Dean Roberts
And The Black Moths Play The Grand Cinema |
Label :
Ritornell |
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[Chronique en aveugle #32] Le rédacteur ne savait rien de l'identité de l'artiste dont il a chroniqué le présent album.
Chronique à l'aveugle, épisode 3. Après la power pop sans grande imagination de Tall Ship, après le post punk teuton de Trio, que me réserve donc cette troisième aventure ? L'X responsable a-t-il choisi de cibler un artiste capable de faire la synthèse de mes préférences ou au contraire, et c'est ce que je crois, de me déstabiliser en me proposant quelque chose aux antipodes de mes 92 chroniques précédentes ? Bingo ! Après la première écoute je peux affirmer que c'est bien la seconde proposition qui l'emporte. Et à vrai dire j'en suis tout heureux, même si cette première écoute m'a laissé perplexe voire pantois. Retour sur quarante minutes de musique dissonante et abstraite dissimulant à la perfection ces mélodies en lambeaux.
Face à l'inconnu, le réflexe est de chercher des repères. La moisson, ici, est plutôt maigre. Sur le deuxième titre, à 5'20'', j'ai l'impression fugitive d'un sample de Mendelson, mais c'est si fugace que je n'arrive pas à identifier le titre. Sur le cinquième titre, l'intro est très Labradford, mais là aussi la sensation s'évanouit rapidement. Non, globalement cet opus m'évoque plutôt Mark Hollis. Mais un Mark Hollis qui aurait gratté sa musique jusqu'à l'os, gratté si fort qu'elle en serait devenue méconnaissable.
Tout démarre dans un drone plaintif et crépitant sur lequel vient se plaquer des éléments percussifs, percussions d'origine douteuse et instruments à cordes que l'on frappe au lieu de les gratter ou frotter. Une voix surgit qui s'exprime en anglais. Les éléments rythmiques cherchent à se mettre en ordre mais se trouvent vite contraint à un lent decrescendo qui ne s'achèvera que dans le deuxième morceau au bout de trois bonnes minutes. Il y a comme un étirement hors du temps entre dissonances et silences. Quelques frottements et tapotements nous ramènent doucement dans notre dimension et après l'éventuel sample de Mendelson une tentative plus conventionnelle de mélodie échoue à peine ébauchée. Dommage la voix s'était faite plus claire, marquant sa proximité avec celle du leader de Talk Talk. La transition se fait de nouveau dans le titre suivant au mépris du découpage prévu dans la tracklist. C'est un obscur et léger carillonnement d'origine surnaturel (je veux dire obtenu synthétiquement ou travaillé de telle sorte qu'il ne sonne pas naturel) qui éteint ce qu'il restait du deuxième morceau, juste un tapotement de baguettes. Ce troisième titre ne démarre d'ailleurs jamais vraiment et s'éteint tranquillement comme un feu privé d'oxygène. Sur le morceau suivant, l'impression diffuse qui court sur tout l'album se révèle enfin. C'est une impression d'emprunt à des musiques traditionnelles et sacrées, ces musiques qui se perpétuent de génération en génération, qui par leur intransigeance questionnent sur la place de l'homme dans l'ordre des choses, qui l'interrogent sur sa spiritualité et son rapport au divin. Je ne peux pas être plus précis, tout cela est si éloigné de ma vie. Cette tentative d'occidentalisation est forcément vouée à l'échec. Mais c'est ce qui est beau. En mettant le doigt là où ça fait mal, l'auteur (ou les auteurs mais ce me semble être un travail solitaire) souligne avec brio que notre matérialisme s'accommode mal de spiritualité. De retour dans ma bulle occidentale, j'écoute béatement ce qui est, actuellement, mon titre préféré de l'album, le plus facilement accessible. Cette ouverture à la Labradford, ce gros effort pour que la trame soit plus conforme à nos attentes, ce bel édifice bancal dans sa répétitivité dont l'extinction se fera dans un crépitement électrique. La suite est un summum de dissonance ou chaque instrument semble jouer dans son coin sans se soucier des autres. Tant pis pour les faibles. L'impression décrite plus haut perdure et s'accentue.
Cet album est une épreuve qui devrait plaire aux plus aventureux d'entre vous, à ceux qui comme moi se lassent et peine à s'extasier sur la musique populaire de chez nous produite aujourd'hui.
Chronique à l'aveugle, épisode 3. Après la power pop sans grande imagination de Tall Ship, après le post punk teuton de Trio, que me réserve donc cette troisième aventure ? L'X responsable a-t-il choisi de cibler un artiste capable de faire la synthèse de mes préférences ou au contraire, et c'est ce que je crois, de me déstabiliser en me proposant quelque chose aux antipodes de mes 92 chroniques précédentes ? Bingo ! Après la première écoute je peux affirmer que c'est bien la seconde proposition qui l'emporte. Et à vrai dire j'en suis tout heureux, même si cette première écoute m'a laissé perplexe voire pantois. Retour sur quarante minutes de musique dissonante et abstraite dissimulant à la perfection ces mélodies en lambeaux.
Face à l'inconnu, le réflexe est de chercher des repères. La moisson, ici, est plutôt maigre. Sur le deuxième titre, à 5'20'', j'ai l'impression fugitive d'un sample de Mendelson, mais c'est si fugace que je n'arrive pas à identifier le titre. Sur le cinquième titre, l'intro est très Labradford, mais là aussi la sensation s'évanouit rapidement. Non, globalement cet opus m'évoque plutôt Mark Hollis. Mais un Mark Hollis qui aurait gratté sa musique jusqu'à l'os, gratté si fort qu'elle en serait devenue méconnaissable.
Tout démarre dans un drone plaintif et crépitant sur lequel vient se plaquer des éléments percussifs, percussions d'origine douteuse et instruments à cordes que l'on frappe au lieu de les gratter ou frotter. Une voix surgit qui s'exprime en anglais. Les éléments rythmiques cherchent à se mettre en ordre mais se trouvent vite contraint à un lent decrescendo qui ne s'achèvera que dans le deuxième morceau au bout de trois bonnes minutes. Il y a comme un étirement hors du temps entre dissonances et silences. Quelques frottements et tapotements nous ramènent doucement dans notre dimension et après l'éventuel sample de Mendelson une tentative plus conventionnelle de mélodie échoue à peine ébauchée. Dommage la voix s'était faite plus claire, marquant sa proximité avec celle du leader de Talk Talk. La transition se fait de nouveau dans le titre suivant au mépris du découpage prévu dans la tracklist. C'est un obscur et léger carillonnement d'origine surnaturel (je veux dire obtenu synthétiquement ou travaillé de telle sorte qu'il ne sonne pas naturel) qui éteint ce qu'il restait du deuxième morceau, juste un tapotement de baguettes. Ce troisième titre ne démarre d'ailleurs jamais vraiment et s'éteint tranquillement comme un feu privé d'oxygène. Sur le morceau suivant, l'impression diffuse qui court sur tout l'album se révèle enfin. C'est une impression d'emprunt à des musiques traditionnelles et sacrées, ces musiques qui se perpétuent de génération en génération, qui par leur intransigeance questionnent sur la place de l'homme dans l'ordre des choses, qui l'interrogent sur sa spiritualité et son rapport au divin. Je ne peux pas être plus précis, tout cela est si éloigné de ma vie. Cette tentative d'occidentalisation est forcément vouée à l'échec. Mais c'est ce qui est beau. En mettant le doigt là où ça fait mal, l'auteur (ou les auteurs mais ce me semble être un travail solitaire) souligne avec brio que notre matérialisme s'accommode mal de spiritualité. De retour dans ma bulle occidentale, j'écoute béatement ce qui est, actuellement, mon titre préféré de l'album, le plus facilement accessible. Cette ouverture à la Labradford, ce gros effort pour que la trame soit plus conforme à nos attentes, ce bel édifice bancal dans sa répétitivité dont l'extinction se fera dans un crépitement électrique. La suite est un summum de dissonance ou chaque instrument semble jouer dans son coin sans se soucier des autres. Tant pis pour les faibles. L'impression décrite plus haut perdure et s'accentue.
Cet album est une épreuve qui devrait plaire aux plus aventureux d'entre vous, à ceux qui comme moi se lassent et peine à s'extasier sur la musique populaire de chez nous produite aujourd'hui.
Très bon 16/20 | par Hpl |
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