux.

Le concert aura été court mais tellement bon, ce son, les attitudes des musiciens, comme si ils jouaient pour la première fois face à un public, timides et timorés, ils ont su nous plaire simplement.
le batteur m'a particulièrement marqué, par sa frappe sèche et son jeu intelligent qui alternait tempo rock et ballade aérienne.
Enfin, leurs compos, leurs sens de la mélodie, leurs amours pour la musique nous a convaincu aussi facilement que nous avons aimé leur album.

Magnifique. Tout simplement digne de s'appeler Slint.
Parfait   17/20





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