Pig Destroyer
Prowler In The Yard |
Label :
Relapse |
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En dépit de son extrémisme forcené et de ses débordements musicaux, visuels ou paroliers, le grind a le même mode de fonctionnement que les autres genres. Il y a les pionniers, les opportunistes, les élèves appliqués mais guère originaux, les cancres, les copieurs, les branleurs voyous, les prodiges. Pig Destroyer appartient définitivement à cette dernière catégorie.
La pochette est trompeuse. Pig Destroyer n'est pas un énième groupe de gore-metal où les vocaux d'un ours brun en rut côtoient les raclements intestinaux d'instruments rouillés à force d'être trempés dans des menstrues de vierges, le tout enregistré dans la cave d'un immeuble abandonné ayant servi de toilettes à des décennies de tourisme allemand. Ne vous laissez donc pas abuser, voire rebuter, par cette image de démembrement car le pire (comprendre le meilleur, le grind fonctionnant principalement sur cette inversion totale des valeurs chère à Nietzsche) se trouve encore à l'intérieur.
Relapse peut être fier de compter ce groupe dans son écurie car Prowler In The Yard impose Pig Destroyer comme la formation incontournable de la musique extrême, le truc à écouter absolument si l'on veut comprendre ce que deux guitares, une batterie et une voix peuvent causer comme méfaits. En effet, ces Américains m'apparaissent comme ce qui peut se faire de plus agressif uniquement à partir d'instruments traditionnels, repoussant à chaque titre les limites de la violence auditive en termes de rapidité d'exécution, de technicité et de créativité.
En effet, au premier abord, Pig Destroyer a tout du groupe de grindcore typique. Sur les 22 titres qui composent "Prowler in the Yard", les trois-quarts oscillent entre vingt secondes ("Ghost of a Bullet", "Evacuating Heaven", "Murder Blossom") et une minute trente (une dizaine de morceaux), les intitulés évoquent un raffinement certain et un goût prononcé pour une sexualité délirante ("Cheerleader Corpses", "Trojan Whore", "Pornographic Memory", "Snuff Film at Eleven") et l'ensemble ne dépasse que très difficilement la demi-heure. Soit. Mais la durée d'un album n'a jamais eu pour corollaire la qualité (Les trente minutes de "Reign in Blood", de Slayer, restent la référence en matière de Thrash), et l'excellence de cet album provient également de son incroyable intensité. Je conçois que pour un néophyte, 20 secondes de musique passent pour de la fumisterie ou une forme de négation artistique, mais il faut entendre les prouesses qu'effectuent ces types en un temps record ! Loin d'être une aberration dégénérée de ce que le rock a fait de moins accessible, il s'agit au contraire ici de mettre en avant la qualité irréprochable de la production qui conjugue limpidité, clarté et puissance, ainsi que l'inventivité sans cesse renouvelée des riffs et des schémas musicaux. Les guitaristes sont de véritables virtuoses, enchaînant les plans techniques à une vitesse supersonique, le batteur blaste comme un forcené, balance des breaks monstrueux dans des laps de temps ridiculement courts et les vocaux sombrent toujours un peu plus dans la folie, saccagés par la haine, le délire d'une âme en ruine inlassablement mise à la torture par un cerveau dérangé.
C'est un fait, la brutalité intrinsèque de Pig Destroyer n'a que très peu d'équivalent sur la scène actuelle. Pourtant, là où le groupe passe du statut de très bon élève à celui de pur génie du mal, c'est dans sa faculté à créer des ambiances psychotiques sur la base d'un psychédélisme épileptique. Pour ce faire, la formation compose alors des titres plus longs (3 minutes trente pour "Ultraviolet", 5 pour "Starbelly" puis 8 minutes pour "Piss Angel"), du jamais vu dans le genre, à part peut-être chez Cephalic Carnage. Cette prise de risque optimale est pourtant parfaitement maîtrisée, "Hyperviolet" étant probablement une des meilleures compositions de Pig Destroyer, ce temps supplémentaire permettant au groupe de travailler sur des tempos plus lourds, parfois proches du stoner. D'ailleurs, ce penchant pour des structures plus posées (tout est relatif) se retrouve dans tous les albums à venir et fait partie intégrante du style Pig Destroyer, unique, inimitable, sans concession, sans pitié.
S'il me semble absolument évident que tout fan de musique extrême se doit de posséder au moins un album de Pig Destroyer dans sa cédéthèque sous peine de passer à côté de ce qu'il se fait de mieux actuellement, je pense également que ce groupe a de quoi séduire les amateurs de musiques expérimentales (Naked City, Painkiller) car on y retrouve cette même volonté déstructurante, ce désir vital d'amener la musique ailleurs, dans des contrées sonores encore vierges mais pourtant riches de promesses élégiaques.
Tout simplement indispensable.
La pochette est trompeuse. Pig Destroyer n'est pas un énième groupe de gore-metal où les vocaux d'un ours brun en rut côtoient les raclements intestinaux d'instruments rouillés à force d'être trempés dans des menstrues de vierges, le tout enregistré dans la cave d'un immeuble abandonné ayant servi de toilettes à des décennies de tourisme allemand. Ne vous laissez donc pas abuser, voire rebuter, par cette image de démembrement car le pire (comprendre le meilleur, le grind fonctionnant principalement sur cette inversion totale des valeurs chère à Nietzsche) se trouve encore à l'intérieur.
Relapse peut être fier de compter ce groupe dans son écurie car Prowler In The Yard impose Pig Destroyer comme la formation incontournable de la musique extrême, le truc à écouter absolument si l'on veut comprendre ce que deux guitares, une batterie et une voix peuvent causer comme méfaits. En effet, ces Américains m'apparaissent comme ce qui peut se faire de plus agressif uniquement à partir d'instruments traditionnels, repoussant à chaque titre les limites de la violence auditive en termes de rapidité d'exécution, de technicité et de créativité.
En effet, au premier abord, Pig Destroyer a tout du groupe de grindcore typique. Sur les 22 titres qui composent "Prowler in the Yard", les trois-quarts oscillent entre vingt secondes ("Ghost of a Bullet", "Evacuating Heaven", "Murder Blossom") et une minute trente (une dizaine de morceaux), les intitulés évoquent un raffinement certain et un goût prononcé pour une sexualité délirante ("Cheerleader Corpses", "Trojan Whore", "Pornographic Memory", "Snuff Film at Eleven") et l'ensemble ne dépasse que très difficilement la demi-heure. Soit. Mais la durée d'un album n'a jamais eu pour corollaire la qualité (Les trente minutes de "Reign in Blood", de Slayer, restent la référence en matière de Thrash), et l'excellence de cet album provient également de son incroyable intensité. Je conçois que pour un néophyte, 20 secondes de musique passent pour de la fumisterie ou une forme de négation artistique, mais il faut entendre les prouesses qu'effectuent ces types en un temps record ! Loin d'être une aberration dégénérée de ce que le rock a fait de moins accessible, il s'agit au contraire ici de mettre en avant la qualité irréprochable de la production qui conjugue limpidité, clarté et puissance, ainsi que l'inventivité sans cesse renouvelée des riffs et des schémas musicaux. Les guitaristes sont de véritables virtuoses, enchaînant les plans techniques à une vitesse supersonique, le batteur blaste comme un forcené, balance des breaks monstrueux dans des laps de temps ridiculement courts et les vocaux sombrent toujours un peu plus dans la folie, saccagés par la haine, le délire d'une âme en ruine inlassablement mise à la torture par un cerveau dérangé.
C'est un fait, la brutalité intrinsèque de Pig Destroyer n'a que très peu d'équivalent sur la scène actuelle. Pourtant, là où le groupe passe du statut de très bon élève à celui de pur génie du mal, c'est dans sa faculté à créer des ambiances psychotiques sur la base d'un psychédélisme épileptique. Pour ce faire, la formation compose alors des titres plus longs (3 minutes trente pour "Ultraviolet", 5 pour "Starbelly" puis 8 minutes pour "Piss Angel"), du jamais vu dans le genre, à part peut-être chez Cephalic Carnage. Cette prise de risque optimale est pourtant parfaitement maîtrisée, "Hyperviolet" étant probablement une des meilleures compositions de Pig Destroyer, ce temps supplémentaire permettant au groupe de travailler sur des tempos plus lourds, parfois proches du stoner. D'ailleurs, ce penchant pour des structures plus posées (tout est relatif) se retrouve dans tous les albums à venir et fait partie intégrante du style Pig Destroyer, unique, inimitable, sans concession, sans pitié.
S'il me semble absolument évident que tout fan de musique extrême se doit de posséder au moins un album de Pig Destroyer dans sa cédéthèque sous peine de passer à côté de ce qu'il se fait de mieux actuellement, je pense également que ce groupe a de quoi séduire les amateurs de musiques expérimentales (Naked City, Painkiller) car on y retrouve cette même volonté déstructurante, ce désir vital d'amener la musique ailleurs, dans des contrées sonores encore vierges mais pourtant riches de promesses élégiaques.
Tout simplement indispensable.
Parfait 17/20 | par Arno Vice |
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