GFOTY

"I guess I should google Nicki Minaj?" - Tranche de vie en compagnie de Polly [jeudi 09 janvier 2020]

En ce 9 janvier de l'an de grâce 2020, deux petits bonhommes ont les fesses vissées sur les tabourets du Supersonic et attendent anxieusement de rencontrer GFOTY, artiste pop et expérimentale multimédia, trublionne trash et ancienne membre du label club underground londonien PC Music, qui fait ce soir-là la première date de sa tournée européenne. Le trac est à son comble alors que nos héros Michaël et Martin se préparent nerveusement à se faire manger tout cru. Mais alors qu'il pensaient rencontrer l'incontrôlable et troublante GFOTY, ils rencontrèrent l'humain derrière le personnage, l'affable et enjouée Polly Salmon. S'ensuivit, au cours d'une de ses premières interviews française, une discussion longue et passionnante où nous divaguâmes autour de sujets aussi divers que l'indépendance artistique, la télévision, le rejet de l'ironie (et d'internet), Nathan For You, l'éthique chaotique du DJing, la création d'un culte de la personnalité...

En italique : en franglais dans le texte

For non french speakers here is the original transcript in english: ORIGINAL TRANSCRIPT

Propos recueillis, retranscrits et mis en page par Martin (Wazoo) et Michaël.



Polly (GFOTY) : On y va on y va !

Martin : Alors bonjour Polly, contents de t’avoir ici, au Supersonic et en France.

Polly : Yes ! Oui ! Ah oui ! France c’est mon… city… country le favorite ! C’était bien non ?

Martin : Bien sûr ! On en a déjà un peu parlé mais je le demande à nouveau pour les fans — est-ce ta première tournée en solo ?

Polly : C’est ma première oui, pas trop tôt, on aurait déjà dû faire ça il y a longtemps. C’est ma première vraie tournée. Je suis tête d’affiche et je suis super contente et… j’ai jamais joué pour de vrai dans la plupart des villes. Paris oui, mais je suis jamais allée en Espagne, ou… ouais jamais allée en Espagne en gros mais oui c’est super !

Martin : Donc c’est ta première en tant que tête d’affiche, ce qui veut dire que toutes celles et ceux qui viennent au concert sont là pour te voir, contrairement à l’époque de tes premières parties. Tu nous parlais tout à l’heure de ta tournée avec Animal Collective, ça devait être… marrant ?

Polly : Des dates très marrantes oui. Comme je l’ai dit eux et moi on est très très différents, comme personnes et comme artistes. Je me suis toujours dit qu’ils m’avaient recrutée pour troller leurs fans et se foutre d’eux. Je sais pas, j’imagine qu’ils m’aimaient bien mais ils ont dû se dire « on va mettre quelqu’un que vous allez détester, pour que quand on arrive vous nous trouviez géniaux ». Cette tournée était pas géniale donc je pense qu’ils avaient besoin d’un truc nul pour que leur concert marche mieux.

Michaël : Mais tu as quand même fait connaissance avec eux ?

Polly : On a passé un peu de temps ensemble mais ils étaient à fond dans la tournée, avec le bus et tout. Je pense que si t’es en tournée pour de vrai t’as même pas le temps pour ça. Alors que moi, qui ne fait que quelques concerts, je suis à fond genre « me voilà ! trop cool on va se bourrer la gueule » mais ils m’ont sûrement trouvée… très très ennuyeux.


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Martin : Aujourd’hui c’est ta première date, tu dois être en pleine forme ! Pas encore fatiguée.

Polly : Non pas vraiment parce que… Parce que… j’ai dû me lever à 4h du matin. Donc pas fatiguée, mais fatiguée quand même. Mais je suis prête, donc j’espère ne pas vous décevoir !

Martin : Tu es récemment passée en indépendant — fin 2018 ou début 2019, je crois…

Polly : En gros… J’en ai fini avec PC Music en septembre 2018 mais je l’ai annoncé il y a un an.

Martin : Qu’est ce qui t’a conduit à faire le grand saut ?

Polly : Je voulais juste me sentir plus libre. C’est tout ! Je ne veux pas dire de trucs méchants contre qui que ce soit mais maintenant j’ai juste l’occasion de faire ce que je veux quand je veux. Auparavant je sortais presque pas de musique. J’étais une musicienne qui ne sortait rien ! Et maintenant que l’année est écoulée, je crois que j’ai sorti un EP, un album et quelque chose comme 5 singles en tout ? Le but d’être une artiste pour moi c'est de faire ce que tu veux quand tu veux et d’avoir zéro contraintes.

Martin : Donc c’est vraiment une évolution logique.

Polly : Ça l’était pour mon bien-être ! Le seul avantage pour moi d’être sur un label, c’est qu’ils paient tout. Tu dois les rembourser mais ils avancent l’argent, alors qu’en indépendant t’as d’abord besoin de l’argent pour faire tes trucs.

Michaël : Au moins tu peux choisir tes dates de sorties et tout ça.

Polly : Exactement ! C’est génial.

Michaël : Tout est plus spontané.

Polly : Ouais et j’aime bien ça, je suis nulle en planification.

Martin : J’allais te demander comment c’est la vie en indé, mais manifestement la réponse est que c’est super !

Polly : Gé-nial ! J’adore, c’est vraiment bien. Comme je l’ai dit, le seul problème est qu’il faut avoir de quoi financer ce que tu sors. Mais à part ça je suis heureuse, et j’ai beaucoup plus de travail maintenant. Je m’étais pas rendu compte à quel point je serais occupée en passant en indé, c’est fou.

Martin : Qu’est-ce qui a changé dans les faits ? As-tu eu l’occasion de travailler avec des gens avec lesquels tu n’aurais pas collaboré en étant chez PC Music ?

Polly : Même pas, c’est plus que — et ce n’est pas contre PC Music — moi, Polly, en tant que personne, j’ai besoin de savoir que je n’ai pas besoin d’aller voir quelqu’un pour lui dire « je veux faire ça avec untel ». Peut-être que je n’y étais pas obligée à l’époque mais c’est l’impression que j’avais.

Michaël : Ne pas avoir à demander la permission.

Polly : Ouais, je peux juste me lancer n’importe quand. Et si je voulais sortir un truc demain, je pourrais. C’est pour ça que je fais les choses comme ça. Je pense que c’est important aussi pour les fans, parce qu’avec le recul je pense vraiment que les gens ne veulent pas attendre des mois voire des années… Tant que tu sors du contenu et que tu fais plaisir à toi et aux gens qui t’entourent, c’est tout ce qui compte.

Martin : À propos de — j’allais dire ta dernière sortie mais la dernière est en fait le morceau « Ex-mas in the woods » —, donc à propos de GFOTV, qu’est-ce qui a provoqué ce changement de style assez flagrant ?

Polly : Si je vous raconte la vraie histoire, tout le monde va me détester et penser que je suis une énorme salope [a massive massive bitch]. Donc je peux pas vous dire la vraie, mais…

Michaël : Racontes-en une fausse !

Polly : Je peux en inventer une, mais la vraie histoire c’est que… ouais on va éviter. Vous pouvez garder ça ! Je me suis juste dit… « Tu sais quoi ? Nique. Tout ce que les gens veulent c’est une release. Donc je vais leur donner la release et la hyper à fond. » Et... quand je l’ai fait, c’était pour faire une bonne blague, je me suis dit que je pouvais le faire en un mois.

Martin : Oui, le projet ne t’a pas pris beaucoup de temps !

Polly : Voilà, j’ai dit « je fais tout ça, des clips pour chaque chanson… » bon au final j’en ai fait pour chacune mais il y en a 7. Évidemment, je voulais juste hyper un projet et faire en sorte qu’il soit très excitant, en gros. Ce que j’ai sorti n’est d'ailleurs même pas particulièrement décevant ; j’ai juste sorti un truc… bizarre. La veille de la sortie j’avais tellement peur, je me disais « qu’est-ce que j’ai fait ?!! Je vais plus avoir aucun fan maintenant, c’est horrible, je viens de troller horriblement tout le monde ! » Il y a des gens qui ont dit « c’est de la merde », mais d’autres qui ont capté et savaient que c’était de toute évidence un troll, ce qui était le plus important pour moi. Mais ENSUITE Anthony Fantano a écrit un truc dessus et j’ai fait YES!! C’était tout ce dont je pouvais rêver : un critique qui dit à quel point c’est le pire truc qu’il ait jamais entendu, mais tout en disant que c'était l'avenir de la musique ! Puis Iggy Pop l’a passé sur son émission de radio ! Ça s’est trop bien passé ! Cela dit, jamais je ne jouerais aucune de ces chansons en live et j’ai dû écouter l’album deux fois dans ma vie.



Martin : Le projet a un côté très « studio », peut-être que ça serait bizarre de jouer ça en live ?

Polly : Je prévois — c’est prévu — de faire un événement unique à Londres où je jouerai tout en live etc., ça aura lieu mais c’est clairement quelque chose dont je ne ferais jamais un vrai concert, parce que c’est pas… c’est comme… des trucs en plus, du bonus… ce que je trouve très beau, il y a de très beaux passages… « Under the Sea » !

Michaël : On est d’accord !

Martin : Ouais, on a tous les deux adoré à vrai dire.

Polly : Merci beaucoup ! C’est cool ! J’ai tellement aimé le faire, le résultat est super… Mais je ne pourrais jamais jouer ça ce soir !

Martin : Toute cette histoire est assez marrante, quand on traîne sur internet, on voit comme les réactions à GFOTV sont très contrastées — certains adorent et d’autres disent que c’est de la merde. On se demandait si tu t’attendais à ce type de retours de la part du public.

Polly : Je pensais que personne n’aimerait. Je me disais… je sais pas ce que je me disais ! Mais dans ma tête je ne pensais pas aux autres. Je me suis dit « on va le faire, ça va être drôle » et puis voilà.

Martin : C’est toujours la meilleure façon de faire les choses.

Polly : Sans doute. Comme je l’ai dit, je ne raconterai jamais la vraie raison, vous pouvez spéculer là-dessus, mais je n’ai pas pensé à grand-chose d’autre, et la veille je me disais « j’ai fait la plus grosse erreur de ma vie, je suis foutue ! Tout est foutu ! » Mais j’ai donné les recettes Bandcamp à une association caritative, donc ça a quand même du sens pour moi, mais d’une façon qui n’est pas juste « c’est ma musique ».

Martin : À quel moment as-tu décidé de parler de dessins animés et de séries TV ? À moins que ce soit la partie de l’histoire que tu désires garder secrète…

Polly : Les séries télé, c’est ma vie ! Regarder la télé, c’est la plus grosse partie de mon existence. Quand j’écoute les chansons des génériques j’en ai toujours une qui me vient en tête. Par exemple la première, « American Family », à chaque fois que je regarde Les Simpsons ou que je marche dans la rue je chantonne « Meet Homer and Marge, they are husband and wife! … » Je le chante, et je l’ai toujours fait, donc ça s’est fait un peu fait tout seul. La télé est la majeure partie de ma vie, ce qui est pathétique parce que, je sais pas, pour la plupart des gens c’est plus respectable de ne pas avoir la télé…

Michaël : De nos jours en particulier.

Polly : J’entends des gens dire « je regarde pas la télé » et je me dis putain mais t’es qui ?!! Tout ce que je fais, ma vie, c’est regarder la télé. Tout ce que j’ai envie de faire quand je suis toute seule, c’est la regarder.

Michaël : Avant ça faisait partie de la vie de tout le monde… jusqu’à il y a dix ans je dirais, au moment où Internet a pris beaucoup plus de place, et maintenant comme tu dis c’est cool de pas avoir la télé. Vraiment.

Polly : Si ça ne tenait qu’à moi, j’en aurais une dans chaque pièce de la maison. C’est peut-être un peu nul, mais… je déteste Internet, je crois. Sur mon portable, tous mes SMS, mon Twitter, mon Instagram, Facebook, j’ai désactivé toutes les notifications, donc je les regarde que quand je suis obligée, parce que j’aime pas ça. En fait vraiment je déteste ça. Mais en même temps je me sens très bête, parce qu’après tu traînes avec tous tes amis et ils disent « t’as vu ça ? » et je réponds « non j’ai juste revu Friends pour la millième fois », c’est vraiment pas mon truc.





Martin : C’est intéressant, parce que je te suis pas non plus sur tous les réseaux, par exemple je n’ai pas Twitter car j’ai trop peur que ça engloutisse trop de temps de ma vie — mais je viens de m’inscrire sur Instagram il y a une semaine, et je vois que tu es très active dessus, tout en détestant ça !

Polly : Je connais beaucoup d’amis qui ne peuvent pas être sur Instagram parce que ça les déprime trop. En un sens je les comprends mais personnellement, ça ne me traverse même pas l’esprit de scroller mon fil d’actualité pour regarder ce que font les gens. J’y vais quand j’ai besoin de poster quelque chose et je déteste le faire. Quand je sors, comme aujourd’hui à Paris, j’ai juste envie de m’amuser, le dernier truc auquel je pense c’est « il faut que je mette ça sur Insta ! », mais maintenant je suis un peu obligée, donc je le fais… Je pense que si tu vois les réseaux sociaux comme ça et uniquement comme ça, alors c’est facile. Mais encore une fois je pense que c’est parce que je suis pas très Internet, comme personne.

Martin : Tu es assez détachée, finalement.

Polly : Oui. Mon rêve c’est d’avoir mon téléphone éteint, et la seule raison pour laquelle il est allumé c’est que je dois faire ce que je fais en ce moment, mais je n’ai aucun intérêt pour la vie des autres gens, je crois. Peut-être que c’est dommage ? C’est un peu déprimant !

Martin : Si j’avais le choix — à vrai dire je l’ai —, si j’avais la force mentale de le choisir, alors je serais pas tout le temps sur mon téléphone.

Polly : Je déteste ça !

Martin : (jetant (avec délicatesse) son téléphone sur le côté) Hors de ma vue !

Polly : Casse-toi !

Martin : Ouais, casse-toi, téléphone !

Polly : Le merde ! Mon français est très mauvais…

Michaël : Par ailleurs je pense que les gens ne pourraient pas t’en vouloir de ne pas être sur les réseaux. Je n’ai jamais entendu personne dire « pourquoi t’es pas sur Facebook ?! » ou quoi. Eux-mêmes s’en foutent un peu.

Polly : Ouais, je suis allée quelques fois à des conférences sur la musique — j’ai des amis qui travaillent là-bas — et le conseil que donnent les pontes de l’industrie, c’est « sois en ligne en permanence, dès que tu peux »… Et je pense pas que ce soit vrai ! Enfin, peut-être que quand tu démarres, c’est bien pour montrer ta personnalité, mais je pense vraiment pas que ce soit bien d’être en ligne pour tout ça.

Michaël : En plus, on a l’impression qu’aucune grosse star n’est très présente sur les réseaux, quelqu’un comme Frank Ocean par exemple… Ils préservent un certain mystère, et ça marche.

Polly : C’est vrai ! Ça marche vraiment, mais ils ont sans doute beaucoup de chance que ce soit le cas.

Martin : Vu qu’on est français, et qu’on est pas en mesure d’aller à Londres aussi souvent qu’on le voudrait… Il semblerait que tu aies fait des événements un peu particuliers, comme The Lore of GFOTY, donc on se demandait…

Michaël : C’est quoi, ce truc ?


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Polly : Je me considère comme musicienne à 5%, et comme marque à 95% — je voudrais pas me désigner comme une artiste parce que l’idée me dégoûte, mais comme une entité libre de faire tout ce qu'elle veut ; c’est une autre raison pour laquelle j’aime bien être en indépendant : j’ai des idées, et si j’ai une idée, je veux la mener à bien tout de suite, tout le monde devrait pouvoir faire ça. Même si ça attire deux personnes. Le Lore of GFOTY c’était… en fait je savais que je pouvais créer une secte, je crois. J’ai vu beaucoup de documentaires Netflix et je me suis dit « je peux le faire et je vais le faire », et je l’ai fait. Je vais en faire beaucoup plus parce que c’était vraiment un week-end magique. C’était un peu comme Wild Wild Country, vous avez vu ça sur Netflix ? Ça parle d’Osho, c’était un guide spirituel banni d’Inde qui s’est installé sur un petit terrain aux États-Unis et a créé cette secte géante, genre secte libertaire dingo qui a eu mauvaise presse là-bas, on disait que c’était une secte sexuelle, il y a eu plein de conflits… et je me suis dit que j’allais faire ça, puis je l’ai fait ! Et vous pouvez le faire aussi, vous pouvez tout faire, fondez une secte !

Michaël : Il faut quand même commencer par être connu, non ?

Polly : Non pas du tout, t’inquiète pas ! J’ai sorti le grand jeu quand j’ai fait ma secte, j’ai fait beaucoup de pub pour ça, et tout. Et personne n’est venu. Ça m’a rendu très triste ! Parce que je dirai toujours que ma carrière musicale représente 5% du truc — même si pour tous les autres c’est plutôt 100% — et donc les gens sont venus, mais pas beaucoup. Et je me dis que c’est tellement plus important, ce côté artistique des choses, plutôt que de me voir chanter des chansons dans un micro. Mais les gens s’en foutent. Ça m’a rendu triste pour l’humanité, mais bon, assez parlé de ça !

Michaël : C’est intéressant, j’ai l’impression que le manque de gens à l’événement pourrait être dû au fait que…

Polly : Je ne fais pas un vrai concert !

Michaël : Oui, et ils ne savent pas vraiment à l’avance ce qui va s’y passer.

Polly : Mais c’est ce qui m’énerve le plus, à mes yeux c'est tellement mieux que de me voir chanter une chanson.

Martin : Ça nécessite d’accepter d’être surpris, de ne pas savoir à quoi s’attendre.

Polly : C’était clairement le meilleur week-end du monde, je vais carrément en faire d’autres.

Michaël : J’essayerai de venir !

Polly : Ça se fait pas comme ça cela dit, ça a coûté très cher, genre vraiment très cher. J’ai dû financer deux journées d'une secte de ouf, mais c’était trop drôle.

Martin : J’ai pu entendre un peu de la musique qui s’est jouée lors de l’événement. J’imagine que tu le sais puisque tu l’as partagé sur ta page Facebook, mais quelqu’un a posté un bootleg de If You Think I’m a Bitch..., en ajoutant une piste drone de 9 minutes à la fin…



Polly : Ouais, on a fait ça ensemble, il m’a demandé de le faire et voulait le sortir sur cassette en mon nom. Donc c’était bien un bootleg de cette performance, et cette piste est ce que j’ai passé tout le week-end entre les différents sets.

Martin : En boucle ?

Polly : Oui oui oui, « GFOTY is your saviour » en boucle, et elle est vraiment bien ! Vous l’avez ?

Martin : La cassette est épuisée…

Polly : Je vous l’enverrai ! J’en ai deux, je peux vous les envoyer. Si vous me le rappelez, je le ferai.

Michaël : Trop bien, merci !

Martin : C’est le genre d’objet que je convoite !

Polly : Il y en avait seulement trente, ça s’est vendu en une heure mais ils m’en ont donné dix en plus donc je peux vous filer ça.

Michaël : Actuellement, pour des raisons mystérieuses je n’arrive pas à penser à autre chose qu'à Nathan For You.



Polly : Pourquoi tu penses à Nathan For You ?!

Martin : À vrai dire, on allait faire semblant de ne pas savoir que tu connais la série, et poser une question très naïve, du genre « Hmmm… Tu as fait une parodie de Starbucks avec GFOTYBUCKS, et Nathan Fielder a fait la même chose dans son émission, avec Dumb Starbucks… »

Polly : Je l’aime… C’est mon homme idéal.

Michaël : Bien sûr ! Il se trouve qu’on a regardé la série il y a quelques mois…

Polly : Vous avez vu tous les épisodes ?

Michaël : Oui, évidemment !

Martin : Michaël a commencé l’année dernière puis je m’y suis mis aussi, c’est une série incroyable…

Polly : Oh mon dieu, m’en parlez pas, c’est… il est génial.

Martin : Donc j’allais te demander : est-ce que tu t’inspires de lui ?

Polly : Non ! Non, stop ! GFOTYBUCKS a été créé avant que je voie la série. C’était en gros il y a 4 ans. Évidemment je l’adore, je ferais n’importe quoi avec lui, donc est-ce qu’il m’inspire ? Oui. Mais est-ce que j’ai fait quoi que ce soit que je trouve similaire, à part GFOTYBUCKS ? Non. Même si je voudrais carrément ouvrir un GFOTYBUCKS. Mais… je l’aime tellement !

Martin : Répandons l’amour de Nathan !

Michaël : Il y a sans doute une sorte de similarité entre vos deux personnages, mais je ne pourrais pas la formuler explicitement.

Polly : Oh… Honnêtement, c’est le meilleur compliment qu’on m’ait jamais fait.

Martin : Il y a une sorte de malaise étrange dans le personnage de GFOTY… (Polly s'esclaffe.) Mais pas chez Polly ! Par exemple, on a vu quelques trucs sur ta chaîne YouTube récemment, avec notamment une interview que tu as faite d’un girl band anglais.

Polly : Oui, Little Mix.



Martin : Et je pense que dans un monde parallèle, Nathan aurait pu mener une interview de ce genre !

Polly : Bon, pour être honnête, je pense pas que j’essayais de développer un personnage à l’époque, je crois que j’avais juste la gueule de bois !

Michaël : C’est ce qui me fait le plus rire, ça n’a pas l’air fait exprès !

Polly : Mais c’est triste ! Je ne veux pas qu’on me trouve gênante. Plus encore qu’avec GFOTY, je pense qu’en tant que Polly, je suis très embarrassante…

Michaël : C’est pareil pour Nathan, il dit que le personnage découle de sa façon d’être dans la vie.

Polly : Oui, ce que fait Nathan, c’est qu’il prend sa personnalité de la vraie, et la rend encore plus gênante. Mais je suis gênante de nature dans la vraie vie, donc j’ai fait en sorte d’essayer de l’être moins ! En gros, c’est le contraire de Nathan ! Je sais pas, c’est bizarre… c’est intéressant !

(rires nerveux partagés)

Polly : Qu’est-ce qu’il y a ?

Michaël : Je ne sais pas si tu te souviens de la blague sur les olives, dans l’interview.

Polly : Oh, la blague sur les olives ! Elle était bien !

Martin : Il y en avait même deux !

Polly : J’avais pas l’intention d’être gênante !

Michaël : Bien sûr ! Et nous, on connaît bien la tapenade, donc c’était réellement drôle.

Polly : Merci beaucoup, beaucoup !

Michaël : Tu peux t’estimer validée.

Polly : C’est le cas ! (rires)

Martin : On allait aussi te poser une question sur la partie non-musicale de ton contenu — bien que tu aies déjà abordé le sujet. Tu utilises beaucoup de médias différents, à plus forte raison depuis que tu es passée en indépendant. If You Think I’m a Bitch a une histoire complète publiée sur ton site internet, par exemple…

Polly : Oui, c’est le délire de la marque, tout a un scénario.

Martin : Ce n’est pas que de la musique.

Polly : Non, je m’en sers comme d’un outil. Autrement, ça n’aurait pas de sens, parce que je ne pense sincèrement pas être musicienne. J’invente des paroles et j’ai des idées sur à peu près tout, mais… si j’étais musicienne il n’y aurait rien de moi là-dedans, car je ne suis pas la productrice. Enfin, je sais produire mais je ne produis pas mes chansons, je bosse avec des gens.

Michaël : Mais avant tu le faisais, non ?

Polly : Je suis capable de le faire… Mais je ne le fais pas. J’ai commencé par faire des chansons d’anniversaire débiles pour les enfants, mais je ne dirais vraiment pas que je produis la moindre de mes chansons. C’est du 50/50, je m’assois et je dis ce que je veux mais je ne produis rien.

Martin : Tu as dit à peu près la même chose à propos du DJing : que tu n’étais pas DJ. C’est vraiment ce que tu penses ?

Polly : Ça fait 15 ans que je fais du DJing, j’ai débuté dans un trio de filles DJ qui s’appelait The Hormones. Et on avait commencé à le faire parce qu’on était mineures et qu’on adorait Pete Doherty — les Libertines et tout ça. Donc on a trouvé le DJing pour s’incruster dans ce monde-là. Et on l’a fait parce qu’on était de la même ville, et ça a vraiment marché, il y avait des magasines de musique et on a fait des teufs de fou vers l’âge de 15 ans. C’était vraiment marrant de jouer les groupies quelque temps. Donc je sais mixer et j’en use dans tout ce que je fais, mais… je ne suis pas très bonne DJ ! Enfin, si, mais… je devrais en apprendre un peu plus. Pour moi, le DJing, c’est de la performance. Ce n’est pas juste comme jouer de la musique. Quand je mixe, je le fais en tant que GFOTY, donc je mixe dans un personnage, je rends ça chaotique. Tout ce que je fais se situe dans un état d’esprit bien précis. Parce que si tu me demandes de mixer à une fête d’anniversaire en tant que Polly, je ne vais pas faire « Ouaaaaais » et je ferais juste un set normal et ennuyeux.



Martin : OK, je vois. Je me demandais si, dans ton personnage, tu faisais exprès de ne pas être meilleure DJ.

Polly : Tous les jours, je me regarde dans la glace — c’est pas vrai — mais je pense « Pourquoi est-ce que je n’essaye pas de m’améliorer ? » Je pourrais le faire n’importe quand, j’ai suffisamment d’amis et tellement d’accès à la chose, je sais me servir des platines. Les gens se disent qu'ils me trouvent douée, que je fais l’affaire, mais ils voient avant tout le personnage.

Martin : Au début de ton set au Petit Bain l’an passé, tu as fait venir DJ Paypal vers les platines, et de loin on aurait cru qu’il t’expliquait comment t’en servir !

Polly : Non ! Ce n’est pas ce qu’il faisait !

Martin : Il est temps de rétablir la vérité.

Polly : OK, d’abord il était 4:30 du matin. Moi et Paypal, on est bons amis. Ce qu’il faisait, c’est que… chaque DJ a une manière différente de s’installer. Ce que je ne sais pas faire quand je joue après un autre DJ qui a son setup spécifique, c’est le changer. C’est tout ! Le seul truc que je demande, c'est quel canal va avec quoi.

Michaël : Je connais bien cette expérience !

Polly : Merci ! Parce que voilà, parfois t’as l’air con…

Martin : Michaël est aussi un peu DJ, en fait !

Polly : Ah ouais ?

Michaël : Oui, et je dois dire que tu m’inspires beaucoup dans ce domaine.

Polly : Merci ! Tu viens de Paris aussi, c’est ça ? Tu devrais venir mixer pour moi, à l’occasion !

Michaël : Ça me plairait beaucoup ! Parce que cette approche pseudo-chaotique est vraiment celle que j’adopte aussi. J’adore écouter tes sets pour cette raison. J’ai beaucoup d’amis qui sont mi-enthousiastes, mi-sceptiques à propos de cette approche, et bizarrement je dois souvent m’expliquer sur ce que je cherche à faire.

Polly : Exactement ! Le fait que tu doives l’expliquer rend ça bizarre. Beaucoup de membres de ma famille ou d’amis d’enfance qui disent « Ah, donc Polly est devenue folle ? Elle a pété un câble ? » Et je leur réponds que non, je fais juste des trucs marrants. Mais l’idée, c’est que je sais être DJ. Peut-être pas la meilleure, mais je sais comment m’y prendre !

Michaël : Je dirais à peu près la même chose.

Polly : Merci, tope-là ! Belle chemise, au passage.

Michaël : Merci. Ça m’a fait penser à une autre question bateau : je t’ai vue à un concert fin 2016 au club Heaven, à Londres. Sur scène avec toi, il y avait un type…

Polly : À la guitare ?

Michaël : Oui ! C’est qui ?

Polly : Johnny. En fait, il a produit GFOTV, ainsi que mes versions de « Creep » et « We Are the Champions », c’était mon copain à l’époque, et il fait du stand-up — il est assez connu, mais en gros c’est l’une des personnes les plus intelligentes, incroyables et talentueuses que je connaisse, donc on fait des trucs ensemble et il est très bon.

Michaël : Est-ce que c’est lui qu’on entend sur le morceau « The Argument » ?

Polly : Oui, c’est lui ! Ses trucs d’humoriste sont vraiment bien aussi.



Michaël : Ils sont disponibles en ligne ?

Polly : Oui, mais quand tu regardes ça en ligne, c’est de la merde. Tu devrais voir ça en vrai, c’est vraiment bien, un chouette truc à voir.

Martin : Je croyais que dans « The Argument », on entendait ta voix pitchée de deux manières différentes.

Polly : Ça aurait pu, mais non ! Il y avait un tweet marrant l’autre jour : il y a un site qui s’appelle RhymeZone, et quelqu’un a remarqué que si tu y entres le mot « Word », le résultat, c’est les paroles de « The Argument » ! On peut dire que c’est une autre chanson troll, mais ils ont trouvé d’où j’ai sorti les paroles, c’était une belle découverte.

Martin : Est-ce qu’en tant que GFOTY, tu te considères comme une figure de l’underground ?

Polly : Je ne suis clairement pas overground, donc bon, j’imagine que oui…

Martin : En fait je me demandais si… imaginons que du jour au lendemain tu exploses dans la sphère mainstream. Est-ce que tu pourrais encore faire ce que tu fais ?

Polly : Si je perce soudainement dans l’overground, je continuerais exactement comme je le fais maintenant, mais en ayant du succès, dans le sens où c’est ce que recherchent les gens de cette scène, donc avec un peu de chance, ça veut dire que j’aurais plus de chances de me produire dans de grandes salles et d’être encore plus orientée vers la performance, grâce au respect des gens. Mais je m’adapte à la façon dont vont les choses. Ce serait le rêve !

Martin : Je me demandais si tu serais encore en mesure d’avoir cette liberté d’expression, cette liberté créative dont tu disposes, si d’un coup, tout le monde avait les yeux braqués sur toi.

Polly : Je pense que les messages dans ce que je fais ne sont pas spécialement horribles. Donc si tu approfondis n’importe lequel de mes propos — en espérant que je perce un jour, je touche du bois — je pense que je défends beaucoup tous les trucs bien que les gens aiment, donc je pense que la meilleure manière de s’y prendre est de recourir à une expression vraie, pas juste de dire « Vive la santé mentale ! » Ça, tout le monde s’en fout, il faut le faire d’une manière qui montre que ça t’importe. C’est terrible que ce ne soit pas ce que le monde veut pour l’instant. Tout ce qu’on veut, c’est qu’une jolie bouille le dise. J’espère qu’un jour, ce que le monde voudra, c’est des artistes comme nous qui disent les choses avec autant de sincérité que possible. Il faut le faire et le faire avec intention, sans être payé pour. Vous voyez ce que je veux dire.



Michaël : Je me demande un truc : tu as utilisé le terme de « troll », ce qui me surprend un peu, parce que je ne l’aurais jamais utilisé pour décrire ton travail tel que je le connais, ça me semblerait un peu péjoratif.

Polly : Ah, oui, à 1000%, bien sûr.

Michaël : Les gens pourraient aussi en déduire que ce que tu fais est insincère, ironique ou je ne sais quoi, bien que ce ne soit évidemment pas le cas.

Polly : Je vois, en fait quand je dis troll, je ne trolle pas, évidemment. Quand je sors l’album, je ne me dis pas « ouais, je vais troller mes fans ! », mais plutôt « je veux juste m’amuser ». Je ne dis pas Fuck you, fans!, il s’agit plutôt de me faire plaisir en faisant un truc marrant, quelque chose comme ça. Troller… eh bien, l’idée que la moindre chose que je fasse soit ironique, je ne serais jamais d’accord avec. Parce que je pense que c’est ennuyant. Pour tout le monde.

Michaël : Ça s’use très vite.

Polly : Ça serait très ennuyant pour moi d’avoir des fans « ironiques », et tout. Je sais que beaucoup de gens le sont, mais mon délire est plutôt celui-ci : je sais que beaucoup de gens veulent savoir qu’ils peuvent faire ce qu’ils veulent, et ressentir cette liberté. Et c’est vraiment ce que je recherche dans les choses que je fais. Et pas de faire genre « Allez, on va trop s’amuser ! » Je le fais, mais ça veut plutôt dire : fuck it!

Martin : Si tu te contentais de faire des trucs ironiques, ça perdrait très vite son sens.

Polly : Ça m’énerverait beaucoup !

Michaël : Ça serait nul pour toi comme pour nous !

Polly : Ce serait horrible, et bizarre. Donc ouais, quand je dis troll, c’est plus une façon de dire que je m’amuse un peu.

Martin : C’est apprécier secouer les fans.

Polly : Oui, c’est un défi !

Michaël : Je le demandais simplement car c’est ce que veulent dire les gens lorsqu’ils emploient ce terme. Et tu l’entends dans un sens différent.

Polly : Oui, c’est vrai.

Michaël : Mais ça me fait penser que tes deux dernières sorties — l’EP et l’album — sont d’une certaine manière plus émotionnels, semble-t-il, que ce que tu faisais avant..?

Polly : C’est vrai, à 1000%, merci ! Vraiment. Comme je le disais, j’ai travaillé sur GFOTV avec la personne qui m’est le plus proche, Johnny — tout comme je sais que je le vois comme le type intelligent. Et c’est tout ce que je voulais faire, réaliser cet album avec une personne que je trouve si talentueuse. Je m’en sens vraiment très coupable, parce que c’était comme… pas un troll, mais une petite blague, tu vois.

Martin : Peut-être que tu doutais juste que les gens allaient être déconcertés.

Polly : C’était plus qu’à mon avis, la musique n’est pas tout, et on ne devrait pas s’offusquer que cette sortie ait moins de musique que les autres. C’est vraiment le seul truc qui intéresse les gens, new release new release new release, et la release en question n’a pas vraiment d’importance tant que l’artiste sort un truc. Les gens y feront toujours attention. Et c’est pour ça que quand Anthony Fantano puis Iggy Pop se sont exprimés sur ce que j’ai sorti, ça l’a bien montré. Les gens s’en foutent, ils veulent juste de la musique. Tout ce qu’ils veulent, c’est entendre des trucs, peu importe s’ils aiment ou pas. Les gens critiqueront, ou ne critiqueront pas quoi qu’il arrive, peu importe que tu sois nul ou bon en musique. Cette publicité, même mauvaise, aura toujours le même effet pour toi. Je crois que je ne sais pas faire la différence !

Michaël : C’est en fait assez profond…

Polly : Tu vois, c’est aussi comme ça que j’envisage la sortie de GFOTV. Néanmoins, la vraie raison pour laquelle je l’ai fait, je ne la dirai jamais !

Martin : On n’insiste pas !

Polly : Mais j’ai fait une digression, ta question était différente, tu me demandais quoi, déjà ?

Michaël : C’était à propos du côté plus émotionnel de ta musique.

Polly : Oui, c’était émotionnel de différentes manières. Pour ce qui est de l’EP, j’aurais pu le sortir sur PC Music, il aurait été assez similaire mais aussi très différent, parce que j’ai travaillé avec de nouveaux producteurs. C’était juste plus libre. Mais cet EP parlait d’un type que je détestais. Aujourd'hui je ne le déteste plus. Donc il y avait une sorte de scénario.

Martin : Il y a aussi les vidéos qui accompagnent cette histoire.

Polly : Ouais, ça faisait une sorte de transition vers tout ça. C’est aussi une histoire d’amour.

Martin : C’est encore plus émouvant lorsqu’on voit les vidéos.

Polly : Tu vois, c’est ça que j’aime le plus faire. C’est le truc le plus amusant. Merci d’avoir pris le temps de voir ça, la plupart des gens n’ont aucune idée que ça existe. C’est pour ça que je trouve triste que les gens ne se soucient pas de ces trucs qui en fait comptent vraiment pour moi, et que je fais à 100% toute seule. Mais les gens s’en foutent de l’art, en vrai.

Martin : C’est encore plus dur sur internet, où il est si facile de se contenter de jouer un personnage derrière un écran, d’être ironique, d’être un troll…

Michaël : C’est comme si ça ne pouvait pas être plus.

Martin : C’est dur d’oublier cette étiquette, et de se dire que ce que tu fais est réellement sincère.

Polly : Oui, c’est ça. Je ne vais jamais le forcer auprès des gens, mais j’adore le fait que vous ayez fait l’effort de le remarquer, c’est tout ce que je peux espérer de mieux. J’aimerais tellement mieux que les choses soient comme ça, plutôt que d’avoir d’aussi bonnes chansons. Et Iggy Pop qui soutient... j’adore, que dire de plus !

Michaël : Ce qui m’a vraiment frappé avec cet EP, c’est que, bien que tu aies l’air de détester le type en question, dans la dernière chanson tu remercies tes ex.



Polly : Parce qu’ils te font grandir, en tant que personne ! Même si tu les détestes, tu dois les remercier car chaque relation te fait grandir.

Michaël : On ne peut qu’être d’accord. Ça correspond pour moi à une expérience assez intime que j’ai faite au moment de la sortie de l’EP, qui coïncidait avec une séparation.

Polly : Oh, je suis heureuse que ça ait eu du sens pour toi… Évidemment j’ai choisi précisément l’ordre des chansons, et j’imagine que ça fait comme une sorte de voyage, qui se finit sur Sea at Night, où je dis merci.

Martin : Autre chose : as-tu reçu des vidéos faites par les fans à partir des mini-clips de GFOTV ?

Polly : Non ! Beaucoup de gens l’ont acheté sur Bandcamp, mais j’ai dû en recevoir deux. C’est pas grave, mais…

Michaël : C’est aussi assez intimidant, parce qu’on y voit que toi sur ton canapé, les vidéos ont quelque chose de très intime. On se demande un peu si on a le droit de manipuler ça dans tous les sens…

Polly : T’as raison, c’est peut-être bizarre ! Je me disais que c’était une bonne idée, de faire tout à la fois, sortir tous ces morceaux, tous ces clips, et tu fais ce que tu veux avec, en mode interactif…

Michaël : Tu disais plus tôt que le processus de fabrication de GFOTV avait été expéditif, est-ce que ce n’était pas un peu la même chose pour Call Him a Doctor ?

Polly : En fait, sur GFOTV, l’idée était d’inventer des paroles en direct, j’ai juste décidé à l’avance de quelles séries télé j’allais parler, vu que je les connais bien. Call Him a Doctor était le résultat d’une session d’écriture de deux jours, avec Alex [A.G. Cook, fondateur de PC Music, ndlr] et Johnny, où on s’est assis pour le construire de A à Z. Alex est un producteur incroyable, et on travaille très bien ensemble, donc on s’est juste débrouillés comme ça. Je vais aussi très vite pour écrire des paroles. Donc c’était pas le même type de rapidité.



Michaël : La composition des morceaux de GFOTV est assez complexe.

Polly : Johnny est un musicien incroyable. Ah, mais je n’ai pas parlé de la production, en fait l’album a été enregistré très vite, mais ensuite on a passé du temps sur la production. On l’a enregistré en deux heures.

Martin : C’est génial !

Polly : C’est comme ça qu’on fait les choses !

Michaël : J’ai une dernière question, un peu lambda, mais je me demande toujours ce qu’écoutent les artistes que j’apprécie. Du coup, qui sont tes popstars préférées du moment ? Ou artistes tout court, en fait.

Polly : Du moment ? En fait, je n’écoute pas d’artistes du moment, si j’en écoute… est-ce que DJ Paypal, c’est encore d’actualité ? Je l’adore. J’aime beaucoup Rex Orange County, de façon inconditionnelle. Qui d’autre est-ce que j’écoute… Genre, vraiment Stevie Wonder, Pixies, Queen, Carly Simon… des vieux ! C’est peut-être nul, mais je n’écoute pas de musique récente.

Michaël : Ce n’est pas si important, de toute façon.

Martin : C’est intéressant, tu ne te sens pas reliée à la scène musicale d’aujourd’hui ?

Polly : Non… je me sens bête ! Les gens me posent souvent des questions, mais je ne connais rien à la musique ! Enfin si, évidemment, mais… en fait, non ! Parfois, je suis chez moi, et je me dis : « je devrais peut-être taper « Nicki Minaj » sur Google ? » Histoire de savoir ce qui se passe, parce qu’à chaque fois que je vois des amis, je me sens comme Joey dans Friends, tout le monde parle et je fais « ouais, grave, cool ». J’ai juste aucune connaissance de tout ça. Et c’est terrible. On peut regarder les derniers trucs que j’ai écoutés sur Spotify, mais à part ça… c’est très gênant !


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Michaël : Il me semble qu’il est plutôt courant pour des artistes bien en vue de ne pas connaître la musique du moment.

Polly : Oui, peut-être que tu as raison, mais je me dis que je devrais en savoir plus.

Michaël : Je ne dis pas que c’est un problème, juste que c’est peut-être plus courant que tu ne l’imagines.

Polly : J’espère, parce que là je me sens trop bête. Non, c’est pas vrai, je me sens vachement bien. Mais j’ai besoin d’un autre verre, vous avez d’autres questions ?

Martin : Une dernière : as-tu quelque chose à dire à tous les fans de rock indé d’Xsilence ?

Polly : Longue vie à vous. GFOTY. Ah, et… les Libertines… c’est super ! (rires)

Michaël : Les Pixies, aussi !

Polly : Eux aussi ! Voilà ! On dirait que vous m’avez payée pour dire ça.





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