Ezra Furman

Transangelic Exodus

Transangelic Exodus

 Label :     Bella Union 
 Sortie :    vendredi 09 février 2018 
 Format :  Album / CD  Vinyle   

"Transangelic Exodus c'est l'histoire d'un road-trip..." STOP ! Nul besoin d'aller plus loin Ezra Furman, tu viens de prononcer le mot magique qui éveille instantanément ma curiosité. Je te l'avoue je n'ai rien entendu de tes précédentes œuvres, c'est donc vierge de tout avis/a priori que je me lance dans l'écoute de ton nouvel album.

Tu me parles de road-trip et en plus de çà tu y ajoute une touche d'originalité, t'as tout compris ! Un Humain qui part sur la route avec un Ange transsexuel pour fuir un gouvernement détestable et menaçant... ce n'est pas tous les jours que l'on tombe sur un tel scénario et c'est une belle manière d'imager l'état actuel de plusieurs sociétés.

Ce que j'adore avec ton nouvel album c'est qu'il est difficile de le mettre dans une catégorie, les styles et les ambiances se mêlent tout du long et souvent au sein d'un seul et même morceau. Je prends en exemple "Maraschino-Red Dress $8.99 At Goodwill" et "Peel My Orange Every Morning", ce sont des chansons saccadées et logiques à la fois, empreintes d'une folie voire d'une certaine schizophrénie. Ta musique voyage toujours entre l'épuré et le grandiloquent ; quand tu veux en mettre plein la face – volontairement ou non d'ailleurs – t'es capable de créer des titres qui me rappellent assez Queen (le single "Love You So Bad" avec le combo batterie/violoncelles/voix), voire Bryan Adams au niveau de ses meilleurs titres Rock passionnés (l'ouverture grandiose "Suck The Blood From My Wound") ; j'ai parlé de Queen parce qu'il y a clairement du Freddie Mercury en toi, "I Lost My Innocence" c'est le genre de chanson qu'il aurait sûrement fait s'il était toujours parmi nous. Puis quand tu veux la jouer plus introspectif, tu te tournes vers un son plus mélancolique ("God Lifts Up The Lowly" ce violoncelle !) et plus Lo-Fi qui personnellement me rappelle les premiers albums de Yellow Ostrich, quand j'écoute "Compulsive Liar", "From A Beach House" et "Peel My Orange Every Morning" je t'imagine bien dans ta chambre à bidouiller avec ce que t'as sous la main. D'ailleurs quand je suis arrivé à cette dernière, je me suis demandé si Lou Reed n'était pas l'une de tes principales influences, tu partages avec lui non seulement des thèmes, mais surtout un sens de la narration qui paraît vrai, tes histoires j'ai l'impression que tu les as toutes vécu, il devient difficile de savoir si tout est inventé ou si l'album contient une grande part autobiographique. Je pourrais même évoquer son pote David Bowie, surtout pour "Psalm 151", mais çà tu l'as sûrement fait exprès, c'est moins original et pourtant toujours aussi plaisant... j'ai du mal à voir des défauts à ton œuvre. En fait ce titre et "Driving Down To L.A." sont peut-être les 2 seules choses que je pourrais te reprocher ; la première je l'ai dit, on dirait un titre de Bowie, tu ne t'en détache que trop peu, tandis que pour le second c'est le phrasé (et non la voix) copié sur Neil Young, mais encore une fois ce titre est magnifiquement composé, entre instants calmes et explosion de distorsion, c'est agressif et innocent à la fois (le xylophone calmant le tout, même dans l'excitation).

Je dois aussi te parler de 3 de tes titres qui, avec "Suck The Blood From My Wound", m'ont complètement rendu accros : "No Place" et son bugle sonnant l'heure de la bataille à mener, l'urgence est là, c'est épique, ça paraît "à part" par rapport aux autres pistes et pourtant encore une fois c'est logique. "Come Here Get Away From Me" la plus originale de toutes est une chanson Country sombre aux accents Western (merci le dulcimer avec le bottleneck) qui se mêle aux sonorités Hip-Hop – oui ça peut paraître étrange et pourtant c'est plus que convaincant, y'a un truc à développer plus en longueur avec ce titre. Et "The Great Unknown" ou l'illustration parfaite d'un Artiste dédié totalement à son Art, tu t'es quand même cassé le cul à enregistrer 43 "Hey !" en tout, pas seulement 1 que t'as samplé pour l'utiliser tout du long comme beaucoup auraient fait, non 43 ! Quand on aime son Art on va jusqu'au bout.

"A song is a dream that keeps going on when it's over
A man hears a song in the soft speaking voice of his lover
A hero goes on when the others believe it's all over
A sister is strong when she fights for the cause of her brother"


Tes paroles, je l'ai déjà dit, ça sonne vrai, ça sonne le vécu. Il y a de la poésie dans la plupart de tes textes, cette histoire, ce road-trip tu l'as écrit avec passion, avec intelligence, tu ne t'es pas contenté de cracher sur ces êtres immondes qui te veulent du mal, tu sembles bien plus malin que çà. Tu utilises tes mots pour faire passer des messages, il y a de l'espoir dans tes paroles, tout n'est pas merveilleux évidemment, la noirceur n'est jamais très loin, le désespoir aussi parfois

"Angel, don't fight it
To them, you know, we'll always be freaks"


mais ce n'est pas çà qui va t'empêcher de vivre et de faire ta musique. Et tu dois continuer à faire ta musique, parce que si tes précédents et tes futurs disques sont aussi bons que celui-ci, je vais me régaler en les découvrant. À partir d'aujourd'hui, pour moi tu fais partie des Artistes à écouter ET à lire !

Transangelic Exodus est un album aussi essentiel que l'était Pure Comedy de Father John Misty l'année dernière, bien sûr les thèmes ne sont pas les mêmes, c'est surtout dans leur aspect social qu'ils se rejoignent, dans leur côté bénéfique car ils permettent de faire réfléchir sur une ou des situations actuelles de notre société. Oh je sais bien que la Musique a en quelque sorte perdu de son impact social, mais si certaines mentalités pouvaient changer grâce à tes textes et à ta musique Ezra, je pense que tu pourras être fier de ton œuvre.


Excellent !   18/20
par Beckuto


  En écoute : https://ezrafurman.bandcamp.com/album/transangelic-exodus


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