Junip

Fields

Fields

 Label :     City Slang 
 Sortie :    mercredi 15 décembre 2010 
 Format :  Album / CD  Vinyle   

José González. Voilà le nom qui revient dès que l'on évoque Junip. Et pour cause, des trois membres de cette sensation de l'année (ne tournons pas autour du pot), l'hidalgo d'origine argentine a déjà fait ses preuves en solo à travers son folk brut ondoyant porté aux nues par une écriture inspirée. Pourtant, Junip est loin d'être le projet d'un seul homme. Et bien que sa présence (centrale ?) en tant qu'auteur, guitariste et chanteur est très appréciable, il est bon de rappeler que le combo existe depuis plus de dix ans, et ce donc avant Veneer (2003) et In Our Nature (2007). Oui mais voilà, José González, Tobias Winterkorn (claviers) et Elias Araya (batterie) n'ont jamais officié sur des périodes suffisamment longues pour développer leurs atomes crochus et produire un répertoire qui en est digne. 2010 est ainsi l'année où ils parviennent à interrompre cette série de hiatus principalement due à l'explosion solo de González. Et enregistrent dans la foulée Fields.

C'est bien de cela dont il s'agit : d'atomes crochus. Car on ne peut pas vraiment dire que les trois suédois partagent un seul et même registre et font de ce premier album un tir groupé sur une cible commune. Au contraire, il est ici question de complémentarité, de continuité dans les genres, d'affinités dans la diversité. Comme l'illustre la pochette, Fields est un album qui irradie et diffuse des rayons divergents qui se recoupent pourtant à on ne sait quel moment pour s'unir dans des mélodies panachées bouillonnantes. Tobias Winterkorn apporte ses couches nébuleuses ou ronflantes avec des claviers old-school (Moog Prodigy et Fender Rhodes entre autres), Elias Araya mène les parties rythmiques intrépides et soutenus tirant sur l'afrobeat, et José González ajoute son folk pointu elliptique en amorce avant de s'effacer doucement. En effet, dans cette composition rappelant étrangement celle des Doors (les parties basses sont confiées elles aussi au claviériste), les compositions sont principalement portées par le duo Tobias/Elias. José quant à lui s'occupe la plupart du temps des détails, des pointes de cordes.

Le résultat assez inédit batifole entre folk hypnotique très souple, atmosphères psyché mélanges de krautrock et Riders On The Storm, et tempos trip hop lorsqu'ils ne sont pas dopés par un groove vitaminé. L'alchimie entre les trois convives a été portée à ébullition lors de longues jam sessions que l'on retrouve dans les structures de Fields : répétitives et obsédantes, avec très peu de décrochages. Cette approche donne ce doux psychédélisme délicieusement enivrant, un brin sinueux, sans qu'il dévie de son orbite très haut perchée pour autant. La navette Junip va lentement et sûrement. D'un point A à un point B qui lui très proche, en tournant au préalable autour d'une idée fixe, d'une mélodie entêtante sans jamais oser la corrompre avant de la quitter. Les pépites dans le genre ne manquent pas : "Rope & Summit" dans un entrain tendre et le scintillement des claviers sonnant 60's, le trip hop "Without You" qui monte subtilement jusqu'à son explosion étouffée jubilatoire ou encore "Howl" tout bonnement hypnotique par sa cadence. Le tout est enregistré via un quatre pistes analogique, ce qui infuse cette chaleur, ces rondeurs sonores, ce côté organique inégalable... Ce métissage et cette énergie n'est pas sans rappeler la collaboration fluide de José González avec Zero 7 sur The Garden qui laissait déjà apercevoir des possibilités d'assembler ses morceaux avec un peu d'électro en préservant les vertus des deux parties.

Il aura fallu ainsi une décennie pour que chacun ait le temps de nourrir son style et qu'ils finissent par fusionner en harmonie sur ces champs fleuris et fertiles. Preuve des bienfaits d'une longue attente et d'une volonté de soigner ce premier disque après deux EP encore hésitants. Black Refuge un peu pesant et sans réelle identité encore, suivi de Rope & Summit encore trop axé sur la guitare qui essuie quelques longueurs (ces deux EP apparaissent d'ailleurs sur l'édition limitée 3CD de Fields). Junip apparaît soudainement et surprend. Alors que l'on se demande s'il est encore possible d'innover, de créer avec de l'ancien, le trio suédois apparaît de nulle part, fait des prouesses, et ce en toute humilité (vous verrez d'ailleurs dans le clip bien loufoque de "Always" qu'ils ne se prennent pas au sérieux). Rien de mieux que d'être charmé instantanément sans avoir rien vu venir.


Excellent !   18/20
par TiComo La Fuera


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