Câlin

Vous prendrez bien un petit quart d'heure de musique aliénée? Ca tombe bien, Yugo Solo et Francis Fruit se sont échappés un temps de leur formation pas vide du tout nommée pourtant Rien (Mais c'est quoi Rien? Une camisole? Un parachute?) pour nous offrir cet "album moyenne durée" comme ils disent. Du rock instrumental kaléidoscopique de Rien, on en retrouve un certain sens de l'humour absurde et une atmosphère crépusculaire, mais les ressemblances s'arrêtent là. Ici tout part en vrille, pas de belles phrases mélodiques, c'est sale, de l'electro-rock noisy, délirant et parodique. Nos deux drilles semblent guidés par l'instinct et par une envie d'expérimenter avec potacherie. " Money Poney " démarre sur une boîte à rythme vintage vite suivie par une mélodie aussi accrocheuse que débile jouée au synthé, sorte de Danse des Canards version Suicide, jusqu'à ce que les pauvres canards ayant un peu forcé sur la datura commencent à piaffer en coeur avec une caisse claire hoquetante (un petit effet electronique m'a piégé plusieurs fois sur cette partie, me faisant regarder sur mon portable si je venais pas de recevoir un sms), mais je parlais des canards. Donc les canards reprennent avec désinvolture, après ce moment d'auto-mutilation magnifique, leur aspect normal pour continuer leur danse ridicule (ah, que c'est bon!). Le ton se durcit sur sur le pas gentil " Tolérance 1 – Impunité 0 ", où le rock and roll est poussé à ses retranchements primitifs : le " Super " de Neu! est invoqué pour venir s'appeler " Enôôrme " : ça croone dans les aigus de manière tellement approximative qu'on comprend rien aux paroles (à moins qu'il n'y en ait pas), sur un rockab' parti à fond la caisse. Sur ce disque, il y a aussi du vocoder, de menaçants roulements de toms, du vacarme encore et toujours, et une chanson d'amour, du genre " baby I'm pretty, cause I wash myself every morning for you ", slow à contre-temps, je m'en foutiste. En clair, Yugo et Francis nous offrent là gratuitement un disque gratuit, inconséquent, idiot, et bruyant. En clair (bis), un disque semblant guidé simplement par le plaisir et l'envie de faire plaisir, indispensable pour quiconque voudrait se faire une idée entre autres de comment sonnerait Kraftwerk si ses membres s'étaient partagés 4 neurones. Un vraie petite friandise déviante en attendant un nouvel album de Rien, ou qui sait, un Câlin prolongé.