Archers Of Loaf
All The Nation's Airport |
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La première chanson est hurlée et scandée, d'abord en sourdine puis à plein volume, par Eric Bachmann, comme un marin au port un samedi soir de repos. Pourtant, il semble ici que le port soit plutôt un aéroport. N'importe quel aéroport du pays en fait, ce qui laisse de côté toute notion de port d'attache au profit d'une liberté se propageant de lieu en lieu. Et d'après la pochette, l'atterrissage se fait de nuit, c'est encore mieux. All The Nation's Airports, voilà comment s'appelle le troisième et avant-dernier album d'Archers of Loaf paru en 1996. Après un Icky Mettle produit localement par le même mec qui a enregistré Ben Folds, album qui signe un démarrage sur les chapeaux de roue, et après un Vee Vee plus tight produit par Bob Weston, c'est à Brian Paulson (Uncle Tupelo, Arcwelder, Polvo, Slint, le premier Wilco...) que revient la tâche de produire cette collection de quinze chansons diverses et variées. Parce que si ça commence par un morceau hurlé pas forcément très finaud au premier abord, et que de celui-ci puisse naître la crainte de retrouver ce motif sur la longueur du disque, cela ne dure pas et les nuances vont se dévoiler par la suite et au fil des écoutes. Parmi les albums d'Archers of Loaf, c'est en réalité celui que je préfère en tant qu'album complet, pour la bonne raison que c'est un album conçu, volontairement ou non, comme une autoroute (aérienne). Et ça m'a toujours botté. On croirait que les morceaux ne s'arrêtent jamais, chacun laissant la place au suivant sans qu'on ne s'en rende compte. On n'en est pas au point du Never Hear the End of it de Sloan, mais les transitions sont toutes très fluides et on prend plaisir à se laisser aller de l'un à l'autre de cette façon qui semble si naturelle alors que les morceaux ne sont pas du tout construits pareil: on est face à un cas intéressant de continuité dans la différence, mon cher Watson. Dès le deuxième morceau, le morceau-titre, la guitare joue à l'élastique comme c'était également le cas chez Polvo ou The Raymond Brake, les poteaux de Chapel Hill, Caroline du Nord. Dans ce style de guitare chewing-gum mais bien tendu, le pic est certainement atteint sur l'intro de "Worst Defense" et sur "Attack of the killer bees" qui le suit sans s'en détacher. Et puis on navigue entre compositions frontales et mélodiques qui ont fait leur marque de fabrique tels l'excellent "Scenic Pastures", ou "Bones Of Her hands", ou encore "Form and File" ; ou tantôt des instrumentaux aux atmosphères particulières comme par exemple le lent tempo de "Bumpo" et ses échos surf ou bien la progression en lumière qu'on peut entendre sur "Acromegaly" – en opposition à la lourdeur sombre et belle de "Distance Comes in Droves" qui suit. Et puis là, au milieu du disque, brille la tristesse de "Chumming the Ocean" qui au son du piano - que l'on retrouvera tout seul sur le dernier titre - laisse entrevoir la couleur future des compositions de Bachmann et le début de son travail sur sa voix, qu'il forcera de moins en moins. L'album suivant serait leur dernier et en 1998, Eric Bachmann irait ensuite parcourir d'autres routes avec Crooked Fingers, toujours actifs depuis, le dernier album étant paru en 2011, avant de se lancer ponctuellement sous son propre nom sous lequel il créera deux superbes albums l'un en 2006 et l'autre dix ans plus tard.
Excellent ! 18/20 | par LaEscoba |
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