Yelle

L'Ère Du Verseau

L'Ère Du Verseau

 Label :     Recreation Center 
 Sortie :    vendredi 04 septembre 2020 
 Format :  Album / CD  Vinyle  Numérique   

Six ans. Il aura fallu six ans à Yelle pour nous offrir le successeur de Complètement Fou, sorti donc, si vous savez compter, en 2014. Eux qui nous avaient habitués à un délai plus court entre chaque disque, plutôt de l'ordre de 3/4 ans, on pourrait vite penser qu'ils se sont dorés la pilule un petit moment.

Autant le dire tout de suite, ce n'est absolument pas le cas. Déjà, se dorer la pilule en baie de St Brieuc, c'est couillu, et c'est quelqu'un qui a passé la majeure partie de sa vie dans le Finistère qui vous dit ça. Ensuite, en y regardant d'un tout petit peu plus près, ils n'ont certes pas sorti d'album, mais entre 2017 & 2018, ils ont semé derrière eux une poignée de titres qui deviendra un Ep fin 2018, BOPS, et évidemment la longue série de concerts qui a suivi la sortie de Complètement Fou. Donc non, Ils n'ont pas glandouillé. Enfin, pas seulement.

L'Ère du Verseau arrive avec son cartable dès la rentrée, au tout début du mois de septembre. Ce n'est pas un album du confinement comme on en voit fleurir à cette période, il était prêt en début d'année, ils ont même eu le temps de tourner un clip avant qu'on se fasse enfermer. Mais commençons par le commencement. C'est quoi, au fait, L'Ère du Verseau ?

On peut penser à un truc de babloches, rapport à Hair & à "The Age of Aquarius", quand Bukowski découvre les hippies à Central Park. Et ben mine de rien, le second couplet met bien en lumière le côté voulu par Yelle :

Harmony and understanding
Sympathy and trust abounding
No more falsehoods or derisions
Golden living dreams of visions
Mystic crystal revelation
And the mind's true liberation
Aquarius
Aquarius

Bon, c'est vrai que ça fait un poil new age vu comme ça, mais c'est l'idée développée à travers le disque. De la douceur, de l'amour, de l'humanité, de la tolérance, du respect. Sur fond de bips électroniques et d'autotune.

La différence majeure avec les albums précédents se perçoit d'emblée. Yelle, ou Julie, mais comme la confusion se fait sans cesse entre la front-woman et le groupe, on va se simplifier la vie et dire Yelle jusqu'à la fin. La différence donc, c'est la voix, bien plus grave, presque plus adulte. Pas mature non, je n'ai pas dit que c'était l'album de la maturité, me faites pas dire ce que je n'ai pas dit. Ce changement se fait de manière presque indicible au fur et à mesure des albums, mais réécoutez PopUp avant L'Ère du Verseau et vous verrez comme c'est flagrant. Ok, treize ans séparent les deux disques, mais ce n'est pas une raison. Ils aiment toujours autant jouer avec les mots, que ce soit leur sens ou la sonorité, sur les non-dits pour justement mieux dire les choses, ils s'amusent beaucoup avec la langue. C'est aussi pour ça qu'ils continuent en français, leur anglais n'est pas suffisamment bon pour jouer autant avec. Mais c'est surtout car ils aiment ça, et le public aussi, la langue française plaît à l'étranger, même sans la comprendre. Rien qu'à voir les vidéos sur la toile des concerts à l'étranger, comme Ba$$in au Texas par exemple, pour comprendre l'engouement. C'est pas donné à tout le monde de jouer à Coachella, de se faire remixer par SOPHIE & A.G. Cook, ou d'assurer la première partie sur une tournée de Katy Perry.
Avec déjà quatre singles et clips assortis, l'album mêle une fois encore l'image au son, avec un usage magique de l'autotune. Considérant, à juste titre, que la voix est une instrument comme un autre, qu'on peut mettre des effets à foison dessus & jouer avec, même par petites touches, ça peut tout changer. Sur "Je T'aime Encore" par exemple, les fins de phrases modulent, les notes se tiennent artificiellement, sans pour autant faire office de cache misère comme beaucoup qualifient encore cet effet magique. Il faut plusieurs écoutes pour déceler toutes les trouvailles, pour cerner les différents thèmes abordés et les diverses manières de le faire, ce qui rend l'album encore plus intéressant une fois qu'on l'a bien en bouche.

Si l'on oublie le coté fluo, Yelle ne laisse pas pour autant dans le fossé le coté dansant de sa musique. On ne peut pas vraiment dire qu'il s'agit là d'un disque festif, mis à part "Karaté" et, toutes proportions gardées, "Noir." Le mélange paroles & musique font de L'Ère du Verseau un disque presque grave, amoureux sans aucun doute, thème décliné sous de nombreuses facettes, comme sur "Mon Beau Chagrin", sublime adaptation du "Pictures Of Departure" de Tony Hymas (sur Flying Fortress, sorti en 1988) , ou avec "Vue d'en Face", petite pépite aux sens multiples.

Avec cet album sibyllin, vous l'aurez compris, Yelle impose sa patte, force le respect et nous propose là un disque à plusieurs niveaux, qu'on peut juste effleurer ou creuser en profondeur, à vous de choisir, de changer d'avis et de découvrir que oui, le français peut être une langue musicale.


Parfait   17/20
par X_Lok


  En écoute :
https://yelle.bandcamp.com/album/l-re-du-verseau


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